Les Mémoires d’un nonce - Le Cardinal Ferrata

Léon Grégoire
Les Mémoires d’un nonce - Le Cardinal Ferrata
Revue des Deux Mondes7e période, tome 2 (p. 392-407).
LES MÉMOIRES D’UN NONCE
LE CARDINAL FERRATA

On a souvent demandé, dans les joutes récentes du Parlement et de la presse, à quoi sert un nonce. D’aucuns, d’une voix très haute, ont exprimé leurs alarmes au sujet de cette « personnalité étrangère » qui pouvait, à l’abri même de son intangible dignité de diplomate, diriger dans l’État une mobilisation de l’Eglise. Et d’un tout autre point de l’horizon politique s’élevaient timidement de tout autres murmures : des voix étouffées, qu’assourdissait un sentiment de gène, chuchotaient que le souci même de prudence diplomatique dont s’inspirent les actes d’un nonce peut l’induire, parfois, à réclamer de l’épiscopat indigène certains fléchissements, ou de l’opposition catholique certains désarmements, et qu’au demeurant, théocratie et démocratie ne pouvant avoir rien de commun, cet agent de liaison que serait un nonce est parfaitement inutile.

Trois volumes fraîchement arrivés de Rome doivent désormais abréger ces débats : ce sont les Mémoires du cardinal Ferrata, mort secrétaire d’État du pape Benoît XV [1]. Ils nous conduisent de l’année 1847, date de la naissance du cardinal, jusqu’à l’année 1896, qui marqua le terme de ses nonciatures. Quatorze cents pages durant, nous voyons là ce qu’est un nonce, ce qu’il est dans le monde actuel, sur terrain parlementaire, en pays démocratique. Les archives des chancelleries ensevelissent d’ordinaire avec une invincible jalousie les deux ou trois quarts de siècle immédiatement écoulés : lorsqu’on voit l’actuel gouvernement du Saint-Siège trouver naturel, et même très opportun, que M. l’avocat Nazzareno Ferrata nous livre dès maintenant, dans les Mémoires de son frère, tous les dessous d’une histoire religieuse presque contemporaine, on peut conclure qu’au milieu des polémiques soulevées par la prochaine institution d’une nonciature, ces Mémoires doivent être interprétés comme une véritable leçon de choses, susceptible d’éclairer l’opinion publique et de rassurer utilement, de part et d’autre, certaines inquiétudes. Ce qui ajoute à l’ascendant d’une telle leçon, c’est que le cardinal dont elle émane dirigea, durant les derniers mois de sa vie, tout le réseau de la diplomatie vaticane. Et pour sceller, semble-t-il, l’autorité de ces pages, Benoît XV est intervenu, en écrivant à M. l’avocat Ferrata, à la date du 6 janvier 1921, une lettre qui sert de portique aux Mémoires :


Il nous est doux, et consolant de penser que la publication de ces très intéressants Mémoires contribuera à faire mieux connaître les qualités et les mérites du cardinal, son tact, sa rare habileté dans la conduite des affaires, les services qu’il a rendus à l’Église et au Saint-Siège, et aidera à perpétuer le souvenir de ce membre si regretté du Sacré Collège. Nous formons le vœu que votre livre, qui fait ressortir les bienfaits de l’Église dans ses rapports avec les autorités civiles, ainsi que la droiture de ses représentants, soit profitable à tous ceux qui étudient le grave problème des relations entre l’Église et les Étals, et serve de guide et d’exemple aux ecclésiastiques qui sont appelés à la carrière diplomatique.


On remarquera tout ce que ces lignes contiennent de précisions, et tout ce qu’elles ouvrent de perspectives : elles érigent le cardinal Ferrata en une sorte d’auteur classique pour les nonces présents et futurs ; et ses tractations avec les gouvernements contemporains peuvent désormais être assimilées à celles que conduisit jadis, avec les souverainetés de la Sainte-Alliance, le cardinal Consalvi, et qui, grâce aux autres Mémoires de cet autre cardinal, demeurèrent longtemps un modèle pour la diplomatie pontificale.


I

Avant de présider à l’une des vicissitudes les plus critiques qu’ait traversées le catholicisme français, Mgr Ferrata eut le double honneur de rétablir en Suisse la paix confessionnelle et de restaurer en Belgique la représentation du Saint-Siège. Ses trois missions en Suisse, en 1863, 1884 et 1888, mirent un terme aux conflits aigus qui, durant les dernières années de Pie IX, s’étaient élevés entre certains gouvernements cantonaux de la Suisse alémanique et l’évêque de Bâle Mgr Lachat, et puis, par répercussion, entre le pouvoir fédéral et le Saint-Siège. La translation de Mgr Lachat aux fonctions d’administrateur apostolique du Tessin fut un moyen fort élégant de ramener l’harmonie dans les cantons septentrionaux et de préparer en même temps, pour les territoires helvétiques de langue italienne, les bases d’une nouvelle organisation ecclésiastique. Le jeune prélat qui répara les ruines du passé en concertant ces assises de l’avenir se révéla tout de suite comme expert en l’art de recoudre. Pour faire accepter à l’opinion catholique certains sacrifices d’amour-propre requis par les intérêts supérieurs de l’Église, et pour faire comprendre à la puissance laïque tout ce qu’il y a de respectable dans les jalouses fiertés des consciences religieuses, il fallait donner à cette opinion, à cette puissance, l’impression que le prélat qui entrait en contact avec elles envisageait avec un certain esprit de sollicitude leurs susceptibilités respectives : Mgr Ferrata excellait à donner cette impression.

