Lettres à la princesse/Lettre121

Lettres à la princesse, Texte établi par Jules TroubatMichel Lévy frères, éditeurs (p. 168-170).

CXXI


Ce 4 septembre.
Princesse,

Je prends décidément le titre, comme la position, de solliciteur général auprès de Votre Altesse.

Vous devinez pour qui : L…, au fond, est pauvre ; il n’écrit tant que parce qu’il a besoin de vivre de sa plume. Il se résignera, s’il le faut, à passer l’hiver à la campagne, pour s’épargner un déplacement toujours coûteux. Ce secret de bien des choses, il me l’a dit, et il l’a également confessé à vous, Princesse, en demandant votre appui.

Cet appui est pour arriver à être employé auprès de M. Walewski. Ma pensée sur L… est que c’est un garçon excellent, — pas légitimiste au fond, comme vous semblez le penser, Princesse : — il a seulement des goûts, des inclinations vers ce genre de littérature ; ce n’est chez lui que littérature, et nullement de la politique. Il peut donc, très-sincèrement, servir dans le régime ; il est un peu cousin de M. Rouher ; il est exubérant comme écrivain, mais spirituel, et cette exubérance, il l’a aussi dans le cœur : il est, je le crois, capable d’un surcroît de reconnaissance. Je l’éprouve moi-même, qui n’ai eu pour lui que des bontés très-mélangées.

Soyez-lui donc bonne et propice, vous la Notre-Dame de Saint-Gratien, qui savez proportionner votre genre de bonté à la situation et au caractère de chacun. J’ose croire que vous ne vous en repentirez pas.

La santé est-elle revenue à Catinat[1] ? il me semble que, dans tout ce rayon alentour, il ne doit y avoir que joie, force, santé du corps et de l’esprit.

Daignez agréer, Princesse, l’hommage de mon respectueux et tendre attachement.


Mérimée est de retour ; il m’a dit qu’il irait pour avoir l’honneur de vous voir mercredi.


  1. C’est le nom donné à la résidence du maréchal Catinat, à Saint-Gratien, devenue la propriété de la Princesse.