Mémoires d’une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante/21/Chapitre V

chapitre v

Conflits, propagande et crise finale




Ce que le docteur Bataille a raconté au sujet des suites de la mémorable séance du 25 mars 1885 est assez exact dans son ensemble ; des erreurs de date ont été commises, et elles ont été rectifiées par ma lettre qui a été insérée à la fin du Diable au xixe siècle ; disons encore qu’un fait de Louisville a été rapporté par le docteur selon une légende, et non conformément à la réalité.

Le 26 mars, les officiers du Triangle Saint-Jacques se réunirent en se déclarant comité secret et eurent la prétention, vraiment exorbitante, de juger mon cas.

La discussion fut longue ; car des difficultés constitutionnelles se présentaient, par le fait de mon initiation au grade de Maîtresse Templière commencée dans un Triangle auquel je n’étais pas inscrite.

Dans la Haute-Maçonnerie, il n’en est pas comme dans la Maçonnerie officielle avouée, où l’Atelier dont on est membre peut seul vous donner une initiation. En palladisme, une fois que l’on a le premier degré, on peut, en acquittant un droit spécial, se faire conférer un grade supérieur dans n’importe quel Triangle ; mais, ainsi que l’a fort bien expliqué le docteur Bataille, si à la suite des épreuves le Triangle dont on a sollicité le grade supérieur refuse de le conférer, celui-ci ne peut qu’ajourner indéfiniment le ou la récipiendaire et n’a pas pouvoir de radiation. En effet, la radiation emporte l’exclusion définitive et complète de la Haute-Maçonnerie ; un Atelier ne peut donc pas priver l’adepte des grades inférieurs qu’il ne lui a pas conférés. C’est pourquoi, dans un cas comme celui qui était le mien, il devient nécessaire de recourir au Triangle qui a donné la première initiation palladique, et c’est à ce Triangle qu’il faut demander la radiation, si l’adepte dont l’initiation supérieure a été interrompue par ajournement est considéré comme étant devenu indigne ou dangereux. Le résultat : c’est le Triangle où l’on est inscrit qui est le seul et légitime juge.

En prétendant me juger, le Triangle Saint-Jacques, de Paris, violait la Constitution du Palladium.

Or, voici ce que le docteur Bataille a ignoré : je fus jugée le soir du 26 mars. Et le docteur a ignoré cela, parce qu’il a beaucoup écrit d’après les on-dit, parce qu’il n’a assisté à aucune des séances où j’ai été en cause, parce qu’il n’a jamais eu les pièces en main.

Dans la première réunion du comité secret, on approuva à l’unanimité la décision prise la veille par la grande-maîtresse Sophia ; ce fut à qui la féliciterait d’avoir décrété l’ajournement, qui me mettait en état de suspension. Mais le président B*** estimait qu’il ne fallait pas en demeurer là : selon lui, cette séance d’initiation manquée m’ayant appris des pratiques que j’avais hautement désapprouvées, j’étais devenue tout-à-fait dangereuse ; à son avis, je ne garderais pas un tel secret, « n’étant pas, dit-il, une nature passive ». Ce sont les propres termes dont il se servit. Il déclara qu’il était de toute nécessité de me faire disparaître immédiatement ; sa motion fut adoptée, mais à la majorité d’une seule voix.

Je dois la vie au F▽ Hubert, directeur de la Chaîne d’Union, qui fut informé aussitôt de ce qui venait de se passer, par un membre de la minorité du comité secret du Triangle Saint-Jacques. Je lui dois la vie, et je suis heureuse de le déclarer publiquement. S’il veut me faire l’amitié d’accepter un fauteuil à la conférence du 19 avril, j’aurai grande joie à lui dire, devant les représentants de la presse, qu’il n’a pas obligé une ingrate.

