Nouvelles études de littérature canadienne française/À Louvigny de Montigny

À M. Louvigny de Monligny

AGENT GÉNÉRAL
DE LA SOCIÉTÉ DES GENS DE LETTRES AU CANADA
Montréal.

Mon cher ami,

Je tiens à écrire votre nom sur la première page de ce livre. Ce n’est pas un grand cadeau que je prétends vous faire. Vous y trouverez, j’en suis certain, des appréciations qui ne sont pas vôtres, et des opinions avec lesquelles vous refuseriez de vous solidariser. Vous n’en connaissez que les quelques études publiées dans diverses Revues, et je préfère qu’il en soit ainsi, afin que je ne fasse pas rejaillir sur vous la mauvaise humeur de ceux que mes appréciations très modérées ne sauront satisfaire. Il m’est cependant particulièrement agréable de vous dédier ce travail. Vous êtes jeune. Encore qu’un peu votre aîné, je puis vous traiter en compagnon d’armes, et offrir ainsi mon livre à tous les jeunes gens qui se sont consacrés aux lettres et à la culture française sur le Nouveau Continent. Et nous vous devons tous, Français et Canadiens, un grand merci, à cause de votre brillante campagne des droits d’auteurs.

Permettez-moi de rappeler en deux mots un fait personnel.

Il y a trois ans, lorsque je publiai un précédent volume sur le Canada, mon excellent éditeur voulut protéger cet ouvrage contre la reproduction illicite. Sans doute je courais peu de risques. On s’attaque à plus hauts seigneurs que votre serviteur indigne. Cependant, pour la bonne régie, nous écrivîmes à votre Ministère de l’Agriculture, puisque par une bizarrerie inexplicable c’est le Ministère de l’Agriculture qui est chargé, au Canada, de recevoir le dépôt des livres.

Un fonctionnaire voulut bien nous répondre en nous envoyant l’assurance que nous étions protégés en Canada si nous accomplissions les formalités prescrites par la Convention de Berne, c’est-à dire le dépôt en France de deux exemplaires. Mais si nous désirions, ajoutait-il, revendiquer la protection locale de la loi canadienne, il fallait nous conformer aux prescriptions du Copyright Act, qui régie la matière dans le Dominion, et dont il nous envoyait un exemplaire.

Comme il était de notoriété publique que jamais la Convention de Berne n’avait été appliquée aux livres étrangers par les Canadiens, et que la contrefaçon littéraire faisait partie des industries nationales de votre pays, au même titre que la pulpe ou le nickel, nous nous débattions dans la situation la plus difficile. « Conformons-nous donc, s’écria M. de Rudeval, aux prescriptions du Copyright Act. » Et nous ouvrîmes la brochure rouge que votre Ministère de l’Agriculture nous offrait si libéralement.

Ce fut une séance mémorable.

Je nous vois encore lisant, ou plutôt traduisant cette brochure bilingue, dont le texte canadien est à peu près incompréhensible pour un Français. Heureusement, le texte anglais nous permettait parfois de nous tirer d’affaire, mais les dispositions qu’il nous semblait y trouver nous paraissaient si étranges que nous préférions nous en prendre à notre incomplète connaissance de la langue officielle. Et pourtant, nous avions raison, tristement raison. L’étude du Copyright Act nous laissa dans la situation pénible de malfaiteurs involontaires, qui se sont exposés malgré eux à la juste vindicte des lois. Nous avions fait imprimer sur les couvertures la célèbre mention : Enregistré au Ministère de l’Agriculture, à Ottawa, conformément à l’acte du Parlement canadien. Et voilà que nous apprenions cette terrible nouvelle : un livre étranger ne peut revendiquer la protection de la loi canadienne que s’il est réimprimé au Canada dans le mois qui suit sa publication. Faute de se conformer à cette étrange formalité, les auteurs qui ont fait usage de la sacro-sainte mention protectrice sont passibles d’une amende de 300 dollars, dont moitié revient à leur dénonciateur.

Voyez par exemple combien cette protection doit être efficace pour un ouvrage comme la Grande Encyclopédie !

