Max Havelaar/Avant-propos

Traduction par A. J. Nieuwenhuis et Henri Crisafulli.
Dentu (p. ).

Avant-Propos


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L’agent de police. Monsieur le Président, voici l’homme qui a assassiné la femme Barbarette.

Le Président. Il faut pendre cet homme. Comment s’y est-il pris ?

L’agent de police. Il l’a coupée en menus morceaux. Il l’a salée et enfermée dans une bourriche.

Le Président. C’est très mal, ce qu’il a fait là… on le pendra.

L’accusé Lothario. Monsieur le Président, ce n’est pas moi qui ai assassiné la femme Barbarette ; moi, je l’ai nourrie, vêtue et soignée ; je puis citer des témoins qui déclareront que je suis un honnête homme, et non un assassin.

Le Président. Vous serez pendu. Vous aggravez votre crime par votre impertinence. Il ne convient pas à un individu… accusé d’une pareille action… de se prétendre un honnête homme.

L’accusé Lothario. Mais, Monsieur le Président, il y a des témoins qui l’affirmeront… et parce qu’on vient m’accuser d’un assassinat…

Le Président. Vous serez pendu. Vous l’avez coupée en morceaux, mise à la croque au sel, et renfermée dans une bourriche, la femme Barbarette !… et vous êtes content de vous ! Voilà pourtant trois chefs d’accusation bien acquis !… — Qui êtes-vous, ma bonne femme ?

La femme Barbarette. Monsieur le Président, il ne m’a pas mise à la croque au sel… au contraire, il m’a fait beaucoup de bien… c’est un digne homme !

L’accusé Lothario. Vous entendez, monsieur le Président ; elle dit que je suis un honnête homme.

Le Président. Hum ! Hum !… Il ne vous a pas coupée en morceaux, salée ni enfermée dans une bourriche… mais c’est un impertinent. Qu’on le pende !


(Théâtre inédit.)


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