Calmann Lévy (p. 36-37).
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XXI


Comme de coutume, elles étaient montées sur leur maison pour respirer l’air du soir.

Mais les dernières lueurs rouges du couchant mouraient à peine sur les blancheurs de la ville arabe, quand Lalla-Kadidja fit à ses filles un commandement bref, et toutes trois descendirent.

Elles prirent une peinture noire, et entourèrent leurs yeux d’un cercle épais, en les agrandissant démesurément vers les tempes. Ensuite elles versèrent des parfums sur leurs cheveux et leurs mains, elles mirent des vestes de soie brochée d’or, et se couvrirent de bijoux.

Ce dimanche des chrétiens, jour de fête et d’orgie dans la ville basse, pour les marins, les soldats et les marchands venus de France, ne pouvait avoir rien de commun avec leur vie cloîtrée. — Alors pour quels époux attendus, ces parures ? — ou pour quelle solennité mystérieuse ?…

La belle nuit de mai qui descendit ce soir-là sur Alger les trouva vêtues comme des almées, avec la recherche et l’apparat des anciens jours.