Les moteurs à gaz/Le gazomètre

L. Boulanger (Le livre pour tous no 95p. 17-19).

LE GAZOMÈTRE

Sortant des épurateurs, le gaz peut être livré à la consommation, et c’est pour cela qu’on l’emmagasine dans ces grandes cuves que tout le monde connaît, et qu’on appelle des gazomètres.

Ces gazomètres sont de plusieurs sortes : il y a le gazomètre à suspension, le gazomètre télescopique et le gazomètre articulé, qu’on appelle aussi gazomètre Pauwels, du nom de son inventeur.

Le gazomètre à suspension, qui est celui que montre notre dessin d’ensemble page 12, n’est plus guère employé que dans les petites usines.

Il se compose de deux cuves : l’une creusée dans le sol, revêtue d’une maçonnerie solide et d’un enduit de ciment imperméable, est destinée à contenir de l’eau : l’autre, qui doit recevoir le gaz, s’emboîte dans la première, de façon à la recouvrir complètement.

Au fur et à mesure que le gaz arrive à la partie inférieure de cette cuve, comme il est arrêté par l’eau que contient la cuve inférieure et qu’il ne peut s’échapper, il la soulève peu à peu.

En se soulevant, le gazomètre glisse dans les rainures qui lui servent de guides et un contrepoids, calculé convenablement, sert à l’équilibrer, de façon qu’il ne monte que sous la pression du gaz.

Le gazomètre télescopique est ainsi nommé, parce qu’en dehors de la cuve en maçonnerie commune à tous les gazomètres, il se compose d’une série de cylindres rentrant les uns dans les autres, comme les canons d’un télescope, et disposés de façon que la partie inférieure de chaque cylindre soit relevée en forme de rebord, ou se fixe intérieurement la partie supérieure du cylindre suivant.

Quand l’appareil est vide, toutes les parties de la cloche supérieure sont emboîtées les unes dans les autres et le cylindre supérieur est au niveau de l’eau dans la cuve.

Au fur et à mesure que le gaz arrive, il soulève par la pression le premier cylindre qui se lève, guidé par des galets roulant dans une coulisse pratiquée dans les montants. Quand ce premier cylindre est plein de gaz il entraîne après lui le second cylindre, qui s’accroche dans les rebords pleins d’eau du premier et s’élève à son tour, entraînant lui-même le troisième, qui lui-même entraîne le quatrième et ainsi de suite, sans qu’il y ait aucune déperdition, à cause de la fermeture hydraulique, faite par les rebords inférieurs des cylindres, qui sont toujours remplis d’eau.

Ce système, très commun en Angleterre, est assez rare chez nous, où l’on voit surtout des gazomètres Pauwels.

Dans ce système la suspension de la cuve supérieure est remplacée par des colonnes à genouillères creuses, qui facilitent les mouvements de montée et de descente de la cloche, et qui servent en même temps de tuyau d’introduction et de tuyau d’échappement pour le gaz.

Le gaz arrive par le bas du tuyau d’introduction, qui a trois brisures à genouillères. Chaque genouillère renferme à l’intérieur deux tuyaux articulés, dont le jeu d’articulation se fait dans deux autres tuyaux qui les enveloppent comme des stuffing box.

Au fur et à mesure que le gaz s’introduit dans le gazomètre, celui-ci se soulève et les tubes peuvent suivre son mouvement, grâce à leur trois brisures, qui leur donnent autant de jeu qu’il en faut, pour partir du niveau de l’eau dans la cuve inférieure et s’arrêter au point où le gazomètre est absolument rempli.

Inutile d’ajouter que ces appareils sont construits avec le plus grand soin ; car il importe avant tout qu’il n’y ait point de fuite de gaz ; ils sont pourvus d’une échelle métrique qui permet de constater les consommations journalières ; car ces gazomètres sont les grands compteurs, dont il suffit de tourner la clef pour alimenter tous les compteurs de la ville.

Dans les usines qui desservent Paris, leur contenance est généralement de dix mille mètres cubes. À la Villette il y en a douze comme cela, à Clichy sept ; cependant l’usine de Saint-Mandé en a deux de chacun 15 000 mètres, et deux plus gigantesques encore, puisqu’ils contiennent chacun 25 000 mètres cubes.