Les Petits poèmes grecs/Anacréon/Ode IX

IX.

Sur une colombe

« Aimable colombe, d’où viens-tu ? D’où naissent les suaves parfums que tu exhales en traversant les airs ? Qui es-tu ? Quel soin t’occupe donc en cet instant ?

— Anacréon m’a envoyée vers un enfant, vers Bathylle, qui règne aujourd’hui en tyran sur tous les cœurs. Cythérée m’a vendue au poète pour une petite chanson. Messagère fidèle, je sers ses amours, et maintenant, quelles douces lettres je porte de sa part ! Il dit qu’il va bientôt me rendre la liberté ; mais dût-il me la donner, moi je veux rester esclave auprès de lui, car quel plaisir aurais-je à voler dans les montagnes, sur les plaines, à me reposer sur les arbres, à manger quelques graines sauvages ! À présent je me nourris du pain que j’enlève aux mains d’Anacréon lui-même ; il me donne à boire du vin qu’il a goûté ; puis je danse, et de mes ailes j’ombrage mon maître. Je me couche et je m’endors sur sa lyre. Tu sais tout ; adieu, voyageur ! Tu m’as fait jaser plus qu’une corneille. »