La situation était vraiment pleine de charme. Au pauvre écrivain qui réclamait la protection de la Convention de Berne, vos tribunaux objectaient : Que ne vous êtes-vous conformés au Copyright Act. La convention de Berne, nous l’ignorons, le Canada n’y a point participé, et la Grande Bretagne ne pouvait conclure pour lui. À ceux qui se réclamaient du Copyright Act, on répondait : C’est entendu, mais faites-vous réimprimer dans les trente jours au Canada, ou bien non seulement nous permettrons à nos concitoyens de vous reproduire, mais encore nous offrirons de votre poche une prime à votre dénonciateur, serait-il votre contrefacteur lui-même. » Notre cas personnel était d’autant plus pendable que notre premier envoi de livres était parti pour le Canada, et que tous mes volumes dédicacés enfreignaient la loi.

Vous avez eu le courage, mon cher ami, de faire cesser cette situation ridicule. Tandis qu’en France, M. Auguste Dorchain, M. Jean Lionnet, Me Sauvel combattaient le bon combat, vous agissiez directement. Soutenu par notre Société des Gens de Lettres, vous entamiez le fameux procès, dont la Tante Berceuse de M. Jules Mary fut le prétexte, et vous faisiez reconnaître le bon droit devant les juridictions de votre pays.

Mais vraiment, il était temps. Plus personne ne se trouvera dans la situation risible où vos lois nous avaient placés ; nul ne se verra forcé de coller des bandes de papier sur la formule de protection, et de renoncer à ce paratonnerre inutile, ou plutôt nuisible, qui eût attiré la foudre !

Comme vous l’avez montré dans de brillants articles, on pouvait impunément jusqu’ici reproduire les œuvres de nos écrivains au Canada, sans leur verser un sou, sans même citer leurs noms. On mesure l’étendue du préjudice, quand on songe que la France est par la force des choses le grand fournisseur intellectuel du Canada, et que la Province de Québec reproduisait dans tous ses journaux les ouvrages français, sans même que les professionnels de cette exploitation eussent l’air de se douter qu’ils agissaient comme des voleurs de grand chemin ou des pick-pockets.

Mais nous ne voudrions, ni vous ni moi, nous en tenir à ce point de vue purement matériel. Vous avez obéi à des considérations plus hautes, et l’intérêt des écrivains français ne tenait que la seconde place dans vos préoccupations. Il s’agissait pour vous de la littérature canadienne elle-même et de son avenir. Comment payer un auteur local a peu près inconnu, quand on peut reproduire gratuitement quelques jours après leur publication à Paris, Loti, Bourget, Courteline, Rostand, et même Georges Ohnet et Pierre Decourcelles ? La question des droits d’auteurs et de la protection littéraire doit se comparer à une question de tarifs douaniers, et le libre échange de naguère, ou plutôt le libre pillage, était encore plus préjudiciable aux écrivains canadiens qu’aux écrivains français.

C’est donc un acte de justice, et non seulement un témoignage d’amitié, que de vous dédier ce livre, car vous avez bien mérité du Canada et de la France, en tuant l’industrie des forbans littéraires.

Espérons qu’elle ne ressuscitera pas.

Plus de trois ans se sont écoulés déjà, mon cher ami, depuis l’apparition de mes précédentes Études, depuis que la question des droits d’auteurs pour laquelle vous faisiez alors campagne dans le Nationaliste, nous permit de nous connaître, et de commencer ces relations épistolaires.

De loin, chacun de nous a su qu’un autre s’intéressait à ses travaux, à ses joies, et même à ses douleurs, quand le malheur inévitable venait nous visiter. Trois ans déjà… Que de camarades nous avons laissés sur le bord de la route, frappés par la mort. Et ce livre commencé à Paris s’achève bien loin de la ville où j’en composai la première page.

