Les Mystères du peuple — Tome I
NOTES DU TOME I.
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NOTES.


LE CASQUE DE DRAGON. — L’ANNEAU DU FORÇAT.





CHAPITRE PREMIER.

(A) « S’il s’est conservé quelque part des bardes (chanteurs populaires), et des bardes en possession de traditions druidiques, ça n’a pu être que dans l’Armorique (la Bretagne), dans cette province qui a formé pendant plusieurs siècles un état indépendant et qui, malgré sa réunion à la France, est restée gauloise de physionomie, de costume et de langage jusqu’à nos jours. » (Ampère, Histoire littéraire professée en 1839 au collège de France.)

(B) Chants populaires de la Bretagne, par M. de Villemerqué. Il fait remonter au quatorzième ou quinzième siècle cette chanson que les chanteurs ambulants ou barz (anciens bardes) chantent encore de nos jours en Bretagne. Nous aurons sujet de revenir sur l’excellent ouvrage de M. de Villemerqué, auquel nous renvoyons le lecteur pour toutes les chansons bretonnes citées dans ce chapitre, telles que la chanson des Pauvres, la Demande, etc.

(C) M. de Villemerqué fait remonter ce récit, encore très-populaire de nos jours en Bretagne, au onzième ou douzième siècle ; ainsi, depuis huit ou neuf cents ans il se transmet de génération en génération.


CHAPITRE II.

(A) Français, dit M. Amédée Thierry dans son Histoire des Gaulois (introduction, page 8) : j’ai voulu faire connaître cette race (la race gauloise), de laquelle descendent les dix-neuf vingtièmes d’entre nous Français. C’est avec un soin religieux que j’ai recueilli ces vieilles reliques dispersées, que j’ai été puiser dans les annales de vingt peuples les titres d’une famille qui est la nôtre… Les traits saillants de la famille gauloise, ceux qui la différencient le plus, à mon avis, des autres familles humaines, peuvent se résumer ainsi : Une bravoure personnelle que rien n’égale chez les peuples anciens, un esprit franc, impétueux, ouvert à toutes les impressions, éminemment intelligent.

… Les premiers hommes qui peuplèrent l’ouest de l’Europe furent les Galls ou Gaulois, nos véritables ancêtres, car leur sang prédomine dans ce mélange successif de peuples divers qui a formé les modernes Français ; toutes les qualités et quelques défauts des Gaulois, les traits les plus saillants de leur caractère, survivant chez nous, attestent encore notre antique origine (Henry Martin, Hist. de France, vol. I, éd. 1838).

… Il est incontestable que jusqu’ici nous ne nous sommes pas fait assez honneur de nos pères, les Gaulois ; il semble qu’éblouis par les prestiges de l’antiquité hébraïque, même de l’antiquité grecque et romaine, nous nous empressions par honte de faire bon marché de la nôtre et de la passer sous silence………………… Mais j’ose le dire, si Dieu avait voulu que l’Écriture nous eût conservé l’héritage paternel aussi brillamment qu’elle l’a fait chez les Hébreux, les Grecs et les Romains, loin d’humilier nos antiquités nationales devant celles de ces peuples, nous n’eussions voulu relever que d’elles seules. (Jean Raynaud, article Druidisme, page 405, Encyclopédie nouvelle.) Nous aurons souvent occasion de citer l’autorité si imposante de notre illustre et excellent ami Jean Raynaud.

(B) C’est surtout pour nos frères du peuple et de la bourgeoisie que nous écrivons cette histoire sous une forme que nous tâchons de rendre amusante. Nous les supplions donc de lire ces notes, qui sont, pour ainsi dire, la clef de ces récits et qui prouvent que sous la forme romanesque se trouve la réalité historique la plus absolue.

Voici quelques extraits des historiens anciens et modernes qui établissent, quoique à différents points de vue, qu’il y a toujours eu parmi nous deux races : les conquérants et les conquis.

Une chronique de 1119, citée dans l’excellent ouvrage d’Augustin Thierry (Hist. des Temps mérovingiens, v. I, p. 47), s’exprime ainsi en parlant de la Gaule :

« De là vient qu’aujourd’hui cette nation appelle Francs dans sa langue ceux qui jouissent d’une pleine liberté ; et quant à ceux qui, parmi elle, vivent dans la condition de tributaires, il est clair qu’ils ne sont pas Francs par droit d’origine, mais que ce sont des fils de Gaulois assujettis aux Francs par droit de conquête. »

Maître Charles Loyseau (Traité des charges de la Noblesse, 1701, p. 24) dit à son tour :

« Pour le regard de nos François, lorsqu’ils conquestèrent les Gaules, c’est chose certaine qu’ils se firent seigneurs des biens et des personnes d’icelles ; j’entends seigneurs parfaits, tant en la seigneurie publique qu’en la seigneurie privée. Quant aux personnes, ils firent les Gaulois serfs. »

Plus tard, le comte de Boulainvilliers, un des plus fiers champions de l’aristocratie et de la royauté française, écrivait (Histoire de l’ancien gouvernement de France, p. 21 à 57, citée par A. Thierry) :

« Les Français conquérants des Gaules y établirent leur gouvernement tout à fait à part de la nation subjuguée. Les Gaulois devinrent sujets, les Français furent maîtres et seigneurs. Depuis la conquête, les Français originaires ont été les véritables nobles et les seuls capables de l’être, et jouissaient, à raison de cette noblesse, d’avantages réels, qui étaient l’exemption de toutes charges pécuniaires, l’exercice de la justice sur les Gaulois, etc., etc. »

Plus tard encore, Sieyès, dans sa fameuse brochure : Qu’est-ce que le Tiers-État ? qui sonna le premier coup de tocsin contre la royauté de 89, disait :

« Si les aristocrates entreprennent, au prix même de cette liberté dont ils se montrent indignes, de retenir le peuple dans l’oppression, le tiers-état osera demander à quel titre ; si on lui répond à titre de conquête, il faut en convenir, ce sera remonter un peu haut ; mais le tiers-état ne doit pas craindre de remonter dans les temps passés. Pourquoi ne renverrait-il pas dans les forêts de la Germanie toutes ces familles qui conservent la folle prétention d’être issues de la race des conquérants, et d’avoir succédé à leurs droits de conquête ? La nation épurée alors pourra se consoler, je pense, d’être réduite à ne plus se croire composée que des descendants des Gaules. »

Enfin, M. Guizot, sous la dernière année de la restauration, écrivait ces éloquentes paroles :

« La révolution de 89 a été une guerre, la vraie guerre, telle que le monde la connaît, entre peuples étrangers. Depuis plus de treize cents ans, la France contenait deux peuples : un peuple vainqueur et un peuple vaincu. Depuis plus de treize cents ans le peuple vaincu luttait pour secouer le joug du peuple vainqueur. Notre histoire est l’histoire de cette lutte. De nos jours une bataille décisive a été livrée ; elle s’appelait la révolution. Francs et Gaulois, seigneurs et paysans, nobles et roturiers, tous, bien longtemps avant cette révolution, s’appelaient également Français, avaient également la France pour patrie. Treize siècles se sont employés parmi nous à fondre dans une même nation la race conquérante et la race conquise, les vainqueurs et les vaincus ; mais la division primitive a traversé le cours des siècles et a résisté à leur action ; la lutte a continué dans tous les âges, sous toutes les formes, avec toutes les armes ; et lorsqu’en 1789, les députés de la France entière ont été réunis dans une seule assemblée, les deux peuples se sont hâtés de reprendre leur vieille querelle. Le jour de la vider était enfin venu. » (Guizot, Du Gouvernement de la France depuis la restauration, et du ministère actuel, 1829.)

Ce véhément appel aux souvenirs révolutionnaires avait pour but de prouver que, malgré la révolution de 89, la monarchie légitime de 1815 voulait, en 1829, renouveler l’oppression des conquérants sur les conquis, des Francs sur les Gaulois ; car M. Guizot terminait en ces termes, en s’adressant aux contre-révolutionnaires :

« On sait d’où vous venez… c’en est assez pour savoir où vous allez… »

Or, aujourd’hui 5 août 1849, jour où nous écrivons ces lignes, le parti prêtre et légitimiste espère encore nous traiter en peuple conquis en nous inféodant de nouveau au dernier rejeton de cette royauté de race franque, prétendue de droit divin. C’est curieux, après les notes que nous venons de citer. — Nous laisserons-nous faire ?

(C) Les druides (ministres de l’antique et sublime religion gauloise) ont, au contraire, avec un héroïsme admirable, lutté pendant des siècles contre les Romains, contre les Francs et contre le clergé catholique, pour reconquérir l’indépendance et la nationalité de la Gaule, soulevant les populations contre l’étranger et expiant leur patriotisme dans les tortures, tandis que le haut clergé catholique, allié des rois et seigneurs francs qu’il captait par la ruse et par des flatteries infâmes, regorgeait de richesses.

Ainsi Grégoire, évêque de Tours, le seul historien des rois de la première race, dit de Clovis, ce premier roi de droit divin :

« Ayant encore fait périr plusieurs autres rois, et même ses plus proches parents, Clovis étendit son pouvoir sur toutes les Gaules. Cependant ayant un jour rassemblé les siens, on rapporte qu’il leur parla ainsi des parents qu’il avait fait lui-même périr : — Malheur à moi qui suis resté comme un voyageur parmi des voyageurs et qui n’ai plus de parents qui puissent, en cas d’adversité, me prêter leur appui ! — Ce n’était pas qu’il s’affligeât de leur mort, — ajoute l’évêque de Tours ; — mais il parlait ainsi par ruse et pour découvrir s’il lui restait encore quelqu’un à tuer. » (Grégoire de Tours, Histoire des Francs, l. II, ch. XIII.)

Croit-on que le prêtre chrétien, le serviteur du Christ, l’évêque gaulois flétrisse cette épouvantable hypocrisie du roi franc conquérant, souillé de vols, de meurtres, d’incestes, de fratricides, comme tous ceux de cette première race ? On va le voir :

« Chaque jour Dieu faisait ainsi tomber les ennemis de Clovis sous sa main et étendait son royaume, parce qu’il marchait avec un cœur pur devant lui, et faisait ce qui était agréable aux yeux de Dieu. » (Grégoire de Tours, Histoire des Francs, l. II, ch. XL.)