Réinstallant à la fin de mai 1885 la nonciature de Bruxelles, qui depuis cinq années était sans titulaire, il apprenait que la fraction « libérale, » fraîchement vaincue, préméditait de faire accueillir le nonce par l’hostilité de la rue. Un sens achevé des nuances devenait nécessaire, pour éviter que le retour d’un représentant pontifical, succédant à la victoire électorale des catholiques, ne prît l’aspect d’une revanche politique. Il n’était dans l’esprit ni de Léon XIII ni de Mgr Ferrata, que la diplomatie vaticane rentrât dans les fourgons d’un parti vainqueur, ce parti fùt-il officiellement étiqueté catholique : le souci qu’eut Mgr Ferrata d’échanger rapidement quelques courtoisies avec Frère Orban, avec Bara, avec ceux-là mêmes qui naguère avaient distendu les liens entre la Belgique et le Pape, amena le parti libéral, dès 1886, à voter à l’unanimité les crédits de la légation de Belgique auprès du Saint-Siège. Tout en sachant calculer, comme l’exigeait un certain réalisme, les incidences de la politique sur la religion et les répercussions des faits parlementaires sur les destinées de l’Eglise, Mgr Ferrata veillait à ce que la religion fût dégagée de la politique. Lorsque, en 1889, il quitta Bruxelles, ces mêmes journaux libéraux qui cinq ans plus tôt l’avaient menacé l’escortaient de leurs regrets, et le Journal de Bruxelles, commentant ce changement d’attitude, écrivait : « Si le parti libéral est revenu à des idées plus saines, Mgr Ferrata y a largement contribué. » La conception même d’une nonciature, suspecte en 1885 à toute une partie du peuple belge, était, en 1889, unanimement comprise et acceptée.


II

De longue date ce prélat connaissait la France ; de longue date, il avait senti que la politique suivie par les catholiques au début de la troisième République devait se modifier au gré des circonstances nouvelles. Pie IX tout le premier, — Mgr Ferrata nous révèle ce détail, — en avait eu l’intuition, le jour où il disait à Mgr Czacki : « Mon successeur doit s’inspirer de mon attachement à l’Eglise et de mon désir de faire le bien ; quant au reste, tout a changé autour de moi ; mon système et ma politique ont fait leur temps, mais je suis trop vieux pour changer d’orientation ; ce sera l’œuvre de mon successeur. » Dès l’automne de 1879, Mgr Czacki, envoyé par Léon XIII auprès de la « République des républicains, » — auprès de Gambetta, — inaugurait une méthode dont Mgr Ferrata, alors auditeur à la nonciature de Paris, nous explique ainsi l’esprit :


De même que la Papauté, jadis, au temps des monarchies absolues, empêchait la religion de devenir une chose d’État, de même, aujourd’hui, sous les régimes démocratiques, elle doit empêcher la religion de devenir une chose de parti ; et lorsque des hommes politiques, même très ardemment pieux au fond du cœur, établissent une si intime solidarité entre leurs opinions et leur foi, que leur religion risque de passer, aux yeux du public, pour un moyen de leur politique, il convient que le Saint-Siège et son représentant, déclinant toute complicité, élèvent au-dessus des contingences humaines ce christianisme dont i)s ont la garde. C’est ce que fit Mgr Czacki ; et lorsque, durant ma difficile nonciature, pour appliquer, en une crise plus aiguë, des instructions plus formelles encore, j’eus à dégager le Saint-Siège et les catholiques de tout lien avec les anciens partis, l’exemple de Mgr Czacki me fut un encouragement et une leçon.