C’est du cœur des montagnes corses que je vous écris. Elles sentent la menthe et la sauge, et les lentisques leur donnent un aspect singulier et lointain. De tous petits ânes passent, trimballant sur leur croupe, le long des haies d’aloès, de vigoureux gaillards vêtus de velours marron. La vieille citadelle de Coite, nid d’aigle qui se renfrogne, sur son rocher abrupt, domine le lit torrentueux, mais à sec, d’une rivière au nom italien et sonore. Ce coin n’est presque plus la France. Sans doute les Corses protestent à cette assertion, et il est bon qu’il en soit ainsi. Depuis un siècle et demi, nous suivons des destinées communes. et ils font partie intégrante de notre nation, au même titre que les Bretons ou les Flamands. Il nous ont même donné un maître… Mais que voulez-vous ? leurs conscrits et leurs réservistes, quand ils endossent l’uniforme, ignorent la langue dans laquelle on les commande, et présentent ce paradoxe de soldats français qui ne parlent pas français. De cette terre foncièrement italienne où m’amène le hasard paresseux des vacances, je ne puis m’empêcher de reporter ma pensée vers la France d’Amérique, plus française cent fois que la Corse où flotte notre drapeau. Tandis que l’on raconte ici d’extraordinaires histoires qui datent de l’année dernière et qui font pâlir Colomba, il est difficile de se figurer que l’on n’est pas reporté au XVIe siècle. Hier, à cinq cents mètres de l’endroit d’où je vous écris, un soldat a plongé neuf centimètres de couteau dans la poitrine d’un de ses camarades, pour une affaire de vendetta. Que les Canadiens à l’accent normand sont plus près de nous, et qu’ils me rappellent davantage les paisibles gens d’Évreux ou de Lisieux, ou de Honfleur, et de toute la molle et grasse contrée du Nord-Ouest !

Le paquebot qui nous amenait vers cette Corse enchantée et enchanteresse, dont les paysages ont un charme si purement classique, fendait, par une soirée divinement calme, les eaux du golfe de Gênes que la lune rendait lumineuse. Une voix d’homme s’éleva soudain dans la nuit, une voix vibrante et sonore, chaude et méridionale, chantant des paroles italiennes. La voix était juste, l’air original. Une voix de femme répondit, et pendant longtemps les deux improvisateurs alternèrent leurs chansons. C’était une sensation rare. La mer, calme comme un lac, reflétait la clarté de la lune, et notre navire avançait lentement dans une nappe de lumière, tandis que les chanteurs corses se renvoyaient comme des volants leurs strophes monotones que rythmaient les pulsations de la machine. Je pensai alors à vos pagayeurs dont M. Ernest Gagnon nous a conservé les mélodies, et qui chantent, par de telles soirées, sur vos rivières et sur vos lacs, les vieilles chansons de chez nous, dont l’air nous prend aux entrailles et qu’un Français seul peut chanter. Et l’antique Cyrnos, avec ses promontoires de granit rose qui baignent dans la mer violette, ses oliviers aux feuilles grêles, ses châtaigneraies géantes, ses femmes aux attitudes sculpturales, qui portent sur la tête leur fardeau dans un geste de canéphores, ses marmots en haillons, nus des talons à la ceinture, ses masures en ruine qui semblent victimes d’un bombardement, la mollesse d’Ajaccio qui s’endort sous ses palmiers dans la splendeur d’un été perpétuel, l’activité mercantile de Bastia, l’orgueil déguenillé de Corte ou l’âme violente de Sartène, la Corse avec son maquis parfumé, ses fières montagnes, sa Méditerranée courroucée ou paisible qui la berce de son éternelle chanson, me parut infiniment plus lointaine que votre Canada français, où l’on parle comme chez nous.

Et pourtant, presque à chaque page, à chaque ligne de mon travail, je faisais une constatation mélancolique. Après un siècle d’isolement et de séparation, nos deux pays se seraient-ils retrouvés pour, se perdre une fois encore ? Le message de la Capricieuse serait-il périmé ? Les efforts que nous avons faits de part et d’autre pour maintenir en Amérique notre langue et notre race devraient-ils se terminer par une sorte de divorce moral, de séparation d’âmes ? Je ne parle pas ici de certains espoirs trop rapides que la multiplication merveilleuse de vos familles avaient fait naître, et que l’immigration anglo-saxonne, germanique ou slave, rend problématiques, mais des rapports mêmes de votre province avec notre pays. Tandis que le gros du public français en est encore à la joie de vous retrouver et n’apprend qu’à peine à vous connaître, faut-il prendre au tragique des symptômes qui n’échappent point à vos amis les plus sincères et plus désintéressés ?

