Nous tous/À l’Opéra

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Nous tousG. Charpentier et Cie, éd. (p. 40-41).
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XVIII

À L’OPÉRA


À l’Opéra, quand la Musique,
Pour consoler tous nos exils,
Jette en une extase physique
Nos sens affinés et subtils ;

Tandis que la magique phrase
Veut nous emporter, effarés,
Jusqu’au paradis de l’extase
À travers les cieux déchirés ;

Folle, et toujours contrariante,
La Beauté, ce friand repas,
Nous dit de sa bouche riante :
Regardez-moi. N’écoutez pas.


La Chair de lys murmure en prose
Je suis le vin et l’échanson ;
Et la Lèvre couleur de rose
Dit : C’est moi qui suis la chanson.

Amour, ce maraudeur équestre
Envolé sur un cheval fou,
Empêche d’entendre l’orchestre
Et montre les blancheurs d’un cou ;

Et ce Paris qui toujours cède,
Tandis que chante Escalaïs,
Admire tout ce que possède
Agnès, et tout ce qu’a Laïs.


14 décembre 1883.