Marc Aurèle ou La fin du monde antique/Chapitre XXIII

Calmann-Lévy (p. 405-429).


CHAPITRE XXIII.


PROGRÈS D’ORGANISATION.


Au milieu de circonstances en apparence si difficiles, l’organisation de l’Église se complétait avec une surprenante rapidité. À l’heure où nous sommes arrivés, l’Église de Jésus est quelque chose de solide et de consistant. Le grand danger du gnosticisme, qui était de diviser le christianisme en sectes sans nombre, est conjuré. Le mot d’« Église catholique »[1] éclate de toutes parts, comme le nom de ce grand corps qui va désormais traverser les siècles sans se briser. Et on voit bien déjà quel est le caractère de cette catholicité. Les montanistes sont tenus pour des sectaires ; les marcionites sont convaincus de fausser la doctrine apostolique ; les différentes écoles gnostiques sont de plus en plus repoussées du sein de l’Église générale. Il y a donc quelque chose qui n’est ni le montanisme, ni le marcionisme, ni le gnosticisme, qui est le christianisme non sectaire, le christianisme de la majorité des évêques, résistant aux hérésies et les usant toutes, n’ayant, si l’on veut, que des caractères négatifs, mais préservé par ces caractères négatifs des aberrations piétistes et du dissolvant rationaliste. Le christianisme, comme tous les partis qui veulent vivre, se discipline lui-même, retranche ses propres excès. Il joint à l’exaltation mystique un fonds de bon sens et de modération, qui tuera le millénarisme, les charismes, la glossolalie, tous les phénomènes spirites primitifs. Une poignée d’exaltés, comme les montanistes, courant au martyre, décourageant la pénitence, condamnant le mariage, n’est pas l’Église. Le juste milieu triomphe ; il ne sera donné aux radicaux d’aucune sorte de détruire l’œuvre de Jésus. L’Église est toujours d’opinion moyenne ; elle est la chose de tout le monde, non le privilège d’une aristocratie. L’aristocratie piétiste des sectes phrygiennes et l’aristocratie spéculative des gnostiques sont également déboutées de leurs prétentions. Il y a dans l’Église les parfaits et les imparfaits ; tous peuvent en faire partie. Le martyre, le jeûne, le célibat sont choses excellentes ; mais on peut sans héroïsme être chrétien et bon chrétien.

Ce fut l’épiscopat qui, sans nulle intervention du pouvoir civil, sans nul appui des gendarmes ni des tribunaux, établit ainsi l’ordre au-dessus de la liberté dans une société fondée d’abord sur l’inspiration individuelle. Voilà pourquoi les ébionites de Syrie, qui n’ont pas l’épiscopat, n’ont pas non plus l’idée de catholicité. Au premier coup d’œil, l’œuvre de Jésus n’était pas née viable ; c’était un chaos. Fondée sur une croyance à la fin du monde, que les années, en s’écoulant, devaient convaincre d’erreur, la congrégation galiléenne semblait ne pouvoir que se dissoudre dans l’anarchie. La libre prophétie, les charismes, la glossolalie, l’inspiration individuelle, c’était plus qu’il n’en fallait pour tout ramener aux proportions d’une chapelle éphémère, comme on en voit tant en Amérique et en Angleterre. L’inspiration individuelle crée, mais détruit tout de suite ce qu’elle a créé. Après la liberté, il faut la règle. L’œuvre de Jésus put être considérée comme sauvée, le jour où il fut admis que l’Église a un pouvoir direct, un pouvoir représentant celui de Jésus[2]. L’Église dès lors domine l’individu, le chasse au besoin de son sein. Bientôt l’Église, corps instable et changeant, se personnifie dans les anciens ; les pouvoirs de l’Église deviennent les pouvoirs d’un clergé dispensateur de toutes les grâces, intermédiaire entre Dieu et le fidèle. L’inspiration passe de l’individu à la communauté. L’Église est devenue tout dans le christianisme ; un pas de plus, l’évêque devient tout dans l’Église. L’obéissance à l’Église, puis à l’évêque, est envisagée comme le premier des devoirs ; l’innovation est la marque du faux ; le schisme sera désormais pour le chrétien le pire des crimes[3].

