Manuel pratique de la culture maraîchère de Paris/13

CHAPITRE XIII.

Calendrier de la culture maraîchère, ou résumé des travaux à exécuter et des produits à récolter dans chaque mois de l’année.

Ayant donné, page 92, les raisons qui nous ont déterminés à commencer l’exposé de la culture maraîchère par le mois d’août, ces mêmes raisons nous conduisent à commencer aussi ce calendrier par le même mois.

AOÛT.

Il faut que, dans ce mois, la terre continue d’être couverte de tous les légumes de la saison, et continuer de les entretenir à la mouillure et en état de propreté. Il faut encore se souvenir que ce mois est le commencement de l’année horticole et qu’il est temps de commencer à accumuler le fumier de cheval, dont il faudra faire une prodigieuse consommation dès novembre jusqu’en avril de l’année prochaine. À mesure que les melons, plantés sur les couches en tranchées, se vendent, on vide ces tranchées du fumier qui formait les couches, on les remplit de la terre qu’on en avait tirée, on la laboure et on y plante des choux-fleurs durs et demi-durs, de la scarole, de la chicorée grosse et demi-fine, des choux de Milan frisés, pour vendre dans le courant de l’hiver. Après le 15 du mois, au fur et à mesure que les planches se vident, on y sème de l’oignon blanc, des épinards à graines rondes et à graines piquantes, qui se vendront de l’automne au printemps ; des radis, des mâches, qui seront bons à vendre en octobre ; des carottes demi-longues, qui seront livrées à la consommation au printemps suivant. On sème aussi des haricots de Hollande, que l’on couvrira de châssis à l’approche des premières gelées. On donne de fortes mouillures aux cardons, céleris, choux-fleurs, cardes-poirées, poireaux, à l’oseille, à l’estragon ; mais on n’arrose que modérément la scarole, la chicorée, les concombres, les cornichons, à moins que le temps ne soit à la grande sécheresse. On visite souvent les porte-graines pour les purger d’insectes, et on recueille les graines à mesure qu’elles mûrissent. Si on n’a pas commencé la culture des champignons dès le mois de juillet, on peut l’entreprendre dans celui-ci et le suivant ; cependant il faut ne faire usage que très-rarement de cette latitude, car il est toujours avantageux d’arriver le premier, puis huit jours de retard peuvent faire perdre une saison : enfin tous les légumes doivent être sarclés, binés, ésherbés dans ce mois, comme dans tous ceux de l’année où la végétation est en activité.

Les récoltes de ce mois sont des chicorées, des laitues grises, romaines blondes, choux-fleurs d’été, poireaux, carottes, un peu d’épinards, pourpier, scarole, cerfeuil, persil, melons, concombres, radis, cornichons, oseille, tomates, aubergines, potirons de toute espèce.

SEPTEMBRE.

La terre doit être tout aussi garnie de légumes dans ce mois que dans le précédent. Les choux-fleurs d’automne, les scaroles, les chicorées occupent une très-grande place, tandis que la romaine, les melons et concombres disparaissent peu à peu. À compter du 1er de ce mois, on ne plante plus aucune salade dans nos marais, mais alors on sème les choux hâtifs, tels que chou d’York, pain-de-sucre et cœur-de-bœuf, pour être repiqués plus tard en pépinière ; du 8 au 12, on sème les choux-fleurs petit et gros salomon, le demi-dur et le dur, pour être repiqués soit sur ados ou sous châssis, et ensuite plantés sur couche ou en pleine terre quand la saison sera arrivée. On sème de la laitue petite noire ou crêpe pour être plantée sous cloche ou sous châssis à froid ; on continue de semer des mâches, des épinards, et, si le temps est sec, il faut arroser ces plantes pour les faire lever. On continue d’amasser du fumier pour faire des couches en novembre, et réchauffer des asperges blanches et vertes dès la fin d’octobre ; on en prépare aussi pour faire des meules à champignon. Vers la fin du mois, on commence à lier et empailler des cardons pour les faire blanchir ; on replante du céleri dans des tranchées ou dans de vieilles couches et on l’empiète ; on sème encore des radis roses, on sème du cerfeuil qui donnera au printemps, on fait un second semis de laitue petite noire qui sera repiquée sous cloche et plantée sur couche en novembre ; à la même époque, on sème aussi de la romaine verte pour être repiquée très-clair sous cloche, parce que c’est de cette romaine dont plus tard on plantera un pied entre quatre laitues par clochée sur couche. On cueille les choux-fleurs d’automne à mesure que leur tête arrive à la perfection ; on fait un second semis de raiponce pour donner après celui déjà fait, on continue de lier la scarole et la chicorée, et, si le temps est au sec, on mouille en plein les choux-fleurs, le céleri et tout ce qui paraît en avoir besoin.

