Odes (Horace, Séguier)/II/15 - Contre le luxe du siècle

Odes et Épodes et Chants séculaires
Traduction par M. le Comte de Séguier.
A. Quantin (p. 74).


XV

CONTRE LE LUXE DU SIÈCLE


Nos vastes palais bientôt à la charrue
Prendront tout le sol ; on verra des viviers,
      Du Lucrin dépassant l’étendue,
   Surgir partout ; les platanes altiers

Évinceront l’orme. Alors, la violette,
Le myrte, en un mot tous les trésors du flair,
      Répandront leur baume où l’olivette
   À l’ancien maître offrait un gain si clair.

Alors le laurier de ses rameaux compactes
Exclura le jour. Ainsi ne l’ont prescrit,
      Ô Romule, ô dur Caton, vos actes :
   Des vieux décrets ce ne fut pas l’esprit.

Les particuliers avaient un cens modique,
L’État de grands biens : à l’air vif d’Hélicé
      Privément ne s’ouvrait nul portique
   Au décempède exactement tracé.

La loi défendait de mépriser le chaume
En partage échu, — le marbre précieux
      Ne parant, sur les fonds du royaume,
   Que les cités et les temples des dieux.