Quant aux débauches et aux crimes d’un grand nombre d’évêques gaulois, nous citerons au hasard, car la mine est féconde :

« Cependant Tautin, devenu évêque, se conduisait de manière à mériter l’exécration générale. » (Grégoire de Tours, Histoire des Francs, l. IV, ch. XII.)

«… Ceux de Langres demandèrent un évêque ; on leur donna Pappol, autrefois archidiacre d’Autun. Au rapport de plusieurs, il commit beaucoup d’iniquités. » (Grégoire de Tours, l. V.)

«… Salone et Sagiltaire, évêques d’Embrun et de Gap, une fois maîtres de l’épiscopat, commencèrent à se signaler, avec une fureur insensée, par des usurpations, des meurtres, des adultères et d’autres excès. » Grégoire de Tours, Histoire des Francs, l. V, ch. XXI.)

Certes, l’évêque de Tours ne peut être soupçonné de partialité envers ses confrères de l’épiscopat.


CHAPITRE III.

(A) Nous empruntons les chiffres et les réflexions suivantes à un écrit de notre excellent ami, M. Perreymond, dont nous ne le louerons jamais assez les beaux et les grands travaux. Il est impossible de joindre plus de science pratique et plus de profondeur de vues à une conviction plus généreuse dans l’avenir de la cause démocratique et sociale. (Aux commerçants : la faillite et le morbus numériens.)

« À Paris, pendant les dix dernières années du règne de Louis-Philippe, années de prospérité, dit-on, le nombre des procès et des faillites augmenta continuellement ; en voici la progression :

Tribunal de commerce de Paris.
En 1836, il y a eu 26,545 causes et 329 faillites
1839 47,077 788
1845 46,064 691
1846 54,878 931
1847 59,560 1,139

» C’est-à-dire une augmentation en dix ans de 30,000 causes et de 810 faillites.

» L’ensemble du passif a été, en 1845-46, de 48,342,529

1846-47, de 68,474,803

» La moyenne du passif, par faillite, de 51,000 fr. »

Or, le nombre des faillites et l’ensemble des passifs augmentant chaque année, voici comment M. le président du tribunal de commerce, Bertrand, en explique les causes pour les années 1845-46 et 1846-47 ; nous citons :

« (1845-46) Parmi les causes habituelles, déjà signalées par nos prédécesseurs, telles que la concurrence illimitée, l’exagération des dépenses de premier établissement, il fallait placer aussi comme cause accidentelle et malheureusement trop évidente les séductions de l’agiotage sur les actions de chemin de fer, auxquelles se sont laissé entraîner beaucoup de petits commerçants par l’appât d’un gain qu’ils n’avaient pas, comme d’autres spéculateurs plus grands et plus habiles, le talent de rendre facile et sûr.

» C’est surtout pour les petits commerçants que la cherté des subsistances, la rareté du numéraire, l’élévation du taux de l’escompte et le retrait des facilités du crédit, ont dû avoir les plus fâcheux résultats.

» (1846-47) Les sinistres éprouvés par le commerce de Paris peuvent être attribués à des causes différentes : d’abord les spéculations hasardeuses, celles conçues dans des proportions déraisonnables ; les craintes des capitalistes qui ont fermé aux petits fabricants, aux modestes industriels, les sources pécuniaires auxquelles ils avaient l’habitude de puiser et dont la suppression a déterminé la chute… »

Ainsi, de l’aveu même des hommes recommandables que les commerçants de Paris choisissent pour présider leur tribunal, le commerce de la capitale se trouve sous le coup :

De la concurrence illimitée ;

De la chicane ;

Des séductions de l’agiotage ;

Du jeu sur les actions industrielles, plaie de notre époque ;

De l’habileté des grands spéculateurs qui savent et peuvent jouer à coup sûr contre les petits spéculateurs ;

De l’élévation du taux de l’escompte ;

Du retrait des facilités du crédit ;

Des capitalistes qui ferment aux modestes industriels les sources pécuniaires du travail, pour des craintes plus ou moins plausibles, et dont eux, capitalistes, restent seuls juges et appréciateurs.


CHAPITRE V.

(A) On sait la terreur blanche qui a succédé à la première restauration du roi de droit divin, les massacres du Midi, les exécutions sans appel, etc., etc. Nous lisons dans l’un des derniers numéros de la Démocratie pacifique :

Le 27 octobre 1815, M. Pasquier lisait à la chambre un rapport sur le projet de loi relatif aux propos et écrits séditieux :

« Prononçons, s’écriait-il, la peine des travaux forcés contre les cris, les discours et les écrits séditieux proférés ou publiés isolément ;

» La mort, s’ils sont concertés ;

» La peine des parricides, s’ils sont suivis d’effets. »

Une législation aussi implacable était bien faite pour satisfaire les haines les plus aveugles, les ressentiments les plus vifs voués aux hommes du régime impérial. Elle ne suffit pas à la ferveur royaliste ou plutôt à la rage haineuse de M. de Castelbajac.

Il se lève, et, de concert avec deux de ses collègues, il propose, avec la plus vive insistance, d’appliquer la peine de mort à tout individu convaincu d’avoir arboré le drapeau tricolore !

« Eh quoi ! s’écrie l’un de ces honorables, on ne punirait pas de mort l’érection de ce drapeau abominable que je ne veux pas nommer, tant son nom me répugne à prononcer et me révolte ! »

Cette effrayante leçon sera-t-elle perdue ? Une troisième restauration du roi par droit de conquête ne durerait pas six mois, mais elle aurait le temps d’assouvir ses haines sauvages contre les conquis. Les horribles paroles prononcées plus haut prouvent par le passé ce que serait l’avenir.


(B) Ainsi qu’on verra plus tard, les chefs francs, lors de la conquête, imbibaient leur chevelure de graisse mélangée avec de la chaux, afin de rendre leurs cheveux d’un rouge éclatant. C’était la beauté de l’époque.


(C) On retrouvera dans la suite de ces récits l’histoire de l’abbesse Méroflède, du maréchal de Retz, de Septimine la Coliberte, de Broute-Saule, de Ghiselle la Paonnière, d’Alison la Maçonne, de Marotte la Haubergière (armurière), etc., etc.


CHAPITRE VII.

Les Gauloises aux bras blancs et forts (page 80).

« La femme gauloise égale son mari en force ; elle a les yeux encore plus sauvages lorsqu’elle est en colère ; elle agite ses bras aussi blancs que la neige, et porte des coups aussi vigoureux que s’ils partaient d’une machine de guerre. » (Ammien-Marcellin. Voir aussi les notes des Martyrs, vol. XVIII, l. IX.)

« — Je n’ignorais pas que les Gaulois confient aux femmes les secrets les plus importants, et que souvent ils soumettent aux conseils de leurs filles et de leurs épouses les affaires qu’ils n’ont pu régler entre eux. » (Ibid., Martyrs, l. IX, p. 69.)

« Si quelque Carthaginois se trouve lésé par un Gaulois, l’affaire sera jugée par le conseil suprême des femmes gauloises. » (Plutarque, cité par Sainte-Foy, Essais sur Paris.)


CHAPITRE VIII.

Nous allons revivre ailleurs… voilà tout (page 92).

Nous avons supposé, chose moins étrange qu’elle ne le paraît, puisque la religion juive, non moins ancienne que la religion druidique, a encore ses croyants, nous avons supposé M. Lebrenn et sa famille fidèles par tradition au dogme de l’éternité de l’existence physique, si admirablement formulé par les druides des Gaules. Bien des siècles avant l’apparition du christianisme, on verra dans le courant de ces récits les prodiges opérés par cette foi dans la continuité et la perpétuité de l’existence. Nous citerons seulement ici un extrait du magnifique travail de notre excellent et illustre ami Jean Raynaud sur les druides (Encyclopédie nouvelle, article druidisme).

«…… Telle était dans son essence la doctrine des druides, et voilà pourquoi ceux qui la partageaient se trouvaient aussi délivrés que possible du mal de la mort. L’homme détaché des organes dont il s’était servi durant la période terrestre ne devenait point une ombre comme dans le dogme du paganisme et de l’Église romaine, l’âme reprenait aussitôt possession d’une nouvelle enveloppe, et sans entrer dans le fabuleux empire de Pluton, ni dans celui de Satan, pas plus que dans les mystiques rayons de l’empirée, elle allait tout simplement chercher sa résidence sur un autre astre que celui-ci. Ainsi, la mort en réalité ne formait qu’un point de division dans une série d’existences périodiques. C’est ce que décident les vers de Lucain, dans la brièveté desquels sont amassées tant de lumières. Selon vous (dit-il en s’adressant aux druides), les ombres ne se rendent pas dans les domaines silencieux de l’Erèbe et dans les pâles royaumes de Pluton ; le même esprit régit dans un autre monde d’autres membres. La mort, si ce que contiennent vos hymnes est certain, n’est qu’un milieu dans une longue vie.

» Que Lucain a bien raison d’ajouter que les Gaulois étaient heureux d’une telle foi ! Aussi ne faut-il pas s’étonner si le dogme de l’immortalité formait le point capital de leur religion ; il en était le plus achevé, et par conséquent le plus fructueux. Rien n’était donc plus juste que de le proposer au peuple comme la plus précieuse leçon. Aussi les historiens sont-ils d’accord pour constater la prédilection des druides en faveur de cette croyance, qui est en effet la plus caractéristique du génie de la Gaule. Pompilius Mela dit que c’était le seul dogme qui fût populaire. César, qui le considère au point de vue du soldat, c’est-à-dire dans ses effets sur la guerre, assure de même qu’il n’y avait rien à quoi les druides tinssent davantage. — En premier lieu (dit César), les druides veulent persuader que les âmes ne périssent pas, et qu’après elles passent de l’un à l’autre ; et ils pensent que cela excite puissamment les hommes au courage, en leur faisant négliger la crainte de la mort.— Ainsi, on disait à un Gaulois : — Que crains-tu ?Je ne crains qu’une chose, c’est que le ciel ne tombe, — répondit-il


CHAPITRE X.

