Traduction par Ernest Charrière.
Hachette (p. 1-18).

MÉMOIRES
D'UN
SEIGNEUR RUSSE.

I.
Khor et Kalinytch. Serfs russes dans les campagnes.

Tout voyageur à qui il est arrivé de passer du district de Bolkhovski dans celui de Jizdrinsk a dû être frappé de la différence tranchée qu’on remarque entre les gens du gouvernement d’Orel et ceux du gouvernement de Kalouga. Le paysan d’Orel est petit, cassé, morose ; il vous regarde en dessous ; il vit dans de méchantes huttes de tremble, va à la glèbe, n’a aucun commerce, aucune industrie, mange on ne sait quoi et se chausse d’écorce tressée. Le paysan de Kalouga paye une redevance à son seigneur pour avoir sa liberté d’action, habite des chaumières de pin, est grand de stature, a le regard ferme, l’air placide, la face lisse et blanche ; il trafique d’huile et de cambouis, et se chausse de bottes les dimanches et fêtes. Un village de la partie orientale du gouvernement d’Orel est ordinairement situé au milieu de champs labourés, près d’un ravin semé de mares fangeuses. A l’exception de quelques tristes aubiers qui croissent à l’abandon, et de deux ou trois maigres bouleaux, vous pourrez parcourir les plus grandes distances sans rencontrer un arbre. Les chaumines sont côte à côte et se soutiennent l’une par l’autre, toutes’également couvertes de paille moisie. Un village kalougien, au contraire, est communément situé à la lisière d’un bois ou d’un bocage ; les chaumières se tiennent espacées et droites, elles ont des toits de planches ; les portes ferment hermétiquement ; la palissade ne plie pas de vétusté, elle ne tombe pas çà et là en débris vermoulus, ouvrant ses brèches à tout porc de passage. Pour le chasseur, c’est le gouvernement de Kalouga qui est le bon. Dans le gouvernement d’Orel, les derniers bois, les dernières landes buissonneuses auront disparu d’ici à cinq ans ; de marécages, on n’en a déjà plus mémoire ; tandis que dans le gouvernement de Kalouga, il n’est pas rare de trouver des clairières ayant plusieurs centaines de kilomètres d’étendue, des marais qui en comptent plusieurs dizaines de surface ; on y rencontre encore le noble coq de bruyère, la grive bonasse, et l’agile perdrix, qui, par son vol brusque et saccadé, égaye et étonne à la fois chien et chasseur.

Comme je parcourais, en qualité de chasseur, une partie intéressante du district de Jizdrinsk, je rencontrai dans la campagne un gentillàtre campagnard Kalougien avec qui je liai conversation ; je ne fus pas longtemps sans savoir qu’il s’appelait Poloutykine et avait la passion de la chasse, d’où je conclus a l’instant que ce devait être un excellent homme. J’avouerai pourtant qu’il n’était pas sans quelques petites faiblesses ; par exemple, il avait la manie de faire demander la main de toutes les riches demoiselles à marier de la province, et notez qu’après s’être vu fermer le cœeur de la fille et la maison du père, il racontait expansivement sa déconvenue à ses amis et connaissances, sans discontinuer d’envoyer aux parents des filles refusées des paniers de pêches vertes et autres fruits peu fondants de son jardin ; ajoutons-qu’il aimait plus que de’raison à répéter les quatre ou cinq anecdotes dont se composait tout son répertoire de grande gaieté, qu’il n’avait pas l’art de rendre communicative ; il louait avec extase les œuvres de je ne sais plus quel auteur profondément inconnu ; il bégayait, appelait son D’UN SEIGNEUR RUSSE. 3

chien Astronome, quoique je n’aie jamais remarqué que l’animal s’occupât des étoiles ; il disait stapendant pour cependant, et avait déplorablement introduit chez lui la cuisine française, dont tout le secret, au dire de son cuisinier qui me l’a révélé, consistait à changer du tout au tout le goût particulier de chaque aliment. Ainsi, ses viandes avaient un goût de poisson, son poisson un goût de morilles, ses macaroni sentaient la poudre à canon. Il ne tombait jamais dans les potages de cet artiste une carotte ou un navet qui n’eût la forme d’un rhombe ou d’un trapèze. A part donc ces légers travers, M. Poloutykine était un homme d’un bon et sur commerce.

Dès le jour même de notre première rencontre, M. Poloutykine m’invita à venir passer la nuit chez lui sans façon.

Il y a d’ici chez moi, ajouta-t-il, environ cinq verstes’, faire tout ce chemin à pied nous fatiguerait trop ; nous passerons chez Khor. •

— Qu’est-ce que ce Khor ?

