Méthode pratique d’orchestration symphonique/Renseignements utiles sur la manière d’Orchestrer la Musique de Danse

RENSEIGNEMENTS UTILES
SUR LA
MANIÈRE D’ORCHESTRER LA MUSIQUE DE DANSE

Disons d’abord que la Musique de Danse est destinée à être exécutée le plus souvent dans les Bals (quoiqu’on la joue également comme musique de Concert), et quelquefois en plein air. Il en résulte que, étant donné le peu de silence qui règne dans les Bals et autres lieux de réunion où l’on danse, ce genre de Musique, pour être entendu et pour atteindre son but, qui est d’entraîner les danseurs, doit, avant tout, être très sonore[1]. L’Orchestrateur devra donc tenir compte de cette condition.

Inutile de songer à écrire des Solos de Hb., de Fl. ou Clar., etc., (sauf dans les introductions, si l’on veut), il ne faut rien de tout cela ; on doit chercher surtout à produire de l’Effet et de la Gaité.

Pour ce qui concerne la partie chantante, voici les conseils que nous donnerons :

Il faut bien se garder de ne mettre le chant : qu’aux Violons seuls ;

Ni qu’à la Flûte seule ;

Ni qu’à la Clarinette seule ;

Ni enfin à aucun instrument seul, sauf au Cornet « on voit déjà que ce qui est bon et d’un bel effet dans l’orchestration de musique de fantaisie n’est plus pratique dans la musique de danse. »

Voici donc les principales combinaisons d’instruments pour l’exécution du chant.

Pour les passages doux :

Flûte et 1re Clar. (un peu faible, quoique très usitée).

Flûte, 1re Clar. et 1ers Violons (autant que possible la flûte à l’octave au-dessus des Violons[2] (cette combinaison est la plus fréquente).

1er Cornet avec les 1ers Vns à l’octave (d’un bon effet quoique faible)

Les deux Clar. avec les 1ers Vns à l’octave ou à l’unisson (un peu faible).

Une seule Clar. avec 1ers Vns (trop faible).

Pour un chant grave :

Les deux Clar., Bn ou Tuba, Vcelles, 1ers Vns, le tout à l’unisson.

Il est évident que l’on pourrait trouver d’autres combinaisons ; nous indiquons seulement celles qui sont le plus fréquemment employées.

Dans les Tutti forte quand on fait faire le chant par les trois Trombones à l’unisson et par les Cornets à l’octave, on peut utiliser tout le reste de l’orchestre pour l’accompagnement ; on écrit de larges accords de deux ou trois notes pour les Vns et les Altos, ainsi que pour l’ensemble des Clar., Hb. et Cors ; dans ce cas, on donne assez souvent le chant aux Flûtes de concert avec les Trombones et les Cornets, et l’on fait doubler les Basses par le Tuba.

Ceci dit, on peut constater qu’un morceau de danse, pour être bien orchestré, doit avoir le Chant aux 1ers Violons d’un bout à l’autre, sauf dans les effets de Fl. et Cl. seules, dans les Solos de Cornet, ou dans les Tutti de cuivres ; dans ces derniers cas, on écrit comme nous l’avons dit plus haut, des accords pour les 1ers Vns (ce sont généralement les mêmes que ceux des 2mes Vns ; on a soin toutefois d’intercaler le chant en petites notes sur la même portée, (quand cela se peut) ou de le mettre sur la portée supplémentaire au-dessus de la partie réelle et en accolade[3]. Le chant en petites notes sur la partie de 1er Vn sert à guider le Chef d’Orchestre, et en même temps permet aux 1ers Vns, dans les tout petits orchestres, d’exécuter au besoin le chant à défaut d’instruments en bois ou en cuivre qui pourraient manquer.

Il faut bien remplir la partie de Flûte[4]. Elle ne doit être au repos que dans certains cas, tels que : Un effet de chant grave, un solo de Cornet, un ensemble de Cornet et Vns. Mais il est bon quand la Flûte se tait, d’écrire quand même à cette partie le chant en petites notes[5] ; (on place les pauses au-dessous) ; cela peut à l’occasion servir. Par exemple, dans les petits orchestres, un instrumentiste peut manquer, tantôt c’est le Cornet, tantôt un 1er Vn ; il arrive aussi qu’un Violoniste casse une corde (la chanterelle surtout) au milieu d’un morceau, ce qui est très désagréable quand l’orchestre n’a que ce Violon ; or, si la Fl. et la Clar.[6] ont le chant en petites notes, elles peuvent être d’un grand secours en jouant le chant, dans ces cas là et dans bien d’autres.