Georges ne se doutait pas du dévouement de la pauvre créature (page 111).

Ces traits de courage, dignes de nos mères, sont justifiés par la mort héroïque de deux belles jeunes filles de dix-huit ans, qui, coiffées en cheveux, les bras nus, se tenaient debout sur une barricade, voisine de la rue Saint-Denis, au mois de juin 1848.


CHAPITRE XI.

Nos frères, exaspérés par d’atroces déceptions (page 134).

Plus que personne nous avons déploré la funeste insurrection de juin, le sang qu’elle a fait couler devant et derrière les barricades ; mais nous nous révoltons aussi contre les abominables calomnies dont on a poursuivi tous les insurgés indistinctement. Nous en appelons entre autres au témoignage du brave général Piré, qui, dans une lettre adressée aux représentants du peuple, s’exprimait ainsi :

« Citoyens représentants, entré le premier à la baïonnette, le 23 juin, dans la barricade de la rue Nationale-Saint-Martin, je me suis vu quelques instants seul au milieu des insurgés animés d’une exaspération indicible ; nous combattions à outrance de part et d’autre ; ils pouvaient me tuer, ils ne l’ont pas fait ! J’étais dans les rangs de la garde nationale, en grande tenue d’officier général ; ils ont respecté le vétéran d’Austerlitz et de Waterloo ! Le souvenir de leur générosité ne s’effacera jamais de ma mémoire… Je les ai combattus à mort, je les ais vus braves, Français qu’ils sont. Encore une fois, ils ont épargné ma vie. Ils sont vaincus, malheureux : je leur dois le partage de mon pain… Advienne que pourra ! …….Le lieutenant général Piré. »

Était-ce à des pillards, à des cannibales que croyaient s’adresser le président de l’Assemblée Nationale et le général Cavaignac dans ces proclamations ?

« 23 juin 1848.

: « Ouvriers,

» On vous trompe, on vous égare. Regardez quels sont les fauteurs de l’émeute :

» Hier, ils prenaient le drapeau des prétendants, aujourd’hui ils exploitent la question des ateliers nationaux : ils dénaturent les actes et la pensée de l’Assemblée Nationale… Le pain est suffisant pour tous, il est assuré pour tous ; la Constitution garantira à jamais l’existence à tous ; déposez donc vos armes, etc., etc.

 » Sénard, président de l’Assemblée Nationale. »

« 25 juin 1848.

«… On vous dit que de cruelles vengeances vous attendent : ce sont vos ennemis, les nôtres, qui parlent ainsi. On vous a dit que vous serez sacrifiés de sang-froid ! Venez à nous, venez comme des frères repentants et soumis à la loi, et les bras de la République sont prêts à vous recevoir.………………………….Sénard, Cavaignac. »

En6n, nous citons, sans commentaire, ce passage du journal l’Atelier :

« Octobre 1848.

» Trois mois se sont écoulés depuis les journées de juin, et maintenant on peut juger avec plus de sang-froid la cause de ces effroyables événements ; sans doute on y trouvera, comme toujours, des hommes qui exploitent, au point de vue de leur ambition, les malheurs publics, des hommes qui sacrifieraient le monde entier à leur esprit haineux et égoïste ; mais le véritable moteur, celui qui a mis le fusil à la main de trente mille combattants, c’était la désolante misère qui ne raisonne pas. Les pères de famille connaissent seuls, hélas ! la puissance de cette excitation.

» Écoutez plutôt celui-ci, que le conseil de guerre vient de condamner à dix ans de travaux forcés :

« J’avais couru pendant deux jours pour avoir du travail, je n’en avais trouvé nulle part… Je rentrai près de ma femme malade ; elle était dans son lit, sans chemise, sans camisole, avec un lambeau de couverture autour d’elle ! J’eus un instant la pensée du suicide ; mais je la repoussai quand je vis à côté la petite figure toute rose de mon enfant, qui dormait profondément au milieu de cette affreuse misère. Ma femme mourut ; je restai seul avec mes deux enfants ; c’était deux jours avant l’insurrection. Mon fils, me montrant le panier qu’il portait habituellement pour aller à l’école, et où on lui mettait sa petite provision, me disait : Papa, tu n’as donc rien mis dedans ? Eh bien, messieurs, voilà pourquoi j’ai écouté mes malheureux camarades….. J’avais souffert comme eux… Quand ils vinrent me chercher, je cédai ; mais je leur dis : Je vous le jure, par la mémoire de ma pauvre sainte mère : si nous sommes vaincus, je serai jeté dans un cul de basse-fosse ; je ne me plaindrai pas, je ne vous reprocherai rien ; mais si nous sommes vainqueurs, pas de vengeance, pardon à tous, car cette guerre entre français est horrible » (Déposition de N. A. devant les Conseils de guerre.)


CHAPITRE XIII.

Le peuple et la modeste bourgeoisie, sur qui pèse presque entièrement l’impôt, c’est-à-dire la gêne et la misère (page 1491.

Afin de donner un aperçu de l’odieuse iniquité de la répartition des impôts qui pèsent exclusivement sur le peuple, les petits propriétaires et le modeste commerce, tandis que les gros capitalistes en sont exempts, nous empruntons les chiffres et les réflexions suivantes à un excellent travail de la Démocratie pacifique (de la Richesse et des Impôts en France, 15 septembre 1849).

L’auteur, après avoir posé en principe cette incontestable vérité que tous doivent payer l’impôt suivant un mode proportionnel et progressif, en vient à démontrer les iniquités suivantes :


Banques de France.


Par exemple, en 1844, les banques de France ont escompté la somme colossale de 1 milliard 922 millions en effets de commerce.

809 millions par la banque de France en province.

319 — par ses dix-neuf comptoirs à Paris.

594 — par les banques départementales, constituées en sociétés anonymes, indépendantes de la banque de France.

Eh bien ! si nous ouvrons le rapport des censeurs de la banque de France, rédigé par M. Odier, nous trouvons, parmi les frais généraux de cette administration, qu’elle n’a payé qu’un droit de patente de 12,500 francs. Douze mille cinq cents francs pour exploiter une masse d’effets de 809 millions ! Est-ce là de la justice distributive en matière d’impôts ? Si toutes les exploitations agricoles et autres étaient taxées à ce taux, le budget des recettes courrait grand risque de ne pas atteindre 200,000 à 300,000 francs, et il monte pourtant à près de deux milliards.

Aussi la valeur des actions des principales banques de France, en 1846, était montée aux taux suivants :


Banques Valeur de création des actions Valeur en 1846
de France 1, 000 fr 3, 316
Lyon 1, 000 3, 26
Rouen 1, 000 2, 600
Bordeaux 1, 000 2, 285
Marseille 1, 000 1, 750
Lille 1, 000 1, 600
Orléans 1, 000 1, 550
Hâvre 1, 000 1.250
Toulouse 500 1, 150


Industries métallurgiques.

Autre exemple : Parmi les entreprises de la grande industrie, celle des mines figure au premier rang. Voici le relevé de cette production, évaluée en argent pour 1842 :


Mines Production
Houille 33,497,179 fr.
Tourbe 5,326,184
Cuivre et minerai 257,500 257,500
Plomb, litharge, alquifoux, argent fin 844,583
Antimoine et préparations 100,646
Manganèse 116,150
Bitume 459,413
Alun et sulfate de fer 1,413,263
Sel marin 14,889,425 14,889,425
Fer, fonte, acier et minerai en fer 148,074,900
Carrière de matériaux de constructions de pierres à chaux, d’argiles communes 41,047,519
Industries d’origines minérales, telles que verreries, poteries, porcelaines, briques, produits chimiques. 151,690,008
Produits divers en cuivre, zinc, plomb, etc. 6,689,269
-------- --------
Total général 404,406,638 fr.


On connaît les bénéfices énormes que l’industrie des mines procure à une grande partie de leurs propriétaires ; on connaît l’abondance, par exemple, de la production des fers de Saint-Dizier, et l’étendue de leurs débouchés, celle des houilles dans le riche bassin de la Lière, etc. Eh bien ! toutes ces richesses industrielles ne participent à l’impôt que des sommes insignifiantes.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Nous avons analysé plus haut les richesses produites par l’industrie minérale. Le nombre des ouvriers occupés par ces diverses industries est d’environ 500,000.

Quel est le sort de ces ouvriers ? Allez, demandez-le aux catacombes des carrières et des mines, aux forges, aux fonderies brûlantes du fer, des verreries, etc. Visitez les hôpitaux et les chenils de ces misérables travailleurs, vous les verrez mourir avant l’âge, et souvent, hélas ! expirer sous les tortures d’affreuses maladies, produites par les émanations de substances délétères. Voilà le hideux spectacle qui se présentera à vos yeux.

Aussi des rumeurs sinistres et des cris de vengeance sortent de temps en temps de ces profondeurs. C’est le rugissement d’Encelade qui se sent écrasé sous le poids de l’Etna ; c’est la voix des esclaves d’un industrialisme sans entrailles qui lutte contre le poids non moins lourd d’un capital égoïste.


Le socialisme aidant, il le trouvera. (p. 150)

Pour donner une idée du prodigieux mouvement industriel dont nous parlons, et qui éclôt pacifiquement sous la féconde influence du socialisme, nous donnerons sans commentaire la pièce suivante :


ASSOCIATIONS OUVRIÈRES FRATERNELLES.
COMMISSION CENTRALE DES ASSOCIATIONS FRATERNELLES.


Les associations sont enfin unies.

La Mutualité du travail commence sérieusement, et de cette mutualité va naître la gratuité du crédit, basée sur la solidarité proportionnelle que les associations établissent entre elles.

La commission centrale s’occupe activement de former des centres de production et de consommation, afin de rendre très-facile la circulation des bons d’échange, qui seront émis prochainement.

Cette publication des associations adhérentes s’accroîtra chaque semaine des adhésions reçues et des associations nouvelles qui auront été formées.