Le F▽ Hubert n’est certes pas un méchant homme, et quelques uns l’ont fait noir bien à tort. Il a une très grande importance dans la Maçonnerie, surtout à cause de ses connaissances hautes et très étendues. Quand le Palladisme fût établi en France, il fut un des premiers adhérents, lui, le vieil ami de Ragon et de Pike ; il était parfait initié, sans qu’il fût utile de l’admettre à aucune épreuve. Est-il sataniste ? Je ne le crois pas ; je n’ai entendu dire nulle part qu’il ait jamais poignardé une hostie. Il est, évidemment, luciférien, puisqu’il est un des chefs de la Haute-Maçonnerie en France, puisqu’il a un daimon-protecteur, le génie Arkathapias, terrible favori de Moloch, puisqu’il est assez fréquemment l’objet de manifestations surnaturelles. Mais il faut lui rendre cette justice : il n’a jamais mis son influence au service de l’école carduccio-waldériste, dont les infernales pratiques ont fait tant de ravages dans les Triangles français. En outre, il est bon patriote ; il l’a montré, lors de l’incident de la conférence Trollet à la Loge le Globe, de Vincennes ; il est loin d’être favorable à Lemmi, dont il n’a pas craint de blâmer la gallophobie maintes fois en plein Atelier. Son erreur est complète, mais douce ; absolue pour lui, mais tolérante à l’égard des autres, et ce sont les autres qu’il croit aveugles.

Personne, mieux que lui, ne réalise le type du sorcier bon enfant, si l’on peut s’exprimer ainsi. C’est un homme de bonne compagnie, serviable, brillant par des qualités d’excellent diplomate, d’un désintéressement remarquable, d’une cordialité franche, n’ayant pas la moindre haine contre ses adversaires, pardonnant volontiers les torts qu’on peut avoir eus envers lui, et intervenant chaque fois qu’il peut dans les querelles pour apaiser et aider à la réconciliation. Disons le mot de la langue française : le F▽ Hubert est un brave homme, tout-à-fait, sans restriction. C’est un malheur, vraiment, qu’il soit dans l’erreur du Palladisme. Espérons que la grâce de Dieu le sauvera, que la lumière du Rédempteur l’éclairera avant sa dernière heure ; on sait quels miracles ont été accomplis, souvent les plus inattendus, souvent bien tard !…

À la lecture de ce portrait, le Père Portalié bondira sans doute et s’écriera que je m’attache à montrer que des lucifériens peuvent avoir des vertus ; ce jésuite, qui excelle à se contredire, m’applaudirait si mes écrits accusaient les francs-maçons d’être tous pourris de vices. Heureusement, je ne m’émeus guère de son blâme, et je serais désolée d’avoir eu l’approbation d’un homme dont la polémique restera comme un des plus étonnants spécimens de la mauvaise foi.

Dût-il bondir plus haut encore, j’ajouterai que le F▽ Hubert est une preuve vivante des prestiges de Lucifer en ce siècle ; car il jouit du don de bilocation. Non pas une fois, mais plusieurs, il lui est arrivé de se trouver en des différents endroits en même temps. Et que l’on ne dise pas que je prêche ici le luciférianisme : ce que j’ai admiré autrefois pensant dans le sens palladique ; aujourd’hui je le comprends en chrétienne ; il est évident que c’est le démon qui prend la forme du F▽ Hubert pour le faire paraître en plusieurs lieux à la fois. Sept ou huit cas de bilocation du F▽ Hubert sont relatés aux procès-verbaux de la Mère-Loge le Lotus de France, Suisse et Belgique.

Le F▽ Hubert fut donc informé de la décision prise par les officiers du Triangle Saint-Jacques. Inopinément, il se présenta à la réunion dans laquelle on devait examiner les moyens de me faire disparaître et procéder au choix d’un ou plusieurs ultionnistes.

Sa situation de grand-maître provincial pour la Province Triangulaire n°52 lui ouvrait toutes portes.

Étant tout l’opposé d’un homme sanguinaire, mais voulant néanmoins faire prévaloir sa charité en s’appuyant sur les règlements, il exerça très habilement soit de veto sans se compromettre :

— Je m’oppose de façon absolue, dit-il, à l’exécution de la Chevalière Masanec ; vous n’avez même pas le pouvoir de voter sa radiation. C’est au Triangle les Onze-Sept, de Louisville, seul, qu’il appartient de se prononcer, et c’est à cet Atelier du Rite Suprême que vous devez adresser un rapport des faits. Les prescriptions de la Constitution sont formelles.

Et il leur lut la Constitution, en faisant le plus grand éloge de la divine sagesse qui l’avait inspirée.

