Lettre de Saint-Évremond à madame d’Aulnoy, sur la mort de son mari


CXX. Lettre à madame d’Aulnoy, sur la mort de son mari.


LETTRE DE SAINT-ÉVREMOND À MADAME D’AULNOY,
SUR LA MORT DE SON MARI1.

Dans le temps, madame, que votre lettre m’a été rendue, je me donnois l’honneur de vous écrire, sur la mort de M. d’Aulnoy. Je vous conseillois les bienséances, de cacheter vos lettres avec de la cire noire, et de donner au monde des marques d’un deuil qui ne laisse de peine à souffrir que la régularité. La condition d’une veuve ne permet pas de regretter le meilleur mari, et donne de la joie à celles qui en perdent de méchants. Une seule chose peut troubler la vôtre ; c’est de n’avoir eu aucune part aux effets d’un injuste époux. Cette injustice seule m’en fait détester la mémoire. Ma consolation est que vous aurez toujours assez de bien pour vous passer de celui qu’il vous devoit. Mais ce n’est pas assez pour vous, Madame, que d’avoir les choses commodes, je vous souhaite les superflues : c’est le souhait de votre très-humble et très-obéissant serviteur.


NOTES DE L’ÉDITEUR

1. Tirée de la Continuation des Mémoires de littérature de Sallengre, tome II, page 5. Je dois la sanceconnoissance de cette lettre à mon savant et spirituel ami, M. Sainte-Beuve.

Je dois également à mon très honoré confrère, M. Régnier, la communication d’une lettre inédite de Saint-Évremond à M. de Pomponne : pour le complimenter sur sa disgrâce ; lettre que M. Régnier possède sur copie seulement, et qu’il a indiquée, dans son excellente édition des Lettres de madame de Sévigné. C’est un simple compliment de politesse, par lequel, probablement, Saint-Évremond a voulu s’acquitter d’un devoir, sans se compromettre de nouveau par des écritures.