— Eh mais, un de mes paysans. Il demeure tout près d’iCi. ~•,

Nous nous rendîmes donc chez Khor, qui demeurait en plein bois, dans un assez grand espace nivelé, séché et cultivé, où s’élevait une bonne maison rustique en bois de sapin avec les dépendances, cours, hangars, étables, puits, etc. La maison d’habitation avait devant elle un long perron couvert soutenu par quatre minces piliers. Nous fûmes reçus à Yentrée par un beau grand gaillard de vingt ans. Ah ! c’est toi, Fédia ! dit le maître ; Khor est à la maison ?.

— Non ; Khor est allé avec sa charrette à la ville, répondit le gars en souriant et en nous découvrant une rangée de dents blanches comme la neige. Voulez-vous que j’attelle la télejka ’ ’ ?

— Oui, mais d’abord donne nous du kvass ’. » I. La verste russe équivaut à. peu près à notre kilomètre. 2. Chariot découvert et non suspendu. · 3. Boissonvulgaire des Russes, aigrelette et rafraîchissante. I’ Les parois de la chambre étaient tout naïvement les rondins dont la maison était construite, mais taillés à la hache et blanchis à la craie, sans étaler ces grossières images de Souzdal collées à la mie de pain, comme on n’en voit que trop dans les chaumières, où elles attirent la poussière, les insectes ailés et autres ; mais dans l’angle d’honneur, devant une image sainte enchâssée en argent massif, s’élevait la flamme d’une lampe consacrée ; une table de tilleul qui était au-dessous, en avant d’un large banc, avait été récemment raclée et lavée avec soin. Dans les interstices des rondins et autour du cadre des tenêtresj on ne voyait courir ni ’la blatte agile, ni le grillon joyeux, ni le cafard pensif.

Le jeune garçon reparut armé d’une grande cruche blanche pleine d’un kvass frais et mousseux, et d’un énorme quartier d’un pain de froment que vint aussitôt rejoindre une douzaine de concombres salés nageant dans une gamelle de bois. Tout cela fut mis en bon ordre sur la table, et le gaillard alla s’épauler contre le montant de la porte, ’ d’oü il nous regardait, le visage tout épanoui de bonne humeur. Nous eûmes à peine achevé notre modeste collation, que nous entendîmes la télejka rouler en cahotant, dans la cour. Nous sortîmes à l’instant. Un jeune gars de quatorze ou quinze ans, au teint frais et à la chevelure tout en boucles, était carrément assis sur le siège, fort occupé à contenir l’ardeur d’un jeune cheval pie. Autour du chariot se tenaient six jeunes géants tous très-ressemblants à Fédia. ·

Ce sont les fils de Khor, dit mon compagnon.

-oui, tous Khoriaux, ajouta Fédia, qui nous avait suivis au perron ; mais nous ne sommes pas tous ici : Potapp est · au bois, Sidor mène le père. Qà, toi, Vacia, roule crânement, c’est le bârine’que tu mènes. Seulement prends bien garde aux bosses et aux creux, et là retiens la bête, sans quoi tu nous la gàteras, et, ce qui est pis, tu feras danser la cervelle du seigneur. ··

Les autres Khoriaux parurent tout réjouis des railleries de

l. Le maître, le seigneur. l r

D’UN SEIGNEUR RUSSE. 5

Fédia. Dès que nous eûmes pris place, M. Poloutykine s’ég cria d’un ton solennel :

Hé ! qu’on place ici Astronome ! ·· Fédia prit plaisir à soulever en l’air le chien un peu surs pris, médiocrement charmé, et le déposa à nos pieds sous le siège, qui était formé d’une planche étroite. Vacia lâclia la j bride. A

Nous roulions depuis un’quart d’heure. Voici mon comptoir, me dit Poloutykine en me montrant I une maisonnette fort basse. Voulez-vous entrer ? — Volontiers.

I — Le local est vacant, mais vous allez voir quelle eau fai là. »

La maison se composait de deux chambres vides. Un vieux gardien borgne accourut.

Bonjour, Miniaitch ; apporte-nous de l’eau, »· dit le maître.

j Le vieillard sortit et’reparut avec une bouteille d’une eau très-pure et très-froide, et deux verres ; c’était de l’eau de source. Nous en bûmes chacun un verre, et le vieillard nous saluait pendant l’opération, comme si, pour nous remercier d’avoir songé à son nectar, il faisait à ses précieux hôtes mille souhaits de santé et de joyeuse vie. çà, à présent, nous pouvons nous remettre en route, me dit mon compagnon. C’est ici que j’ai vendu, et bien vendu, au marchand Allélouief quatre arpents de forêt. · » Une demi-heure après nous entrions dans l’enceinte de l’habitation seigneuriale.

Dites-moi, je vous prie, dis-je à Poloutykine en soupant, d’où vient que Khor a su se faire une closerie où il vit séparé de vos autres paysans ?

