Les principaux monuments funéraires/Picard

PICARD.




Picard (Louis-Benoit), homme de lettres, membre de l’Académie française et de la Légion-d’Honneur, naquit à Paris le 19 juillet 1769.

Son père exerçait honorablement les fonctions d’avocat au barreau de Paris : l’éducation de Picard fut surveillée avec soin, et il fit d’excellentes études ; mais il ne se sentit aucun goût pour la carrière du barreau. Il fut entraîné vers le théâtre par un penchant irrésistible, et les nombreux succès qu’il y a obtenus ont justifié son choix, et l’ont placé au premier rang parmi nos écrivains dramatiques.

Picard se lia dès sa jeunesse avec Andrieux et Colin d’Harleville : aucune rivalité de talent ou de succès ne vint jamais interrompre le cours d’une aussi étroite amitié ; il recherchait avec empressement les conseils de ces aimables écrivains, se hasardait parfois à son tour de leur en donner ; mais il convenait lui-même que ceux qu’il en recevait n’étaient pas les moins utiles.

La première pièce que Picard composa était intitulée le Badinage dangereux. Ce fut Andrieux qui se chargea de la présenter au théâtre de Monsieur, nouvellement bâti à cette époque : elle y fut très favorablement accueillie.

La même troupe française, transportée peu de temps après au théâtre Feydeau, y représenta sa seconde comédie, qui avait pour titre Encore des Ménechmes. Il donna ensuite à l’Opéra-Comique la jolie pièce des Visitandines, qui fut vivement applaudie, et qui est restée au théâtre. Non content de faire représenter ses ouvrages, Picard, dont le goût pour l’art dramatique était devenu une véritable passion, voulut, en suivant les traces de Molière, avoir quelque chose de commun avec ce grand homme, en remplissant lui-même les principaux rôles dans ses pièces.

Après avoir joué avec succès la comédie en société, et notamment au théâtre de Mareux, rue Saint-Antoine, il prit la résolution de se donner tout entier à la scène, et débuta au théâtre de Louvois, dont il prit la direction. Il y reçut, dans plusieurs de ses ouvrages, et principalement dans le Collatéral, un accueil flatteur ; et l’acteur n’eut pas moins à se louer de la bienveillance du public que l’auteur.

Un théâtre plus vaste, celui de l’Odéon, fut mis, en 1801, à la disposition de Picard : il s’acquitta avec zèle et activité de ses triples fonctions de directeur, d’auteur et d’acteur, et ce fut pendant qu’il dirigea primitivement ce théâtre qu’il remporta ses plus beaux succès.

Il se lassa néanmoins, après quelques années d’exercice, de la profession de comédien, et dans l’espoir de composer un plus grand nombre de pièces, il renonça au plaisir d’en jouer.

L’Institut admit Picard au nombre de ses membres en 1807 ; il y prononça son discours de réception le même jour que MM. Laujon et Raynouard. L’Empereur le décora de la croix de la Légion-d’Honneur, et lui confia l’administration dû grand Opéra, qu’il quitta en 1816, pour reprendre la direction de l’Odéon.

Deux incendies ayant consumé l’intérieur de ce bel édifice, l’administration de ce théâtre fut interrompue. Dans l’intervalle de la reconstruction, Picard transporta son spectacle à la salle Favart, oh il obtint la permission de faire jouer en même temps la tragédie et tout le répertoire du Théâtre Français.

Ce fécond écrivain a composé environ soixante-dix pièces de théâtre. Une gaîté franche et naturelle, une entente parfaite de la scène, et un dialogue vif et animé étaient le caractère distinctif de son talent ; quoiqu’il se soit principalement attaché à peindre des mœurs bourgeoises, il s’est cependant élevé, dans quelques ouvrages, aux plus hautes conceptions dramatiques et morales. Des caractères hardiment tracés et des tableaux dont le coloris a de la vigueur, se retrouvent dans Médiocre et Rampant, dans Duhautcours, ou le Contrat d’union, l’Entrée dans le monde, etc. Parmi les autres compositions dramatiques de Picard, nous ne citerons ici que les plus remarquables, le Conteur, le Cousin de tout le monde, les Conjectures ; les Amis de collège, la Petite Ville, la Grande Fille, Monsieur Musard, les Oisifs, les Filles à marier, les Marionnettes, la Manie de briller, les Ricochets, les deux Philibert, etc. Il a en outre publié quatre romans, dont le principal est le Gilblas de la révolution. Ces ouvrages abondent en portraits dessinés avec habileté, en scènes piquantes, et sont écrits à la fois d’un style spirituel et naturel.

Il est décédé le 30 décembre 1828, et a été inhumé au cimetière du Père Lachaise. Son monument se compose d’une pierre tumulaire, sur laquelle sont sculptées en relief deux branches de chêne formant un médaillon, au milieu duquel on lit :

PICARD,
louis-benoit,
DE L’ACADÉMIE FRANÇAISE.
né a paris
le 19 juillet 1769,
mort
le 30 décembre 1828.