À la fin de ce mois et dans le suivant, il est temps de penser à mettre les coffres, les châssis en état, à faire des paillassons ; on n’a pas le temps de s’en occuper dans le jour, la pluie même ne fait pas rentrer le maraîcher ni son monde ; c’est le matin à la chandelle et le soir à la veillée qu’on prépare et qu’on met en état toutes ces choses, afin que, quand arrivera le moment de s’en servir, on les trouve toutes prêtes sous la main.

On récolte, dans ce mois, chicorée de Meaux, de Rouen, scarole, choux-fleurs, carotte, panais, dernières laitues, derniers melons, toutes sortes de fournitures, oseille, cornichons, piment, aubergine, tomates, potirons de toute espèce.

OCTOBRE.

Dans les premiers jours de ce mois, on peut aussi semer une partie des graines semées dans le mois précédent : ainsi on sème encore surtout la raiponce, des mâches ; on sème de la petite laitue noire, de la romaine verte hâtive pour planter sur couche ou en côtière ; on sème enfin du cerfeuil qui donnera au printemps : de quinze jours en quinze jours, on empaille des cardons et on rechausse ; on butte complètement du céleri pour le faire blanchir et en avoir toujours pour la vente ; on repique en pépinière les choux d’York, pain-de-sucre et cœur-de-bœuf semés les premiers jours de septembre. Les choux-fleurs qu’on a semés en même temps se repiquent dans des coffres, afin qu’on puisse les couvrir de châssis à la première gelée ; si les tiges d’asperge sont sèches, on les coupe à fleur de terre et on donne un léger labour aux griffes. On continue de faire blanchir des cardons, du céleri, de lier des scaroles, des chicorées ; on commence à cueillir des mâches semées en août, des radis, des épinards. Vers la fin de ce mois, on sème sous cloche de la laitue gotte, de la Georges, de la rouge et de la grise pour être repiquées sur ados et sous cloche ; on sème également et de la même manière les romaines blonde et grise pour être aussi repiquées sur ados et sous cloche ou sous châssis. Les choux-fleurs d’automne sont actuellement dans toute leur croissance, et il y a d’abondantes têtes à couper tous les jours pour envoyer à la halle ; on plante à demeure l’oignon blanc que l’on a semé en août. Il y a ordinairement de petites gelées à la fin du mois ; alors on met les châssis sur les choux-fleurs que l’on a repiqués dans des coffres et on leur donne de l’air dans le jour. On peut commencer à chauffer des asperges vertes, même des asperges blanches ; mais c’est dans le mois suivant qu’a lieu la grande récolte de ces asperges de primeur.

On récolte chicorée, scarole, chou-fleur, premiers cardons, céleri, carotte, panais, mâche, raiponce, aubergine, tomate, piment, champignons, persil, cerfeuil, raves, radis, épinards, potirons variés.

NOVEMBRE.

C’est dans ce mois que commencent sérieusement les travaux de primeur, et, pour les mener à bien, il faut avoir sous la main une provision de fumier considérable. Dès les premiers jours, on chauffe des asperges blanches et on continue d’en chauffer de vertes ; on continue aussi de repiquer, sur ados et sous cloche, de la romaine, des laitues noire, gotte, Georges, grise et rouge, semées dans le mois précédent ; on peut même en semer encore dans le commencement de celui-ci, si l’on craint de n’en avoir pas assez, car il se fait une énorme consommation de laitues et de romaines forcées à Paris. On commence à faire des couches pour planter les premières laitues noires repiquées sur ados ; on plante en côtière, et même en plein carré dans des sillons, les choux d’York, pain-de-sucre et cœur-de-bœuf, et, quand la gelée devient menaçante, on pose une poignée de litière sur chaque pied ; on continue de planter l’oignon blanc à demeure ; s’il gèle à 3 degrés, on coupe le restant des choux-fleurs d’automne, on couvre de litière la scarole et la chicorée qui n’est pas liée. On rechange le jeune plant de romaine en le repiquant sur un autre ados, s’il paraît grandir trop vite ; on fait des accots autour des couches et des ados pour empêcher la gelée de pénétrer ; on rechange aussi les choux-fleurs repiqués sur châssis par la même raison qui a fait repiquer la romaine. Quand la gelée augmente, on étend des paillassons sur les couches et sur les ados couverts de cloches, on arrache et met en jauge la scarole, la chicorée qui n’est pas liée et que l’on couvre de grand fumier sec, ou bien on les porte dans le cellier, dans la cave, où on les pose la racine en l’air pour les faire blanchir ; on couvre de litière les tranchées de céleri, on rentre les cardons dans une serre ou une cave à l’abri de la gelée : enfin ce mois et le suivant exigent que les primeuristes prennent toutes les précautions possibles pour préserver leurs jeunes plants des rigueurs de la saison.