Ainsi l’Église primitive eut à la fois l’ordre et l’excessive liberté. Le pédantisme de la scolastique était encore inconnu. L’Église catholique acceptait vite les idées fécondes qui naissaient chez les hérétiques, en retranchant ce qu’elles avaient de trop sectaire. La spontanéité de la théologie dépassait tout ce qui s’est vu plus tard. Sans parler des gnostiques, qui poussent la fantaisie aux dernières limites, saint Justin, l’auteur des Reconnaissances, pseudo-Hermas, Marcion, ces innombrables maîtres apparaissant de toutes parts, taillent en plein drap, si l’on peut s’exprimer ainsi ; chacun se fait une christologie à sa guise. Mais, au milieu de l’énorme variété d’opinions qui remplit le premier âge chrétien, se constitue un point fixe, l’opinion de la catholicité. Pour convaincre l’hérétique, il n’est pas nécessaire de raisonner avec lui. Il suffit de lui montrer qu’il n’est pas en communion avec l’Église catholique, avec les grandes Églises qui font remonter leur succession d’évêques jusqu’aux apôtres[4]. Quod semper, quod ubique devient la règle absolue de vérité. L’argument de prescription, auquel Tertullien donnera une forme si éloquente, résume toute la controverse catholique. Prouver à quelqu’un qu’il est un novateur, un tard venu dans la théologie, c’est lui prouver qu’il a tort. Règle insuffisante, puisque, par une singulière ironie du sort, le docteur même qui a développé cette méthode de réfutation d’une façon si impérieuse est mort hérétique !

La correspondance entre les Églises fut de bonne heure une habitude[5]. Les lettres circulaires des chefs des grandes Églises, lues le dimanche à la réunion des fidèles, étaient une continuation de la littérature apostolique[6]. L’église, comme la synagogue et la mosquée, est une chose essentiellement citadine. Le christianisme (on en peut dire autant du judaïsme et de l’islamisme) sera une religion de villes, non une religion de campagnards. Le campagnard, le paganus, sera la dernière résistance que rencontrera le christianisme. Les chrétiens campagnards, très peu nombreux, venaient à l’église de la ville voisine[7].

Le municipe romain devint ainsi le berceau de l’Église. Comme les campagnes et les petites villes reçurent l’Évangile des grandes villes, elles en reçurent aussi leur clergé, toujours soumis à l’évêque de la grande ville. Entre les villes, la civitas a seule une véritable Église, avec un épiscopos ; la petite ville est dans la dépendance ecclésiastique de la grande[8]. Cette primatie des grandes villes fut un fait capital. La grande ville une fois convertie, la petite ville et la campagne suivirent le mouvement. Le diocèse[9] fut ainsi l’unité originelle du conglomérat chrétien.

Quant à la province ecclésiastique, impliquant la préséance des grandes Églises sur les petites[10], elle répondit en général à la province romaine. Le fondateur des cadres du christianisme fut Auguste. Les divisions du culte de Rome et d’Auguste furent la loi secrète qui régla tout. Les villes qui avaient un flamine ou archiéreus sont celles qui, plus tard, eurent un archevêque ; le flamen civitatis devint l’évêque. À partir du iiie siècle, le flamine duumvir occupe dans la cité le rang qui, cent ou cent cinquante ans après, fut celui de l’évêque dans le diocèse[11]. Julien essaya plus tard d’opposer ces flamines aux évêques chrétiens et de faire des curés avec les augustales[12]. C’est ainsi que la géographie ecclésiastique d’un pays est, à très peu de chose près, la géographie de ce même pays à l’époque romaine. Le tableau des évêchés et des archevêchés est celui des civitates antiques, selon leurs liens de subordination[13]. L’empire fut comme le moule où la religion nouvelle se coagula. La charpente intérieure, les divisions hiérarchiques furent celles de l’empire. Les anciens rôles de l’administration romaine et les registres de l’Église au moyen âge et même de nos jours ne diffèrent presque pas.

Rome était le point où s’élaborait cette grande idée de catholicité. Son Église avait une primauté incontestée. Elle la devait en partie à sa sainteté et à son excellente réputation[14]. Tout le monde reconnaissait maintenant que cette Église avait été fondée par les apôtres Pierre et Paul, que ces deux apôtres avaient souffert le martyre à Rome, que Jean même y avait été plongé dans l’huile bouillante[15]. On montrait les lieux sanctifiés par ces Actes apostoliques, en partie vrais, en partie faux[16]. Tout cela entourait l’Église de Rome d’une auréole sans pareille[17]. Les questions douteuses étaient portées à Rome pour recevoir un arbitrage, sinon une solution[18]. On faisait ce raisonnement que, puisque Christ avait fait de Céphas la pierre angulaire de son Église, ce privilège devait s’étendre à ses successeurs. L’évêque de Rome devenait l’évêque des évêques, celui qui avertit les autres. Le pape Victor (189-199) pousse cette prétention à des excès que réprime le sage Irénée, mais le coup est porté ; Rome a proclamé son droit (droit dangereux !) d’excommunier ceux qui ne marchent pas en tout avec elle. Les pauvres artémonites (sorte d’ariens anticipés) ont beau se plaindre de l’injustice du sort, qui fait d’eux des hérétiques, tandis que, jusqu’à Victor, toute l’Église de Rome pensait comme eux[19]. L’Église de Rome se mettait dès lors au-dessus de l’histoire. L’esprit qui, en 1870, fera proclamer l’infaillibilité du pape se reconnaît, dès la fin du iie siècle, à des signes déjà certains. L’ouvrage dont fit partie le fragment connu sous le nom de Canon de Muratori, écrit à Rome vers 180, nous montre déjà Rome réglant le Canon des Églises, donnant pour base à la catholicité la Passion de Pierre, repoussant également le montanisme et le gnosticisme[20]. Les essais de symboles de foi commencent aussi, dans l’Église romaine, vers ce temps[21]. Irénée réfute toutes les hérésies par la foi de cette Église, « la plus grande, la plus ancienne, la plus illustre ; qui possède, par une succession continue, la vraie tradition des apôtres Pierre et Paul ; à laquelle, à cause de sa primauté[22], doit recourir le reste de l’Église ». Toute Église censée fondée par un apôtre avait un privilège ; que dire de l’Église que l’on croyait avoir été fondée par les deux plus grands apôtres à la fois ?

