Les Poètes du terroir T I/Bruc de Montplaisir

Les Poètes du terroir du XVe au XXe siècleLibrairie Ch. Delagrave Tome premier (p. 354-355).

RENE de BRUC de MONTPLAISIR

(1610-1682)


Celui qui fut, avec le comédien Subligny, « le guide de la comtesse de la Suze dans les routes du Parnasse », René de Bruc, sieur de Montplaisir — et par la suite marquis de la Guerche, — naquit à Paris en 1610, et mourut, en Artois, le 12 juin 1682. Il était le quatrième fils de Jean de Bruc, procureur général des États de Bretagne, et de Marie Veniero, dame de la Guerche, en Saint-Brevin. On a dit qu’il fut lié avec tous les beaux esprits de son temps et qu’il fréquenta, sous le surnom de Métrobate, la société précieuse. Ami du langoureux poète Lalanne, il fit avec ce dernier les voyages de Picardie, en 1636, et de Bretagne, en 1638. En 1640, il devint lieutenant du roi au gouvernement d’Arras. « René Bruc de Montplaisir, a écrit Saint-Marc, jouissait dans les troupes de la réputation d’un très bon offieier, et les agréments de son esprit le firent estimer de la cour et de la ville. » Sur la fin de ses jours, selon un mémoire de l’abbé de Loménie de Brienne, il se mit dans la dévotion et composa des ouvrages de piété. Ses vers, tirés des recueils collectifs, et en particulier du recueil de Sercy, ont été réunis, pour la plupart, et publiés avec les poésies de Lalanne, par Le Fèvre de Saint-Marc, en 1759 (Poésies de Lalanne et du marquis de Montplaisir [sic], Amsterdam, Leprieur, in-12). M. Frédéric Lachèvre a donné une énumération de ses productions poétiques dans sa Bibliographie des Recueils collectifs, etc., II, p. 387 et 680 ; III, 456 ; IV, 157. De nombreuses poésies inédites de cet auteur se trouvent dans les manuscrits de Conrart.

Bibliographie. — Abbé Goujet, Biblioth. franc., t. XVII, p. 308. — Saint-Marc, Avertissement à ses poésies, édit. citée. — Baron de Wisme, Notice ; Nantes, Guéraud, 1853, in-8o (extr.  de la Revue des prov. de l’Ouest). — St. Halgan, René de Bruc de Montplaisir, notice publiée dans l’Anthol. des poètes bretons du dix-septième siècle, Nantes, Soc. des Biblioph., 1884, in-4o.



SONNET
fait dans une île à l’embouchure de la loire


Claire eau que les Zéphirs ont doucement émue ;
Beaux arbres, prés fleuris, délices de mes sens ;
Agréables apas, dont cette île est pourvue ;
Pour assoupir mes maux que vous êtes puissans !

Que ces divers objets, qui s’offrent à ma vue ;
Ces vaisseaux étrangers, ces barques des passans,
Que j’aperçois du haut de cette roche nue,
Remplissent mon esprit de plaisirs innocens !

Mais, Dieux ! que le bonheur dure peu dans la vie !
Je reviens à penser que l’ingrate Silvie
A trahi mon amour, et que je dois périr.

Si bien que dans l’ennui qui sans cesse me ronge,
Je goûte des plaisirs, en furieux, qui songe,
Et trouve à son réveil qu’il est prêt de mourir.

(Poésies de Lalanne et du marquis de Montplaisir ; 1759.)