Les Machabées de la Nouvelle-France/Introduction

Imprimerie de Léger Brousseau (p. 7-10).


INTRODUCTION



Quand j’étais enfant, mon père, me prenant sur ses genoux, me racontait le soir quelque fait de la grande épopée de l’Ancien Testament. Il me souvient encore que ma jeune imagination se plaisait surtout aux récits de ces combats merveilleux où la justice et le bon droit, bien que souvent représentés par la faiblesse ou par l’infériorité du nombre, finissent par triompher de la force et de la supériorité numérique des méchants. David enfant, qui tue le géant Goliath, Samson qui se bat seul contre des armées de Philistins et massacre des milliers d’ennemis avec une mâchoire d’âne, Judas Machabée et ses frères luttant avec avantage, quoique toujours en nombre inférieur, contre les puissants rois de Syrie et prodiguant leur sang pour la défense de la religion et de la patrie, tous les hauts faits de ces chefs du peuple de Dieu sont encore aussi vivement présents à ma mémoire que dans ces beaux jours où mon père me les racontait au coin du feu.

La vivacité de ces souvenirs me démontre combien le cerveau de l’enfant est impressionnable et comme les faits qui le frappent à cet âge éveillent dans son imagination naissante une extrême curiosité, et restent à jamais imprimés dans sa mémoire. J’ai donc songé à raconter à la jeunesse canadienne l’histoire d’une famille du pays, dont les exploits sont aussi propres à nous étonner qu’à flatter notre patriotisme ; c’est l’histoire de la famille LeMoyne dont l’un des fils sut mériter, de son vivant, par ses vertus héroïques, le glorieux surnom de Machabée de Montréal ; tandis que la postérité, étendant cette dénomination à tous les membres de la famille de cet homme illustre, les nomme avec orgueil Les Machabées de la Nouvelle-France.

Dispersées de ci et de là dans l’histoire ou enfouies dans des mémoires manuscrits, les nobles actions qui valent aux frères LeMoyne une si belle appellation, méritent d’être groupées en faisceaux lumineux et d’être offertes en exemple à la jeunesse, afin d’éveiller en elle l’admiration des grandes choses et l’amour de la patrie.