On récolte, en novembre, chicorée, scarole, mâche, raiponce, cardons, céleri-rave et autres, chou rouge et autres, carotte, poireau, panais, champignon, cerfeuil, épinards, potirons variés.

DÉCEMBRE.

L’hiver sévit ordinairement avec plus de rigueur dans ce mois que dans le précédent, et le primeuriste doit redoubler de vigilance pour la conservation de ses plants ; quand la gelée augmente, on met du fumier court et sec entre les cloches des ados, on entoure les couches déjà faites de bons accots, et on met du fumier neuf dans les sentiers ; on continue de chauffer les asperges blanches et vertes ; on continue de faire des couches pour planter de la laitue noire sous châssis, pour semer des carottes hâtives, des raves, des radis. On porte du fumier sur la terre où l’on doit faire de nouvelles couches, afin qu’elle ne gèle pas : toutes les fois que le soleil luit, que le temps est doux, on donne de l’air aux châssis, même aux cloches : si on prévoit de grandes gelées, on remet encore du fumier court entre les cloches sur les ados, on couvre de litière les plantes de pleine terre, telles que poirée, carde-poirée, oseille, persil, mâche, et on les découvre aussitôt qu’il dégèle ; mais, comme l’oseille et le persil sont un besoin de tous les jours, on en réchauffe de vieux pieds sur couche et sous châssis : quand il est tombé de la neige sur les paillassons qui couvrent les châssis et les cloches, et que la gelée continue sans que le soleil se montre, on peut laisser cette neige qui est un bon abri pendant quelque temps, mais il ne faut pas la laisser fondre sur les couches ni sur les ados, qu’elle refroidirait et rendrait trop humides. Ceux qui n’ont pas semé de pois Michaux ou précoce sous châssis à froid dans le mois précédent peuvent en semer dans celui-ci : on peut préparer des meules à champignon qui donneront en mars ; on peut semer des melons et concombres.

On vend les dernières chicorées et les dernières scaroles, les derniers choux-fleurs non serrés ; on continue de vendre mâche, raiponce, céleri plein et céleri-rave, cardon, champignon, persil, cerfeuil, poireau, chou rouge et autres, épinard, oseille, premières asperges blanches et vertes, premières laitues noires.

JANVIER.

Les travaux de ce mois sont une continuation de ceux du mois précédent, et ne demandent pas moins de surveillance pour garantir les jeunes plants de la gelée, pour les faire jouir autant que possible du soleil et de l’air pendant le jour, ne serait-ce que pendant une heure. Ainsi on continue de faire de nouvelles couches pour planter de la laitue noire ou crêpe sous châssis, pour réchauffer de l’oseille, du persil, et quelquefois d’autres fournitures, pour semer des raves, des radis. On chauffe des asperges blanches et vertes ; on fait des couches à cloches, et on plante sous chaque cloche quatre laitues et une romaine au milieu ; on sème encore des carottes hâtives sur couche et sous châssis, de la petite chicorée sauvage également sous châssis. Il est bien entendu qu’on entoure ces nouvelles couches de bons accots et qu’on garnit les sentiers de bon fumier neuf. On plante sous châssis plusieurs espèces de choux-fleurs. À la fin du mois, s’il ne gèle pas, on laboure les meilleures côtières, et on y plante les premières romaines vertes que l’on prend sur les ados. On commence à cueillir de la laitue noire plantée sur couche et sous châssis en novembre.

La pleine terre donne peu dans ce mois ; mais, si l’on a pu disposer de quelques coffres et panneaux de châssis pour abriter un bout de planche d’oseille, de persil, cerfeuil, poirée, ces plantes donneront encore quelques produits : on sème melons et concombres.

