Méthode des moindres carrés/Note II

Traduction par Joseph Bertrand.
Mallet-Bachelier (p. 134-141).

NOTE II.

APPLICATION DE LA MÉTHODE DES MOINDRES CARRÉS À LA CORRECTION DES ÉLÉMENTS DE LA PLANÈTE PALLAS.


1.

M. Gauss a donné, dans le tome I des Mémoires de Gottingue, l’application de sa méthode à la correction des éléments de la planète Pallas. L’illustre géomètre ayant développé sur cet exemple l’algorithme indiqué plus brièvement dans son grand ouvrage Theoria Motus Corporum cœlestium (voir la Note précédente), nous avons cru devoir traduire ici cette portion de son Mémoire. La première partie exigeant la connaissance approfondie de la théorie du mouvement des planètes, nous nous dispenserons de la reproduire, et nous prendrons pour point de départ les douze équations auxquelles les corrections des six éléments de l’orbite doivent satisfaire.

En désignant ces corrections par

les équations obtenues par M. Gauss sont les suivantes :

D’après la nature des observations qui ont fourni la dixième de ces équations, elle inspire trop peu de confiance pour qu’on juge utile de la faire intervenir, et c’est d’après les onze autres seulement que l’on déterminera les six inconnues.

Les explications suivantes sont littéralement traduites du Mémoire de M. Gauss.

2.

Dans l’impossibilité où nous sommes de satisfaire exactement aux onze équations proposées, c’est-à-dire d’annuler tous les seconds membres, nous chercherons à rendre la somme de leurs carrés aussi petite que possible.

On aperçoit facilement que si l’on considère les fonctions linéaires

les équations qu’il faut résoudre pour rendre

un minimum, sont

ou, en posant, pour abréger,

, , , , etc., devront se déterminer par les équations suivantes :

L’élimination, très-pénible lorsque le nombre des inconnues est considérable, peut se simplifier notablement de la manière suivante. Outre les coefficients , , etc. [dont le nombre est , si le nombre des inconnues est ], supposons que l’on ait calculé la somme

on voit facilement que l’on a

et, en désignant

par , tous les termes de qui contiennent le facteur , se trouvent dans l’expression , et, par suite,

est une fonction indépendante de . C’est pourquoi, en posant

on aura

nous désignerons cette fonction par .

De même, en posant

la différence

sera indépendante de  ; nous la représenterons par .

En posant, de même,

et

la différence

sera une fonction indépendante de .

En continuant ainsi, nous formerons une suite d’expressions , , , etc., dont la dernière sera indépendante des diverses inconnues, et représentée par , si désigne le nombre de ces inconnues ; nous aurons alors

On prouvera facilement que étant une somme de carrés

et ne pouvant devenir négative, les diviseurs , , , etc., sont tous positifs. (Nous supprimons, pour abréger, le détail de la démonstration.) D’après cela, la valeur minimum de correspond évidemment aux valeurs des inconnues, pour lesquelles

et, en commençant à résoudre le système par la dernière équation, qui ne contient qu’une inconnue, on trouvera les valeurs de , , , , etc., sans avoir aucune élimination à effectuer. La méthode donne, en même temps, la valeur minimum de , qui est .

3.

Appliquons ces principes à notre exemple, dans lequel , , , , etc., sont remplacés par , , , , , . J’ai trouvé, par des calculs exécutés avec soin :

,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,

,
,
,
,
,
,
,
,
,
.

D’où l’on déduit :

,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
.

De la même manière :

,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
,
.

D’où :

,
,
,
,
,
,
,
,
,
.

De même :

,
,
,
,
,
.

D’où :

,
,
.

D’où enfin :

.

Nous avons donc les six équations suivantes :

d’où l’on déduit :

Telles sont les corrections qu’il faut apporter aux éléments trouvés d’abord pour la planète.