Les Principes de 89 et le Socialisme/Appendice 2

Constitution[1]
3 – 13 septembre 1791
Constitution.
3 — 13 septembre 1791.

L’assemblée nationale, voulant établir la Constitution française sur les principes qu’elle vient de reconnaître et de déclarer, abolit irrévocablement des institutions qui blessaient la liberté et l’égalité des droits.

Il n’y a plus ni noblesse, ni pairie, ni distinction héréditaire, ni distinction d’ordres, ni régime féodal, ni justices patrimoniales, ni aucun des titres, dénominations et prérogatives qui en dérivaient, ni aucun ordre de chevalerie, ni aucune des corporations ou des décorations pour lesquelles on exigeait des preuves de noblesse, ou qui supposaient des distinctions de naissance, ni aucune autre supériorité que celle des fonctionnaires publics dans l’exercice de leurs fonctions.

Il n’y a plus ni vénalité ni hérédité d’aucun office public.

Il n’y a plus pour aucune partie de la nation, ni pour aucun individu, aucun privilège ni exception au droit commun de tous les Français.

Il n’y a plus ni jurandes, ni corporations de professions, arts et métiers.

La loi ne reconnaît plus ni vœux religieux, ni aucun autre engagement qui serait contraire aux droits naturels ou à la constitution.


TITRE Ier. – Dispositions fondamentales garanties par la Constitution.

La Constitution garantit, comme droits naturels et civils :

1o  Que tous les citoyens sont admissibles aux places et emplois, sans autre distinction que celle des vertus et des talents ;

2o  Que toutes les contributions seront réparties entre tous les citoyens également en proportion de leurs facultés ;

3o  Que les mêmes délits seront punis des mêmes peines, sans aucune distinction des personnes.

La Constitution garantit, pareillement, comme droits naturels et civils :

La liberté à tout homme d’aller, de rester, de partir sans pouvoir être arrêté, ni détenu que selon les formes déterminées par la Constitution ;

La liberté à tout homme de parler, d’écrire, d’imprimer et publier ses pensées, sans que ses écrits puissent être soumis à aucune censure ni inspection avant leur publication, et d’exercer le culte religieux auquel il est attaché ;

La liberté aux citoyens de s’assembler paisiblement et sans armes, en satisfaisant aux lois de police.

La liberté d’adresser aux autorités constituées des pétitions signées individuellement.

Le pouvoir législatif ne pourra faire aucune loi qui porte atteinte et mette obstacle à l’exercice des droits naturels et civils consignés dans le présent titre, et garantis par la Constitution ; mais comme la liberté ne consiste qu’à pouvoir faire tout ce qui ne nuit ni au droits d’autrui, ni à la sûreté publique, la loi peut établir des peines contre les actes qui, attaquant ou la sûreté publique ou les droits d’autrui, seraient nuisibles à la société.

La Constitution garantit l’inviolabilité des propriétés, ou la juste et préalable indemnité de celles dont la nécessité publique, légalement constatée, exigerait le sacrifice.

Les biens destinés aux dépenses du culte et à tous services d’utilité publique, appartiennent à la nation, et sont dans tous les temps à sa disposition.

La Constitution garantit les aliénations qui ont été ou qui seront faites suivant les formes établies par la loi.

Il sera créé et organisé un établissement général de secours public, pour élever les enfants abandonnés, soulager les pauvres infirmes, et fournir le travail aux pauvres valides qui n’auraient pas pu s’en procurer.

Il sera créé et organisé une instruction publique, commune à tous les citoyens, gratuite à l’égard des parties d’enseignement indispensables pour tous les hommes, et dont les établissements seront distribués graduellement, dans un rapport combiné avec la divisions du royaume.

Il sera établi des fêtes nationales pour conserver le souvenir de la Révolution française, entretenir la fraternité entre les citoyens, et les attacher à la Constitution, à la Patrie et aux Lois.

Il sera fait un code des lois civiles communes à tout le royaume.



  1. Seuls l’introduction et le premier titre sont reproduits dans l’édition originale, la version complète est néanmoins consultable ici. (Note de Wikisource.)