Cette préséance de l’Église de Rome ne fit que grandir au iiie siècle. Les évêques de Rome montrèrent une rare habileté, évitant les questions théologiques, mais toujours au premier rang dans les questions d’organisation et d’administration. Le pape Corneille conduit tout dans l’affaire du novatianisme ; on l’y voit, en particulier, destituer les évêques d’Italie et leur donner des successeurs[23]. Rome était aussi l’autorité centrale des Églises d’Afrique[24]. Aurélien, en 272, juge que le véritable évêque d’Antioche est celui qui est en correspondance avec l’évêque de Rome[25]. Quand est-ce que cette supériorité de l’Église de Rome souffre une éclipse ? Quand Rome cesse d’être en réalité la capitale unique de l’Empire, à la fin du iiie siècle ; quand le centre des grandes affaires se transporte à Nicée, à Nicomédie, et surtout quand l’empereur Constantin crée une nouvelle Rome sur le Bosphore. L’Église de Rome, depuis Constantin jusqu’à Charlemagne, est en réalité déchue de ce qu’elle était au iie et au iiie siècle. Elle se relève plus puissante que jamais quand, par son alliance avec la maison carlovingienne, elle devient, pour huit siècles, le centre de toutes les grandes affaires de l’Occident.

On peut dire que l’organisation des Églises a connu cinq degrés d’avancement, dont quatre ont été traversés dans la période embrassée par cet ouvrage. D’abord, l’ecclesia primitive, où tous les membres sont également inspirés de l’Esprit. — Puis les anciens ou presbyteri prennent dans l’ecclesia un droit de police considérable et absorbent l’ecclesia. — Puis le président des anciens, l’episcopos, absorbe à peu près les pouvoirs des anciens et par conséquent ceux de l’ecclesia. — Puis les episcopi des différentes Églises, correspondant entre eux, forment l’Église catholique. — Entre les episcopi, il y en a un, celui de Rome, qui est évidemment destiné à un grand avenir. Le pape, l’Église de Jésus transformée en monarchie, avec Rome pour capitale, s’aperçoivent dans un lointain obscur ; mais le principe de cette dernière transformation est encore faible à la fin du iie siècle. Ajoutons que cette transformation n’a pas eu, comme les autres, le caractère universel. L’Église latine seule s’y est prêtée, et même, dans le sein de cette Église, la tentative de la papauté a fini par amener la révolte et la protestation.

Ainsi les grands organismes qui forment encore une part si essentielle de la vie morale et politique des peuples européens ont tous été créés par ces hommes naïfs et sincères, dont la foi est devenue inséparable de la culture morale de l’humanité. À la fin du iie siècle, l’épiscopat est entièrement mûr, la papauté existe en germe. Les conciles œcuméniques étaient impossibles ; l’empire chrétien pouvait seul permettre ces grandes assemblées ; mais le synode provincial fut pratiqué dans les affaires des montanistes et de la pâque ; la présidence de l’évêque de la capitale de la province fut admise sans contestation[26]. Un commerce épistolaire extrêmement actif était, comme aux temps apostoliques, l’âme et la condition de tout le mouvement[27]. Dans l’affaire du novatianisme, vers 252, les diverses réunions provinciales, communiquant entre elles, constituent un véritable concile par correspondance, ayant le pape Corneille pour président[28]. Dans le procès contre Privatus, évêque de Lambèse, et dans la question du baptême des hérétiques, les choses se passent d’une manière toute semblable[29].

Un écrit qui montre bien les progrès rapides de ce mouvement intérieur des Églises vers la constitution, disons mieux, vers l’exagération de l’autorité hiérarchique, c’est la correspondance supposée d’Ignace[30], dont la lettre censée de Polycarpe[31] est peut-être une annexe. On peut supposer que ces écrits parurent vers le temps où nous sommes arrivés[32]. Qui mieux que ces deux grands évêques martyrs, dont la mémoire était partout révérée[33], pouvait conseiller aux fidèles la soumission et l’ordre ?