« Ce sera sans doute le dernier représentant du Saint-Siège, » avait-on dit, d’abord, de Mgr Czacki. Mais celui-ci causait avec Gambetta : « Si l’intelligent tribun, écrit Mgr Ferrata, devint partisan du maintien du Concordat, et s’il reconnut que la France doit prendre souci de ce que plus tard il appelait sa clientèle catholique dans le monde, c’est, je crois, aux entretiens de Mgr Czacki qu’il faut attribuer, en bonne partie, cet heureux élargissement de ses idées. De même, c’est au cours de l’un de ces entretiens que le Président de la Chambre dit au nonce : « Monseigneur, si j’avais su plus tôt ce que je viens d’apprendre, le gouvernement de la République aurait pu éviter bien de faux pas sur le terrain religieux. » Mgr Czacki causait avec M. Duclerc, ministre des Affaires étrangères ; et plus tard M. Duclerc devait dire : « J’ai perdu dans Mgr Czacki celui qui m’a le plus appris en matière de politique et de religion. »

Mais tandis que le nonce, patiemment, parachevait ainsi l’éducation politique de ses interlocuteurs officiels, une « pluie d’outrages, » par ailleurs, s’abattait sur lui. C’était l’heure où le Saint-Siège, d’accord avec M. de Freycinet, pour sauver les congrégations des périls qui les menaçaient, eut l’idée de faire signer par leurs supérieurs une formule de déclaration, à la fois acceptable pour l’Eglise et rassurante pour l’Etat ; mais une « coupable indiscrétion » compromettait le succès de cette initiative pacifique ; et certains catholiques, « faisant parade d’une ferveur indignée, » n’osant pas encore s’en prendre au Pape, se vengeaient sur Mgr Czacki, qui du moins eut la satisfaction de voir les ordres de femmes échapper à la dispersion. Mgr Ferrata observait : il concluait qu’un nonce, pour mieux servir l’Eglise, doit parfois s’exposer à l’injuste reproche de la desservir.

Rentré à Rome en avril 1883 comme sous-secrétaire de la congrégation des affaires ecclésiastiques extraordinaires, il apparut tout de suite à Léon XIII comme le spécialiste qui devait être consulté, employé, pour l’étude des choses de France : la fameuse lettre où le Pape confiait à M. Grévy ses anxiétés eut pour rédacteur Mgr Ferrata. Et lorsque en 1890 « l’épisode du boulangisme eut paru fournir un double enseignement : d’une part, l’impuissance des monarchistes à renverser le régime républicain ; de l’autre, une tendance, quoique vague encore, du pays, vers les idées de pacification et de justice, » ce fut à Mgr Ferrata que Léon XIII demanda « un rapport sur la situation politico-religieuse de la France. »

Le prélat, dans ce rapport, après avoir recherché » les moyens à prendre pour obtenir une plus grande identité de vues et d’action dans le corps épiscopal, indiquait qu’il était temps, pour les laïcs catholiques, « de laisser de côté les intérêts privés et secondaires, les intérêts politiques, quelque respectables qu’ils fussent, de renoncer à une opposition systématique contre le gouvernement existant, et, par-dessus tout, de cesser d’identifier cette opposition avec la cause catholique. »


Je faisais valoir, ajoute-t-il, une autre considération : l’influence plus grande que les députés conservateurs acquerraient au Parlement, s’ils se plaçaient sur le terrain légal pour défendre les intérêts de la religion. Le gouvernement, dans ce cas, serait amené peu à peu à tenir compte de leur appui, surtout quand il se trouverait poussé par les radicaux à des mesures révolutionnaires : l’axe parlementaire serait ainsi déplacé, et l’on verrait disparaître cette concentration républicaine qui avait produit l’impuissance du parti conservateur et entraîné toutes les mesures hostiles à l’Église.


Léon XIII, à qui le cardinal Place, archevêque de Rennes, parlait à son tour, en avril 1890, des « profondes racines jetées dans le pays par le régime républicain, » sentit se préciser en sa pensée l’idée d’une manifestation dont, un instant, le cardinal Place parut chargé ; le soin et la responsabilité en furent finalement confiés au cardinal Lavigerie. Le toast d’Alger, du 12 novembre 1890, fît assurément plus de bruit que ne le souhaitait la cour pontificale, qui n’y retrouvait, nous dit Mgr Ferrata, « ni ses traditions diplomatiques ni ses habitudes. » Mais Léon XIII, lui, « ne témoigna aucune surprise, connaissant de longue date la nature riche et ardente de Mgr Lavigerie, et loua le cardinal d’avoir choisi une circonstance aussi propice, obligeant ainsi le public à prêter attention à ses paroles. »

Forcer l’attention, voilà ce qu’avait voulu l’archevêque d’Alger ; on ne peut nier qu’il eût réussi. « Plusieurs fois déjà, expliquait-il à Mgr Ferrata, j’avais développé la doctrine de l’Eglise par rapport aux formes de gouvernement. Cette fois-ci, l’opinion publique s’est émue, et c’était là mon but principal. » Il y avait d’ailleurs une limite à garder, et certaine lettre qu’écrivit alors Mgr Fuzet paraissait à Mgr Ferrata « contenir des paroles trop vives et certainement inutiles à l’adresse des partis monarchiques. » Mgr Ferrata maintenait, avec une grande altitude de vues, qu’il ne s’agissait ni de « blesser » les vaincus de la politique ni de « flatter » les vainqueurs, mais d’ « empêcher que la religion, en voulant ressusciter des partis, respectables sans doute, mais morts dans l’opinion du peuple, ne descendît avec eux dans la tombe ou ne perdit tout au moins ses principales prérogatives de jeunesse et de vie. » Les traditions d’indépendance de l’Église, le souci de virginité politique où se retranche volontiers son impartiale sérénité, l’induisaient ainsi, brusquement, à proposer aux catholiques de France une orientation si neuve, que le nonce à Paris, Mgr Rotelli, avait, tout le premier, une « attitude embarrassée et hésitante. » Léon XIII, en juillet 1891, le remplaça par Mgr Ferrata.


