Lettre 400, 1675 (Sévigné)

Texte établi par Monmerqué, Hachette (3p. 455-456).
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1675

400. — DU COMTE DE BUSSY RABUTIN À MADAME DE SÉVIGNÉ.

Le lendemain du jour que j’eus reçu cette lettre, j’y fis cette réponse.
À Chaseu, ce 18e mai 1675[1].

Quand je ne vais point à Paris, ce n’est ni Monsieur le Prince ni Monsieur le Duc, à l’hôtel de Condé, qui m’en empêchent ; c’est le Roi. Ainsi, Madame, leur absence ne me donne pas plus de liberté, et j’ai pour les ordres de Sa Majesté autant de respect quand elle est en Flandre, que si elle étoit au Louvre.

Vous me mandez que Monsieur le Duc parle de moi encore avec aigreur ; il faut donc qu’il soit changé, car Briord[2] m’écrivit il y a quelque temps que Monsieur le Duc lui avoit commandé de me faire savoir qu’il étoit fâché de l’état où j’étois avec Monsieur son père, et qu’il seroit bien aise qu’il se radoucît pour moi. Quand je veux apaiser Monsieur le Prince, c’est afin d’aplanir tous les chemins, et pour n’avoir rien à me reprocher ; et non pas que je croie que mon retour ne tient qu’à lui : vous savez que j’ai d’autres vues, et je vous assure que malgré tous les obstacles je retournerai à la cour. Ce n’est pas qu’au pis aller je m’en souciasse beaucoup, car c’est plus pour faire enrager les gens qui me craignent que je fais des pas de ce côté-là, que pour les avantages que j’en attends. J’irai droit au maître par le paladin, et par d’autres, car j’ai plusieurs chemins, et quand tout cela[3] me manqueroit, le temps, si je vis, ne me manquera pas.

Nous attendons M. de Coligny à tous moments pour transiger.

J’ai écrit à Mme de Montglas sur la mort de son mari.

Je vous plains fort, ma chère cousine, dans la séparation de notre Comtesse.


  1. Lettre 400. — 1. Dans l’édition de 1818, on avait daté cette lettre du 28 mai. Voyez p. 447, note 1.
  2. 2. Voyez plus haut, p. 207, note 13.
  3. 3. Dans notre copie, Bussy avait d’abord écrit : « quand tout me manqueroit ; » il a ajouté : « cela » au-dessus de la ligne.