Maison d’éditions et d’impressions Anct AD. Hoste, S. A. (p. 142-143).

XI.

PRIÈRE.


Oh ! tous ces doux bonheurs que je n’ai pas voulus !
Ces poèmes d’amour que je n’aurai pas lus !

Exauce-moi, mon Dieu ! Ma fervente prière
Implore, avant la mort, une grâce dernière.

Comme une fleur d’automne au beau calice d’or,
Comme le chant du soir d’un oiseau qui s’endort,

Comme un fruit savoureux qui se fond sous les lèvres
Et comme une fontaine où s’apaisent les fièvres,

Donne-moi ce bonheur que je n’ai pas connu
D’être aimée et d’aimer d’un amour ingénu.

Je ne franchirai pas hardiment la clôture
Pour voler la fleur d’or, la pêche fraîche et mûre.

Mais, triste, j’appuierai mon front contre le mur,
Pour aspirer l’odeur de fleur et de fruit mûr


Et la fraîcheur de l’eau dans la vasque de marbre
Et le chant de l’oiseau qui jubile dans l’arbre.

Et peut-être qu’alors, toi qui me vois souffrir,
Dieu puissant, Dieu d’amour, tu voudras bien m’ouvrir.

Tu voudras me donner ce que je n’ose prendre,
L’eau fraîche pour ma soif, le fruit doux, la fleur tendre.

Et je ne sais comment — mais tu peux tout, mon Dieu,
J’espère en toi, mon Père, ô doux Père au ciel bleu !