Les filles de Loth et autres poèmes érotiques/00

Préface
Les filles de Loth et autres poèmes érotiques, Texte établi par Bernard, Edmond Dardenne, Imprimerie de la Genèse (Sodome) (p. 11-15).


PRÉFACE


Qui ne connaît Les Filles de Loth ?

Quel est le potache qui, dans ses dernières années de lycée, ne l’ait appris par cœur, délaissant ainsi Boileau, Racine ou Virgile ? Aujourd’hui, le jeune potache d’antan est un docte praticien ou un avocat expert et, dans le silence de son cabinet, il aimerait à se remémorer les célèbres vers d’Alfred de Musset.

Depuis fort longtemps ce poème n’avait pas été édité. Nous venons de combler cette lacune et nous avons eu l’heureuse idée d’ajouter à ces vers immortels des pièces et des poésies qui furent tout aussi célèbres. Citons :

L’Examen de Flora
L’Ode à Priape
Le Compendium Érotique
Le Chapitre des Cordeliers
La Morpionéïde
La Femme à Barbe de Guy de Maupassant

etc., etc., en un mot à peu près tous les poèmes qui firent, durant de longues années, le tour des salles de garde de Paris et de Province.

Aucune de ces pièces ne figure dans les deux tomes des TROIS ORFÈVRES À LA SAINT ÉLOI, de joyeuse mémoire, que nous avons fait paraître, il y a trois ans, et qui ont obtenu le retentissant succès que l’on sait, mais, au contraire, en forment, avec leur suite, le complément indispensable.

Nous avons également intercalé parmi ces œuvres une parodie érotique de LA MADELON. Cette chanson, malgré son dévergondage, fut chantée fréquemment au G. Q. G. pendant la guerre et fit la joie des officiers qui la fredonnaient.

Enfin, figure également :

Le Théâtre Érotique, de M. Joseph Prudhomme

dû à la plume grivoise d’Henry Monnier ; nous voulons parler de : La Grisette et l’Étudiant et Les deux Gougnottes.

Des dessins libres, coloriés à la main, ornent cet important ouvrage.

Édite sur vergé alfa de luxe à la forme, il est élégamment présenté dans un bel étui de luxe. Son format est de l’in-8 jésus.

Ces illustrations ont été dessinées par le même artiste qui illustra La Trilogie Érotique de Verlaine, que nous fîmes paraître, voici tantôt deux ans, et qui obtint un si légitime succès.

Avant de terminer, qu’il nous soit permis de remercier tous les collaborateurs bénévoles qui ont apporté leur pierre au nouvel édifice que nous venons de construire.

Lorsque nous avons fait connaître notre projet de sortir de l’oubli ces refrains et ces vieux souvenirs chers à tous ceux qui ont fréquenté les Facultés, des quatre coins de notre belle France, il nous est arrivé des quantités de poèmes et de chansons qui nous permettraient de composer plusieurs volumes de l’importance de celui que nous éditons aujourd’hui. Tous se sont souvenus que nous étions fils de Rabelais ; tous nous ont soutenus de leurs efforts et ont applaudi

le courage que notre intention dénotait, spécialement à une époque où le rire n’était plus permis qu’à lèvres pincées, où l’austérité apparente était une nécessité, où l’hypocrisie était une loi !

Aussi, de pontifiants et haut placés personnages ont senti la jeunesse leur revenir et nous en ont fait profiter.

Nous pouvons citer de jeunes étudiants qui n’ont pas hésité à cambrioler les tiroirs de leurs vénérables ascendants pour y dénicher des Péchés de Jeunesse !

Que de lettres n’avons-nous pas reçues depuis la parution des TROIS ORFÈVRES À LA SAINT ÉLOI, nous demandant de continuer notre œuvre et de faire revivre dans un nouvel ouvrage tout ce qui n’avait pu trouver place dans notre première production !

« Et, nous écrivait-on, vous avez négligé ceci, vous avez omis cela. Pourquoi laisser perdre à jamais ces souvenirs de jeunesse ? Vous en avez certainement oubliés qui se trouvent encore dans des coins ignorés, dans des tiroirs jalousement fermés à double tour. Pourquoi ne poursuivez-vous pas votre récolte, votre chasse ? Laissez-vous tenter et une reconnaissance universelle vous sera acquise. »

Et c’est ainsi que nous avons persévéré. Nous avons fouillé à droite, nous avons demandé à gauche, faisant comprendre aux uns qu’ils contribuaient ainsi à rajeunir la race, aux autres qu’ils n’avaient pas le droit de conserver

pour eux seuls ces chefs-d’œuvre, et nous avons pu récolter les diverses pièces qui forment le tout de l’ouvrage que nous présentons aujourd’hui sous le titre de :

LES FILLES DE LOTH

Si LES TROIS ORFÈVRES À LA SAINT ÉLOI contenaient des morceaux connus de tous, presque tous les feuillets de notre nouveau recueil en recèlent de moins connus, mais tout aussi célèbres et dont le naufrage dans l’oubli eût été, cette fois, irréparable.

Abandonnant toute fausse modestie et reconnaissant nous-mêmes notre effort, nous sommes persuadés d’avoir rempli le désir cher à tous nos amis et de leur donner, en ces pages, la suite, qu’ils attendaient si impatiemment, aux deux tomes des TROIS ORFÈVRES À LA SAINT ÉLOI.

À la lecture de notre ouvrage, leurs cœurs bondiront, leurs yeux se mouilleront, comme en un rêve, ils reverront leur jeunesse, leur vie du Quartier : la Source, le d’Harcourt, le Panthéon, Bullier et, leurs mains se joignant comme pour une prière, leurs lèvres murmureront : « Merci, Vidame, merci !… »

Là, se borne notre ambition !

Vidame de Bozegy.