La commission centrale de l’Union invite les associations qui n’ont pas encore envoyé leurs statuts à les envoyer le plus promptement possible, afin qu’elle puisse les faire jouir du bénéfice de la publicité des journaux démocratiques. Il a été bien compris que l’envoi des statuts et l’adhésion aux rectifications n’impose pas l’obligation d’adhérer au Contrat d’union.

Le siège de la commission centrale est rue Saint-André-des-Arts, 17, ancien 35. Ouvert tous les jours, de dix heures du matin à quatre heures, et de six à dix heures du soir.


union des associations fraternelles


Mutualité du travail et du crédit. — Solidarité des associations.


BLANCHISSEUSES. Rue Michel-Lecomte, 27.
BONNETIERS. Rue de la Vannerie, 47.
BOULANGERS. Bureau central, rue des Fossés-Saint-Germain-l’Auxerrois, 7. — Succursales :

Rue de la Glacière, 32, et rue Vincent, à Belleville. — Rue Mogador, 13, à la Villette.
CASQUETTES (Ouvrières en). Rue Saint-Germain-l’Auxerrois, 4.5.
CHARBONS DE TERRE ET DE BOIS. Rue de Châtillon, 3.
CHAUSSONNIERS. Rue Jean-de-l’Épine. 11.
CHEMISIÈRES ET COUTURIÈRES. Rue de la Corderie Saint-Honoré, 7.
CLOUTIERS. Rue Château-Landon, 6.
COIFFEURS. Associations solidaires. Rue Saint-Honoré, 87. — Rue Jean-Robert, 22. — Cloître Saint-Benoît. — Rue Saint-Denis, 278. — Chaussée du Maine, 56. — Rue Michel-le-Comte, 50. — À Saint-Denis (Banlieue), rue Compoise, 57. — Rue Saint-Nicolas-Saint-Antoine, 26.
CORDONNIERS. Rue du Cadran, 13. — Rue Rambuteau, 57. — Place du Louvre, 26.
CUISINIERS. Jardin de la Liberté, rue des Poissonniers, 38 et 40, à la Chapelle-Saint-Denis, et rue Saint-Sauveur, 53. — Réunis, barrière Pigale et barrière des Amandiers, et rue Aubry-le-Boucher, 32. — Français, barrière des Trois-Couronnes.

Rue Notre-Dame-des-Victoires, 7. — Rue de la Grande-Truanderie, 40.
DAGUERRÉOTYPES. (Fabricants d’appareils de).

Rue Galande, 47.
ÉCRIVAINS RÉDACTEURS. Rue du Petit-Reposoir, 3.
GRAVEURS. Rue des Vieux-Augustins, 58.
LIMONADIERS. Rue du Roule, 3.
LINGÈRES. Rue du Faubourg-Saint-Denis, 23.
LITHOGRAPHES. Passage du Caire, 64-65.
MAÇONS ET TAILLEURS DE PIERRE. Rue Geoffroy-Lasnier, 11.
MÉDECINS ET PHARMACIENS. Rue Montmartre, 20.
ŒUFS, BEURRE, FROMAGE (pour la vente). Rue Saint-Honoré, 49.
PEINTRES EN BÂTIMENTS. Fusion des trois associations, ayant leurs sièges respectifs rue des Arcis, 8 ; rue de Paradis-Poissonnière, 40, et rue du Faubourg-Saint-Denis, 123.
PHARMACIENS. Pharmacie humanitaire, rue Constantine, 26, et rue du Temple, 55.
SAGES FEMMES. Rue du Cherche-Midi, 12.
SERRURIERS EN TOUS GENRES. Faubourg Saint-Denis, 135.
TRAVAILLEURS de toutes professions et de tous pays, à Châtillon, près Montrouge (département de la Seine).


Associations dont les statuts ont été vérifiés, mais qui n’ont pas adhéré à l’Union.


APPAREILLEURS DE GAZ. Rue Saint-Denis, 257, passage du Renard, et rue du Renard-Saint Sauveur, 4.
CHAPELIERS. Boulevard Saint-Denis, 4, et rue Dauphine, 11.
CHARPENTIERS. Rue Vieille-du-Temple, 79.
COIFFEURS. Rue Lamartine, 1. — Succursale : rue Saint-Honoré, 139.
CORDONNIERS. Rue Salut-Honoré, 22.
CORPORATIONS RÉUNIES. Impasse des Couronnes, 6 et 8, à la Chapelle Saint-Denis.
CORROYEURS. Rue de la Terrasse, 4, aux Batignolles. Dépôt à Paris, rue du Renard-Saint-Sauveur, 7.
CUISINIERS. Rue du Faubourg-du-Temple, 58. — Rue du Four Saint-Germain, 46. — Rue Dauphine.
FACTEURS DE PIANOS. Rue de Chabrol, 24.
GRAINETIERS. Rue des Fourreurs, 12.
GRAVEURS SUR BOIS pour illustrations typographiques. Quai Bourbon, 39, île Saint-Louis.
INSTITUTEURS, INSTITUTRICES ET PROFESSIONS socialistes. Rue de Bréda, 21.
LIMES (Ouvriers en). Rue Phelippeaux, 27.
LUNETTIERS EN ACIER. Rue Saint-Martin, 180, entrée rue Jean-Robert, 28.
MARBRIERS ET TAILLEURS DE PIERRES réunis, pour monuments funèbres. Rue Fontaine-Saint-Georges, 52.
MÉGISSIERS. Rue Saint-Hippolyte, 13.
MENUISIERS EN BÂTIMENTS. Rue de Jessaint, à la Chapelle-Saint-Denis.
PHARMACIENS. Pharmacie médicale, rue Zacharie, 5.
SERRURIERS MÉCANICIENS. Rue du Grand-Hurleur, 5.


Pour la Commission,
Le secrétaire, JEANNE.


CHAPITRE XV.

La langue bretonne n’est autre que la langue celtique ou gauloise (page 165).

L’un des plus illustres historiens de nos jours, dont l’autorité ne saurait être contestée, M. Amédée Thierry, dit dans son introduction à l’Histoire des Gaulois, page 96 : « On trouve encore aujourd’hui, dans quelques cantons de France et d’Angleterre, le reste des langues originales ; la France en possède deux : le basque, parlé dans les Pyrénées-Orientales ; le bas breton (ou gaulois-armoricain), plus étendu naguère, resserré maintenant à l’extrémité de la Bretagne ; — l’Angleterre, le gallois, parlé dans le pays de Galles. » Voir aussi la préface du Dictionnaire français-celtique, de Grégoire de Rostrenen (édit. de Guingaud, 1834).


L’écriture gauloise était d’abord la même que celle des Grecs (page 169).

« Les Gaulois employaient les mêmes caractères ou lettres que les Grecs. Tacite parle de plusieurs inscriptions gauloises trouvées sur les frontières de la Germanie, et observe qu’elles étaient écrites en caractères grecs. » (Latour d’Auvergne, Origines gauloises, ch. I, page 12.)


Joël, le chef de la tribu de Karnak (page 169).

Afin de démontrer la vraisemblance de notre fiction, et de prouver qu’un pareil souvenir a pu traverser les siècles, nous extrayons le passage suivant de Grégoire de Rostrenen, qui écrivait au milieu du dernier siècle :

«… Ce que j’ai trouvé de plus ancien sur la langue gauloise ou bretonne, c’est le livre manuscrit en langue bretonne des prédictions de Guin-Clan, astronome breton, très-fameux encore aujourd’hui chez les Bretons ; il marque, au commencement de ses prédictions, qu’il écrivait l’an de l’ère chrétienne 240, demeurant entre Roc’h Hellas et le Potz-Guen, c’est-à-dire aujourd’hui entre Morlaix et la ville de Tréguier. » (Grég. de Rostrenen, liste de la plupart des auteurs, livres ou manuscrits dont il s’est servi pour la confection de son Dictionnaire.) Or, nous le demandons, si l’on sait aujourd’hui, en 1849, que Guin-Clan habitait, en 240, c’est-à-dire il y a seize cent neuf ans, entre Morlaix et Tréguier, il n’y a rien de vraisemblable dans notre fable, qui suppose que les descendants de la famille Lebrenn savaient que leur aïeul demeurait il y a environ deux mille ans, près des pierres de Karnak, qui existent encore de nos jours telles qu’elles étaient alors.




LA FAUCILLE D’OR.


CHAPITRE PREMIER.

Au temps où vivait César (page 175).

An 57 avant Jésus-Christ. Ce récit remonte donc à dix-neuf cents ans environ.


Alrè (page 175).

Aujourd’hui Auray, département du Finistère.


Aussi vrai que Elldud a inventé la charrue (page 176).

« Elldud, le saint homme de Cor-Dewdws, améliora la culture, enseigna aux Gaulois une meilleure manière de cultiver la terre que celle qui était connue auparavant, et leur montra l’art de la marner et de labourer à la charrue. Avant le temps d’Elldud, la terre était seulement cultivée avec la bèche et le boyau. » (Jean Raynaud, notes du Druidisme, page 415. — Encyclopédie nouvelle.)


Teutâtès (page 176).

« Teutâtès est le demi-dieu (ou le saint) qui, aux yeux de nos pères, tenait dans ses mains les destinées particulières de toutes les âmes ; c’est lui qui présidait à la circulation, non-seulement sur la terre, mais dans tous les cercles de l’univers, véritable guide, comme le nomme César, des voies et des voyages. » (Jean Raynaud, art. Druid., Encyclopédie nouv.)

Ogmi, dont la parole enchaîne les hommes (page 17 7).

Un des traits les plus caractéristiques de ce génie conteur, et surtout de ce besoin d’entendre raconter, si particulier aux Gaulois, c’est la semi-divinité d’Ogmi.

« Il est impossible, — dit Jean Raynaud, — que chez les Gaulois, si amoureux de la parole, l’art qui lui correspond ne fût pas mis au premier rang parmi les inventions de l’esprit. Le demi-dieu qui symbolise cette puissance de la parole dont Lucain a décrit les attributs, est figuré sous les apparences de la vieillesse, comme pour marquer qu’au détriment des vertus du corps, il possédait celles de la tradition et de l’expérience ; revêtu de la peau du lion et de la massue d’Hercule, ce n’était point pourtant par la force qu’il s’attachait ses captifs. Liés à des chaînes d’or et d’ambre, qui, partant de leurs oreilles, venaient se réunir à la bouche du dieu, loin de lui résister, ils le suivaient avec empressement, comme ces bêtes farouches autrefois asservies par la lyre d’Orphée. » (Jean Raynaud, art. Druid., Encyclop. nouv.)