On récolte, dans ce mois, laitue noire, mâche, raiponce, poireau, céleri plein et céleri-rave, chou rouge, chou de Bruxelles et autres, persil, cerfeuil, épinard, champignon, asperges blanches et vertes, choux-fleurs conservés dans le cellier par le moyen indiqué page 132.

FÉVRIER.

Dès les premiers jours de février, on fait une couche mère pour semer des melons cantaloups de diverses variétés et des concombres, que l’on repique huit ou dix jours après sur une autre dite couche pépinière, en plein terreau ou dans de petits pots, d’après le calcul qu’on aura fait du temps à s’écouler jusqu’à ce qu’on puisse les planter à demeure. À cette époque, les primeuristes ont déjà des couches vides qui ont rapporté de la laitue noire ou crêpe : alors on retourne ces couches ; on y mêle du fumier neuf, on les rebâtit, et on y replante une autre saison de petite laitue noire, une première saison de chou-fleur, de romaine ; on y sème des carottes, des radis, etc. : on fait des couches neuves pour semer de la chicorée fine, des haricots-flageolets pour repiquer sur d’autres couches ; on plante les premiers choux-fleurs demi-durs en pleine terre dans une côtière où l’on a déjà planté de la romaine verte, et que l’on abritera au besoin avec une poignée de paille ; on sème, en pleine terre et seulement en côtière, des carottes, des radis, en même temps qu’on y plante de la romaine et des choux-fleurs ; on sème sur couche des poireaux pour être plantés en pleine terre au printemps ; on sème des aubergines, des tomates sur couche et sous châssis pour les planter en pleine terre après les gelées. Si on n’a pas pu planter tout son oignon blanc à l’automne, ses choux-d’York, pain-de-sucre et cœur-de-bœuf, on en achève la plantation ; on continue de chauffer l’asperge blanche et verte. Pendant tout ce temps, il faut veiller à ce que la gelée ne pénètre sous aucune cloche, sous aucun châssis, profiter du soleil pour donner de l’air à ce qui en a besoin, chasser l’humidité surabondante, nettoyer, supprimer les feuilles altérées des laitues, romaines et autres plantes. Après le 15 ou le 18, on plante les premiers melons, les premiers concombres sur des couches retournées et refaites à neuf, munies de coffres et de châssis. Vers la fin du mois, on laboure la terre où l’on doit faire des tranchées à melons cantaloups en mars ; on sème en pleine terre des carottes, des épinards, du persil, du cerfeuil ; on plante sur des couches les haricots-flageolets que l’on a semés et repiqués au commencement du mois ; on les couvre de châssis, et on en sème d’autres pour leur succéder.

On a à vendre, dans ce mois, laitue noire, radis nouveaux, romaine verte, oseille, mâche, raiponce, persil, cerfeuil, oseille, céleri plein et céleri-rave, poireau, panais, premiers haricots verts, champignons, asperges blanches et vertes, choux-fleurs conservés, nouvelle laitue à couper.

MARS.

Dans les premiers jours de ce mois, on commence à ouvrir les tranchées dans lesquelles on fera successivement des couches sur lesquelles on plante des melons cantaloups en grande quantité et que l’on couvre de châssis au fur et à mesure qu’on les plante ; on fait des couches pour continuer de planter des laitues et des romaines sous cloche et sous châssis ; on sème sur couche et sous châssis d’autres melons pour une deuxième ou une troisième saison ; on plante en pleine terre les romaines verte, blonde et grise, les laitues grise, rouge et Georges, que l’on prend sur les ados où elles ont passé l’hiver ; et, comme en cette saison on ne craint plus ordinairement de fortes gelées, on sème en pleine terre, dans nos marais, beaucoup de graines qu’ailleurs, et dans les terres fortes et froides, on ne sème qu’en avril et mai : ainsi, dans le courant de mars, nous semons en pleine terre des carottes courte, demi-longue et longue, de l’oignon, du poireau, des chicorées fine et demi-fine, des raves et radis, de l’oseille, panais, cresson alénois, des laitues gotte, rouge et Georges ; on fait un second semis d’épinards pour succéder à celui fait en février, et, quoiqu’on ait semé de la chicorée fine et demi-fine en pleine terre, on en sème aussi sur couche et sous châssis, qui sera venue avant celle semée en pleine terre ; on fait de nouvelles couches en tranchées, pour les haricots ; on sème encore des aubergines et des tomates sur couche ; on sème en pleine terre de la graine d’asperge, et on peut commencer à planter le semis de l’an passé ; enfin on plante en pleine terre beaucoup de choux-fleurs élevés sous châssis.

