Marguerite de Lorraine, duchesse d’Alençon/Préface

PRÉFACE

Parmi les princesses de la maison de Lorraine, il en est une, entre autres, dont le nom est resté populaire dans le pays où elle est née, et surtout dans celui où s'est écoulée la seconde moitié de son existence : c’est Marguerite, duchesse d’Alençon.

La lumière placée dans la vallée éclaire seulement les rares habitants du voisinage ; mais si elle apparaît sur la montagne, elle devient pour la contrée un phare bienfaisant : ses rayons préservent des écueils, guident la foule à travers les difficultés du chemin, et la conduisent au port du salut : telle fut la vie de Marguerite de Lorraine. Ses exemples, partis de haut, furent pour un grand nombre comme une révélation. En voyant son humilité au milieu des grandeurs, et son esprit de pauvreté au sein des richesses, on mesura l’énergie de sa volonté à l’étendue des sacrifices, et on recueillit avec émotion les persuasifs enseignements de ses vertus. Aussi, après sa mort, bien des voix s’élevèrent pour demander que ses reliques et ses statues fussent placées sur les autels ; on implora son assistance, on recueillit des preuves de sa puissance au ciel ; ce crédit fut constaté par des témoignages irrécusables, et plusieurs démarches furent tentées pour obtenir sa canonisation ; mais les troubles et les guerres de l’époque ne permirent pas de leur donner la suite convenable. Les vœux de la reconnaissance ne furent donc pas exaucés. L’Église, seule dispensatrice du titre de saint ou de bienheureux, n’honore pas Marguerite d’un culte public ; elle ne la propose pas à la vénération des fidèles, et si nous parlons de sa sainteté, c’est seulement pour rendre hommage à l’éminence de ses mérites. Toutefois son souvenir est encore vivant ; on n’a pas cessé de l’invoquer, elle ne cesse pas de secourir : le bien qu’elle fait se continue, aucune de ses vertus n’est tombée dans l’oubli. En voulant se dérober aux regards du monde, elle a doté son nom d’un éclat et d’une immortalité qu’il n’aurait jamais connus, si elle n’avait mis tant d’ardeur à s’y dérober.

Plusieurs auteurs ont raconté sa vie. Pour citer seulement quelques-uns d’entre eux, nous indiquerons le P. Yves Magistri, le P. du Hameau, D. Calmet, le P. de Coste, le P. Benoît Picard, l’abbé Baratte, M. de la Serre, historiographe de France, et surtout, de nos jours, M. l’abbé Laurent, chanoine honoraire de Bayeux. M. Laurent a fait de patientes recherches, a su tirer un heureux parti des documents mis à sa disposition, et a reproduit des détails pleins d’intérêt pour les habitants de l’ancien duché d’Alençon.

Si cette nouvelle biographie parvenait à édifier quelques lecteurs, après Dieu et Marguerite, ce serait à ces pieux historiens qu’ils devraient faire remonter leur gratitude.


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