Ornithologie du Canada, 1ère partie/L’Autour à queue rousse


Atelier typographique de J. T. Brousseau (p. 50-51).

L’AUTOUR À QUEUE ROUSSE.[1]
(Red-tailed Hawk.)


Cet oiseau est extrêmement répandu dans nos campagnes, où il est connu comme le Grand mangeur de poules. Quel est le cultivateur qui n’ait voué aux gémonies ce forban ailé, l’ennemi le plus acharné de sa basse-cour, la terreur de ses poules, dindons et autres oiseaux domestiques ?

Plumage, à la gorge et à la poitrine, d’un blanc légèrement roussâtre, avec taches brunes, arrondies sur le dessous du corps, les pennes caudales d’un joli roux en dessus et traversées par leur extrémité, par une bande noire et très étroite. Son vol est vigoureux et soutenu à une grande hauteur. On le voit raser la cime des plus hauts arbres sans agiter ses ailes, ni incliner sa tête de droite à gauche, pour voir ce qui est au-dessous de lui : ce vol est accompagné d’un cri triste et prolongé, qui s’entend au loin, et calculé à mettre en émoi tous les êtres vivants d’alentour, pour les faire lever et fondre dessus. Quand une proie a frappé sa vue, il s’arrête brusquement, comme un cheval au galop dont on serre tout à coup la bride : il semble noter la place avec exactitude, puis il va se percher sur l’arbre le plus voisin ; alors il se retourne, regarde fixement sa victime et presqu’aussitôt s’élance sur elle avec tant de vitesse, de précision, qu’il la manque rarement ; s’il ne trouve rien dans les champs, il se perche sur l’arbre le plus élevé de la forêt et promène au loin ses regards : un gentil et leste écureuil vient de saisir une noix, il la roule joyeux entre ses pattes et se dispose à la croquer quand tout à coup tombe sur lui la Buse à queue rousse, elle le saisit, l’étrangle, lui perce la tête, le dévore sur place, ou l’emporte sur la branche qu’elle vient de quitter.

Audubon rapporte que, pendant l’enfance des jeunes, le nid est abondamment pourvu de gibier, et surtout d’écureuils gris, que les parents se procurent, en chassant de compagnie. L’un d’eux se tient au-dessus de l’arbre où se trouve le quadrupède ; l’autre l’attaque directement ; celui-ci, pour éviter son ennemi, tourne autour du tronc, et alors le premier fond sur lui ; s’il ne trouve pas un trou, il est saisi, dépecé et distribué aux petits. L’attachement conjugal, qui avait réuni le mâle et la femelle pour la conservation de leur postérité, ne dure que pendant le temps nécessaire à leur éducation ; dès qu’ils peuvent se passer de leurs parents, ceux-ci deviennent aussi indifférents l’un à l’autre que s’ils ne s’étaient jamais connus.

Dimensions, 20 × 46.


  1. No. 23. — Buteo borealis. — Baird.
    Buteo borealis. — Audubon.