Il est certain que nos rapports ne sont plus ce qu’ils étaient il y a dix ans. Mon vénérable ami l’abbé Casgrain serait péniblement surpris, s’il revenait sur la terre. Quelques maladresses de notre part, quelques accès de susceptibilité de la vôtre, ont rendu les relations parfois difficiles.

Malgré toute notre sympathie et toute notre affection, différentes sont souvent nos manières de penser. Lord Durham écrivait, il y a soixante-dix ans, dans son célèbre rapport, que les Canadiens Français ont été séparés de leur ancienne patrie par « des années de domination étrangère, et plus encore par les changements que la Révolution et ses conséquences ont opéré dans l’état politique, moral et social de la France. » Les événements récents n’ont pas rendu le contact plus facile. Sans doute, la prudence, l’intérêt personnel m’engageraient à passer sous silence qu’il existe des questions brûlantes, à feindre de les ignorer. Cette politique de l’autruche manquerait de loyauté et de franchise. Nul plus que l’auteur de ces lignes ne déplore ces divergences d’idées et ce fossé peut-être infranchissable qui se creuse entre nos deux pays. Combien de fois n’a-t-il pas rencontré chez vos auteurs des phrases, des pensées, des convictions, en désaccord complet non pas avec les tendances de nos partis extrêmes, mais avec ce qui est aujourd’hui dans notre pays l’opinion courante !

Et vraiment, mon cher ami, ce n’est pas sans appréhension que je termine ce livre. Dans mon premier volume auquel on a fait des deux côtés de l’Atlantique un accueil auquel j’étais loin de m’attendre, j’avais vraiment la partie belle. Il suffisait de rappeler les souvenirs glorieux de votre histoire, la lutte pour votre langue, pour votre foi, pour votre liberté. Mais les temps héroïques sont passés. Morts, les Gaspé, les Garneau, les Crémazie ! J’ai retracé du mieux que j’ai pu la légende du peuple canadien, et vos critiques eux-mêmes ont reconnu que si je me suis trompé parfois, j’ai fait mes efforts pour comprendre. Aujourd’hui, je traite d’idées contemporaines. Comment le faire, sans effleurer à chaque instant des questions sur lesquelles la France et la Canada ne sont pas d’accord ? Si la matière croissait en intérêt, s’il était question de plus de vivants que de morts, le rôle que je m’étais assigné devenait singulièrement périlleux, et réclamait une réserve, une prudence dans l’appréciation personnelle, dont j’ai tâché de ne pas me départir. Au point de vue des idées, ce qui importe, ce n’est pas de savoir jusqu’à quel point l’historiographe les partage, mais s’il les a comprises et s’il les rapporte fidèlement. C’est pourquoi j’ai résumé avec la même méthode et la même impartialité, les deux phases opposées de l’existence d’Arthur Buies, et je n’ai pas hésité à commenter par M. Chapais le terrible auteur de la Lanterne. Je crois m’être dégagé, dans cette étude impartiale, de toute passion autre que celle de la vérité historique. J’ai mené à son terme une large enquête à travers la littérature canadienne, et dans la pensée écrite des meilleurs d’entre vous, j’ai cherché ce que d’autres ont demandé de préférence à l’information directe et à l’interview. J’ai tâché de refléter dans mon livre les principaux aspects de votre esprit au début du XXe siècle. Vous me rendrez seulement cette justice, mon cher ami, vous et tous ceux qui me lirez de bonne foi, que j’ai toujours essayé de comprendre, ce qui est la vraie façon d’aimer, que je me suis montré respectueux de tout ce que respecte l’âme canadienne, et que je me suis impersonnalisé, si vous me permettez ce néologisme, autant que mon éducation et mes tendances me permettaient de le faire.