Hésus (page 177).

Hésus, comme le Jehovah des Hébreux et le Jupiter des païens, était le dieu suprême de la religion des Gaulois. Le nom de Hésus signifiait je suis celui qui suis.

Le brenn (page 180).

Les historiens romains ont pris la qualification du chef des armées gauloises pour son nom, et de brenn (littéralement chef), ont fait Brennus. (Amédée Thierry, Hist. des Gaules.)

Suivant l’exemple donné par Coll (page 181).

Coll (saint gaulois ; apporta le froment et l’orge en Bretagne, où auparavant il n’y avait que du seigle et de l’avoine. (Jean Raynaud, art. Druid., Encyclopédie nouv.)

Des moutons noirs, ainsi que des porcs (page 181).

« Les Gaulois élèvent d’innombrables bandes de porcs à demi sauvages, conduites dans les forêts et non moins dangereuses à rencontrer que des loups. » (Strabon, liv.  IV.)

Les dogues de guerre (page I8l).

« À la guerre, des dogues dépistaient et poursuivaient l’ennemi ; ces chiens, très-féroces, également bons pour la guerre et pour la chasse des bêtes fauves, se tiraient de la Bretagne et des Ardennes ; ils combattaient pour leurs maîtres autour des chars de guerre. « (Strabon, ibid.)

Appliquer l’étain sur le fer et sur le cuivre (page 181).

« Les Gaulois de Bourges appliquaient l’étain à chaud sur le cuivre avec une telle habileté, que l’on ne pouvait le distinguer de l’argent. Des vases, des mors de chevaux, des harnais, des chars entiers, étaient ainsi ornés. » (Pline, liv. IV, chap. XVII.)

L’une des vierges de l’île de Sên (page 182).

Aujourd’hui l’île de Sein. Il y avait autrefois dans cette île un collège renommé de druidesses ; les unes restaient vierges, d’autres se mariaient et participaient à la vie de famille.

Les Ewagh’s veillent la nuit et le jour (page 184).

Les Ewagh’s faisaient partie de la corporation druidique.

Le plus ancien des druides (page 184).

Druide vient des mots gaulois derw (chêne), wyd (gui), dyn (homme), c’est-à-dire homme du gui de chêne, derw-wyd-dyn, et par corruption druide. Le chêne était pour les druides l’arbre symbolique de la divinité ; ils n’avaient pas d’autres temples que les forêts de chênes séculaires, où ils invoquaient et glorifiaient Hésus, le dieu suprême. Le gui, plante d’une autre nature que le chêne et vivant de sa substance, était pour eux l’image de l’homme, vivant de Dieu et par Dieu, quoique d’une autre nature que lui. « Le gui, dit Pline, est l’admiration de la Gaule, rien n’est plus sacré dans ce pays. » (Disons, en passant, que l’eau de gui a existé jusqu’à ce siècle sur le formulaire des pharmaciens, comme panacée presque universelle. L’antiquité, la sublimité de la religion druidique est attestée par de nombreux passages des auteurs anciens.

Aristote (suivant Diogène-Laërte) enseignait dans le Magique que, « grâce aux druides, la Gaule avait été l’institutrice de la Grèce. »

Polystor, une des plus grandes autorités des anciens pour la connaissance des temps passés, enseignait que « Pythagore avait voyagé chez les druides, et qu’il leur avait emprunté les principes de la philosophie. »

Suivant Ammien Marcellin, Pythagore proclame les druides « les plus élevés des hommes par l’esprit. »

Saint Cyrille d’Alexandrie, dans sa thèse contre l’empereur Julien, soutenant que la croyance à l’unité de Dieu avait existé chez les nations étrangères avant de se répandre chez les Grecs, allègue l’exemple des druides, qu’il met au niveau des disciples de Zoroastre et de Brahma. »

Celse (dit Origène) appelle nations primordiales et les plus sages les Galactophages d’Homère et les druides de la Gaule.

Ces témoignages prouvent surabondamment la grandeur et la dignité de la religion de nos pères.

En principe, rien ne séparait le corps druidique du reste de la nation ; ce n’était point une caste et un corps sacerdotal, comme le clergé catholique, par exemple ; les intérêts des Druides se confondaient avec ceux de la société civile ; c’étaient, pour ainsi dire, des gradués savants et littéraires, laissant à celui qui était ainsi gradué toute liberté pour le mariage et les affaires privées et publiques. L’instruction publique, la surveillance des mœurs, la justice civile et criminelle, les affaires diplomatiques étaient leur partage. Le corps druidique se subdivisait en druides proprement dits, chargés de la direction supérieure des affaires publiques ; en Ewagh’s, chargés du service du culte, et qui aussi pratiquaient la médecine, et enfin en Bardes, qui chantaient la gloire des héros de la Gaule, la louange des dieux, et flétrissaient les mauvaises actions par leurs satires. Les Barz, chanteurs ambulants qui existent encore en Bretagne, et aux poésies desquels nous avons emprunté quelques passages cités par M. de Villemerqué, sont les descendants de ces anciens Bardes.


CHAPITRE II.

La maison était de forme ronde (page 186).

Voir pour la construction des habitations gauloises :

Améd. Thierry, Hist. des Gaulois, t. II, p. 44. — Dom Bouquet, Préface, t. I p. 53. — Hérodien, Vie de Maximin, liv. VII. — Vitruve, liv. I, chap. I. — Strabon, vol. IV, p. 107.

Quatre coudées (page 187).

Environ sept pieds.

Du cumin (page 188).

Sorte de poivre rouge. Pour la description des repas gaulois, voir Améd. Thierry, Hist. des Gaulois, t. II, p. 60. Strabon, liv. VII. Posidonius.

Bœuf sauvage appelé Urok (page 188).

Ure ou taureau sauvage, animal fort, grand et très-méchant. « Les Gaulois le chassaient souvent, la jeunesse surtout ; on faisait border d’argent les cornes des ures tués à la chasse, pour orner la table dans les festins d’apparat, » (César, Comin., liv. VI.)

Où trempaient sept branches de gui (page 188).

Voir à l’article druidisme (Encyclopédie nouvelle) la manière de préparer le gui de chêne.


Celui est pur et saint qui fait des œuvres célestes et pures (page 188).

Une des sentences druidiques les plus répandues dans la Gaule.

Bijoux fabriqués à Autun (page 189).

« Les bijoux d’Autun étaient fort bien travaillés et enrichis de coraux, dont il existait plusieurs bancs aux îles d’Hyères, » dit Posidonius, liv. VI.

« Il y avait en Gaule, outre les mines d’or, d’argent, de fer, d’étain et de cuivre, des mines de grenat, nommées escarboucles, et les moindres escarboucles gauloises se vendaient 40 pièces d’or du temps d’Alexandre le Grand. » (Théophraste, Traité des Pierreries, p. 393.)

Voir pour les costumes gaulois, Hist. du Costume en France, par Quicherat.

La ceinture d’agilité (page 190).

« Avoir une bonne tenue militaire, se conserver longtemps dispos et agile, était un point d’honneur pour les Gaulois, et un devoir envers le pays. À des intervalles réglés, les jeunes gens allaient se mesurer la taille à une ceinture déposée chez le chef de la tribu. Ceux qui dépassaient la corpulence officielle étaient sévèrement réprimandés comme oisifs et intempérants et punis d’une amende. » Améd. Thierry, Histoire des Gaul., vol. II, p. 4 4.)

Les rois que Ritha-Gawr a rasés (page 191).

Avant de former une grande république fédérative, la Gaule avait été constituée en royauté. « Mais (dit Jean Raynaud, article Druidisme) le principe républicain était si fortement implanté dans le génie de la Gaule, que celui de la royauté ne put jamais en triompher et ne prit place dans la nation que par l’étranger. »


Les têtes de leurs ennemis (page 191).

« Les têtes des chefs ennemis, fameux par leur courage, étaient placées dans de grands coffres ; c’était le livre où le jeune Gaulois étudiait les exploits de ses aïeux, et chaque génération s’efforçait d’y ajouter une nouvelle page. » Tite-Live, liv. I.

Mais ces usages de barbarie étaient depuis très-longtemps abandonnés à l’époque où se passent les faits de ce récit.


Ils se sont juré d’être saldunes (page 192).

Chez les Gaulois, ceux qui s’appelaient saldunes se juraient de toujours partager le même sort, soit qu’ils s’attachassent à un chef, soit qu’ils combattissent ensemble. Heureux et riches, ils partageaient ; malheureux et pauvres, ils partageaient leurs revers : l’un d’eux périssait-il de mort violente, l’autre se tuait. (Voir César, De Bel. Gall., liv. III, et Tacite, vol. II, p. 13.)


Le morceau du plus brave (page 193).

« Il était d’usage autrefois (dit Posidonius) que le pied ou la cuisse des animaux appartînt au plus brave d’entre les convives, ou du moins à celui qui se prétendait tel. Si quelqu’un osait le lui disputer, il s’en suivait un duel à outrance. » Liv. V, chap. III.

Luttons au sabre (page 194).

« Après le repas, les Gaulois aimaient à prendre les armes et à se provoquer mutuellement à des duels simulés ; d’abord ce n’est qu’un jeu, ils attaquent et se défendent du bout des mains ; mais leur arrive-t-il de se blesser, la colère les gagne, ils se battent alors pour tout de bon ; si l’on ne s’empressait de les séparer, l’un d’eux resterait sur la place. » (Posidonius, cité par Améd. Thierry, Hist. des Gaul, t. II, p. 69.)


CHAPITRE III.


Au lourd sabre de cuivre (page 196.)

Pendant longtemps, et même lors de l’invasion romaine, les Gaulois ne se servaient que de sabres de cuivre très-affilés.


Hèr ! her ! (page 197).