Obéissez à l’évêque comme Jésus-Christ obéit au Père, et au corps presbytéral comme aux apôtres ; révérez les diacres comme le commandement même de Dieu. Que rien de ce qui concerne l’Église ne se fasse en dehors de l’évêque. En fait d’Eucharistie, celle-là doit être tenue pour bonne qui est administrée par l’évêque ou par celui à qui il en a confié le soin. Là où l’évêque est visible, que là soit le peuple, de même que, là où est le Christ Jésus, là est l’Église catholique. Il n’est permis ni de baptiser, ni de faire l’agape en dehors de l’évêque ; l’approbation épiscopale est la marque de ce qui plaît à Dieu, la règle ferme et sûre à suivre dans la pratique}[34]

Il convient donc que vous abondiez dans le sens de l’évêque, comme vous faites. Car votre vénérable corps presbytéral, digne de Dieu, est avec l’évêque dans le même rapport harmonique que les cordes avec la cithare. C’est par l’effet de votre union et de votre affectueuse concorde que Jésus-Christ est chanté. Que chacun de vous soit donc un chœur, afin que, pleinement d’accord et unanimes, recevant la chromatique de Dieu en parfaite unité, vous chantiez d’une seule voix par Jésus-Christ au Père, pour qu’il vous entende et qu’il vous reconnaisse, à vos bonnes actions, pour des membres de son fils[35].


Déjà on s’était servi du nom de Paul et de ses relations avec Tite et Timothée pour donner à l’Église une espèce de petit code canonique sur les devoirs des fidèles et des clercs. On fit de même sous le nom d’Ignace[36]. Une piété tout ecclésiastique prit la place de l’ardeur que, pendant plus de cent ans, entretint le souvenir de Jésus. L’orthodoxie est maintenant le souverain bien ; la docilité, voilà ce qui sauve ; le vieillard doit s’incliner devant l’évêque même jeune[37]. L’évêque doit s’occuper de tout, savoir le nom de tous ses subordonnés[38]. Ainsi, à force de pousser à outrance les principes de Paul, on arrivait à des idées qui eussent révolté Paul. Lui qui ne voulait pas qu’on fût sauvé par les œuvres, eût-il admis davantage qu’on fût sauvé par la simple soumission à des supérieurs ? Par d’autres côtés, pseudo-Ignace est un disciple bien authentique du grand apôtre. À égale distance du judaïsme et du gnosticisme[39], il est un de ceux qui parlent de la manière la plus exaltée de la divinité de Jésus-Christ[40]. Le christianisme[41] est pour lui, comme pour l’auteur de l’épître à Diognète, une religion entièrement séparée du mosaïsme. Toutes les distinctions primitives avaient, du reste, disparu devant la tendance dominante qui entraînait les partis les plus opposés vers l’unité. Pseudo-Ignace donnait la main au judéo-chrétien pseudo-Clément[42], pour prêcher l’obéissance et le respect de l’autorité[43].

Un exemple bien frappant de cette abdication des dissidences qui avaient rempli pendant plus de cent ans l’Église du Christ fut celui que donna Hégésippe[44]. Sorti de l’ébionisme, mais accueilli pleinement par l’Église orthodoxe, ce respectable vieillard achevait à Rome ses cinq livres de Mémoires, base première de l’histoire ecclésiastique[45]. L’ouvrage commençait à la mort de Jésus-Christ. Il est douteux cependant qu’il fût conduit selon un ordre chronologique[46]. À beaucoup d’égards, c’était un livre de polémique contre les hérésies[47] et contre les révélations apocryphes écrites par les gnostiques et les marcionites. Hégésippe montrait que beaucoup de ces apocryphes venaient d’être composés tout récemment[48].

Les Mémoires d’Hégésippe auraient pour nous un prix infini, et leur perte n’est pas moins regrettable que celle des écrits de Papias. C’était tout le trésor des traditions ébionites, rendues acceptables aux catholiques et présentées dans un esprit de vive opposition à la gnose. Ce qui concerne les sectes juives et la famille de Jésus était très développé, évidemment d’après des renseignements particuliers. Hégésippe, dont la langue maternelle était l’hébreu, et qui ne reçut pas d’éducation hellénique, avait la crédulité d’un talmudiste. Il ne reculait devant aucune bizarrerie. Son style paraissait aux Grecs simple et plat, sans doute parce qu’il était calqué sur l’hébreu, comme celui des Actes des Apôtres. Nous en avons un curieux spécimen dans ce récit de la mort de Jacques[49], morceau d’un ton si singulier qu’on est tenté de croire qu’il a été emprunté à un ouvrage ébionite écrit en hébreu rythmé.

Rien ne ressemblait moins cependant à un sectaire que le pieux Hégésippe. L’idée de catholicité tient dans son esprit autant de place que chez l’auteur des épîtres pseudo-ignatiennes. Son but est de prouver aux hérétiques la vérité de la doctrine chrétienne, en leur montrant qu’elle s’enseigne uniformément dans toutes les Églises, et qu’elle y a toujours été enseignée de la même manière depuis les apôtres. L’hérésie, à partir de celle de Thébuthis ( ?), est venue d’orgueil ou d’ambition[50]. L’Église romaine, en particulier, a remplacé pour l’autorité la vieille discipline juive, et créé en Occident un centre d’unité comme celui que constitua tout d’abord en Orient l’épiscopat des parents de Jésus, issus comme lui de la race de David[51].

