imprimerie de la Vérité (Ip. 132-133).

LEUR RELIGION NE LE LEUR DÉFEND PAS


24 juin 1882


La Minerve du 15 du courant contient l’un de ces tristes articles dont elle a le secret. Cet écrit est évidemment inspiré par la déesse de la sagesse païenne que le journal de la rue Notre-Dame a prise pour patronne.

Or, on le sait, les dieux et les déesses des païens étaient tout simplement des démons qui se faisaient adorer des humains pour mieux les perdre.

Minerve, déesse de la sagesse, est en réalité le démon de la fausse sagesse selon le monde et la chair, sagesse en tous points opposée à la sagesse selon Jésus-Christ.

Inspirée donc par la déesse de la fausse sagesse, la Minerve du 15 publie la phrase suivante :

Les candidats conservateurs qui sont orangistes ou francs-maçons sont en même temps protestants. Leur religion ne leur défend pas d’appartenir aux sociétés sécrètes. Ils ne sont pas plus coupables d’être orangistes ou francs-maçons que d’être protestants.

Il ne faut pas être très versé dans la théologie pour savoir que la thèse de la Minerve est absurde et dangereuse.

La religion des protestants n’étant pas une religion du tout, mais la négation de la seule et vraie religion, ne peut ni défendre ni permettre de manière à lier ou à délier les consciences. Voilà une vérité claire comme le jour pour tout homme qui a quelques notions élémentaires mais saines de ce que sont la religion et la conscience et des rapports qui existent entre l’une et l’autre.

Et depuis quand, nous voudrions bien le savoir, un acte, qui est radicalement mauvais s’il est commis par un catholique, devient-il indifférent, s’il est commis par un protestant ? Étrange doctrine, en vérité, qui mettrait les hérétiques dans une meilleure position vis-à-vis du bon Dieu que les vrais croyants !

Il peut très bien se faire que le catholique qui abuse de la grâce et des lumières qu’il a reçues soit plus coupable que le protestant qui n’aurait pas à répondre du même abus ; mais il suffit d’un peu de bon sens et d’un peu de réflexion pour se convaincre que le même acte, radicalement mauvais chez le catholique, ne peut pas être absolument indifférent chez l’hérétique ou chez l’infidèle.

Du reste, en supposant pour un instant qu’il soit vrai de dire que les protestants ne sont pas plus coupables d’être francs-maçons que d’être protestants, il est bien certain que les protestants francs-maçons, c’est-à-dire les protestants qui sont liés par un serment dont ils ignorent la portée, sont plus dangereux, beaucoup plus dangereux que les protestants qui n’ont pas ainsi transgressé la loi naturelle.

Car, qu’on le remarque bien, si l’Église condamne les sociétés secrètes, ce n’est pas une affaire de discipline qui peut se modifier avec les temps et les circonstances ; elle les condamne parce qu’elle ne peut pas ne pas les condamner. Interprète infaillible de toute la loi, de la loi écrite, de la tradition et de cette loi naturelle que Dieu a placée au fond de la conscience de chaque homme venant de ce monde, elle ne peut pas ne pas condamner ceux qui se lient par un serment solennel dont ils ignorent la portée. Car un tel serment est défendu par la loi naturelle qu’aucun être humain, qui a l’usage de sa raison, ne peut transgresser impunément.