— C’est que j’ai en lui un gaillard très-avisé ; il y a vingt-cinq ans, sa chaumière brûla ; il vint trouver feu mon père, et lui demanda la permission, moyennant une redevance très-acceptable, d’aller se faire dans une éclaircie du bois, à portée d’un marais, une habitation pour lui et pour la famille que Dieu voudrait bien lui donner. Et pourquoi aller vivre dans un marécage ? dit mon père. — Ce n’est rien ; vous l’exigerez plus de moi aucune corvée ; fixez vous-même équitablement ma redevance. — Cinquante roubles[1] par an. — C’est bien ; merci. — Mais point de grâce à espérer de moi sur cette somme. — Vous serez payé aux termes. » Et il est allé se créer le clos que vous avez vu ; tous les autres paysans l’ont alors surnommé Khor (le putois), et le nom lui est resté.

— Il y a fait ses affaires ?

— Parfaitement. Il me paye aujourd’hui cent bons tselkoves[2] haut la main, et je l’ai déjà prévenu plus d’une fois que j’exigerai davantage, à moins qu’il ne veuille se racheter ; c’est à quoi je l’engage très-vivement, mais il jure ses grands dieux qu’il n’a pas le premier sou pour cela, l’imbécile. A d’autres !... »

Le lendemain, de bonne heure, après le thé, nous partîmes pour la chasse. Poloutykine reprit le chemin de la maisonnette qu’il appelait son comptoir et cria en approchant : « Kalinytch !

— Je suis à vous, monsieur ! répondit une voix ; j’attache mes laptis[3]. »

Nous mîmes la cariole au petit pas, et comme nous débouchions du village voisin, nous fûmes rejoints par un homme de quarante ans, maigre, haut de taille, la tête petite et déjetée, non en avant, mais en arrière. L’air de bonhomie qui se jouait sur son visage hâlé et semé de verrues me plut dès le premier coup d’œil. C’était Kalinytch. J’ai su plus tard que cet homme suivait chaque jour son seigneur à la chasse, portant sa gibecière et parfois son fusil ; il en savait long sur les oiseaux ; c’est lui qui courait chercher de l’eau fraîche, ramasser les baies du bocage et faire avancer la drochka[4]; sans lui il n’y aurait pas eu de chasse possible pour un sybarite tel que M. Poloutykine. Outre que Kalinytch avait des nerfs d’acier, c’était un homme d’un l

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caractère doux et enjoué, qui chantonnait sans cesse en ’ j jetant des regards rapides de vingt côtés à la fois ; il parlait un peu· du nez, clignait en souriant de ses yeux bleu clair et portait souvent la main à sa barbe disposée en pointe à la ; mode juive. Il marchait à grands pas sans nulle apparence de hâte, s’appuyant très-légèrement sur un long et mince bâton. Dans le cours de la journée nous échaugeâmes quelques paroles, lui et moi ; il me rendait sans servilité une foule’de j petits services ; mais dans ses allures autour de son maître, l’homme montrait toutes les prévenances d’une. vieille bonne. La chaleur du jour nous étant devenue insupportable, il nous mena à sa case, en plein fourré ; il nous introduisit dans un f carré où séchaient appendues des herbes aromatiques recueil-Llies en bouquets ; il nous fit deux lits de foin frais, puis il se passa par-dessus la tête une espèce de sac en filet, pritjun couteau, un pot et un bout de latte amincie, et se rendit à sa ruche pour nous conquérir un rayon de miel. Nous bûmes un beau miel fluide et ambré comme nous aurions bu de l’eau de source, et nous nous endormîmes au bourdonnement des abeilles ·et au frôlement des feuilles du bois. Un petit coup de vent me réveilla.... J’ouvris les yeux et vis Kaliuytch assis sur le seuil de la porte en trou verte, essayant de faire avec son couteau des cuillers de bois pour de grandes occasions comme celle-ci. Je contemplai avec ravissement pendant un gros quart d’heure ce bon visage d’homme simple et primitif, ce front serein comme un beau coucher de soleil d’automne. M. Poloutykine étant venu à s’éveiller à son tour, nous partîmes. J’avais été le mieux partagé dans la hutte, grâce à un genre de jouissance que je sais me donner : il est délicieux, à mon sens, après une longue course et un sommeil de chasseur, de demeurer, les yeux ouverts, immobile sur une excellente couche de foin ; le corps est doucement affaissé au repos, le visage a le rouge de la pivoine avec un grand éclat de vie, l’œil est tout chargé d’une molle et voluptueuse paresse. Nous recommençâmes à battre les champs et les taillis. A notre rentrée, le soir, nous soupàmes comme tout A le monde ne soupe pas, même à la campagne. Tout en soupant je parlai de nouveau de Khor, et surtout de Kalinytch ; r Y

Si MEMOIRES

Kalinytch est un brave homme, un bon paysan, très-p serviable. G’est dommage qu’il ne puisse pas se mettre enménage ni s’arranger une chaumière ; je le tire toujours à moi ; chaque jour il me suit à la chasse ; où prendrait-il le moment de se faire un petit chez soi, n’est-ce pas ? — Sans doute. »

J Nous allàmes nous coucher.