Cri d’encouragement des Gaulois, analogue à l’évohé des Romains et des Grecs. (Sidoine-Apollinaire, liv. VI.)


Un vase rempli d’eau de gui (page 198).

En Gaule, le gui était considéré, en sa qualité de plante sacrée, comme un spécifique universel. (Ammien Marcellin, liv. V.)


Continuer de vivre ailleurs (page 199).

Nous l’avons dit, selon la croyance druidique, l’on ne mourait pas, l’âme quittait ce monde pour un autre, et s’y révélait d’une nouvelle enveloppe charnelle. Cette foi à la perpétuité de la vie, dans des existences successives, donnait aux Gaulois, en toute circonstance, ce mépris de la mort, signalé par tous les historiens de l’antiquité, car il constitue le trait le plus caractéristique de la race de nos pères. — Aristote assure que « les Gaulois poussaient le mépris du danger jusqu’à refuser de s’enfuir d’une maison prête à s’écrouler. » — Horace définit la Gaule : « La terre où l’on n’éprouve pas la peur de la mort. » — « Tandis que les Romains, — dit Polybe, — n’arrivaient au combat qu’après s’être rendus invulnérables, les Gaulois, se dépouillant de leurs vêtements habituels, y venaient presque nus ; tel était le premier rang de leur armée, composé des plus jeunes, des plus beaux et des plus héroïques. Au premier abord, avant d’avoir fait l’épreuve du fer, l’ennemi lui-même éprouvait une sorte de terreur devant cette témérité surhumaine. » — « Coupés avec les haches à deux tranchants. — dit Pausanias, — ou déchirés à coups d’épée, l’emportement de leurs âmes (des Gaulois) ne faiblissait pas tant qu’ils respiraient ; retirant les traits de leurs blessures, ils les retournaient contre les Grecs. »


Des lettres seront déposées sur ton bûcher (page 199).

Cette foi dans la perpétuité de la vie se retrouvait dans toutes les circonstances et affectait nécessairement mille formes. — « Dans les funérailles (dit Diodore de Sicile), les Gaulois déposent des lettres écrites aux morts par leurs parents, afin qu’elles soient lues par les défunts qui les ont précédés. » — En citant ce passage de Diodore, Jean Raynaud (dans son ouvrage sur le Druidisme) ajoute ces belles paroles : « Que de regards devaient donc suivre, en imagination, ces voyageurs, plonger à travers l’espace avec eux, assister à leur arrivée, à leur étonnement, à leur réception ! Si l’on ne pouvait empêcher les larmes, du moins brillait toujours sur les lèvres le sourire de l’espérance. »


Il demande au druide s’il ne connaît pas un remplaçant (page 200).

Voici ce que dit Posidonius sur cette coutume étrange : — « Un Gaulois tombait-il sérieusement malade, c’était pour lui un avertissement de l’ange de la mort de se tenir prêt à partir ; mais que cet homme eût d’importantes affaires à terminer, qu’une famille l’enchaînât à la vie, que la mort lui fût enfin un contre-temps, si aucun de ses clients ou de ses proches n’était en disposition de partir à sa place, il faisait chercher un remplaçant. Celui-ci arrivait bientôt accompagné d’une troupe d’amis ; stipulant une somme pour prix de sa peine, il la distribuait souvent en cadeaux de départ à ses compagnons. Parfois il s’agissait simplement d’un tonneau de vin : on dressait une estrade, on faisait une espèce de fête ; puis le banquet terminé, le héros se couchait sur son bouclier et se faisait trancher les liens du corps par le couteau sacré. » — Si cette coutume de nos pères semble barbare dans sa grandeur naïve, n’oublions pas que de nos jours le riche qui craint les fatigues de la vie de soldat ou qui a peur de mourir à la guerre achète aussi un remplaçant.


Il prit trois pièces d’argent à la tête de cheval (page 201).

La plupart des monnaies gauloises portaient pour effigie une tête de cheval. Quant à la coutume de charger les mourants de payer leurs dettes contractées, ou d’en contracter de payables après la mort, voici ce que disent les historiens sur cette coutume, qui prouve combien était profondément enracinée dans l’esprit gaulois la foi à la perpétuité de la vie : — « On se prêtait de l’argent à rembourser dans l’autre monde, — dit Pomponius Mela, — et même le remboursement des créances était remis après la mort. » — « Après avoir quitté les murs de Marseille, — dit Valère Maxime, — je trouvai cette ancienne coutume des Gaulois, qui ont institué, comme on sait, de se prêter mutuellement de l’argent à rembourser après la mort, car ils sont persuadés que les âmes des hommes sont éternelles, »


J’irai continuer de vivre ailleurs avec lui (page 201).

« Il y a des Gaulois, — dit Pomponius Mela, — qui se placent volontairement sur le bûcher de leurs amis, comme devant continuer de vivre ensemble après la mort. »


Strasbourg (page 203).

Autrefois Argentoratum.


Le crime de la mère est avéré (page 206).

Cette superstition, dit M. Amédée Thierry dans son Histoire des Gaulois, t. II, p. 63, a inspiré à un poète grec inconnu quelques vers pleins de grâce, qui méritent de trouver place ici :

« C’est le Rhin, ce fleuve au cours impétueux, qui éprouve chez les Gaulois la sainteté du lit conjugal. — À peine le nouveau-né, descendu du sein maternel, a-t-il poussé le premier cri, que l’époux s’en empare. — Il le couche sur son bouclier et court l’exposer aux caprices des flots ; car il ne sentira pas dans sa poitrine battre un cœur de père avant que le fleuve, juge et vengeur du mariage, ait prononcé l’arrêt fatal, — Ainsi donc, aux douleurs de l’enfantement succèdent pour la mère d’autres douleurs ; elle connaît le véritable père, et pourtant elle tremble dans de mortelles angoisses, elle attend ce que décidera l’onde inconstante. » (Julian., Epist. XV, ad Maxim, philos. — Idem, Orat. in Constant, imper. — Anthol., l. I, ch. LXIII.)


Ont-ils de vaillants coqs de combat ? (page 207.)

Les coqs de combat gaulois, dont l’image surmontait leur enseigne de guerre, étaient très-recherchés. — « Pour récompenser l’enfant de sa docilité, je lui donnerai deux coqs gaulois des plus acharnés au combat. » (Pétrone, Satyricon, chap. LXXXVI.)


Les Gaulois du Bas-Languedoc (page 209).

Alors les Gaulois Tectosages.



CHAPITRE IV.


Sans doute elle était venue du fond de l’Asie (page 214).

« Les puissants essaims des nations sciltiques et celtiques ou Gaulois (puisque les Celtes sont les premiers peuples connus qui occupèrent la Gaule), poussés providentiellement par la Providence dans le continent de l’Europe, sortis des mêmes montagnes que les essaims de l’Inde et de l’Asie, avaient dû nécessairement s’y empreindre des mêmes croyances… Si le rassemblement devant les mêmes autels dans les montagnes d’Asie, des patriarches inconnus, qui sont devenus les pères des nations, suffit pour expliquer les affinités générales qui se trouvent entre l’essaim celtique (ou gaulois) et les autres, quelle difficulté y a-t-il à ce qu’il se trouve des affinités plus particulières encore entre les deux races celtique et hébraïque ? » (Jean Raynaud, DRUIDISME, Encycl. mod.)

D’où il suit, selon Jean Raynaud, et il le démontre avec une irrésistible puissance historique et logique, que les religions hébraïque, brahmique et druidique sortent de la même souche. Ainsi les Hébreux, de même que les Gaulois, avaient la plus grande vénération pour le chêne, ainsi que le prouve le chêne de Sichen, etc., etc. De même qu’aux Gaulois, les pierres brutes servaient spécialement d’autels aux Hébreux et avaient d’autres emplois communs aux deux peuples : servant chez les Gaulois, ainsi que chez les Hébreux, de limites de frontières, de tombes, de monuments commémoratifs d’actions glorieuses ou de la foi jurée.

« Aussi loin que l’on puisse remonter dans l’histoire de l’Occident, on trouve la race des Celtes (devenue la race gauloise) occupant le territoire continental compris entre le Rhin, les Alpes, la Méditerranée et l’Océan. » (Amédée Thierry, Hist. des Gaulois, vol. I, p. 1)


Ne faire qu’un seul corps (p. 216)

L’histoire du gouvernement gaulois offre trois périodes distinctes :

Théocratie du druidisme. — Royauté et aristocratie. — Constitutions populaires fondées sur l’élection et la volonté du plus grand nombre. (Amédée Thierry, Hist. des Gaulois, vol. II, p. 65.)

Plusieurs siècles avant Jésus-Christ, l’élection populaire remplaça l’antique privilège de l’hérédité. Les rois et les chefs absolus furent expulsés, le pouvoir remis aux mains de législateurs librement consentis ; mais l’aristocratie héréditaire ne se laissa pas déposséder sans combat ; appuyée sur le peuple des campagnes, elle engagea contre les villes une guerre longue et mêlée de chances diverses. (Amédée Thierry, Hist. des Gaulois, vol. II, p. 104)… Ce fut une sorte de démocratie pure où le peuple en corps nommait, soit des sénats souverains, soit des magistrats et des chefs, et où, suivant l’expression d’un de ces petits chefs populaires, la multitude conservait autant de droits sur le chef que le chef sur la multitude… Tout le système politique de la Gaule reposait sur l’association ; de même que des individus clients se groupaient autour d’un patron, de petits états se déclaraient clients d’un état plus puissant ; les états également puissants s’associaient et se fédéraient entre eux ; des lois fédératives, universellement reconnues, réglaient les rapports de tous ces états, fixaient les services mutuels, déterminaient les droits et les devoirs. (Améd. Thierry, Hist. des Gaulois, vol. II, p. 108.)


Au gui l’an neuf (p. 230).

Ce cri de ralliement druidique au gui l’an neuf, est encore, dans quelques provinces, acclamé par de pauvres enfants qui parcourent les rues au nouvel an.


Que ce cri avertisse les tribus (p. 230).

