Lettre d’une fille autrefois religieuse…

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Hortense de Vala à nos seigneurs de l'Assemblée Nationale

Augustes pères des Français,
O vous dont la sagesse étonne
L'univers plein de vos décrets,
Oserai-je moi, jadis nonne
Approcher de mes bienfaiteurs
Et quand le bonheur m'environne
En remercier les auteurs ?

A quinze ans, sensible et jolie,
A Lindor je donnais mon cœur,
Lindor aussi m'avait choisie
Et fidèles à notre ardeur
Nous comptions unir notre vie ...
De mon père, la fantaisie
Fit un choix un peu différent ;
Et soumise à sa tyrannie,
Pour un époux, j'eus un couvent

Je fis mes vœux à St Antoine,
Et dieu remplaça mon amant
Accablé d'un malheur si grand
Mon Lindor ne se fit pas moine,
Mais se soumit en bon chrétien
Devint sage et bon citoyen
N'en chérit que plus sa cocarde,
Sécha ses pleurs, monta sa garde,
De son district fut le soutien
Prompt à parler, beau sous les armes,
Car ce qu'il fait il le fait bien !
Hélas ! Moi je ne faisais rien
Que de me nourrir de mes larmes

Un jour, grand Dieu, jour plein de charmes,
Lindor accourut au parloir
Brûlant d'amour, brillant d'espoir.
"Le ciel, dit-il, ma chère Hortense,
Nous regarde d'un œil plus doux,
C'en est fait le bonheur commence
Pour ne plus finir qu'avec nous.
Tu connais peu les droits de l'homme,
Mais enfin ces droits sont les tiens
Plus justes, plus puissants que Rome,
Nos États brisent tes liens.
Je te vois, tremblante, éperdue ...
Hortense, ah ! reprends tes esprits
Viens la liberté t'est rendue,
Suis le plus tendre des amis,
Et quant à ton hymen céleste
Que nul scrupule ne te reste :
Bientôt le divorce est permis
Or, ce qu'on doit bientôt permettre
Va, crois-moi, n'est plus défendu."
Que vous dirai-je enfin ? je l'ai cru,
Et du couvent j'ai disparu