Le lendemain, M. Poloutykine dut se rendre à la ville avec son voisin de campagne, nommé Pitchoukof. Le voisin Pitchoukof avait, en labourant son champ, gagné quelque peu de.terrain, et c’était entre eux matière à contestation. Je ne sais s’ils partirent bons amis ; moi, je chassai seul ce jourla.·Le soir, je pris machinalement le chemin du clos de Khor. Je trouvai sur le seuil de la chaumière un vieillard grisonnant et demi-chauve, de petite taille, mais large d’é· paules et bien constitué : c’était Khor en personne. J’observai curieusement ce brave homme, dont le galbe rappelle la plupart des bustes de Socrate : front très-haut et bosselé, petits yeux pénétrants, nez épaté. Il me lit entrer chez lui. Fédia me servit du lait etdu pain noir. Khor s’assit sur lebanc qui faisait a peu près le tour de la chambre ’. Et en passant doucement la main sur les ondes de sa barbe, il se mit àcauser avec moi. Il me parut avoir une idée bien arrêtée sur sa dignité d’homme de sens ; il parlait et se mouvait lentement, « et de temps en temps un mouvement de sa lèvre, répété par sa longue moustache, trahissait un léger sourire. Nous causàmes de semailles, de moissons, du genre de vie, du paysan.... Il parut être de mon avis sur tous les points. Bientôt cela me sembla fastidieux ; je sentis que je perdais, moi, de ma dignité dans une causerie sans but. Khor était y discret et réservé ; il ne croyait pas qu’il fût prudent ou convenable de se montrer autrement. Voici un échantillon de notre conversation :

çà, Khor, lui dis-je, pourquoi rester serf au lieu de te racheter’Z.

— Pourquoi me rachèterais-je ? Je connais maintenant W

I 1. Fixé au mur comme dans toutes les chaumières russes. D’UN SEIGNEUR RUSSE. 9

notre maître, je sais quelle redevance j’ai à luipayer ; c’est un bon seigneur que le nôtre.

— Il vaut toujours mieux vivre en liberté, dis-je à demivoix. »

Il me regarda un peu de travers et marmotta : Ah ! oui.

— Eh bien, pourquoi donc ne pas s’aiïranchir ? » Khor baissa la tête et la releva en disant : ’ •· Pour s’ai’franchir il faut de l’argent, monsieur ; je n’en, ai pas.

— Allons donc, ·mon vieux !...

— Voilà Khor devenu homme libre, ajouta-t-il à demivoix et comme s’il se parlait à lui-même ; quiconque se rase le menton peut avec Khor trancher du supérieur. — Tu te raseras, et tout sera dit.

— Qu’est-ce que la barbe ? une herbe ; cela se fauche., — Eh bien donc ? ·

— Khor passera tout droit dans le corps des marchands, aux marchands il fait bon vivre, et ils ont gardé leur barbe. — Justement tu n’es pas novice en commerce, je suppose ? — Oui, un peu d’huile, un peu de cambouis.... N’ordonnez-vous pas qu’on vous attelle un chariot ? » A ce mot dit d’un ton parfaitement naturel et officieux, je pensai : Voilà un gaillard qui ne manque ni d’esprit ni de finesse. ·· Non, lui dis-je, non, il ne me faut point de chariot ; demain je chasse autour de ta closerie, et en attendant, si tu veux bien le permettre, j’irai prendre mon sommeil dans ton grenier au foin.

— Très-honorés nous sommes ; mais seras-tu a ton aise sur le foin ? Les femmes vont étendre un drap de lit et mettre un oreiller. Eh ! les babas ’ ! cria-t-il en se levant de sa place ; ici les babas ! et toi, Fédia, va avec elles ; les femmes sont une espèce si bête ! »

Un quart d’heure après, Fédia, pourvu d’une lanterne, me conduisit dans le hangar au foin ; je m’étendis avec déy I. En Russie les classes inférieures portent la barbe. 2. Femme dans la nuance méprisante de commère. ’lO MÉMOIRES

lices ; mon chien s’enroula à mes pieds ; Fédia me souhaita une bonne nuit et rabattit sur lui la porte du hangar, qui · J fermait à merveille. Je fus assez longtemps sans m’endormir. La vache approcha de la porte et mugit énergiquement à deux reprises ; mon chien se souleva pOur lui dire son fait, sur quoi elle s’éloigna ; un pourceau lui succéda en fouillant de sa hure je ne sais où ; un cheval qui se trouvait dans mon voisinage se mit à mâcher bruyamment le foin de son râtelier, puis à souffler et à s’ébrouer ; moi, à la fin, je m’endormis.

