Maison d’éditions et d’impressions Anct AD. Hoste, S. A. (p. 213-214).

LXVI.

CHANSON TRISTE

Mon ami s’en est allé
Sur la mer profonde.
Rien ne peut me consoler.
C’est la fin du monde.

Je voudrais — mes yeux sont lourds,
Ma peine est trop forte —
Dormir sans rêve, à toujours,
Apaisée et morte.

Doux ami, tu reviendras,
Entre en ma demeure.
Je n’ouvrirai pas les bras
À ton cœur qui pleure.

Tu sèmeras mon lit blanc
De lys et de roses,
Tu baiseras lentement
Mes paupières closes.


Des cieux bleus de tes doux yeux
Couleront deux larmes
Sur mon cœur silencieux
Que la mort désarme,

Réveilleront de la mort
Mon cœur solitaire,
Las d’avoir aimé si fort
En devant se taire.

Ma main pâle tu prendras
— Sens comme elle tremble —
Et je t’ouvrirai les bras,
Pour pleurer ensemble.