Les oeuvres poétiques de Clovis Hesteau de Nuysement 1578/Ah que je sens le feu


LVI.


Ah que je sens le feu dans mes bouillantes veines,
Ah que je sens de glace au milieu de mes os,
Ah que je sens d’angoisse agiter mon repos,
Ah de combien d’effors sens-je accroistre mes peines.

Ah que je sens d’ardeur, & de douleurs certaines,
Ah Dieux que de soupirs & de cuisans sanglots,
Ah quelle mer d’ennuis furieuse en ses flots,
Noye le triste accent de complaintes vaines.

Ah qu’amour me tourmente, ah pourquoy suis-je né,
A pourquoy m’avez vous à ces maux destiné,
A pourquoy si long temps doy-je haïr ma vie.

Je desdaigne de vivre, & mourir je ne puis :
J'arrouse de mes pleurs l’aigreur de mes ennuis,
Et la vie & la mort tousjours l’on me denie.