VA l’aurore je fus réveillé par Fédia :’ce jeune gars me plaisait infiniment, et, autant que je l’ai pu remarquer. il était le favori du vieux Khor ; ils s’amusaient à se plaisanter mutuellement. Le vieillard vint à ma rencontre. Je ne saurais dire si c’était parce que j’avais passé la nuit sous son toit ou pour une autre cause, mais Khor fut avec moi beaucoup plus empressé que la veille.

On t’a mis le samavar’, me dit-il cordialement, viens prendre le thé. »

Nous nous mîmes ensemble a table. Une femme robuste, l’une des belles-filles du vieux Khor, apporta un pot de lait. Tous les fils entrèrent successivement dans la chambre. Quels superbes gaillards tu as là ! dis-je au vieillard. — En eiïet, dit Khor, en grignotant un petit morceau de sucre, il me semble que nos gars n’ont pas à se plaindre de moi ni de leur mère.

— Et tous vivent avec toi ? «

— Tous. Il leur plaît ainsi, et je ne me plains pas plus d’eux qu’ils ne se plaignent de moi.

— Sont-ils tous mariés ? t

—Voilà un vaurien qui ne se décide pas, répondit Khor, en montrant Fédia appuyé, selon son habitude, contre la porte. Vaska, lui, est encore jeune ; rien ne presse.. —Et pourquoi me marierais-je ? repartit Fédia ; je suis bien comme je suis. Je ne sais pas même pourquoi on prend une femme.... pour hurler à deux ? quoi ! ’, 1. Bouilloire à thé, pourvue d’un foyer et d’une cheminée. D’UN SEIGNEUR RUSSE. H

—La, là, mon drôle, nous te connaissons ; je t’ai vu des bagues d’argent aux doigts. Tu aimes à flairer comme un bouquet les filles de service’du maître, là-bas : « Oh ! le vi-Iain, voyez donc ! me laissera-t-il tranquille !... ·· ajouta ie A vieillard en imitant la voix des filles de service de Poloutykine : G’est bien, c’est bien, M. Blanches-mains ! » — Qu’est-ce qu’il y a de bon dans une femme ? — Une femme, dit gravement Khor. c’est le serviteur le plus proche de l’homme ; ce sont deux bras travailleurs qui, ajoutés aux siens, font quatre bras ; c’est un domestique.• - Qu’ai-je a faire d’un domestique à moi ? — C’est que tu aimes à remuer ton feu avec les mains du prochain. On sait ce que vous valez, vous autres gens sans femme.

—Eh bien ! marié-moi donc, si c’est comme ça. Eh bien ! quoi ? tu ne dis rien la-dessus ? — Assez, mauvais plaisant, assez ; tu vois bien que nous fatiguons le bàrine. Je te marierai, sois-en sûr. Mais toi, monsieur, pardonne : c’est un grand enfant, un dadais, qui. n’a encore que du duvet au menton, et pas un poil de barbe. Le moyen de lui parler raison ! »

Fédia branla la tête....

Khor est-il à la maison ? » cria du dehors une voix connue.... Et Kalinytcli entra dans la chambre, portant un beau bouquet de fraisiers champêtres avec le fruit, ramassés de sa main pour son ami le putois. Le vieillard lui fit le plus cordial accueil. Ie regardai Kalinytch avec beaucoup de surprise ; je ne croyais pas un moujik~, un demi-sauvage tel que lui, capable de cette sorte de délicatesse.. J’allai à la chasse ce jour-·là quatre heures plus tard que d’habitude, et je passai encore trois jours ainsi, faisant de mon mieux afin de n’être pas un hôte incommode pour le vieux Khor. J’avais pris de l’intérêt a mes nouveaux amis ; je ne sais comment j’eus le bonheur de gagner leur confiance, mais ils en étaient venus en deux I. Paysan : ce mot si connu n’a presque plus besoin d’explication. 12 MÉMOIRES