Voici ce qu’on lit dans César au sujet de ce singulier moyen de communication de télégraphie orale, si l’on peut s’exprimer ainsi :

« Les paysans gaulois, occupés aux travaux des champs, se communiquaient les nouvelles importantes en se les criant de l’un à l’autre ; elles volaient ainsi de bourg en bourg, de cité en cité, avec la rapidité d’un son. Un événement arrivé à Genabum (Orléans), au lever du soleil, dans les jours les plus courts de l’année, put être connu chez les Avernes (les Gaulois de l’Auvergne), à cent soixante milles de distance, avant la fin de la nuit. » (César, De Bello Gall., liv. VII, ch. III.)

Nous cherchons les préceptes les plus simples (page 233).

Diogène Laërte cite ces belles maximes, empruntées à la philosophie druidique : — Obéir aux lois de Dieu. — Faire le bien de l’homme. — Supporter avec courage les accidents de la vie.

Les astres dont nous étudions la marche (page 233).

« L’astronomie préoccupait assez la Gaule pour qu’il soit permis de penser qu’elle y formait aussi, parmi les druides, une classe particulière de savants ; pendant que les uns s’efforçaient, suivant Ammien Marcellin, de découvrir les enchaînements et les sublimités de la nature terrestre, d’autres s’appliquaient aux mêmes travaux pour la nature céleste. Ce qui est certain, c’est que les plus savants des druides avaient su se poser les problèmes fondamentaux de l’histoire géométrique du ciel ; ils faisaient profession de connaître, comme on le voit dans César et dans Nicla, les dimensions de la terre, ainsi que sa forme, la grandeur et la disposition du ciel, les mouvements des astres… Que l’on compare sur le système du monde le langage des bardes (une des classes des druides) et des pères de l’Église au sixième siècle, c’est la science à côté de l’ignorance. Que l’on réfléchisse seulement à ce que suppose de science ce simple passage du Chant du monde, par Talyessin :

« Je demanderai aux bardes du monde : — Pourquoi les bardes ne me répondraient-ils pas ? — Je leur demanderai qui est-ce qui soutient le monde ? pour que, privé de supports, il ne retombe pas ! — Et s’il tombe ? quel chemin suit-il ? — Mais qui pourrait lui servir de support ? — Quel grand voyageur est le monde ! — Tandis qu’il glisse sans repos, il demeure tranquille dans son orbite.— Et combien la forme de cette orbite est admirable pour que le monde ne tombe dans aucune direction !

» Qui ne sent frémir ici ce grand courant duquel était sorti Pythagore, et qui en reparaissant devait produire Kepler et toutes les explorations modernes des étoiles ?

» L’attention des druides s’était surtout attachée à la lune. On sait, par le témoignage d’Héraclée, qu’ils s’étaient aperçus (probablement par la considération des dentelures) de l’existence des montagnes lunaires, qui fournit à l’astronomie un principe si riche en inductions ; aussi peut-on avoir quelque soupçon des idées que leur dogme favori de la continuité de la vie avait dû leur inspirer touchant les perspectives les plus profondes de l’astronomie. » (Jean Raynaud, Encyclopédie nouvelle, DRUIDISME.)


Les druides l’ont condamnés à mourir (page 234).

Les sacrifices humains, si calomnieusement reprochés aux druides, se composaient d’exécutions juridiques et de sacrifices volontaires. Quant à ceux-ci, les chrétiens ne sauraient en contester les grandeurs : le Christ en croix, offrant à Dieu le Père son sang pour la rédemption du monde, est le type parfait du sacrifice volontaire.

« Le jugement des meurtres, dit Strabon, est spécialement attribué aux druides. » Diodore de Sicile ajoute : « Après avoir retenu les criminels en prison, les druides les attachent à des potences en l’honneur des dieux, ou les placent avec d’autres offrandes sur des bûchers. » César dit enfin : « Les druides sont persuadés que les supplices les plus agréables aux dieux sont ceux des criminels saisis dans le vol, le brigandage ou autres forfaits. »

Citons enfin ces éloquentes paroles de Jean Raynaud :

« En définitive, la principale différence des exécutions druidiques et des nôtres venait de ce qu’alors la religion se trouvait d’accord avec la loi civile pour les ordonner. Sans approuver, sur ce point, la loi de nos pères, puisque c’est une sorte de lâcheté de se défaire des criminels au lieu de les corriger, je ne serais pas embarrassé pour dire quel est des deux spectacles le plus abominable, ou du druide rendant lui-même à Dieu, comme une hostie expiatoire, au milieu d’une assemblée en prière, le criminel condamné, ou du bourreau de nos jours, du mercenaire sans entrailles et sans foi, saisissant brutalement le criminel pour l’égorger sur un tréteau en forme de démonstration de police. ». . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

« En outre des sacrifices volontaires et expiatoires, les druides, quelques siècles avant César, dévouaient parfois à leur dieu, de même que les Hébreux, les ennemis de leur nationalité. Après la victoire, sur le lieu même de la lutte, ils en faisaient des holocaustes ; la formule de l’anathème était presque semblable à celle employée par les Hébreux, et en lisant les exterminations dans le Chanaan, on pourrait se croire avec les Gaulois des temps les plus reculés : hommes et animaux, le sacrifice embrassait tout ; l’incendie du butin accompagnait, comme un encens, l’offrande du sang. Que l’on compare la prise d’Amalec ou de Jéricho avec quelque holocauste gaulois : — Ils tuèrent, dit JOSUÉ, tout ce qui était dans la ville, depuis l’homme jusqu’à la femme, depuis l’enfant jusqu’au vieillard ; ils frappèrent avec le glaive les bœufs, les ânes et les moutons ; ils incendièrent la ville et tout ce qu’elle contenait. »

Certes, il faut déplorer ces barbaries des âges primitifs, qui toujours, d’ailleurs, allèrent en s’affaiblissant dans la religion druidique ; mais nos livres saints, l’Ancien Testament, les Prophètes, etc., etc., dont la source est, dit-on, divine, fourmillent de barbaries, d’atrocités plus épouvantables encore, et ils n’offrent pas une idée d’une aussi consolante sublimité que cette PERPÉTUITÉ DE LA VIE, base fondamentale du druidisme. »


Les pierres sacrées de Karnak (page 240).

La forêt de Karnak, maintenant détruite, s’étendait alors presque jusqu’au bord de la mer ; quant aux pierres druidiques qui existent encore de nos jours (en 1850), voici la description qu’en donnait un écrivain du siècle passé. (Ogée, Dictionnaire de la Bretagne, t. I, p. 161. On peut voir aussi, Voyage pittoresque dans l’ancienne France, par M. Taylor. — Bretagne, t. I.)

Carnac, sur la côte, à cinq lieues et demie à l’ouest-sud-ouest de Vannes, son évêché, à vingt-cinq lieues et demie de Rennes et deux lieues et demie d'Auray, sa subdélegation et son ressort.

Sur la côte, au sud du Morbihan, tout auprès du bourg de Carnac, sont ces pierres étonnantes dont les antiquaires ont tant parlé ; elles occupent le terrain le plus élevé en face de la mer, depuis ce bourg jusqu’au bras de mer de la Trinité, dans une longueur de six cent-soixante-dix toises ; elles sont plantées en quinconce comme des allées d’arbres, et forment des espèces de rues tirées au cordeau. La première de ces rues, en les prenant du côté de Karnac, a six toises de largeur ; la seconde cinq toises trois pieds ; la troisième six toises ; la quatrième six toises deux pieds ; la cinquième et la sixième cinq toises chacune ; la septième trois toises trois pieds ; la huitième trois toises quatre pieds ; la neuvième quatre toises, et la dixième deux toises ; ce qui fait en largeur totale quarante-sept toises. Ces pierres sont de grosseurs différentes et plantées à dix-huit, vingt, vingt-cinq pieds les unes des autres ; il y en a qui ne sont pas plus grosses que des bornes ordinaires ; mais en revanche il s’en voit, surtout à l’extrémité des rangs, qu’on ne peut considérer sans étonnement. Elles sont hautes de seize, dix-huit et même cinquante pieds ; quelques-unes sont d’une masse si prodigieuse, qu’elles doivent peser plus de quatre-vingt milliers. Ce qu’il y a de plus étonnant, c’est que la plus grande grosseur est en haut et la moindre en bas, de sorte qu’il en est plusieurs qui sont portées comme sur un pivot ; elles sont brutes, telles qu’on les a tirées du rocher. On en remarque seulement quelques-unes qui ont un caractère aplati, et l’on a affecté de tourner ce côté de manière qu’il fait face aux rues.


Dont les corps allaient se dissoudre en une flamme brillante (page 242).

Les Gaulois, comme les Grecs, brûlaient les morts ; ils préféraient avec raison cette volatilisation de la matière par la flamme à ces charniers répugnants appelés cimetières, qui, dans un temps donné, finiront par envahir l’espace réservé aux vivants.

Mais, contrairement aux Grecs, les Gaulois, beaucoup moins préoccupés de la matière ou de ce qui en rappelait les souvenirs, n’en conservaient pas les cendres.

« Les Gaulois, dit Jean Raynaud, tous pénétrés des sublimes enseignements de la spiritualité druidique, sentaient bien qu’il n’y avait point là le sujet d’un crime ; s’ils faisaient moins d’état des cendres ils songeaient davantage aux âmes, c’est une différence que les monuments ont consacrée d’une manière bien sensible ; au lieu de l’urne païenne noyée dans les pleurs, on trouve des sculptures gauloises qui représentent le personnage mortuaire, les yeux levés vers le ciel, d’une main tenant la cippe, et de l’autre, à demi ouverte, montrant l’espace. Au lieu de ces stériles inscriptions du paganisme, qui n’inspirent jamais que le deuil et les larmes, on trouve chez nos pères des inscriptions qui savent, à côté du regret, recommander l’espérance. On connaît celle-ci, découverte sur les bords du Rhône : Si la cendre manque dans cette urne, alors regarde l’esprit, sur le salut duquel rien n’a été dit témérairement. »

Quel parfait affranchissement de tout lien matériel ! (DRUIDISME. Encyclop. nouv.)


Toujours ainsi à l’infini (page 243).

