Les souvenez-vous/Ô Souvenir

H. Falque (p. 18-21).

Ô SOUVENIR

Pour Manol.

Ô souvenir, ne t’en va pas… Reste caché
Dans le fond reculé, merveilleux, de mon être ;
Reste : sois le trésor et sois aussi le Maître
Que l’on sait là, tout près, quand on va le chercher.


Ô Souvenir, pousse du doigt la porte basse
De mon âme, puis viens au bord de mon désir ;
Redis-moi que les dons du Rêve et du Plaisir
Feraient long mon chemin et lourde ma besace.

Ô Souvenir, lorsque j’aurai, le long du jour,
Beaucoup souri, des yeux, des lèvres, des paroles,
Fais que je pleure un peu sur ces choses frivoles
En t’écoutant parler de mon unique amour.

Ô Souvenir, si j’abandonne ma pensée
Aux brises du printemps si pleines de langueur,
Viens chanter au jardin qui fleurit dans mon cœur,
La chanson d’autrefois à peine commencée.

Ô Souvenir plein de bonheur inachevé,
Qui joins matin et soir mes mains pour la prière,
Souvenir bien-aimé, grave en mon cœur sincère
Le nom cent fois redit que je mêle aux Ave.


Ô Souvenir, fais que ma bouche murmurante
Le prononce toujours avec la même foi,
Ô souvenir de mon amour, protège-moi
Quand — on ne sait pourquoi — la vie est accablante.