Les Pierres de Venise/Avant-propos

Traduction par Mathilde P. Crémieux.
Renouard (p. --).

AVANT-PROPOS


Les « Pierres de Venise » font suite aux « Sept Lampes de L’Architecture » que John Huskin publia comme une « préparation » à une étude plus développée destinée, dans sa pensée, à démontrer que l’architecture gothique et byzantine fut, à Venise, le produit de la foi et des vertus domestiques, tandis que l’architecture de la Renaissance correspond au manque de foi et à rabaissement des mœurs de la nation corrompue. Pour Ruskin, c’est à Venise que se développa la plus noble des écoles gothiques et comme il voyait, avec douleur, le charme et la beauté de ses monuments s’amoindrir sous les atteintes du temps, de la négligence et de la restauration, il se hâta de déchiffrer les leçons que, suivant lui, renfermaient les « Pierres de Venise » : il voulut faire de ces pierres, la clef de voûte de toute architecture, bonne ou mauvaise.

Cette étude minutieuse et approfondie, entreprise par un chercheur ultra-scrupuleux, ne vit le jour qu’en octobre 1853, alors que les « Sept Lampes » l’avaient annoncée déjà depuis quatre ans et demi.

On a conservé, à Brantwood, un grand nombre de petits carnets carrés que Ruskin portait toujours sur lui pour les couvrir de notes et de dessins qu’il transcrivait, chaque soir, sur de plus grands cahiers. Il y inscrivait ses impressions, mais il se gardait d’en tirer des conclusions qu’aurait pu modifier un second examen. Aussi épris de la nature que de l’art aussi artiste que théologien, écrivain et poète, il entreprit le travail gigantesque d’illustrer lui-même son œuvre, avec une merveilleuse habileté. Malheureusement, il fut forcé d’en fixer le prie à deux guinées et peu d’amateurs se présentèrent ; il s’écoula un long temps avant que la célébrité vint enfin récompenser Ruskin de tant d’années passées à dépouiller Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/34 Page:Ruskin - Les Pierres de Venise.djvu/35