Il réussit ainsi à calmer les impatients, et, sans aborder le fond de la question, en se cantonnant sur le terrain des règlements, toujours doux et souriant, parlant comme un bon papa qui ne veut pas la discorde dans sa famille, grondant paternellement le président B*** et la grande-maîtresse Sophia, il se retira en disant qu’il me couvrait de sa protection.

Ai-je raison de dire que je dois la vie au F▽ Esprit Hubert ?… Il savait fort bien, j’en ai la conviction, qu’au Triangle les Onze-Sept, fondé par mon père, je ne comptai que des amis. Grâce à lui, les Saint-Jacques furent obligés de revenir sur leur décision ; un rapport au Triangle de Louisville fut rédigé, séance tenante. Je n’ai pas besoin d’insister pour dire que je n’y étais pas ménagée : ma radiation immédiate y était demandée expressément, comme une absolue nécessité qu’aucun palladiste ne pouvait méconnaître.

Quant à moi, tenue au courant, non par le F▽ Hubert, mais par une Sœur officière du Triangle Saint-Jacques, je quittai Paris et la France sans perdre de temps, et quoique les affaires de famille qui m’avaient amenée en Europe ne fussent pas complètement réglées ; j’arrivai à Louisville en même temps que le rapport de mes adversaires.

Le Courier-Journal, de Louisville, a dit récemment quelle était l’importance du Triangle The Eleven-Seven (les Onze-Sept) du vivant de mon père et quelle extension il n’a cessé de prendre[1]. À cette époque, il n’avait pas moins de 500 membres actifs.

Dès mon arrivée, une réunion fut convoquée ; elle eut lieu le 16 avril, en Parfait Triangle, c’est-à-dire que seuls y assistèrent les initiés qui avaient le grade de Mage Élu. Le grand-maître N. P., qui avait succédé à mon père, présidait.

Ce que je dis a été rapporté exactement.

Le grand-maître des Onze-Sept fit donner lecture de la dénonciation du Triangle parisien et me demanda si je reconnaissais les faits.

Je répondis affirmativement, et je développai mon appréciation. « Je suis une luciférienne vraie, dis-je en substance, une luciférienne de cœur et de raison. » je fis allusion au Baphomet, sur lequel mon oncle m’avait donné des explications ; car je ne lui avais pas caché, à mon retour, ma surprise au sujet de cette grossière icône. « Chers Frères, dis-je, vous avez adopté cette image comme un symbole sacré, et ce n’est pas le moment de discuter à cet égard. Mais vous n’ignorez pas que les adonaïtes prétendent que ce symbole est un vain simulacre, et pourtant, si une de ces représentations de la divinité naturelle tombait entre leurs mains, ils la mettraient en pièces avec fureur. Ce serait là une contradiction d’opinion ; car on ne se met pas en

colère contre ce que l’on pense n’être rien, n’être qu’une inerte matière. Laissons donc les folies aux adonaïtes, et ne les imitons pas. Propageons la vérité per une action lente, douce et sûre ; tirons peu à peu les profanes de l’ornière de l’erreur ; c’est ainsi que nous établirons progressivement le culte du Dieu-Bon sur tout le globe, c’est ainsi que nous amènerons les peuples à nous. Mais pas de violences absurdes ! pas d’insanités chez nous qui prêchons la logique et le bon sens ! »

Avec grande amitié, le F▽ N. P. me dit que mon principal tort avait été de demander au Triangle Saint-Jacques l’initiation au grade de Maîtresse Templière, et que, lorsque la proposition me fut faite, j’aurais dû ne pas me hâter et, d’abord, consulter mes amis de Louisville. Il ajouta que je mettais, par cela, le Haute-Maçonnerie palladique dans un immense embarras. Il ne désapprouvait pas ma manière de voir, en ce qui concernait les profanations d’hosties ; mais il dit que, si chez les Onze-Sept ces pratiques n’étaient pas en usage, c’est parce qu’au Kentucky le palladisme se recrute exclusivement chez les protestants, qui ne croient pas à l’Eucharistie. À son avis, ce qui est inutile pour une récipiendaire n’ayant jamais cru à la présence réelle du Dieu des catholiques dans l’hostie, n’est pas une épreuve à négliger, quand il s’agit

d’une récipiendaire élevée dans les croyances du catholicisme romain. On avait donc eu tort, selon lui, de ne pas tenir compte, à Paris, de l’éducation que j’avais reçue ; mais j’étais allée trop loin en ne pas donnant aux Saint-Jacques une satisfaction qui aurait dû n’avoir pour moi aucune importance.