III

La grande fresque historique où l’éminent prélat déroule sa nonciature de France, et qui ne remplit pas moins de deux volumes, nous rappelle ces tableaux qui n’apparaissent en pleine lumière qu’à la faveur d’un certain recul. De même le recul du temps sera-t-il propice à ces Mémoires, en les soustrayant à l’emprise des polémiques. Beaucoup de nos hommes politiques peuvent dès maintenant y trouver quelques fragments de leur propre histoire, y ressaisir certains éclairs de pensée, certains cris ou certaines boutades, dont le souvenir peut-être s’est aboli dans leur propre mémoire, et qu’avec son respectueux souci de comprendre les esprits les plus différents du sien, le nonce enregistrait et commentait. Et ces relations mêmes attestaient que Mgr Ferrata considérait sa besogne de nonce comme une collaboration constante avec les autorités de l’État non moins qu’avec celles de l’Église pour le bien moral du pays.

Mais cette collaboration délicate, ce n’étaient pas seulement les adversaires de la politique de Léon XIII, c’étaient parfois les amis mêmes de cette politique qui risquaient de la compromettre. Car ceux-ci, pour faire plus aisément accepter par leurs coreligionnaires les instructions du Saint-Siège, « répétaient que leur intention était d’entrer dans l’édifice républicain pour en chasser tous les éléments mauvais. » Et Mgr Ferrata d’observer, dans une page singulièrement significative :


C’était là une fanfaronnade inutile, qui n’avait d’autre effet que de stimuler les républicains à monter la garde devant la porte de la République et à en empêcher l’entrée par tous les moyens. C’était aussi rapetisser la politique du Saint-Siège en la rabaissant à des intérêts personnels, et en faisant ainsi d’une œuvre de conciliation et de paix un élément nouveau de conflit.

Je crus opportun de signaler cette erreur de tactique à certains catholiques, car elle fut la cause d’une longue défiance de la part des républicains, même modérés, qui à certains moments non seulement ne se montrèrent point disposés à favoriser la politique du Saint-Siège, mais firent cause commune avec les radicaux pour la combattre. Comment peut-on espérer être bien reçu dans la maison d’un individu que l’on menace ouvertement de mettre à la porte dès que l’on sera entré ? Dans toutes nos conversations avec des hommes du gouvernement, j’eus soin, afin de dissiper ces craintes, de bien déclarer que l’unique but du Saint-Siège était d’arriver à la pacification religieuse, et qu’il attendait ce résultat de leur bonne volonté et de leur sagesse, qu’il n’en faisait point une question de personnes, mais de principes et d’intérêts supérieurs.


Les incidents se multiplièrent. Ils attestèrent la souple fermeté du nonce, toujours préoccupé d’expliquer au gouvernement certains non possumus formulés par la conscience catholique, et de faire constater aux catholiques, évêques et fidèles, que les hommes d’Etat, eux aussi, quelle que fût parfois leur bonne volonté, pouvaient se sentir acculés par les exigences de leur majorité parlementaire à d’autres non possumus, qui pour être moins augustes n’étaient pas moins impérieux. Et c’est en s’attachant tout d’abord à l’impartiale observation de toutes les impossibilités, que Mgr Ferrata se rendait capable de découvrir, peu à peu, les possibilités d’entente, et même de les créer.

Le pénible épisode auquel donnèrent lieu la bagarre romaine du Panthéon et le « tempérament impulsif » de Mgr Gouthe-Soulard, eût été très opportunément abrégé si l’archevêque eût accepté la solution concertée entre le nonce et M. Ribot, et approuvée par les cardinaux Foulon et Richard, et s’il eût voulu déclarer que dans sa lettre à M. Fallières il n’avait eu « aucune intention d’offenser la délicatesse et l’honneur de M. le ministre des Cultes. » Du moins, Mgr Ferrata connut-il la joie tardive de pouvoir convaincre les métropolitains de France, au lendemain de la condamnation de l’archevêque d’Aix, que les adresses de sympathie déjà expédiées au prélat par l’épiscopat n’avaient pas besoin d’être complétées par une nouvelle série de manifestations. Que de nuages durent s’accumuler devant le regard du représentant pontifical à la suite d’une certaine visite qu’il reçut le 6 décembre 1891 ! Un député venait lui dire : « Si les évêques veulent arriver à la séparation de l’Eglise et de l’Etat, ils ont été logiques dans leurs manières d’agir ; mais si telle n’a pas été leur intention, ils ont eu tort de se conduire comme ils l’ont fait : la responsabilité des événements ne retombera pas sur les catholiques, mais sur le clergé. » Le visiteur qui s’exprimait ainsi n’avait pas le renom d’un opportuniste ; il s’appelait Albert de Mun. L’appréciation était « un peu sévère et pessimiste, » ajoute l’auteur des Mémoires ; elle ne pouvait pourtant être négligée.