jours à converser avec moi sans contrainte. Je les écoutais et les observais avec plaisir. Khor et Kalinytch (qui ve—· nait chaque jour, M. Poloutykine ayant dû séjourner tout ce temps-là à la ville) ne se ressemblaient en aucune sorte : Khor était un homme positif et pratique, une tête administrative, ne donnant rien qu’au raisonnement ; ·Kalinytch, au contraire, tout entier à l’idéal, était un romantique, un exalté, un homme de poétique rêverie. Khor comprenait la réalité ; il s’était établi dans la vie ; il avait pourvu à l’avenir comme au présent ; il s’était mis dans de bons rapports avec son seigneur et avec les autres puissances ; Kalinytch était chaussé d’écorces et ne tenait à rien, en souriant a tout. Khor avait créé et mis au monde une nombreuse famille soumise àsa personne et unie sous son autorité ; Kalinytch avait eu autrefois une femme qu’il craignait, et n’avait jamais eu d’enfants. Khor avait des longtemps pénétré son seigneur d’outre en outre ; Kalinytch avait une pieuse vénération, une espèce d’idolâtrie pour M. Poloutykine. Khor aimaitet protégeait Kalinytch comme un être faible et digne d’aifection ; Kalinytch aimait Khor à force d’estime et de respect. Khor parlait peu, raillait quand il voulait ne rien dire, et méditait tout au dedans de lui ; Kalinytch parlait avec feu et entrain, et il était doué de vertus que reconnaissait volontiers Khor lui-même : par exemple, il conjurait les coups de sang, les visions et la rage ; il chassait les vers et les chenilles ; les abeilles se donnaient à lui, et généralement il avait la main Iœurcuse. J’ai vu Khor le prier de se. charger d’introduire dans l’écurie un cheval qu’il venait d’acheter, et le charmeur se rendre avec une consciencieuse gravité à la prière du vieux sceptique. Kalinytch se. tenait plus rapproché de la nature, Khor, des hommes et de l’état social. Kalinytch, étranger à la fatigue de raisonner, se berçait dans ses idées et croyait à tout aveuglément ; Khor s’élevait parfois jusqu’à ces points de vue où la vie semble une ironie plus ou moins révoltante ; il avait beaucoup vu, étudié beaucoup d’hommes et de choses, et j’ai recueilli de sa bouche bien des faits que j’ignorais. Ainsi, j’ai su par lui qu’en été, avant la fenaison, paraît D’UN SEIGNEUR RUSSE. 13

dans les villages une petite télègue d’une forme particulière. Dans ce chariot est un homme en cafetan, qui vend des faux. Au comptant, il prend un rouble, et un quart ou un tiers, souvent la moitié en sus, s’il vend à crédit.] ! va sans dire que tous les paysans lui prennent crédit sa marchandise. Deux ou trois semaines après, il reparaît et exige son argent ; le paysan ne fait que de rentrer son avoine, et conséquemment il a de quoi s’acquitter ; il va au cabaret, ou il règle ses comptes avec le trafiquant. Il s’est trouvé des seigneurs qui ont eu la lumineuse idée•d’acheter, argent comptant, les faux et de les céder au prix coûtant à leurs pay- ’ sans ; en bien ! ceux-ci, au lieu de remercier le maître, se sont montrés sombres et tout consternés ; on les avait privés’du plaisir de frapper sur la faux, d’écouter le son du métal vibrant, de tourner l’instrument en tout sens, et de dire vingt fois au trafiquant Filou-Ficelle : « Hé ! hé ! mon petit, ça ne vaut pas grand-chose ;· ça sonne fêlé ; celle-ci a une paille. » La même comédie a lieu lors de l’emplette des faucilles, avec cette différence qu’alors les femmes s’en mêlent, et mettent quelquefois l’industriel dans la nécessité de les rosser pour leur apprendre à vivre.

Khor m’apprit qu’il est une autre circonstance ou les femmes ont bien plus à souiïrir de leur folie. Les pourvoyeurs des papeteries confient l’achat du chiiïon à des gens qu’en de certains districts on appelle assez communément aigles. Ces aigles reçoivent de leur patron une somme d’argent, et s’élancent à la poursuite de leur butin. Mais, au · ’ rebours de ce que fait le noble oiseau dont le chiffonnier usurpe le nom, il ne fond pas ouvertement, hardiment sur l’objet de sa recherche ; il a recours à la ruse et à la perfidie. Il laisse son chariot quelque part dans les broussailles, à peu de distance du village, et il arrive furtivement par les mares, par les arrière-cours, comme un passant, comme un pauvre ou un vagabond. Les femmes devinent, en quelque sorte par le flair, la présence de l’aigle, et elles viennent à sa rencontre. Le marché est vite fait ; une baba, pour quelques sous, livre à l’aigle non-seulement toutes les guenilles mises au rebut dans la chaumière, mais parfois la IE 14 MÉMOIRES ’

chemise de son mari et sa propre jupe. Dans ces derniers temps, les femmes ont à peu près adopté l’usage de B8’ voler elles-mêmes et d’écouler.ainsi des, parties de chanvre et de filasse ; ceci, comme tour de passe-passe, est un immense progrès dans Vindustrie des aigles. Les maris, de leur côté, sont devenus plus üns, et au moindre soupçon, au premier bruit vague, de l’apparition d’un aigle, ils recourent vivement aux mesures préventives ou correctionnelles. Et, en effet, n’est-ce pas un aiïront ? C’est, certes, bien l’affaire des hommes de vendre le chanvre. Ils ont donc la satisfaction de vendre leur chanvre, non pas à la ville, il faudrait pour cela s’y transporter avec la marchandise, mais au village même, à des trafiquants de passage, qui, n’ayant pas leurs balances, assurent que le poude’de chanvre est de quarante poignées, et on sait ce que c’est que la poignée, ce que c’est que l’envergure de la main d’un Russe, particulièrement lorsqu’il empoigne de bon cœur. Donc ce qui ne va pas à l’aigle par la femme passe au vautour par le mari.