En somme, le grand-maître était fort ennuyé, fort perplexe ; il m’aimait bien et ne voulait pas se déclarer contre moi, ni blâmer officiellement les Saint-Jacques.

Cependant, il fallait se prononcer sur la requête du Triangle parisien ; ma radiation était énergiquement demandée.

Moi, non seulement j’entendais demeurer palladiste, mais encore je réclamais ma proclamation comme Maîtresse Templière, attendu, dis-je, que j’avais prêté mon serment me vouant à Lucifer et que je n’en rétractais pas un mot.

Une discussion s’engagea entre les Mages Élus de Louisville. Le F▽ N. P. avait un rival qui avait convoité la succession palladique de mon père, et quelques uns étaient ses partisans. Le grand-maître était d’avis de ne pas me radier, mais de renvoyer le vote à trois mois, dans l’espoir que, par mon oncle, on me déciderait à donner ma démission : au moyen de cette solution, pensait-il, tout serait sauvegardé ; les Saint-Jacques n’insisteraient plus, et mes amis de Louisville me garderaient amitié dans tes relations profanes. Plus tard, quand l’émotion que j’avais causée à Paris se serait apaisée, on obtiendrait un décret d’Albert Pike, et on me réintégrerait. Mais, par esprit d’opposition à N. P., son rival R. T. combattit cette proposition et parla vivement en faveur d’un vote immédiat. Moi, je voulais aussi qu’on en finît tout de suite, et encore une fois je réclamai mon maintien et ma proclamation.

Alors, on me lut l’article 327 de la Constitution, en vertu duquel l’Atelier palladique, qui a commencé une initiation à un grade quelconque et qui l’a interrompue, peut seul, s’il y a lieu, c’est-à-dire si le récipiendaire est enfin reconnu acceptable, reprendre le cérémonial et donner la consécration d’abord refusée.

À cela je ne pouvais rien répondre ; ma contrariété était des plus vives.

Un premier vote, à mains levées, repoussa le renvoi à trois mois. La situation devenait inextricable ; en effet, presque tous étaient, au fond, contre la radiation, et les quelques uns qui inclinaient à donner satisfaction à la requête des Saint-Jacques ne m’étaient pas hostiles, à moi personnellement ; mais leur but était de mettre N. P. dans une fausse position, puisque, sans donner un blâme absolu à la requête, il avait dit qu’il fallait néanmoins l’écarter ; et, s’ils avaient réussi, N. P. aurait été moralement obligé de démissionner comme grand-maître et de céder la place à leur candidat R. T.

Je sentais bien que je courais le risque d’être victime d’une intrigue qui ne me visait pas. La réunion était dans une confusion inexprimable. On ne savait à quel parti s’arrêter. J’observais tout, sans rien dire, maintenant, prête à un coup d’éclat. En moi-même, je me disais : « Je vais être sacrifiée avec les plus belles guirlandes de roses, si je ne m’impose pas à eux ; non seulement je ne dois pas faiblir, mais il me faut les dominer ! »

Enfin, le F▽ R. T., énervé, dit :

— Le scrutin ! le scrutin !

— Quel scrutin ? fis-je en bondissant… Le scrutin secret ?… Vous oseriez voter au scrutin secret ?

— C’est la règle, répondirent quelques voix.

Je m’élançai vers l’urne, je me plaçai devant, et je m’écriai :

— Ce que vous allez voter, c’est mon maintien ou ma radiation ; il n’y a pas d’autre solution possible… Allons ! que chacun ait le courage de son opinion !… Je ne veux pas des fleurs dont vous vous proposez de me couvrir, tout en adoptant les conclusions de la requête du Triangle Saint-Jacques… Non, mes Frères, pas de milieu ou la radiation, avec sa signification de désapprobation complète, ou mon maintien, qui seul prouvera que vous m’aimez !… Quand il s’agit de voter sur l’expulsion imméritée de la fille du fondateur de ce Triangle, les sentiments de chacun doivent se montrer en pleine lumière… Que ceux qui sont contre moi prennent donc la responsabilité de leur vote à front découvert !… Je demande au grand-maître d’inviter les Frères qui veulent ma radiation, à lever la main.