On voit que le vieil Ébion était bien adouci. Après Hégésippe, on ne connaît plus cette variété du christianisme, si ce n’est au fond de la Syrie. Là, Jules Africain, vers 215, trouve encore des nazaréens primitifs et reçoit d’eux des traditions fort analogues à celles dont vécut Hégésippe[52]. Ce dernier souffrit des progrès ou, pour mieux dire, du rétrécissement de l’orthodoxie. On le lut peu, on le copia moins encore. Origène, saint Hippolyte ignorent son existence. Seuls, les curieux d’histoire comme Eusèbe le connurent, et, de ces pages précieuses, celles-là furent sauvées que les chronographes plus modernes insérèrent dans leurs récits[53].

Un autre signe de maturité est l’épître adressée à un certain Diognète, personnage fictif sans doute[54], par un anonyme éloquent et assez bon écrivain[55], qui rappelle par moment Celse et Lucien[56]. L’auteur suppose son Diognète animé du désir de connaître « la nouvelle religion[57] ». Les chrétiens, répond l’apologiste, sont à égale distance et de l’idolâtrie grecque et de la superstition, de l’esprit inquiet, de la vanité des juifs[58]. Tout le travail de la philosophie grecque n’est qu’un amas d’absurdités et de duperies charlatanesque[59]. Les juifs, d’un autre côté, ont le tort d’honorer le Dieu unique de la même manière que les polythéistes adorent leurs dieux, c’est-à-dire par des sacrifices, comme si cela pouvait lui être agréable[60]. Leurs précautions méticuleuses sur la nourriture, leur superstition du sabbat[61], leur jactance à propos de la circoncision, leur préoccupation mesquine des jeûnes et des néoménies, sont ridicules. Il n’est pas permis à l’homme de distinguer entre les choses que Dieu a créées, d’admettre les unes comme pures et de rejeter les autres comme inutiles et superflues. Prétendre que Dieu défend de faire le jour du sabbat une action qui n’a rien de déshonnête, quoi de plus impie ? Présenter la mutilation de la chair comme un signe d’élection, et s’imaginer que, pour cela, on est aimé de Dieu, quoi de plus grotesque ?


Quant au mystère du culte chrétien, n’espère l’apprendre de personne. Les chrétiens, en effet, ne se distinguent des autres hommes ni par le pays, ni par la langue, ni par les mœurs ; ils n’habitent pas des villes qui leur soient propres, ne se servent pas d’un dialecte à part ; leur vie ne se fait remarquer par aucun ascétisme particulier ; ils n’adoptent pas à la légère les imaginations et les rêves d’esprits agités ; ils ne s’attachent pas, comme tant d’autres, à des sectes portant le nom de tel ou tel ; mais, demeurant dans les villes grecques et barbares, selon que le sort les y a placés, se conformant aux coutumes locales pour les habits, le régime et le reste de la vie, ils étonnent tout le monde par l’organisation vraiment admirable de leur république. Ils habitent des patries particulières, mais à la façon de gens qui n’y sont que domiciliés ; ils participent aux devoirs des citoyens, et ils supportent les charges des étrangers. Toute terre étrangère leur est une patrie, et toute patrie leur est une terre étrangère. Ils se marient comme tout le monde, ils ont des enfants ; mais jamais ils n’abandonnent leurs nouveau-nés. Ils mangent en commun, mais leur table pour cela n’est pas commune[62]. Ils sont engagés dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair. Ils demeurent sur la terre, mais sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois établies, et, par leurs principes de vie, ils s’élèvent au-dessus des lois. Ils aiment tout le monde, et ils sont persécutés par tout le monde, méconnus, condamnés. On les met à mort et, par là, on leur assure la vie. Ils sont pauvres et ils enrichissent les autres[63] ; ils manquent de tout et surabondent. Ils sont accablés d’avanies et, par l’avanie, ils arrivent à la gloire. On les calomnie et, l’instant d’après, on proclame leur justice ; injuriés, ils bénissent[64] ; ils répondent à l’insulte par le respect ; ne faisant que le bien, ils sont punis comme malfaiteurs ; punis, ils se réjouissent comme si on les gratifiait de la vie. Les juifs leur font la guerre comme à des gentils[65] ; ils sont persécutés par les Grecs, et ceux qui les haïssent ne sauraient dire pourquoi.