Quelques semaines après — le 20 janvier 1892 — Mgr Ferrata était prévenu par l’archevêque de Paris que la presse publierait, quelques heures plus tard, une déclaration collective des cinq cardinaux. Si le nonce n’en avait pas reçu connaissance, disait Mgr Richard, c’était « par un sentiment de délicatesse, et afin que la responsabilité de cet acte ne pût retomber en aucune manière sur le représentant du Saint-Siège. » — « Raison qui ne me parut pas du tout convaincante, » avoue Mgr Ferrata. Mais lorsque le concert entre les cinq cardinaux fut, en vertu d’une jurisprudence archaïque, taxé d’illégalité, et lorsque Mgr Ferrata reçut l’avis officiel qu’en raison de sa forme collective la déclaration cardinalice allait être déférée au conseil d’État, les Éminences qui ne l’avaient pas pris pour confident le trouvèrent comme avocat d’office. « La mission de paix que m’a confiée le Saint-Siège va être compromise, » déclara-t-il au gouvernement ; et cette « mission de paix » était déjà si respectée, grâce au missionnaire, qu’on entendit M. Léon Bourgeois faire en substance cette déclaration : « Je représente dans le cabinet l’opinion avancée, mais je n’hésite pas à dire que si le Conseil est persuadé, après les paroles du Nonce, que l’appel comme d’abus contre les cinq cardinaux peut amener une rupture avec le Saint-Siège, il doit s’abstenir de prendre cette résolution. »

On vit bientôt tourbillonner, dans l’atmosphère politique, quelques feuillets relatifs au devoir électoral, et qui s’ajoutaient comme supplément à certains catéchismes diocésains. Sans contester qu’en principe les évêques fussent éminemment qualifiés pour rappeler aux fidèles que la conscience morale est engagée dans l’accomplissement du devoir civique, Mgr Ferrata notait :


Ces matières électorales sont très délicates, spécialement en France, et les évêques doivent user de grande prudence et de grande circonspection, s’ils ne veulent pas aboutir à un résultat tout différent de celui qu’ils se proposent. En fait, dans le plus grand nombre des départements, l’intervention directe et publique des évêques en matière d’élections, non seulement n’est pas utile à la cause conservatrice, mais lui est plutôt nuisible. Tous les catholiques sensés sont de cet avis, et l’expérience le confirme.


De fait, Mgr Ferrata voyait certains hommes politiques s’armer de ces feuillets pour invoquer contre l’Église les rigueurs de l’État ; et le geste de l’évêque de Grenoble retirant son catéchisme électoral avant même que le conseil d’État n’en eût jugé, — geste qualifié de « sage démarche » par le cardinal Rampolla, — servit d’exemple aux trois autres évêques que le conseil d’État frappa. Des polémiques superficielles accusèrent alors le Saint-Siège et son représentant d’avoir acculé les évêques à une capitulation ; le nonce, au contraire, jaloux de soutenir leurs droits théoriques et de sauvegarder pleinement leur dignité, avait voulu qu’en sacrifiant eus pages momentanément irritantes, ils apparussent comme faisant acte d’obéissance, non pas au gouvernement, mais à l’autorité légitime du Pape, ce qui, pour un évêque, ne saurait avoir rien de dur.


IV

Dans cette partie si complexe où des intérêts si graves étaient engagés, où des anxiétés si respectables étaient mises en émoi, c’était le rôle de Mgr Ferrata, d’amener à se comprendre mutuellement les susceptibilités qui s’affrontaient. Au lendemain de l’encyclique de février 1892, où Léon XIII précisait ses directions et ses désirs, le Pape fit demander un rapport à son nonce sur l’accueil fait par l’épiscopat à ce document. Le futur cardinal Bourrel, évêque de Rodez, renseignait Mgr Ferrata :


Il peut bien, lui écrivait-il, y avoir quelques regrets parmi certains prêtres et certains évêques un peu plus attachés par leur éducation, ou leur tradition de famille, aux anciens régimes ; mais, outre que ces personnes sont peu nombreuses, soyez persuadé que l’esprit de soumission et d’obéissance, qui est complet chez nous, mettra facilement au second rang ces regrets et ces vieux attachements. Il y aurait plutôt à craindre quelque mécontentement intérieur parmi les membres du clergé et des congrégations religieuses, plus ardents par caractère, en face de la condescendance du Pape vis-à-vis d’un gouvernement qui ne se montre guère reconnaissant de ces avances. La vivacité du tempérament, un zèle moins mesuré, un caractère militant, la conviction qu’une résistance aurait amené de meilleurs effets, et surtout l’irresponsabilité des résolutions à prendre et de la bataille à conduire, peuvent bien parfois produire chez certaines natures quelques divergences d’opinion et quelques appréciations plus ou moins raisonnées sur la politique suivie par le Saint-Siège ; mais là encore il n’y a aucun danger. L’obéissance sera complète, et l’adhésion du cœur et de l’esprit aussi.


