Mais il te faut m’être si douce

Œuvres posthumesMesseinPremier volume (p. 96-97).
À Eugénie…


Mais il te faut m’être si douce !
Car tu sais ou tu ne sais pas
Que je suis faible et que mon pas
Flageolle à la moindre secousse ;

Que mon cœur qui trôna jadis,
Fier de sa puissance amoureuse,
Tremble et s’alarme à tels petits,
Tout petits flirts, riens, viande creuse ;

Que mon esprit naguère encor
Triomphal en pleine lumière,
Chu de son vol d’azur et d’or,
A perdu sa gloire première ;

Qu’enfin mon âme toute en Dieu
Lors d’un autrefois dont les anges
Furent participants, au lieu
Des cieux, erre ès-limbes étranges…


Qui, toi douce ! et tout est fini
Du mal languide qui m’oppresse, —
Et qu’à jamais ton nom béni
Ferme les sceaux de ma détresse !