Les Opalines/Les heures d’angoisse

L. Vanier (p. 50-51).

LES HEURES D’ANGOISSE

La nuit dans le parc se promène,
Majestueuse et souveraine ;
Sur ses pas se lèvent des chuchotements,
Et la lune,
Qu’importune
L’aboiement
Douloureux et funèbre
Et lointain,
Dans les blanches ténèbres,
D’un mâtin
Garde-ferme,
Derrière un volet de nuage s’enferme.


Je pense à toi, aimée, et lointaine aujourd’hui.
Des souvenirs en flots m’arrivent que j’accueille,
Et mon amour pour toi frémissant dans les feuilles
Emplit la nuit.

Je pense à toi, à toi, qui dans ce moment même
D’un sommeil inquiet t’agites loin de moi,
Je pense à toi qui m’es ce que je suis pour toi,
Et que je t’aime.

Je pense à toi, chérie, et la peur tout d’un coup
M’angoisse de la mort, de cette mort qui rôde
Sans cesse et sans pitié, en honteuse maraude,
Tout près de nous.

Je pense à toi, ma grande, et qu’il nous faut bien vite
Et sans en perdre un seul nous enivrer des jours
Qui s’offrent, si pressés. — La carrière où l’on court
Est si petite !

Je pense à toi, ma Toute, et qu’au soir détesté
Où je devrai partir pour les nuits qui m’attendent,
Je n’aurai qu’un regret, que mon cœur appréhende
De te quitter.