— La règle du scrutin secret n’est pas absolue, dit le F▽ N. P… Que les Frères qui sont d’avis d’adopter les conclusions de la requête du Triangle Saint-Jacques, orient de Paris, tendant à la radiation de la Chevalière Masanec, veuillent bien lever la main.

Pas une main ne se leva.

Alors, je me sentis toute émue ; le grand-maître l’était aussi. Je me jetai dans ses bras. En l’embrassant, j’embrassais tous mes Frères de Louisville.

Diana Vaughan




Le fascicule n°22 paraîtra le 15 avril.

Un de ses articles sera consacré à l’abbé Garnier.

On y verra également un document démontrant le palladisme de M. Paul Rosen sous le nom de Moïse Lid-Nazareth.



  1. Au Kentucky, pays de ma famille paternelle, on a bien ri, parmi les protestants, des doutes semés en Europe sur mon existence. Le Courier-Journal, quotidien, qui est le principal organe du parti démocratique au Kentucky, qui est le premier journal de Louisville, a consacré plusieurs articles au Palladisme dans l’Union et, en particulier, dans l’État. À la suite des premières notes me concernant, le rédacteur en chef a en une entrevue avec le sociétaire du Triangle, habitant la ville même. Ce Frère, qui est un important commerçant, m’a écrit que le journaliste fut fort surpris, lorsqu’il reçut sous le sceau du secret la confidence qu’il était palladiste ; c’est par cet ami intime de ma famille que le Courier-Journal eut les renseignements complémentaires qu’il a publiés dans son numéro du 14 janvier 1897. L’ami secrétaire n’a commis qu’une erreur : il a cru, ainsi qu’on l’a répété à mon oncle, que je suis actuellement dans un couvent ; mais tout le reste de sa communication est exact.
    M. Tardivel, dans la Vérité, de Québec (n° du 20 mars), vient de donner quelques extraits de ce second article, lequel ne tient pas moins de 188 lignes de petit texte dans les colonnes du Courier-Journal.
    Voici les passages cités par M. Tardivel : « L’article publié dernièrement dans le Courier-Journal au sujet de Diana Vaughan, qui habitait autrefois Louisville, et qui s’est convertie des doctrines du Luciférianisme ou Palladisme à celles du Catholicisme a fait quelque bruit parmi les habitants de Louisville, qui ne sont pas au courant des étranges croyance des Lucifériens… Un des principaux palladistes nous disait hier qu’il y a 3,000 personnes à Louisville qui croient au Palladisme… Il y a un demi-million de palladistes en ce pays (les États-Unis), dit-il, et à l’époque où le père de Diana Vaughan, le Triangle de Louisville, les Onze-Sept, était le plus célèbre de l’univers. Le Triangle Phébé-la-Rose, de New-York, n’est venu qu’en second lieu… Quelques uns des parents de Diana Vaughan habitent encore cette ville ; mais il ne m’est pas permis de dire leurs noms… J’ai connu Miss Diana Vaughan intimement, pendant sept ou huit ans, pour l’avoir rencontrée dans les sociétés secrètes en Europe et à New-York. J’ai eu avec elle mes dernières entrevues au Louisville-Hôtel, en cette ville, et dans un autre endroit de cet État en 1894. Elle est maintenant dans un couvent de France. » En outre, le F▽ Secrétaire des Onze-Sept a formellement confirmé que « l’esprit Asmodée était l’ange palladique de Diana Vaughan. »
    De son côté, la Revue Catholique, de Coutances (n° du 26 février 1897), a cité aussi l’article du Courier-Journal et dit ceci, très exact : « Nous savons, d’autre part, que Miss Diana Vaughan a reçu communication de cet article et qu’elle a déclaré savoir gré à son ex-Frère en palladisme de n’avoir pas cité des noms ; en dehors de son oncle paternel, les quelques parents qu’elle a au Kentucky appartiennent à la descendance de sa grand’mère paternelle, qui se remaria ; ils sont, par conséquent, d’un degré éloigné et ne portent pas le même nom ; mais ils sont tous palladistes. Elle n’a aucun lien de parenté, a-t-elle déclaré encore, avec le docteur Vaughan, maçon du Rite Écossais, non palladiste, bien connu au Kentucky. »