Bref, ce qu’est l’âme dans le corps, les chrétiens le sont dans le monde. L’âme est répandue entre tous les membres du corps, et les chrétiens sont répandus entre toutes les villes du monde. L’âme habite dans le corps, et pourtant elle n’est pas du corps ; de même les chrétiens habitent dans le monde sans être du monde[66]. L’âme invisible est retenue prisonnière dans le corps visible ; de même la présence des chrétiens dans le monde est de notoriété publique ; mais leur culte est invisible. La chair hait l’âme et lui fait la guerre, sans que celle-ci ait d’autre tort envers elle que de l’empêcher de jouir ; le monde hait aussi les chrétiens, sans que les chrétiens aient d’autre tort que de faire de l’opposition au plaisir. L’âme aime la chair, qui la hait ; de même les chrétiens aiment ceux qui les détestent. L’âme est emprisonnée dans le corps, et pourtant elle est le lien qui conserve le corps ; de même les chrétiens sont détenus dans la prison du monde, et ce sont eux qui maintiennent le monde. L’âme immortelle habite une demeure mortelle ; de même les chrétiens sont provisoirement domiciliés dans des habitations corruptibles, attendant l’incorruptibilité du ciel. L’âme est améliorée par les souffrances de la faim, de la soif ; les chrétiens, suppliciés chaque jour, se multiplient de plus en plus. Dieu leur a assigné un poste qu’il ne leur est pas permis de déserter.[67]


Le spirituel apologiste nous met lui-même le doigt sur l’explication du phénomène qu’il veut présenter comme surnaturel. Le christianisme et l’empire se regardaient l’un l’autre comme deux animaux qui vont se dévorer, sans se rendre compte des causes de leur hostilité. Quand une société d’hommes prend une telle attitude au sein de la grande société, quand elle devient dans l’État une république[68] à part, fût-elle composée d’anges, elle est un fléau. Ce n’est pas sans raison qu’on les détestait, ces hommes en apparence si doux et si bienfaisants. Ils démolissaient vraiment l’empire romain. Ils buvaient sa force ; ils enlevaient à ses fonctions, à l’armée surtout, les sujets d’élite. Rien ne sert de dire qu’on est un bon citoyen parce qu’on paie ses contributions, qu’on est aumônieux, rangé, quand on est en réalité citoyen du ciel et qu’on ne tient la patrie terrestre que pour une prison où l’on est enchaîné côte à côte avec des misérables. La patrie est chose terrestre ; qui veut faire l’ange est toujours un pauvre patriote. L’exaltation religieuse est mauvaise pour l’État. Le martyr a beau soutenir qu’il ne se révolte pas, qu’il est le plus soumis des sujets ; le fait d’aller au-devant des supplices[69], de mettre l’État dans l’alternative de persécuter ou de subir la loi de la théocratie est plus préjudiciable à l’État que la pire des révoltes. Ce n’est jamais sans quelque raison qu’on est l’objet de la haine de tous[70] ; les nations ont, à cet égard, un instinct qui ne les trompe pas. L’empire romain sentait, au fond, que cette république secrète le tuerait. Hâtons-nous d’ajouter qu’en la persécutant violemment, il se laissait aller à la plus mauvaise des politiques et qu’il accélérait le résultat en voulant l’empêcher.