Mgr Ferrata, joyeux, recopiait ces pronostics, et puis il y ajoutait certaines nuances. Les évêques du Nord apparaissaient au nonce comme plus empressés dans leur adhésion que leurs confrères du Midi, auxquels s’imposait la nécessité de ménager les dévouements catholiques demeurés fidèles aux anciens partis. Et répercutant jusqu’aux oreilles du Pape les « clameurs » d’une certaine presse et de certains salons, Mgr Ferrata concluait avec équité : « Étant donné ces clameurs, il serait difficile d’obtenir des évêques une action plus énergique ou plus ouverte en faveur de la politique du Saint-Siège. » Rome avertie comprenait dès lors les difficultés avec lesquelles devait compter l’épiscopat de France. C’était chez ce diplomate, non seulement une vertu intellectuelle, mais une vertu morale, de savoir mesurer les obstacles avant de jeter le doute sur les bonnes volontés qui s’y heurtaient.

Au jour le jour, il guettait les symptômes qui permettaient d’augurer que dans les sphères d’État les intentions pacifiques de Léon XIII allaient trouver un écho. C’était M. Carnot lui témoignant « le respect qu’il avait pour la religion, son admiration pour le Pape Léon XIII, son vif désir de voir aboutir en France la pacification religieuse, et usant plus d’une fois de son influence, bien que d’une manière discrète, pour détourner les ministres de telle ou telle injuste vexation contre le clergé. » C’était M. Constans partant pour Toulouse en juin 1893 en disant à Mgr Ferrata : « Pourquoi ne devrait-on pas répondre aux avances du Saint-Père ? Vous verrez que je serai presque aussi clérical que vous ; » et puis proclamant effectivement, devant les Toulousains, que « puisque les catholiques, obéissant à l’ordre donné par le chef de la catholicité, déclaraient renoncer aux hostilités, il fallait les suivre sur ce terrain nouveau. » C’était M. Develle, ministre des Affaires étrangères, expliquant au nonce, au lendemain des élections de septembre 1893, que la nouvelle Chambre, en outre de ses éléments de droite, allait grouper trois cents voix républicaines en faveur de la paix religieuse. Terrain nouveau, avait dit M. Constans ; majorité nouvelle, précisait M. Develle ; esprit nouveau, insistait enfin M. Spuller en mars 1894, et le mot fut remarqué, — presque trop. Car dès le lendemain, M. Casimir-Périer faisait comprendre à Mgr Ferrata « que M. Spuller aurait bien pu se dispenser de prononcer de telles paroles, et donnait pour raison qu’il était plus opportun d’agir avec un esprit nouveau que d’en parler publiquement devant une Chambre qui n’était pas encore en état d’apprécier une pareille déclaration. »

Il semblait à Mgr Ferrata que cet esprit nouveau s’attestait par le discret ajournement du projet de loi qui dépouillait les fabriques du monopole des pompes funèbres : projet que le ministère Bourgeois lui-même laissa sommeiller, et qui demeura en souffrance, tant que Mgr Ferrata fut nonce. Mais au mois de mai 1894, une bourrasque soudaine, paradoxal résultat d’une démarche pacificatrice de Mgr Ferrata, éteignit l’arc-en-ciel fragile. Sur l’ordre de Rome, le nonce avait informé tous les évêques, par une circulaire confidentielle, que le Saint-Siège se réservait d’intervenir dans les débats épineux auxquels donnait lieu la récente réglementation des fabriques ; que le gouvernement s’était déclaré disposé à tenir compte des observations de l’épiscopat pour les modifications à apporter ; et que les évêques, dès lors, dans leurs réponses au gouvernement, devaient tout à la fois formuler les réserves nécessaires et opportunes et éviter de se mettre en opposition directe avec la loi. Rome, par une telle démarche, aidait le corps épiscopal à s’unifier et à s’apaiser. Mais une indiscrétion publia la circulaire, et l’on eut tôt fait de dénoncer le « diplomate étranger » donnant des instructions à ces évêques que l’on traitait alors de fonctionnaires.

Si grave que fût le péril, Mgr Ferrata savait ce qu’il devait à ses prérogatives de nonce. Regretter la circulaire elle-même, ainsi que l’eut souhaité M. Casimir-Périer, jamais il n’y consentit. Il déclara simplement que le document, conçu dans une pensée d’apaisement et de conciliation, avait été publié contre son gré, qu’il regrettait cette publication, et qu’il aurait soin qu’un pareil incident ne se reproduisit pas. Il fallut cette formule, pour éviter que l’homme d’Eglise qui avait voulu semer la paix ne récoltât la guerre.