Il ne saurait me convenir de blâmer vos compatriotes si leurs idées ne concordent pas toujours avec les miennes. Je ne cherche à faire aucune propagande, de quelque sorte que ce soit, et ce livre ne renferme point d’arrière pensée. Si le Canada ne jouit pas et ne peut pas jouir de son autonomie littéraire, il garde jalousement son autonomie philosophique et morale, et ne saurait demander à Paris le mot d’ordre. Les Français qui ont parlé de votre pays ont trop souvent oublié cette vérité et les mieux intentionnés parfois se sont heurtés à une sorte de susceptibilité chatouilleuse qui ne saurait admettre les leçons, les critiques ou la pitié.

Votre plus grand homme d’État traitait de foreigner un officier de l’armée impériale. Ne sommes-nous point devenus par la force même des choses, nous aussi, des étrangers parmi vous ? Si donc les conditions sociales au milieu desquelles vous vivez vous satisfont, vous assurent le bonheur, tant mieux pour vous. Ce n’est pas à nous à vous la reprocher et peut-être, au milieu des incertitudes de leur pensée, ceux qui dans notre France en travail d’une humanité nouvelle sentent résonner dans leur âme les cloches obstinées de la ville d’Is, sont-ils plus près de vous envier que de vous plaindre. Nous avons seulement le droit de vous demander la même réserve, et vous m’en voudriez, au moment où il est question pour votre Province de renoncer à nos trois couleurs, si j’avais, moi Français qui dois tout à la France, trouvé pour ma mère des paroles de blâme qui sont aussi éloignées de mon cerveau que de mon cœur.

Mais si, je le répète, il ne faut pas chercher dans ce livre ma pensée politique ou religieuse, qui sans doute ne vous importe guère, je me suis au contraire avancé poitrine découverte, quand il s’est agi de questions d’art. Vous avez bien voulu louer naguère ma franchise, pourtant toujours nuancée de bienveillante sympathie, et m’engager à la faire plus rude. D’aucuns m’ont reproché sans aménité mon aménité. Excusez-moi, j’ai l’âme simple, j’ai pris au mot vos encouragements et ceux de votre presse, et j’ai dit parfois un peu durement mon opinion à tel ou tel de vos écrivains.

Je n’ai pas la prétention de rendre des verdicts. Ce livre devrait s’appeler Lectures Canadiennes.

Il renferme seulement, avec exemples à l’appui, les réflexions que je rapporte de mes promenades à travers vos livres. Je n’ai pas pu dire que les œuvres qui me plaisaient me déplaisaient, ni que les œuvres qui me déplaisaient me plaisaient. Si donc les auteurs dont je traite ne sont pas de mon avis, tant pis pour moi. Je ne perdrai pas mon temps à discuter avec eux. Je déclare d’avance que mes restrictions ne présentent qu’une valeur toute subjective, comme du reste leurs affirmations éventuelles, qu’ils seront toujours libres de se considérer comme de grands poètes, et moi comme un pédant dépourvu de goût. Les seules rectifications que je réclame sont des rectifications de fait. Je les accueillerai toujours avec plaisir. Quant à entamer des polémiques de presse, alors que ma réponse ne pourrait guère paraître qu’un mois après l’attaque, je n’en vois pas la nécessité. Je prie seulement les auteurs qui ne seraient pas d’accord avec moi sur leur propre mérite de ne pas m’accuser de crimes de droit commun.

Et maintenant, mon cher ami, je termine cette lettre trop longue et je la termine comme je l’ai commencée. Quel que soit le succès de ce livre, c’est un livre de bonne foi, et je suis heureux que vous permettiez à un ami, né et élevé dans cette France lointaine et calomniée, de mettre affectueusement votre nom au début même d’un ouvrage qui fut pendant trois ans son compagnon fidèle.

Ch. ab der Halden.  
Corte (Corse) Septembre 19066.