Les Principes et les Mœurs de la République/Les principes républicains/II


II

qu’est-ce que la liberté ?


La liberté est, dans son principe, la faculté qui permet à l’homme de se diriger lui-même, de disposer de lui-même, en un mot d’être son propre maître, au lieu d’être la chose d’un autre, comme un outil ou un animal.

Cette faculté, qui le distingue ainsi de la bête et lui donne la responsabilité de sa conduite, exige qu’il ne soit entravé dans aucun de ses actes, à moins que ceux-ci n’aient pour effet de porter atteinte à la même liberté dans ses semblables.

Il doit donc pouvoir, sous cette condition, penser et parler librement, travailler librement, user librement du fruit de son travail, etc.

C’est précisément pour assurer l’exercice de toutes ces libertés naturelles et la jouissance des biens qui en dérivent, que sont institués les lois et les pouvoirs publics. Malheureusement les gouvernements ont presque toujours usé de leur autorité pour opprimer les peuples à leur profit. Telle est la tendance de tous les gouvernements monarchiques et aristocratiques : ils traitent les hommes comme des troupeaux. L’esprit du gouvernement républicain est, au contraire, de respecter en eux la dignité inhérente à leur titre d’hommes, et d’en faire de libres citoyens.

Le lien civil qui les unit leur impose, il est vrai, certaines obligations qui semblent restreindre leur liberté ; mais, dans le système républicain, d’une part, les lois et les pouvoirs publics auxquels ils sont soumis, loin d’y porter atteinte, ne font qu’en assurer réellement le légitime exercice, en accordant la liberté de chacun avec celle de tous, et, d’autre part, c’est d’eux-mêmes qu’émanent ces lois et ces pouvoirs publics, établis par tous dans l’intérêt de tous.

En somme, gouvernement de soi-même, soit dans l’individu, soit dans le peuple entier, voilà la liberté.

Elle est le premier principe du gouvernement républicain.

L’égalité en est la conséquence nécessaire.