  1. Ἐκκλησία καθολική. Épître des Smyrniotes sur le martyre de Polycarpe, titre, §§ 8, 16 τῆς ἐν Σμύρνῃ καθολικῆς ἐκκλησίας, 19 ; Épîtres pseudo-ign., ad Smyrn., 8. Comp. Actes de saint Pione, § 19. Dans Celse (Orig., V, 59), ἡ μεγάλη ἐκκλησία. Cf. fragm. de Muratori, lignes 55-57, 61-62, 66, 69.
  2. Matth., xviii, 17-20.
  3. Irénée, III, iv ; xxiv, 1. Voir surtout saint Cyprien, Épîtres, 2, 3, 4, 43, 45, 48, 56, 57, 59, 63, 65, 66, 67, 72, 73. Notez πάντα μόνος αὐτὸς ὤν dans le Peregrinus de Lucien, § 11. Le mot λαϊκός se trouve pour la première fois dans l’épître de Clément, ch. xl ; puis dans l’épître pseudo-clémentine à Jacques, § 5. Cf. Clém. d’Alex., Strom., III, 12 (p. 199) ; V, 6 (p. 240), etc. Quant au mot κλῆρος, il a le sens d’« ordre », et il a été opposé à λαϊκός, comme ordo (sous-entendu nobilissimus) a été opposé à plebs.
  4. Irénée, III, iv, 1 ; Tertullien, Præscr., 36.
  5. Se rappeler l’affaire du montanisme et de la pâque. Voir surtout Eusèbe, H. E., V, ch. xxv.
  6. Denys de Corinthe et Soter, ci-dessus, p. 173 et suiv.
  7. Justin, Apol. I, 67.
  8. Concile d’Ancyre (315), canon 13.
  9. Le mot παροικία, d’où est venu « paroisse », fut d’abord à peu près synonyme d’Église ou diocèse. Titre de la lettre des Smyrniotes sur le martyre de saint Polycarpe ; Irénée dans Eus., V, xxiv, § 14 ; comp. § 9 et I, i, 1 ; III, xxviii, 3 ; IV, xv, 2 ; V, v, 8 ; xxiii, 2 ; VI, xi, 1. Παροικία impliquait le sens de colonie étrangère, l’Église, à la manière des Juifs, se considérant comme étrangère ou exilée partout où elle était (comp. תושבים, ἐκκλησία παροικοῦσα Σμύρναν, etc. ; Epist. Polyc., titre ; Clém. Rom. I, titre ; I Petri, i, 17, ii, 11 ; Act., xiii, 17 ; Ps. xxxix, 13 ; Épître à Diognète, 5 ; Constit. apost., VIII, 10).
  10. Voir ci-dessus, p. 178, 205.
  11. Allmer, Revue épigr., no 4, p. 62 ; no 10, p. 154 et suiv., Eusèbe, H. E., VIII, xiv, 9 ; IX, iv, 2, et les notes de Valois. Dans les Actes des martyrs, c’est souvent le flamine qui poursuit. « Seditio coorta est pontificum. » Ruinart, p. 72. Cf. ibid., p. 140. Voir aussi Acta SS., 24 févr., p. 463 ; 24 août, p. 749, sans oublier Lactance, De mort. persec., 36 ; saint Optat, p. 255, 262, édit. Du Pin.
  12. Lettre à Arsace, archiéreus de Galatie, p. 429 et suiv. Spanh. (p. 552 et suiv., Hertlein). D’un évêque converti au paganisme, Julien fait un ἱερεύς. Lettre sur Pégase : Hermes de Berlin, t. IX (1875), p. 259 (p. 603 et suiv., Hertlein).
  13. Ainsi Césarée a la préséance sur Ælia Capitolina. Voir ci-dessus, p. 205.
  14. Rom., i, 8 ; Ign., ad Rom., suscr. ; lettre de Denys de Cor., dans Eus., IV, 23.
  15. Voir l’Antechrist, p. 197-199.
  16. Voir l’Antechrist, p. 191 et suiv.
  17. Irénée, III, iii ; Tertullien, Præscr., 21, 36 ; saint Cyprien, Epist., 52, 55 (ecclesiam principalem unde unitas sacerdotalis exorta est), 67, 71, 75 (Firmilien).
  18. Voir, ci-dessus, ce qui concerne le montanisme et la question de la pâque. Il en fut de même au iiie siècle, dans la question des lapsi et du baptême des hérétiques, ainsi que dans l’affaire d’Origène.
  19. Eusèbe, H. E., V, xxviii, 3.
  20. Lignes 36 et suiv., 70 et suiv. ; 73 et suiv. ; 80 et suiv. Voir Credner (Volkmar), Gesch. des neut. Kanon, p. 341 et suiv. ; Hesse, Das muratori’sche Fragment (Giessen, 1873) ; Harnack, dans le Zeitschrift für K. G., III (1872), p. 358 et suiv.
  21. Caspari, Quellen zur Gesch. des Taufsymbols und der Glaubensregel, quatre parties (Christiania, 1866-1879) ; Gebh et Harn., Patres apost., I, ii, édit. alt., p. 115 et suiv.
  22. « Propter potiorem principalitatem », Irénée, III, iii, 2.
  23. Lettre de Corneille dans Eus., H. E., VI, xliii, 8, 10.
  24. Tertullien, Præscr., 21 ; saint Cyprien, Epist., 52, 55, 71, 75 (Firmilien).
  25. Affaire de Paul Samosate. Eus., H. E., VII, 30.
  26. Voir ci-dessus, p. 175, 178, 205.
  27. Cf. Eusèbe, H. E., IV, xxiii ; VI, xx, 1.
  28. Eusèbe, H. E., VI, ch. xliii.
  29. Saint Cyprien, Epist., 30, 55.