Telle est la nature des récits que moi, qui suis sans expérience et n’ai point habité à demeure la campagne, je n’ai que trop bien entendus dans la famille d’un paysan plein de clairvoyance et de sagacité. Khor me faisait à moi-même vingt questions pour une que je lui adressais pour le plaisir de l’entendre raconter. Il sut que j’avais voyagé à l’étranger ; croirait-on que sa curiosité s’enl1amma tout a ump vivement à cette nouvelle, et que. Kalinytch, survenant, ;1’en montrait pas moins que lui ? Mais ce dernier ne s’intéressait avidement qu’aux descriptions des végétaux, des animaux, des sites, des horizons, des montagnes, des cataractes, des édifices extraordinaires et des cités populeuses ; Khor s’occupait des questions administratives et politiques. Il essayait de deviner ce que je ne disais pas, puis de résumer et de déduire, et il disait : -Est-ce

chez eux de même qu’ici, ou est-ce autrement que chez nous ? Dis, bàrine, dis, voyons.

1. Poids de quarante livres de Russie. ’

— Ah ! seigneur Dieu ! que ce doit être beau à voir, un port de mer ! — s’écriait Kalinytch pendant mes récits…

Khor gardait le silence, fronçait ses épais sourcils et de loin en loin seulement faisait tout haut cette réflexion : « C’est là une chose qui ne vaudrait rien chez nous !… Voilà qui est très-bien !… Ceci est une institution excellente. » Je ne peux pas rapporter toutes les questions que m’adressait cet homme ; et à quoi cela serait-il bon ? Mais de nos entretiens j’ai tiré cette conviction, qui paraîtra peut-être bien inattendue aux lecteurs… la conviction que Pierre le Grand fut le Russe par excellence, profondément Russe, surtout dans sa glorieuse entreprise de régénération du pays. Le Russe est si sûr de sa force et de son énergie, qu’il est prêt à tout et pour tout ; il s’enquiert peu de son passé et regarde fièrement devant lui. Ce qui est bon lui plaît ; ce qui est selon la raison, il l’attend, et, de quelque lieu que cela lui vienne, il l’accepte sans s’informer de la provenance. Son bon sens se rit volontiers de la sagesse transcendante de l’Allemagne, bien que Khor déclare que c’est un peuple curieux à observer et chez qui il irait volontiers se mettre à l’école. Par suite de sa situation tout exceptionnelle, de l’indépendance factice qu’il avait su se faire, Khor m’a dit des choses que vous ne feriez pas sortir de la tête d’un autre, quand vous le broieriez sous la meule. Cet homme comprenait sa position. C’est en causant avec Khor que, pour la première fois, j’entendis le naïf et spirituel langage du paysan russe. Ses idées et ses notions étaient vraiment étendues, très-étendues, surtout si l’on songe que le brave homme ne savait pas lire. Kalinytch savait lire, et Khor disait de lui : « L’alphabet et les abeilles se sont donnés d’eux-mêmes à ce drôle-la, qui les retient ma foi bien. »

« Tu as fait apprendre ai lire à tes enfants ? » lui dis-je.

Après un moment de silence, il me répondit : « Fédia lit.

— Et les autres ?

— Les autres, non.

— Comment cela ? »

Le vieillard se tut d’abord, puis détourna l’entretien de ce sujet. 16 MÉMOIRES-Au

reste, malgré toute son intelligence, ·Khor avait dans la tête bon nombre de préventions et de préjugés ; par exemple, il méprisait les femmes du plus profond de son âme, et, à ses heures, il ne tarissait pas en saillies sur leur compte. Sa femme, vieille et acariâtre, était postée sur la loge du gros poëte, qu’elle ne quittait’guère ; de là, elle grondait sans cesse et sans merci du matin au soir ; les fils ne faisaient aucune attention à elle, mais elle tenait ses brus dans la crainte du bon Dicu. Il n’y a rien de surprenant si, en Russie, on a si üdèle mémoire de la chanson qui fait dire à une belle-mère : ·· Quel fils es-tu pour moi ? quel chef de famille seras-tu, toi qui as une jeune femme et ne la bats jamais’ !... ··, ”

’ Une fois, je m’avisai d’intercéder pour les brus, j’essayai d’apitoyer le vieillard ; ilme répondit tranquillement : ·· Eh ! bàrine, tu as bien de la bonté de reste ! les femmes, ça crie et ça pleure, ça a besoin de se prendre un peu aux cheveux ; si un homme met la main la dedans, il ne la retire pas nette et il a versé de l’huile sur la flamme. ·· Quelquefois la vieille descendait de son fort, appelait le chien-qu’elle avait entendu remuer derrière la porte, et, sans que personne pût dire pourquoi, assénait de grands coups de fourgon sur le dos de la bête ; ou bien elle allait s’établir sous le toit du large perron, et delà elle aboyait à tout venant, selon » l’expression de Khor, une bonne petite heure, comme si elle avait eu à remplir un vœu ou un devoir, à s’acquitter d’un exercice, sans que nul y prît autrement garde. Au reste, . elle craignait son mari, et, dès qu’il avait parlé, elle regrimpait prestement sur le poele.

