Lettres à la princesse/Lettre243

Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 333-334).


CCXLIII

Ce 21 mai.
Chère et bonne Princesse,

Ç’a été en effet, mais bien relativement, un succès[1]. Le résultat de toute cette contention a été, non moins certainement, de me refaire plus souffrant et de me rendre quelque chose de mes maux : j’espère arrêter cela à temps, mais je n’ai pu assister hier à la suite de la discussion. Je savais le départ du surintendant, et je craignais que sa présence, si utile et si gracieuse l’autre jour[2], ne me fît faute : on a eu le goût, cette fois, de me traiter plus humainement.

Oh ! qu’il me tarde de rentrer dans quelque étude toute littéraire sans tout ce bruit.

Saint-Gratien doit-être bien beau : n’irai-je plus ? — Je n’ai pu même me donner le plaisir d’une visite au Salon : ce sont là des diminutions de la vie. On ne laisse pas de les ressentir tout bas, et c’est par là que l’on compte désormais les saisons.

J’ai reçu une lettre aimable de Viollet-le-Duc qui me vient voir aussi quelquefois. Nous nous entendons sur bien des choses autres encore que de vous aimer.

Je mets à vos pieds ; Princesse, l’hommage de mon tendre, de mon respectueux attachement.


  1. Le discours de M. Sainte-Beuve dans la discussion sur la liberté de l’enseignement au Sénat (19 mai 1868).
  2. M. de Nieuwerkerke avait réclamé le silence dans la séance du Sénat où M. Sainte-Beuve, parlant pour la liberté de la presse (7 mai 1868), ne cessa d’être interrompu par des murmures dont la véritable cause était le récent dîner du vendredi saint, raconté ailleurs.