Nouvelle éruption de l’Etna

ITALIE.Nouvelle éruption de l’Etna. — Ce volcan, qui paraissait plus tranquille depuis quelque temps, vient d’effrayer encore la Sicile. L’éruption qui a eu lieu cette fois, le 19 mai, par sept bouches différentes, a détruit huit villages voisins de la montagne, et sur lesquels ne s’étaient jamais étendus jusqu’à ce jour les laves ni les feux du volcan. Toutes les habitations ont disparu sous des monceaux de pierres calcinées, de cendres rougeâtres que jetaient au loin dans les campagnes les nouvelles ouvertures de l’Etna. Le 24 mai, les édifices consumés fumaient encore, et ce malheureux pays était inaccessible par la chaleur que répandaient les cendres, les pierres et les laves dont il était jonché. Ce n’est qu’après le huitième jour qui a suivi ce désastre qu’on a pu s’approcher pour porter quelques secours aux incendiés. Mais les recherches qu’on a faites ont été inutiles.

N. B. Des lettres postérieures que nous avons reçues de plusieurs points de l’Italie annoncent en effet que l’éruption a dû être terrible.

À Naples, le 17 mai, un brouillard épais obscurcit le ciel toute la journée, et bientôt on vit sur les terrasses des maisons et sur les feuilles des arbres une poussière roussâtre qui paraît y avoir été transportée par les vents du midi. Le Vésuve était tranquille ; rien n’annonçait encore une irruption volcanique aux environs de Naples ; cette poussière, ou, pour mieux dire, ces cendres ferrugineuses étaient évidemment apportées de plus loin.

Cette poussière est aussi tombée à Lucques, dans la nuit du 16 au 17 mai, et les trois jours suivans ont été obscurcis par un épais brouillard. Comme à Naples, c’est une terre argileuse calcaire, rendue jaunâtre par l’oxide de fer qui s’y trouve mêlé. Il en est tombé une si grande quantité dans les campagnes, que les feuilles de mûrier qui en étaient imprégnées ont dû être lavées avant de servir à la nourriture des vers à soie.

Le même jour, 17 mai, ce phénomène a été remarqué dans Rome ; l’air a été obscurci par des cendres qui tombaient du ciel. La Romagne et les légations donnent la même nouvelle, sans qu’on puisse deviner la véritable cause qui a produit ces cendres, qui ressemblent assez au lapillo sous lequel fut ensevelie la ville de Pompeï.

Enfin, dans la même matinée du 17 mai dernier, on a été témoin à Turin d’un singulier phénomène. Les feuilles des arbres, celles des vignes, l’herbe des prairies, et tous les végétaux étaient couverts de taches couleur nankin incarnat ; on aurait dit qu’ils avaient été arrosés d’une eau fangeuse, ou d’une terre rougeâtre détrempée. Les postillons qui avaient conduit des voyageurs sur cette route la nuit précédente, et les voitures de ces étrangers, avaient été salis par une pluie fangeuse. On s’est demandé si ce limon s’était formé dans l’atmosphère, ou si, transporté de loin dans l’air par les vents qui avaient soufflé quelques jours auparavant, il était tombé avec la pluie de la nuit précédente. La première hypothèse paraît la plus probable : car, deux jours avant, il avait plu par torrens, et les eaux lavèrent les feuilles des arbres sans laisser aucune tache semblable.

L’explication de ce fait étrange paraît devoir être attribuée jusqu’à présent à l’éruption récente de l’Etna.