Dans ce mois, il y a ordinairement des hâles desséchants qui exigent qu’on arrose avec modération et discernement les couches et la pleine terre.

On a, dans ce mois, laitue noire, radis nouveaux, romaine verte, oseille, persil, cerfeuil, dernières mâches et raiponces, carottes nouvelles, haricots verts, poireaux, épinards, petite chicorée sauvage, champignon, estragon, dernières asperges blanches et vertes, derniers choux-fleurs conservés.

AVRIL.

Il n’y a plus de fortes gelées à craindre ; mais il faut toujours se tenir en garde contre les petites gelées tardives, qui sont souvent fatales aux primeuristes trop confiants. On continue de planter des melons en tranchées sous panneaux, et on en sème d’autres pour être plantés sur couche et sous cloche ; on taille et on tapisse les melons sous châssis ; on retourne les vieilles couches à laitues, à mesure qu’elles se vident, et on y replante des melons à cloche.

Il est temps de semer sur un bout de couche toutes les cucurbitacées qui doivent être ensuite plantées en pleine terre, telles que les différents potirons, giraumonts, concombres et cornichons. On plante en côtière des tomates et des aubergines élevées sur couche ; on sème et on plante en pleine terre tous les légumes maraîchers, qui se cultivent au printemps, dans l’été et automne, et dont l’énumération serait ici trop longue ou fastidieuse ; on ôte les châssis des couches à carottes, raves, radis, chicorées, et on les met sur les derniers melons que l’on plante en tranchées.

À mesure que le froid diminue, la sécheresse augmente ordinairement : il faut veiller à ce que chaque légume ne manque pas de l’humidité qui lui est nécessaire ; enfin il faut qu’à la fin de ce mois on ne voie plus aucune partie nue dans un marais.

On vend, dans ce mois, les dernières laitues noires, les premières laitues gotte et Georges, les premiers melons, petit prescott fond blanc et concombres ; on continue de vendre romaine verte, carotte, raves, radis, oseille, persil, cerfeuil, estragon, pimprenelle, haricots verts, carde-poirée, champignon.

MAI.

Un jardin maraîcher doit, dans ce mois, représenter un tapis de verdure variée, et une des principales affaires du maraîcher est de faire ses semis de telle manière qu’il ait toujours des plants prêts pour remplacer ceux parvenus à maturité et journellement livrés à la consommation, afin que son marais soit toujours plein jusqu’à la fin de l’automne.

On plante les derniers melons cantaloups en tranchées ; on retourne les dernières couches à laitues, à carottes vides, pour y planter d’autres melons ; on plante en place des aubergines, des tomates, si on n’a pu le faire à la fin du mois précédent ; si on ne craint pas trop la concurrence, on sème une planche ou deux de haricots verts pour succéder à ceux que l’on a sous châssis ; on sème des épinards, du cerfeuil, pour remplacer ceux qui montent en graine ; on sème toutes les sortes de laitues, excepté la petite noire, qui n’est plus de saison ; on sème également les trois sortes de romaines, mais la verte finira avec le mois ; on ne sèmera plus que la blonde et la grise, que la scarole et la chicorée feront disparaître à leur tour en septembre ; on sème les cardons sur un bout de couche pour être replantés, ou on les sème immédiatement en place. Le céleri se sème de préférence sur un bout de couche, parce qu’il vient plus vite et peut être repiqué plus promptement que celui semé en pleine terre ; cependant le petit céleri à couper se sème en pleine terre. Les choux-fleurs, soit sur couche, soit en pleine terre, étant dans leur grande force, demandent de grands arrosements et une grande surveillance contre les insectes. On plante à demeure les potirons, giraumonts, concombres et cornichons semés sur couche le mois dernier. La poirée, la carde, le persil de l’an passé montent en graine, et on les remplace par de nouveaux semis si on ne l’a déjà fait. On sème des radis roses tous les dix jours, le radis noir pour l’hiver, des carottes et des panais pour être livrés à la consommation, à mesure qu’ils grossissent. La taille des melons occupe une bonne partie du temps du jardinier-maraîcher, dans ce mois et dans le suivant.

