Monologues en prose/Duo téléphonique

Poèmes mobiles ; MonologuesLéon Vanier, éditeur des Modernes (p. 101-103).


DUO TÉLÉPHONIQUE

À Donald Mac-Nab.


Monsieur Dupont, horloger, désire entretenir son ami Bernard, banquier, à propos d’une affaire de bourse.

Tous les deux entament par téléphone la conversation suivante :

Oui, Mademoiselle !
Allô ! allô !
Voilà, voilà ! ah ! c’est vous Dupont !
Plus haut, s’il vous plaît !
C’est pour le souper, le fameux souper ! ah ! ah !
Avez-vous encore des Panama ?
Non, je n’emmène pas Nana, qu’est-ce que vous voulez en faire ?
Moi aussi, j’ai à vous proposer une affaire, vos Panama sont-ils vendus ?
Je n’entends pas. Parlez plus fort !
Je n’entends pas, parlez moins fort.
Allô ! allô !
Allô ! allô !
J’y suis, j’entends.
J’y suis, j’entends.
Vos Panama sont-ils vendus ?
Non, je n’ai pas besoin de pendules !
Combien voulez-vous de pendules ?
Mais non je ne veux pas de pendules !
Ah ! ils ne sont pas vendus, eh bien, achetez-moi du Foncier 75.
Du Champagne Mercier 75, très bien !
Et de la Ville de Paris !
Oui, à n’importe quel prix.
Tout ce que vous aurez de Ville de Paris.
Dans des vieilles barriques ? Je n’y suis pas. Ça ne se vend qu’en bouteilles.
Non, non, pas de moulins de Corbeil ; ils sont trop bas.
Je parle trop bas ! Mais non, je crie comme un sourd.
Vous avez raison, c’est un four !
Comme un enragé !
Si vous êtes engagé, alors c’est inutile !
C’est inutile.
Bien, c’est inutile !
Bien, c’est inutile !
Je n’entends pas.
Bien !
La communication est dérangée ?
Ce n’est pas la peine de vous déranger.
Oui, Mademoiselle !
Non, mademoiselle !
Allô ! allô !
Voilà.
Vous m’entendez ?
Vous m’entendez ?
Parlez moins fort.
Ni moi non plus !
Nous en reparlerons.
Parlez plus fort !
Attendez la baisse.
Oui, je préviendrai à la caisse.
Alors c’est entendu ?
C’est entendu !


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N’est-ce pas que le téléphone est une merveilleuse invention ?…