Les Jeux rustiques et divins/Odelette III

Les Jeux rustiques et divins. La Corbeille des Heures
Mercure de France (p. 223-224).
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ODELETTE III


Tu frapperas !
La porte est haute sous les roses et le lierre
Aux mille bras
Incrustés dans la vieille pierre
Et se crispant comme la nuit
Qui étreignait de haut en bas
La maison noire et solitaire
Qui maintenant chante et luit
Sous les roses, à l’aube claire.

Je t’attends assis en chantant,
Je t’attends, car c’est le printemps ;
Les vitres pâlissent, et le pavé pâle
S’éclaire et blanchit de dalle en dalle,
Et l’ombre s’accroupit aux angles ;
Entre,
Toi qui à ma porte es venue,
Souriante et nue.


Entre. Veux-tu
T’asseoir à mon foyer pour y filer le chanvre
Au bruit du rouet monotone ?
Veux-tu
Attendre ici l’automne ?
Veux-tu que je te donne
Le gobelet de hêtre et l’assiette d’étain,
Le fruit, le pain,
Un peu d’eau pure,
Et rester là ?
La route est dure.

Mais déjà ton sourire est un baiser… Voilà
Une fleur pour que tu la tiennes
À ta main, et voici une lampe d’or
Et trois opales anciennes ;
Voici encor
Une ceinture où pend une clé ;
Prends la tunique et les sandales,
Je te les donne.
Tu as la lampe et les opales,
Tu as la clé,
Et maintenant va parmi les hommes !