On vend, dans ce mois, laitues rouge et grise, romaines blonde et grise, chou-fleur, melon, concombre, chicorée fine, choux d’York, pain-de-sucre, cœur-de-bœuf, haricots verts, radis, raves, persil, cerfeuil, épinard, oseille, estragon, pimprenelle, cresson alénois, carotte, carde-poirée, poireau nouveau, oignon blanc, ciboule.

JUIN.

Il faut, dans ce mois comme dans les deux précédents, que le jardinier-maraîcher ait toujours à la mémoire combien de temps telle ou telle graine met à lever, en combien de temps le plant qui en provient est bon à planter, et en combien de temps le légume qu’il donne sera bon à livrer à la consommation, afin qu’il fasse toujours ses semis à propos, et qu’il ne soit pas exposé à perdre une saison, ni à voir du terrain inoccupé.

On peut encore planter quelques melons les premiers jours de ce mois, si l’on a du plant en bon état ; on sème des choux-fleurs durs et demi-durs pour donner leur pomme en automne ; on plante ceux que l’on a semés en mai ; on sème encore des cardes-poirées ; on sème les romaines et les laitues de la saison, peu à la fois, mais tous les dix ou douze jours ; on plante les cardons semés sur un bout de couche le mois précédent ; on peut même en semer en place si on ne l’a déjà fait ; on sème le chou de Bruxelles, le chou de Milan frisé et autres pour l’hiver ; on commence à repiquer le grand céleri, le céleri turc et le céleri-rave. La taille des melons réclame encore une partie du temps du maraîcher ce mois-ci. Les fournitures, comme pourpier doré, cerfeuil, bonne-dame, montent vite dans cette saison ; il faut en semer très-souvent. Le pourpier et la bonne-dame ne craignent pas le soleil ; mais le cerfeuil a besoin d’être semé à l’ombre ; on sème la première scarole dans ce mois. Une grande partie du temps est employée aux arrosements, sans lesquels il n’y a pas de récolte à espérer. C’est dans ce mois qu’on retire les châssis et les cloches de dessus les couches ; les châssis s’empilent sous un hangar à l’abri de la pluie ; les cloches s’empaillent et se mettent en route dans un coin du marais à l’abri des chocs (voir page 78).

Les produits de ce mois sont des choux-fleurs, des choux d’York, pain-de-sucre et cœur-de-bœuf, des melons, des concombres, haricots verts, tomates, aubergines, cresson alénois, cerfeuil, persil, pimprenelle, oseille, pourpier doré, oignon blanc, ciboule, ciboulette, raves et radis, premier céleri à couper, bonne-dame.

JUILLET.

Il ne faut pas moins de prévoyance dans ce mois que dans les précédents, puisque l’on a à peu près les mêmes semis et les mêmes plantations à faire, excepté la romaine verte qui a cédé sa place à la scarole.

Dans les premiers jours du mois, on continue de repiquer les céleris ; on continue aussi de planter des choux-fleurs durs et demi-durs pour l’automne ; on plante à demeure les choux de Milan frisé, de Bruxelles, chou rouge et autres, pour être livrés à la consommation pendant l’hiver ; on continue de semer chicorée, scarole, raves, radis, cerfeuil, bonne-dame, et tout ce qui peut arriver à maturité avant l’hiver. À mesure que les couches de melons en tranchées se vident, on enlève le fumier de ces couches, on remplit les tranchées avec la terre qu’on en avait tirée ; on laboure le tout, et on y plante des choux-fleurs d’automne, des chicorées demi-fine, rouennaise, de Meaux, des scaroles, et on y sème d’autres légumes de la saison. Les arrosements sont ordinairement encore plus nombreux et plus indispensables que dans le mois précédent, et il ne faut pas espérer d’obtenir de beaux choux-fleurs, de beaux céleris, s’ils ne sont pas très-abondamment arrosés.

Dans ce dernier mois de l’année horticole, les marais offrent des melons en abondance, des concombres, des cornichons, des chicorées fines et demi-fines, des romaines blondes et grises, des laitues grises et rouges, des choux pain-de-sucre et cœur-de-bœuf, des choux-fleurs d’été, des carottes, tomates, aubergines, panais, poireau, céleri coupé, poirée, radis, persil, oseille, belle-dame, et toutes les fournitures de la saison.