    Très utile à reproduire encore, cette statistique absolument exacte donnée par la Revue Catholigue, de Coutances :
    « Les lecteurs français s’étonneront de ce chiffre d’un demi-million de palladistes aux États-Unis ; ils croiront à une exagération due à la vantardise du luciférien interviewé par le Courier-Journal. Il est donc utile de rappeler que les sociétés maçonniques pullulent dans l’Amérique du Nord.
    « Le World-Almanac, qui se publie à New-York, donne la statistique actuelle de celles de ces sociétés qui ne cachent pas leur existence. Les chiffres, publiés officiellement pour cette année 1897, sont effrayants.
    « Aux États-Unis, les francs-maçons de la juridiction des diverses Grandes-Loges sont 785,945, dont 18,000 au Kentucky. Les affiliés à la Royale-Arche, 167,881. Le Rite Écossais publie en tout sept noms de hauts chefs, mais ne fait pas connaître son effectif, qui est pourtant considérable. Les Chevaliers Templiers, dont le grand-maitre, le F∴ Thomas Warren La Rue, réside à Maysville (Kentucky), ne sont pas moins de 106,670. Les Nobles du Mystique-Autel (Nobles of the Mystic-Shrine), rite luciférien musulman, dont l’Hiram est le calife Ali, cousin de Mahomet, sont 42,000. L’Ordre des Sœurs de l’Étoile d’Orient, sorte d’Académie de Sœurs Maçonnes de New-York et Brooklyn, compte 10,000 dames et demoiselles. L’Ordre androgyne des Bons Templiers Indépendants, qui se recrute dans les Loges Symboliques et les Chapitres de Royale-Arche, accuse le total de 403,849 Frères et Sœurs âgés de plus de 21 ans, et 169,804 jeunes filles (la juvénile-branche). Les Fils de la Tempérance, récemment excommuniés par le Saint-Siège, sont 23,159. Les Chevaliers de Pythias (fondation d’Albert Pike) atteignent le chiffre formidable de 464,559, dont 5,834 au Kentucky ; ils sont 21,000 à New-York. L’ordre du Royal-Arcanum, dont le Suprême Conseil siège à Boston, a un effectif de 188,818 membres, dont près de 20,000 Mages de la dernière initiation. L’Ancien Ordre des Travailleurs Unis, 361,562 membres. L’Ordre des Macchabées, 241,000. Les Modernes Forestiers d’Amérique, 200,000. Les Chevaliers et Dames de l’Honneur, 81,000. Le Parfait Ordre des Hommes-Rouges, 173,000. Les Royaux Templiers de la Tempérance, 20,000. Les Chevaliers de l’Aigle d’Or, 59,224. Les Travailleurs de l’Univers, 69,966, etc., etc., etc. Quant aux Odd-Fellows, il atteignent aux États-Unis le nombre de 798,607, pour la juridiction de la Souveraine Grande Loge, et 118,500 pour la juridiction de l’Ordre Uni (hommes de couleur, c’est-à-dire Nègres), les Patriarches odd-fellows nègres, initiés du plus haut grade se livrant à toutes les pratiques de la sorcellerie, sont 2,100. Dans la juridiction de la Souv∴ G∴ Loge, les Patriarches-Mages sont 15,428, et lus Sœurs Rébecca, 143,251. L’Ancien Ordre Uni des Druides compte 15,000 membres. L’Ordre indépendant des Réchabites a 3,200 hauts-initiés américains, qui dirigent 231,800 membres sur le globe. Les loges juives ont trois groupements principaux : les B’naï-Bérith indépendants, 31,750 ; les B’naï-Bérith Perfectionnés, 2,454 ; les Bérith-Abraham, 11,426.
    « Quand on connaît ces chiffres, on comprend aisément que le nombre d’un demi-million de palladistes, indiqué pour les États-Unis, n’a rien d’exagéré ; attendu que les lucifériens se recrutent au milieu de toutes ces sociétés anticathollques dont on vient de lire l’énumération. »