La partie de Tuba doit être à peu près dans le genre de la partie de Violoncelle. Il y a souvent des passages semblables.

Le Tuba excelle dans certains contre-chants s’harmonisant bien avec les Vns et les Bois. Quand le Cornet doit jouer seul, on peut selon le cas, le faire doubler par le Tuba donnant le chant à l’octave au-dessous. En somme comme nous l’avons déjà dit, le Tuba est le Violoncelle du bal, car les orchestres de danse possédant un Tuba n’ont généralement ni Vcelle ni Basson[7].

Les Trombones sont employés aussi bien dans les Forte que dans les Piano. On peut leur confier des tenues ou les utiliser autrement ; on peut aussi n’en faire entendre qu’un, ou deux, ou le 3me seul formant basse aux Cornets.

Il faut soigner la partie de 3me Trombone et lui mettre quelquefois des petites notes à déf. de Cor, de 1er Trombone ou de Tuba, car il y a souvent des orchestres avec un seul Trombone qui joue la partie de 3me.

La partie de 1er Cornet est toujours assez remplie ; cependant elle a souvent des mesures à compter. Le Cornet alterne de fois à autre avec les Bois quand il y a des reprises ; dans ce cas, le Compositeur indique ce qu’il désire par les mots : 1re fois ou 2me fois ou simplement alternez. On voit quelquefois les mots : obligé, toujours, ce qui veut dire : Ne pas se reposer, sans cela il y aurait un vide.

On fera bien aussi de donner au Cornet, en petites notes, certains passages qu’il pourrait exécuter à défaut de Cor ou de 2me Clar., etc.

Les parties d’accompagnement (2mes Vns, Altos, Vcelles, C.-B., 2me Clar., Cors), doivent être bien remplies ; pourtant pendant un solo de Cornet, de Fl. ou de Cl., il est quelquefois bon d’arrêter les Cors ; il peut aussi se présenter des effets de Bois seuls ou de Cuivres seuls, qui nécessitent l’arrêt du reste de l’Orchestre.

Quant aux Instruments à percussion, nous conseillons d’en user avec une certaine prudence ; il sera bon de n’employer la Grosse-Caisse et Cymbales autant que possible, que dans les Tutti forte.

Le Tambour seul et le Triangle seul s’emploient assez souvent dans les passages Piano.

Quant aux divers genres de musique de danse, tels que : Polka, Mazurka, Valse, Galop, etc., nous n’avons rien à ajouter, au point de vue de l’orchestration, il n’y a pas de différence, les mêmes procédés étant applicables à tous ces genres.

Le lecteur examinera quelques orchestrations de musique de danse faite par des compositeurs spécialistes, au besoin il en copiera quelques-unes en partition d’orchestre.


  1. Ceci ne veut pas dire qu’on doit jouer continuellement tort, car il faut relativement des nuances.
  2. A l’occasion on fait faire à la Flûte une variation quelconque, différente du chant, une trille, un trait, une imitation, etc., surtout dans les Tutti. Ne pas oublier que dans les Bals la partie de Flûte, étant le plus souvent exécutée par une petite flûte, en écrivant le chant à l’unisson des Violons, on l’entendra à l’octave au-dessus.
  3. Dans ce cas on écrit souvent le Chant une octave au-dessus.
  4. Quelquefois, dans les Bals, la petite Flûte est remplacée par un Flageolet. Il n’y a pas lieu de se préoccuper de cette substitution, le rôle de ces deux instruments étant le même.
  5. Même recommandation que dans le no 1.
  6. Les observations formulées pour la Flûte concernent aussi la 1re Clar. dont la partie doit être également bien remplie.
  7. Ni Hb., ni Timbales. Par contre, ils auront parfois 3 on 4 Cornets et autant de Clar., c’est pour ce dernier motif qu’il est d’usage de copier et de graver séparément les parties de 1er et 2me Cornet, de 1re et 2me Clar., afin qu’au besoin, si l’on a deux ou plusieurs exécutants pour la partie de 1er et autant pour la partie de 2me ils ne soient pas tous serrés autour d’un seul pupitre pour lire sur la même feuille contenant en accolade la 1re et la 2me partie.