« Pour les druides, la totalité des êtres qu’embrasse la pensée se divise en trois cercles : le premier de ces cercles (CYLCH-Y-CEUYANT) Cercle de l’Immensité, de l’infini, n’appartient qu’à Dieu ; le second (CYLCH-Y-GWYNPYD), Cercle du Bonheur, comprenait les êtres revêtus du degré supérieur de sainteté, c’était le paradis ; le troisième cercle (CYLCH-YR-ABRED), Cercle des Voyages, enveloppait tout l’ordre naturel ; c’est là, au fond des abîmes, dans les grands océans de l’espace, que commençait le premier soupir de l’homme ; placé bientôt entre le bien et le mal, il s’exerçait longtemps dans les épreuves de ce milieu, sortant de l’une par la mort, reparaissant dans une nouvelle épreuve par la renaissance ; le but proposé à son courage était d’acquérir ce que l’on nommait le point de liberté, équilibre entre les devoirs et les passions. Arrivé à ce point d’excellence, l’homme quittait enfin le cercle des voyages ou épreuves, pour prendre place dans celui du bonheur. Il n’y avait pas d’enfer, l’âme dégradée ou mauvaise retombait à une condition inférieure d’existence, plus ou moins tourmentée ; il y avait assez de supplices en évidence dans le vaste cercle de l’humanité pour dispenser d’un lieu à part pour les punitions. » (Jean Raynaud, DRUIDISME. Encyclop. nouv.)




LA CLOCHETTE D’AIRAIN.




CHAPITRE PREMIER.


Où était établi le camp de César (page 256).

À peu de distance de la ville de Saint-Nazaire, qui existe aujourd’hui. — Le pays ainsi dévasté par l’incendie comprenait presque la totalité des départements du Morbihan et de la Loire-Inférieure de nos jours.


Ainsi que l’a ordonné le chef des cent vallées (page 256).

On a justement admiré le patriotisme des Russes incendiant Moskow pour chasser et affamer l’armée française, mais il ne s’agissait que d’une seule ville ; combien plus admirable a été l’héroïque patriotisme de nos pères ! car, à cette époque, pour combattre l’invasion romaine, non-seulement la Bretagne, mais presque un tiers de la Gaule, a été livré à l’incendie par ses habitants.

Mais laissons parler César :

« Le chef des cent vallées convoqua les chefs des armées gauloises coalisées, et leur déclara qu’il était urgent de changer le système de guerre et d’en adopter un autre plus approprié au caractère d’une lutte nationale ; qu’il fallait affamer l’ennemi, intercepter les vivres aux hommes, le fourrage aux chevaux ; travail d’autant plus aisé que les Gaulois étaient forts en cavalerie, et que la saison les favorisait ; les Romains ne pouvaient encore fourrager au vert, il serait facile de les surprendre dans les habitations éloignées où le besoin les conduirait, et de les détruire ainsi en détail ; mais le salut commun, — ajouta le chef des cent vallées, — exige des sacrifices particuliers ; NOUS DEVONS NOUS RÉSOUDRE À BRÛLER TOUTES NOS HABITATIONS, TOUS NOS VILLAGES ET CELLES DE NOS VILLES QUI NE SAURAIENT SE DÉFENDRE, de peur qu’elles ne deviennent un refuge pour les lâches qui déserteraient notre cause, ou qu’elles ne servent à attirer l’ennemi, par l’espoir du butin : la population trouvera un refuge dans les cités éloignées du théâtre de la guerre. Ces mesures vous paraissent violentes et dures ? mais vous serait-il plus doux de voir vos femmes outragées et captives ? vos enfants chargés de chaînes, vos parents, vos amis égorgés ? vous mêmes réservés à une mort honteuse ? car voilà le sort qui vous attend si vous êtes vaincus. » (CÉSAR, De Bello Gallico, liv. VII, chap. XIV.)

«… Le chef des cent vallées fut écouté avec calme et résignation, aucun murmure ne l’interrompit, aucune objection ne s’éleva contre le douloureux sacrifice qu’il demandait ; ce fut à l’unanimité que les chefs de tribus votèrent la ruine de leur fortune, et la dispersion de leurs familles. On appliqua sans délai ce remède terrible au pays que l’on craignait de voir occuper par l’ennemi… De toute part, on n’apercevait que le feu et la fumée des incendies ; à la lueur de ces flammes, à travers ces décombres et ces cendres, l’on voyait une population innombrable se diriger vers la frontière, où l’attendaient un abri et du pain ; souffrante et morne, mais non pourtant sans consolation, puisque ces souffrances devaient amener le salut de la patrie. » (AMÉDÉE THIERRY, Hist. des Gaulois, t. III, chap. VIII, p. 103.)


CHAPITRE II.


Tor-è-benn (page 281)

Cri de guerre des Gaulois, signifiant frappe à la tête, assomme ! (LATOUR D’AUVERGNE, Origines gauloises.)


CHAPITRE III.


La Mahrek-ha-droad (page 294).

Troupe composée de cavaliers (mahrek) et de piétons (droad).

« Un certain nombre de cavaliers gaulois choisissaient un pareil nombre parmi les piétons les plus agiles et les plus courageux ; chacun d’eux veillait sur un cavalier et le suivait dans les combats ; la cavalerie se repliait sur eux si elle était en danger, et les piétons accouraient ; si un cavalier blessé tombait de cheval, le piéton le secourait et le défendait. Fallait-il s’avancer rapidement ou faire une retraite précipitée, l’exercice avait rendu ces piétons si agiles, qu’en se tenant à la crinière des chevaux, ils suivaient les cavaliers à la course. » (CÉSAR, De Bell. Gall., liv. I, chap. XLVIII.)


La trimarkisia (page 294).

« Dans ce corps de cavalerie, chaque cavalier était suivi de deux écuyers montés et équipés qui se tenaient derrière le corps d’armée ; lorsque le combat s’engageait, le cavalier était-il démonté, les écuyers lui donnaient un de leurs chevaux ; si le cheval et le cavalier étaient tués ou que le cavalier blessé fût emporté du champ de bataille par un des écuyers, l’autre occupait dans l’escadron la place du cavalier. Ce corps de cavalerie s’appelait trimarkisia, de deux mots qui, dans la langue gauloise, signifiaient trois chevaux. » (130, v. 1. Histoire des Gaulois, Amédée Thierry. — PAUSANIAS. L.  X.)


Leurs chants de guerre (page 295).

Les Bardes faisaient, nous l’avons dit, partie de la corporation des Druides…

«… L’art — dit Jean Raynaud — n’était représenté chez les Gaulois que par les bardes ; ils avaient pour ceux-ci un attachement sans bornes… ils ne les séparaient pas des autres ministres de la religion druidique ; le don céleste de l’inspiration leur paraissait une investiture suffisante ; ils comprenaient que l’art n’est digne de celui qui en fait briller les rayons qu’à la condition d’encourager les hommes dans les efforts qui font la noblesse et la sainteté de la vie. — Les bardes, — dit Lucain, — se plaisaient à célébrer la gloire des fortes armes, et en illustrant ainsi les héros, ils allumaient dans les cœurs le désir d’imiter ces modèles, dans l’espoir d’être un jour chantés comme eux. — On a comparé les bardes à Tyrtée qui, par l’autorité de ses accents, disposait, comme un Dieu, de la victoire. — Ils se font écouter des ennemis comme de leurs amis, — dit Diodore de Sicile ; — souvent, entre les deux armées en bataille, quand les rangs marchaient déjà l’un sur l’autre, les glaives tirés, les piques en arrêt, les bardes s’avançant au milieu suspendent le combat, comme s’ils venaient tout à coup apaiser des bêtes féroces par leurs enchantements.

» Le but des bardes n’était pas de divertir, avec d’harmonieux accords, des auditeurs mollement rassemblés autour d’eux pour leur plaisir ; animés par la religion dont ils se sentaient les ministres, ils regardaient le ciel, et suivis de la multitude séduite, ils marchaient en chantant dans la voie que leur montraient les dieux. » (JEAN RAYNAUD, Druidisme.

«… Les Gaulois eurent aussi leurs Pindares et leurs Tyrtées, le talent des bardes, le talent des poètes s’exerçant à chanter en vers héroïques les actions des grands hommes, à entretenir dans le cœur des Gaulois l’amour de la gloire. » (LATOUR D’AUVERGNE, Origine gauloise, p. 168.)

« Les Gaulois pensent, — dit Nicolas de Damas, — qu’il est honteux de vivre subjugués, et que, dans toute guerre, il n’y a que deux chances pour l’homme de cœur : « VAINCRE OU PÉRIR » (NIC. DAMASC.— ap. — Strab. serm. XII.)

Un nom qu’il n’ose plus porter (page 295).

César, dans ses Commentaires, et plus tard les historiens ont pris le titre de commandement exercé par ce héros de la Gaule pour son nom propre, et, par corruption, ils l’ont écrit Vercingetorix, au lieu de ver-cinn-cedo-righ, chef-des-cent-vallées, ainsi que le fait observer M. Amédée Thierry (Hist. des Gaulois, t. III, pag. 86). Vercingetorix, natif d’Auvergne, était fils de Celtil, qui, coupable de conspiration contre la liberté de sa cité, avait expié sur le bûcher son ambition et son crime ; héritier des biens de son père, dont il rougissait de porter le nom, puisqu’on ne le trouve jamais autrement désigné dans l’histoire que par son surnom de guerre, le jeune Gaulois, devenu l’idole du peuple, voyagea beaucoup, alla à Rome et y vit César qui tâcha de se l’attacher, mais le Gaulois repoussa l’amitié de l’ennemi de sa patrie. Revenu dans son pays, il travailla secrètement à réveiller parmi les siens le sentiment de l’indépendance, et à susciter des ennemis aux Romains ; quand l’heure d’appeler le peuple aux armes fut venue, il se montra au grand jour, dans les cérémonies druidiques, dans les réunions politiques, partout enfin on le voyait, employant son éloquence, sa fortune, son crédit, en un mot, tous ses moyens d’action sur les chefs et sur la multitude, pour les amener, comme dit un historien, à revendiquer le droit de la vieille Gaule. (AMÉDÉE THIERRY, Hist. des Gaules.)



fin des notes du premier volume