  30. Voir les Évangiles, p. xvii et suiv. On ne diminue pas les objections contre l’authenticité de ces Épîtres en rabaissant le martyre d’Ignace au temps d’Adrien ou d’Antonin (Harnack, Die Zeit des Ignatius, Leipzig, 1878). C’est dans leur style même et leur tour que les épîtres ignatiennes portent le caractère de l’apocryphe.
  31. L’Église chrétienne, p. 442 et suiv.
  32. La façon vague dont Irénée (V, xxviii, 4) parle d’Ignace, τὶς τῶν ἡμετέρων, semble indiquer que l’écrit d’où la citation est tirée était récent.
  33. Comparez Διδασκαλία ou διδαχὴ Κλήμεντος, Ἰγνατίου, Πολυκάρπου, dans les Canons d’Anastase le Sinaïte et de Nicéphore, Credner, p. 241, 244.
  34. Ad Smyrn., § 8. Cf. ad Philad., § 1.
  35. Ad Eph., 4.
  36. Voir surtout l’épître censée d’Ignace à Polycarpe, et l’épître de Polycarpe.
  37. Ad Eph., 3, 5 ; ad Magn., 3-7, 13 ; ad Trall., 2, 3, 12 ; ad Philad., 1-4, 7, 8 ; ad Smyrn., 8-9 ; ad Polyc., 6.
  38. Ad Polyc., 4.
  39. Ad Magn., 8, 10 ; ad Trall., 6, 7, 11 ; ad Philad., 6, 9 ; ad Smyrn., 2-7 ; Epistola Polyc., ad Phil., 7.
  40. Ad Eph., 7.
  41. Ad Magn., 10 ; ad Rom., 3 ; ad Philad., 6. Le mot χριστιανισμός est déjà dans Celse (Orig., III, 75).
  42. Voir ci-dessus, p. 90-91.
  43. La synonymie d’episcopos et de presbyteros durait toujours. Epist. Polyc., titre ; Irénée à Victor, dans Eus., V, ch. xxiv. Cf. Clm. Rom. I, 42.
  44. Voir ci-dessus, p. 71-73.
  45. Eusèbe, IV, ch. viii, 22 ; saint Jér., De vir. ill., 22 ; Sozom., I, 1 ; le Syncelle, p. 337 et suiv., 345 (Paris).
  46. Le récit de la mort de Jacques, frère du Seigneur, faisait partie du cinquième livre.
  47. Eus., IV, vii, 15.
  48. Ibid., IV, xxii, 8.
  49. Eus., II, ch. xxiii. La circonstance καὶ ἔτι αὐτοῦ ἡ στήλη μένει παρὰ τῶ ναῷ (§ 18) semble provenir d’un document écrit avant l’an 70.
  50. Dans Eus., IV, xxii, 5.
  51. Ἕνωσις τῆς ἐκκλησίας. Hégés., dans Eus., IV, xxxii, 5.
  52. Voyez les Évangiles, p. 74-75.
  53. Eusèbe, H. E., II, 23 ; III, 11, 16, 20, 32 ; IV, 8, 11, 21, 22 ; le Syncelle, l. c. C’est à tort qu’on a conclu d’une note trouvée à Patmos par M. Sakkélion que l’Hégésippe complet a dû exister au xvie siècle (Zeitschrift für K. G., II, p. 288-291). Cette note est une liste de desiderata, c’est-à-dire d’écrits perdus en grec, et non un catalogue d’ouvrages encore existants.
  54. Diognète, le maître de Marc-Aurèle, n’eut pas assez de célébrité pour qu’on puisse admettre qu’il s’agit de lui.
  55. Epistola ad Diogn., Gebh. et Harn., Patrum apost. Op., I, 2e fascic. (Lips., 1878) ou dans le Saint Justin d’Otto (3e édit., 1879). On a cru voir une allusion à Marc-Aurèle et Commode dans le ch. vii. Ce qui est dit de la persécution (ch. v, vii, x) répond bien aux dernières années de Marc-Aurèle. Les chapitres xi et xii sont, de l’aveu de tous, interpolés. L’écrit peut à la rigueur être du iiie siècle ; mais nous nous refusons absolument à y voir une fiction plus moderne. L’attribution à saint Justin n’est soutenable en aucune façon. Le livre n’est pas cité dans l’antiquité ecclésiastique ; mais il en est de même d’Hermias, et très peu s’en est fallu qu’il n’en fût de même d’Athénagore.
  56. Comparez le tableau de la république chrétienne (ci-après, p. 425-427) à la description de la cité idéale de Lucien, Hermotime, 22-24.
  57. Ch. i, 9.
  58. Τὴν Ἰουδαίων δεισιδαιμονίαν… πολυπραγμοσύνην, ἀλαζονείαν. Ch. i, iii, iv.
  59. Epist. ad Diogn., 8, 9.
  60. L’auteur parle ici de la loi juive telle qu’elle est écrite. On a eu bien tort de conclure de ce passage que l’écrit était antérieur à 70. Comparez l’Épître de Barnabé, 2, 4, 9, 13, 14, 16 ; Præd. Petri et Pauli, p. 58-59, Hilg. ; Clém. d’Alex., Strom., VI, 5.
  61. Τὴν περὶ τὰ σάϐϐατα δεισιδαιμονίαν. Ch. iv.
  62. C’est-à-dire qu’on n’y mange pas indifféremment de toutes choses. Voir Otto, p. 178-179 (3e édit.).
  63. Cf. II Cor., vi, 10.
  64. Cf. I Cor., iv, 12.
  65. Ὑπὸ Ἰουδαίων ὡς ἀλλόφυλοι πολεμοῦνται. Ch. v. Cf. Justin, cité dans l’Égl. chrét., p. 277.
  66. Jean, xvii, 11, 14, 16.
  67. Ad Diogn., 5, 6
  68. Πολιτεία. Ad Diogn., 5.
  69. Ad Diogn., 10, etc.
  70. Ad Diogn., endroits cités et ch. ii.