Derechef, en 1895, il put redouter « une tempête gigantesque dans laquelle aurait été submergée la politique de pacification engagée par le Saint-Siège. » Au sujet des nouvelles obligations fiscales qui pesaient sur les congrégations, et qu’avait d’ailleurs fait alléger dans une certaine mesure l’action du Vatican, l’opinion catholique était divisée. Lazaristes, Sulpiciens, Pères du Saint-Esprit, prêtres des Missions étrangères, Frères de la Doctrine chrétienne, estimaient impossible de compromettre leurs grandes œuvres en refusant de se soumettre à la loi. « Puis-je exposer à un grave danger mon institut et les œuvres d’éducation qui en dépendent, disait à Mgr Ferrata le supérieur général des Frères, pour ne point payer annuellement une somme de vingt-cinq à trente mille francs, qui, répartie entre les douze cents maisons, ne constituerait qu’une charge de vingt-cinq à trente francs pour chacune ? » Cependant, en face de ces congrégations, d’autres surgissaient, préconisant la résistance passive ; et Mgr Ferrata concluait, des impressions mêmes du cardinal Richard, que cette mobilisation pouvait s’expliquer par le « sentiment chrétien, blessé d’une mesure hostile à l’Église, mais qu’il y avait là, aussi, quelque chose d’artificiel et de politique. » Le Saint-Siège et la nonciature redressèrent les esprits en faisant comprendre que les congrégations qui acceptaient la loi ne lésaient en aucune façon l’intérêt général de l’Église, et qu’il laissait toute liberté, soit de se soumettre, soit de résister passivement. Chaque congrégation devint ainsi seule juge de ses intérêts, seule maîtresse de ses décisions ; et cette parole libératrice, en faisant échec à certaines contraintes d’embrigadement, vengea du reproche de « poltronnerie » les instituts religieux qui déféraient aux demandes du fisc. Ce n’était pas à tort que, dès février 1895, Mgr Ferrata avait dit au ministre des Affaires étrangères : « Je vois se présenter avec une grave appréhension la question fiscale concernant les congrégations, car je la considère comme un grand obstacle à la paix religieuse. » Mais, grâce à l’intervention romaine, la paix passait outre à l’obstacle.

Ce même Mgr Ferrata, qui, dans sa jeunesse, avait entendu prédire que Mgr Czacki serait contraint de fermer la nonciature, avait l’émotion, en juillet 1896, le jour même où à l’Elysée il recevait la barrette cardinalice, de s’entendre dire par M. Hanotaux : « Durant mon ministère, mes deux principaux désirs ont été d’obtenir une voie ferrée en Chine et un cardinal français à Rome. J’ai obtenu la première concession, et j’espère bien obtenir la seconde, car ce serait malheureux que la Chine se montrât plus condescendante que le Saint-Siège. Quant au choix du cardinal, je m’en remets complètement au jugement du Saint-Père. » La République française, au moment où Mgr Ferrata prenait congé d’elle, se montrait ainsi soucieuse de consolider ses positions à Rome.

Quelques années devaient suffire à modifier l’horizon politique... Mais dans son lointain observatoire romain, le cardinal Ferrata, qui devait mourir trop tôt pour pouvoir assister au début des résipiscences, garda du moins un attachement tenace à notre « sympathique et chevaleresque pays et à cette illustre et antique Église dont la gloire ne fut jamais obscurcie dans aucune persécution, » et qui l’avait « tant édifié par la prodigieuse fécondité de ses bienfaisantes initiatives, par ses missions répandues dans le monde entier, par ses œuvres admirables de charité. » Et la France, même séparée de l’Église, possédait à Rome, sous la pourpre de Mgr Ferrata, une amitié précieuse, toujours prête à témoigner en faveur de l’âme française.


V

Les Mémoires nous montrent l’influence considérable qu’eut sur l’alliance franco-russe la politique du Saint-Siège à l’égard de la République. Déjà, dans le Figaro, au moment du premier voyage à Paris du Tsar Nicolas II, M. Piou avait pu écrire :


La grande scène de Cronstadt, aujourd’hui historique, est bien, quoiqu’on affecte de l’oublier, la conséquence et la victoire de la politique pontificale... Léon XIII a eu le bonheur inespéré d’attirer à la France, par la seule force de son exemple, une amitié qui est pour elle une sauvegarde. Grâce à lui, la fille aînée de l’Église n’est plus seule dans le monde en face de ses adversaires coalisés.

Le baron de Mohrenheim, ambassadeur de Russie à Paris et catholique fervent, me dit plus d’une fois et l’a répété à beaucoup d’autres, que le Gouvernement russe ne se serait pas décidé à nouer une alliance politique avec la République française si le Pape n’avait été le premier à l’appuyer de son autorité morale.

