Nous tous/Rue de Sèze
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XXV
RUE DE SÈZE
Dans les clairs salons de la rue
De Sèze, vit l’âme française,
Comme elle est jadis apparue
Sous Louis Quinze et Louis Seize.
Dix-huitième siècle adorable,
Oh ! comme avec délicatesse
Il sut avoir la mémorable
Élégance de sa tristesse !
Ô boites d’or, miniatures,
Déités vaguement surprises
Parmi d’idéales natures ;
Nymphes des bois dans l’herbe assises ;
Satins, étoffes envolées,
Éventails qui semblez suffire
À calmer les Grâces troublées,
Par la caresse de Zéphire ;
Calmes et souriants visages
Rythmés, où pas un pli ne bouge
Et qui, parmi les paysages,
Nous charmez, vivants sous le rouge ;
Extases de la bucolique,
Frondaisons pleines de mystères ;
Églés que le mélancolique
Watteau guidera vers Cythère,
Avec de longs pleurs taciturnes
Je vous suis, et sous les portiques
Je vois couler l’eau de vos urnes,
Ô bleus paradis poétiques !
Et je vois, dans un vague souffle
De voluptés et de délire,
Pompadour ôtant sa pantoufle
Et du Barry tenant la lyre.