J.-B. Baillières (p. 47-49).

Genre CIX — ROUSSEROLLE, CALAMOHERPE.

ROUSSEROLLE TURDOÏDECALAMOHERPE TURDOIDES. Boie ex Meyer.

La présence de cet oiseau à Paris étonnera sans doute bien des personnes.

Il y a, sur les trois étangs de la Glacière, environ dix paires de Rousserolles. Elles arrivent vers les premiers jours de mai, nichent à la fin du mois quand les roseaux ont atteint toute leur taille, et repartent au commencement de septembre.

Dès leur retour les mâles chantent constamment, perchés au pied d’un roseau à 15 ou 20 centimètres au-dessus de l’eau (c’est à tort que quelques ornithologistes ont prétendu que cet oiseau se perchait à l’extrémité des tiges).

Sans être précisément sauvage, la rousserolle est défiante. Quand on veut l’observer de près et attentivement, il faut se poster au bord de l’étang, ne pas bouger et attendre qu’elle se découvre, car ordinairement elle demeure cachée au centre des massifs de roseaux.

La rousserolle saisit assez adroitement les insectes aquatiques qui font sa nourriture, mais elle est peu agile ; son vol est lourd, bas, mou, elle saute d’un roseau à l’autre plutôt qu’elle ne vole, rarement elle franchit une distance de plus de quelques mètres. Un savant ornithologiste, l’abbé Vincelot, a parfaitement observé les mœurs de la rousserolle et je suis heureux de pouvoir substituer ici sa prose à la mienne.

« Pour composer son nid, dit-il[1], elle choisit quatre ou cinq roseaux assez rapprochés, les réunit par des filaments de plantes aquatiques qu’elle enroule autour des joncs de manière à en former une espèce de bourse grossière. Ce nid a quelquefois une hauteur de près de deux décimètres et semble avoir été ainsi fabriqué pour préserver des dangers de l’inondation les œufs ou les petits de la rousserolle ; il ressemble alors à plusieurs nids superposés. L’intérieur est garni de débris fins et déliés de feuilles de roseaux ; il contient ordinairement quatre ou cinq œufs dont le fond blanc verdâtre ou bleuâtre est parsemé de points ou de taches noires ou brunes qui forment quelquefois une couronne vers le gros bout. Ces œufs sont légèrement piriformes et souvent oblongs ; plusieurs seraient confondus facilement avec des œufs de moineau, dont ils ne diffèrent souvent que par leurs taches plus larges et une couleur plus foncée et plus bleuâtre. Leur grand diamètre varie de 0m 020 à 0m 023, et le petit de 0m 017 à 0m 019. »

J’ajouterai que ce nid est toujours placé au centre des touffes de roseaux.

En mai et juin, le mâle chante du matin au soir avec une vigueur et une persistance étonnantes.

Il se repose à peine pour prendre sa nourriture.

Son chant, composé de plusieurs strophes qu’il lance d’une voix sonore et claire avec beaucoup d’entrain, n’est pas agréable ; il ressemble au bruit que fait une crécelle ; Brehm l’a reproduit assez fidèlement de la façon suivante : « dorre, darre, darre, karre, karre, karre, kerr, kerr, kerr, keï, keï, keï, keï, karre, karre, kith ! »

Les étangs de la Glacière sont peu profonds ; les hauteurs environnantes les garantissent du vent du Nord ; leur eau, quoique stagnante,

  1. Les noms des oiseaux expliqués par leurs mœurs. Angers, 1872, 2 vol. in-8 ; voy. t. I, p. 217.