Ce qui était curieux a entendre chez Khor, c’étaient ses, discussions avec Kalinytch sur la personne de M. Poloutykine. çà, Khor, je t’en prie, ne me dis pas un mot de travers sur le maître, tu sais qu’il m’a toujours.... — Il t’aime, c’est bon ; que ne te donne-t-il des bottes ? -Des bottes ?... À moi a moi, qui suis un moujik ! — Je suis, moi aussi, un moujik, et vois pourtant.’...-Khor, en disant ces mots, soulevait son pied droit, monD’UN SEIGNEUR RUSSE. 17

trant à son camarade une botte faite d’un cuir qui devait provenir d’une peau de mammouth ou de mastodonte. Bah ! tu n’es pas un moujik comme nous autres, toi. ’ — Ha !... que ne te donne-t-il de quoi acheter des laptis bien faits ? tu vas chaque jour avec lui à la chasse, et les laptis de ta fabrique font rarement la journée. — Il me donne pour des laptis.

- En effet, j’oubliais, l’année dernière il t’a gratifié d’un grivennile ’. »,

Kalinytch détourna la tête avec dépit ; Khor se prit a rire aux éclats ; la gaieté brillait sur tout son visage, où toutefois ses petits yeux semblaient avoir complètement fondu. Kalinytch chantait agréablement en s’accompagnant sur la balalaïka ; Khor pouvait l’écouter longtemps, mais il venait toujours un moment, amené par certains accords, où mon hôte tout à coup penchait la tète de côté et entonnait d’une voix mélancolique sa chanson favorite : « 0 toi mon lot, mon triste lot. ·· (Doha ty, maîa dolia.).... En ces occasions Fédia ne manquait pas de dire : « Allons, voilà le père qui se plaint ; les vieillards ont toujours mal quelque part. » Mais Khor s’enfonçait la joue gauche dans le creux de la main, fermait · les yeux et continuait imperturbablement à se lamenter sur son triste lot. Malgré ces petites récréations de mou hôte, il n’y avait pas à trente verstes à la ronde un homme plus laborieux que lui ; il était toujours en action, il radoubait un fond de chariot, il consolidait les palissades, raffermissait les coutures des harnais. Je dois à la vérité de dire que, quantà la propreté, il y attachait peu d’importance, et comme je lui en faisais un jour l’observation, il me répondit qu’il faut bien que la chaumière sente l’odeur de l’homme, du chou et du pain chaud.

Va donc voir un peu, repartis-je, comme tout est propre dans l’ermitage de Kalinytch.

j — S’il en était autrement chez lui, il n’aurait pas les j abeilles à son commandement, » dit-il en soupirant ; ce qui me 1. Petite pièce d’argent de la valeur de huit sous. 7. Sorte de guitare ou guimbarde à longue hanche. \ 126 b

A I. 18 · MEMOIRESfit comprendre que l’industrie des ruches ne lui réussissait pascomme au voisin. La veille de mon départ, comme nous devisions sur ceci et sur cela, il eut tout naturellement occasion de me dire : Est-ce que tu as une terre, bârine ?. — Oui. · — C’est loin d’ici’ !. — Cent verstes. ’ — Est-ce que tu habites ta terre ? — Oui, quelquefois. ’ — Mais tu aimes mieux te donner de l’air le fusil à la main, n’est-ce pas’ ? — La chasse est ma joie. — C’est au mieux ; tire le plus possible le coq de bois et le coq de bruyère, cela va aux estomacs de chasseurs et on accommode ces oiseaux-là partout ; mais là-bas sur ta terre, crois-moi, change souvent, souvent, l’at1cien de ton village. ·· ’ Le quatrième jour, vers le soir, M. Poloutykine, de retour de la ville, m’envoya un messager ; j’eus du regret de quitter le vieillard ; je dis un cordial adieu à Khor, à Fédia et à la famille, et je me mis dans la télégue avec Kalinytch. Il fera beau demain, lui dis-je, en regardant le ciel qui était fort clair. —Non, il-pleuvra, me répondit-il ; le canard s’éloigne à grands coups d’aile des endroits découverts, et l’herbe a une forte senteur. ··. Nous entrions dans un taillis.... Kalinytch chantonnait, tout cahoté qu’il était sur l’arbre du chariot, et toujours son regard se reportait au couchant. g Le lendemain, je quittai le toit hospitalier de M. Poloutykine.

  1. Environ 60 fr., le rouble valant un peu plus d’un franc.
  2. De 4 francs.
  3. Chaussure d’écorce tressée.
  4. Equipage tartare devenu russe ; on s’y tient à cheval sur une banquette, entre deux paracrottes.