Dans l’histoire de l’alliance qui, durant les deux premières années de la Grande Guerre, a retenu loin de nos frontières une partie des forces ennemies, ces lignes de M. Piou faisaient une place à l’action du Saint-Siège ; la publication du cardinal Ferrata nous apporte de curieuses précisions. On y voit, dès 1893, la Papauté se préoccuper des troubles que pouvaient susciter en Russie les persécutions dirigées contre les catholiques. Le cardinal Rampolla écrivait au nonce de Paris :


La parole du Pape dénonçant au monde ces persécutions pourrait amener des conséquences considérables, et même une rupture avec le Saint-Siège, dont profiterait tout au moins la politique hostile à la France. Les excitations ne manquent pas de par ailleurs pour pousser les choses à ce point. Le Saint-Siège ne se laissera pas entraîner dans ses actes par ces influences intéressées, n’ayant en vue que le bien des âmes, mais si la situation religieuse ne s’améliore pas en Russie et en Pologne, l’obligation de remplir des devoirs sacrés, supérieurs à la politique humaine, pourrait exiger du Saint-Père ce qu’il voudrait pouvoir éviter.


Et le cardinal Rampolla suggérait à Mgr Ferrata que M. le comte de Montebello, ambassadeur en Russie, « pourrait peut-être s’employer, dans les limites permises par sa situation officielle, à faire modifier l’altitude du Gouvernement russe envers l’Église catholique, » et rendre ainsi « service, non seulement à la cause de la religion, mais aussi aux intérêts politiques de la France et de la Russie. » Mgr Ferrata, dont la démarche fut très bien accueillie de notre ambassadeur à Pétersbourg, aimait à penser que si de nombreuses causes avaient contribué à la nomination de M. Iswolski comme ministre plénipotentiaire à Rome, et à l’amélioration de la situation religieuse en Russie, l’influence du Gouvernement français, et spécialement celle du comte de Montebello, n’y avait certainement pas été étrangère.

En octobre 1896. un mois avant son départ de Paris, le cardinal Ferrata, reçu par le Tsar Nicolas comme doyen du corps diplomatique, lui disait :


C’est une chose très heureuse et très avantageuse que la politique du Saint-Siège et celle de Votre Majesté se trouvent parfaitement à l’unisson, par rapport à la France. Tandis que le Saint-Père a mis généreusement au service de cette noble nation la force morale dont il dispose, Votre Majesté a apporté l’appui de sa puissance militaire et politique. Votre Majesté ne pouvait la placer plus noblement et plus utilement ; la France, à cause de la générosité et de l’ardeur de ses enfants, est le pays qui a le plus d’influence sur les idées qui agitent le monde ; elle y a sa place marquée, spécialement en ce qui concerne la civilisation chrétienne ; elle a en outre le génie de la propagande ; lorsqu’elle prend une bonne direction, elle peut rendre les plus grands services à l’humanité, comme aussi, si elle en prend une mauvaise, elle peut porter l’incendie partout, comme cela est déjà arrivé.

Le Saint-Siège a voulu épargner à cette illustre nation une lutte religieuse qui aurait été des plus funestes ; et pour atteindre ce but, il la fait des prodiges de longanimité et de patience ; il a voulu renforcer « l’autorité constituée, pour qu’elle ne dégénérât pas en démagogie, en lui amenant les éléments conservateurs qui sont très nombreux, quoique un peu divisés, et en leur donnant le conseil d’adhérer à la république, qui représentait en ce moment la seule autorité constituée dans le pays. Ce qui importait désormais, c’est qu’il y eût en France un gouvernement sage, honnête et respectueux de la religion, afin d’être solide à l’intérieur et respecté à l’étranger. Tel était le principal désir du Saint-Siège.


Et le Tsar de répondre qu’il était « heureux, lui aussi, que les intérêts et les vues du Saint-Siège et de la Russie relativement à la France fussent, bien que distincts, en si complète harmonie. » L’évocation de l’alliance franco-russe, sur les lèvres du cardinal Ferrata, ne servait pas seulement la paix du monde, mais aussi la paix intérieure dans les deux nations alliées.

Son tempérament personnel et la conception qu’il se traçait de ses fonctions de nonce faisaient de Mgr Ferrata un actif auxiliaire de l’esprit de paix : paix entre les évêques et paix entre les religieux, paix entre les partis et paix entre les États, paix entre le magistère supranational de l’Eglise et les pouvoirs nationaux. Et voici que ces Mémoires écrits en français, à la minute précise où ils surviennent, acquièrent le relief d’un message de paix, qui vise la France. Outre-tombe, le cardinal Ferrata fait encore un acte politique : au nom de l’histoire, il désarme les adversaires de l’institution d’une nonciature ; les lueurs mêmes dont il illumine le passé balaient les derniers lambeaux de nuages qui retardaient encore les aurores nouvelles.


LÉON GRÉGOIRE.

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  1. Rome, Cuggiani et Desclée.