Maison d’éditions et d’impressions Anct AD. Hoste, S. A. (p. 89-90).


XXXIX.

PRIÈRE.



Je joins les mains comme un enfant.
Humble, je m’agenouille et prie.
Dieu m’a brisée et, triomphant,
Le Dieu d’amour se glorifie
D’avoir brisé mon cœur d’enfant.
Faut-il que je l’en remercie ?
Non ! non ! je crie
Et je lui montre ma douleur.

Toi qui peux tout, vois ma détresse !
On m’a dit que ta main qui blesse
Verse le baume et la caresse
Sur la brisure de mon cœur.
Je n’entends rien aux lois étranges
Que, pour nous transmuer en anges,
Tu proclamas, Dieu qu’on dit bon
Et je ne sais de quoi te demander pardon.


J’ai souffert, tremblante et soumise,_____
Comme un agneau nu dans la bise,
Comme un petit oiseau des bois,
Dont meurt la voix.
Père cruel, Maître morose,
Si tu peux tout, fais quelque chose
Pour me sauver du désespoir !
Tu vois, c’est un abîme noir.
Criant d’effroi, j’y tombe et tombe,
J’y vais sombrer — Oh ! ta colombe
Qui ne voulait qu’un peu d’amour,
Pour roucouler, le long du jour,
Qu’a-t-elle fait pour ce martyre ?
Ô Dieu ! tu ne veux pas le dire.
Je crie en vain, mais de si bas —
Je crois que tu ne m’entends pas…