Les Opalines/Les fils de la vierge

L. Vanier (p. 23-24).

LES FILS DE LA VIERGE

En ce matin de fin d’été,
Les prés sont vêtus d’étincelles.
On dirait un voile argenté
De lumineuses coccinelles.

Le soleil pâle, endolori,
Ensommeillé dans de la brume,
Comme un enfant chétif sourit
A cette fête qu’il allume.

C’est délicat et virginal,
Et c’est frais comme est une bouche
Dont l’âge encore original
Au moindre baiser s’effarouche.


Or, voici que cela s’éteint,
Que tout s’évanouit sans cause,
Hélas ! et s’absorbe soudain
En la splendide apothéose

De l’astre qui vient d’éclater
Dans l’azur qu’éblouit sa face,
Et que dévore sa clarté
Impétueusement vorace.

Ils sont beaux, les matins vêtus
De myriades d’étincelles,
Mais quel dommage qu’impromptus
Ils soient fragiles autant qu’elles !