Odes (Horace, Leconte de Lisle)/IV/3
Traduction Leconte de Lisle, 1873
Celui, ô Melpoméné, que tu auras, à sa
naissance, illuminé d’un regard ami, ne s’illustrera
point par le pugilat dans les jeux Isthmiques ; un
cheval ardent ne le ramènera point, victorieux,
sur un char Achaïque ; et, ceint de la feuille de
Délos, la guerre ne le présentera point au
Capitolium pour avoir réprimé les orgueilleuses
menaces des rois ; mais les eaux qui arrosent le
fertile Tibur et les épaisses chevelures des bois
l’illustreront par le chant Æolien. Le peuple de Roma, la première des villes, a daigné me recevoir
dans le chœur aimable des poëtes, et déjà je suis
mordu par la dent de l’envie. Ô Piéride, qui fais
résonner le doux bruit de ta lyre d’or ! ô toi qui
donnerais, si tu le voulais, le chant du cygne aux
poissons muets ! c’est à tes seuls dons que je dois
d’être montré du doigt par les passants comme le
maître de la lyre Romaine ; c’est par toi que je
respire et que je plais, si je plais.