Les Grands Cimetières sous la lune/III/1

I

J’ai commencé ce livre par un doux hiver palmesan, tout plein du suc des amandiers en fleurs, juteux comme un fruit d’automne. Ce détail n’a aucun intérêt pour vous, je le crains. Dieu veuille que le café Alhambra redevienne ce qu’il était jadis, chaque matin, à l’heure où débarquaient du Ciudad les voyageurs un peu las d’une nuit de mer, quand fument sur les tables de marbre le café au puissant arôme et les encemadas dorés. Mais le Ciudad est au fond de la mer, avec son équipage, et les poissons tournent en rond dans la cabine où j’ai dormi. Certes, je ne voudrais faire nul tort au sympathique patron de l’Alhambra. Il me permettra cependant de dire que sa maison n’offre rien qui puisse attirer les foules. Elle est néanmoins pour moi l’une des grandes étapes de ma pauvre vie, la dernière sans doute. Car voilà déjà que le jour baisse, le vent fraîchit, la route est longue encore, je ne m’arrêterai pas avant que se referme sur moi la douce nuit que j’attends — ô réconciliatrice, ô secourable, ô sereine !

La vie n’apporte aucune désillusion, la vie n’a qu’une parole, elle la tient. Tant pis pour ceux qui disent le contraire. Ce sont des imposteurs ou des lâches. Les hommes, il est vrai, déçoivent, les hommes seuls. Tant pis encore pour ceux que cette déception empoisonne. C’est que leur âme fonctionne mal, leur âme n’élimine pas les toxines. Pour moi, les hommes ne m’ont pas déçu et je ne me suis pas déçu moi-même davantage. Je m’attendais à pis, voilà tout. Ce que je vois d’abord dans l’homme, c’est son malheur. Le malheur de l’homme est la merveille de l’univers.

Quoi qu’il arrive désormais, la dernière étape de ma vie ne m’aura pas plus déçu que les autres. N’ayant jamais attendu de l’expérience qu’elle m’apportât la sagesse, je ne lui demande qu’un approfondissement de ma pitié, qu’elle creuse en moi assez avant pour que ne risque plus de se tarir la source des larmes. Dieu ! faute de savoir aimer selon votre grâce, ne m’arrachez pas l’humble compassion, le pain grossier de la compassion que nous pouvons rompre ensemble, pécheurs, assis au bord de la route, en silence, tête basse, à la manière des vieux pauvres. Il n’est rien de haïssable en l’homme que sa prétendue sagesse, le germe stérile, l’œuf de pierre que les vieillards se passent de génération en génération et qu’ils essaient d’échauffer tour à tour entre leurs cuisses glacées. En vain Dieu s’efforce de les réduire, les prie avec douceur d’échanger ce ridicule objet contre l’or vivant des Béatitudes. Ils le regardent en claquant des mandibules, épouvantés, poussant d’effroyables soupirs. S’il est vrai, comme l’exprime l’Évangile, que cette sagesse est folie, pourquoi, entre tant d’autres folies, ont-ils élu ce caillou ? Mais la sagesse est le vice des vieillards, et les vieillards ne survivent pas à leur vice, emportent avec eux son secret.

Je ne me sens pas né pour couver un œuf dur. Vous aurez beau me dire d’essayer, que je réussirai peut-être mieux que les autres, hé bien non ! — « Soit ! Mais ne refusez pas cette innocente distraction à de respectables patriarches que le Moraliste vous invite à honorer. » — « Je la leur refuse froidement. Qu’ils courent plutôt derrière les petites filles ! » — « Ils ne tiennent plus sur leurs jambes ! » — Qu’ils lisent donc le dernier roman de M. Léon Daudet. — « Ils ne peuvent plus lire. » — Alors, faites-en des sénateurs et allez les asseoir sur un banc du Luxembourg, au bord du bassin. » Il me semble qu’un homme de mon âge peut parler ainsi sans craindre le ridicule où ne manquent pas de tomber les jeunes gens irrespectueux, car il n’est rien de plus comique que la rageuse gravité des gâteux sinon la naïve, suffisante et discordante faconde du jouvenceau. Je n’en veux nullement aux vieillards. Il est même, entre nous, parfaitement possible qu’ils aient mérité jadis la révérence, qu’entre beaucoup d’autres guignols tragiques, le monde moderne ait pu réussir à créer une nouvelle race de Nestors. Aussi longtemps que les hommes vivent très près de la terre, comme formés et façonnés par elle, leur expérience n’est que les mérites accumulés de l’humble effort de chaque jour. Elle est une espèce de sainteté naturelle, qui s’exprime par l’indulgence et la sérénité, une forme de prudence inaccessible aux êtres encore engagés dans la lutte pour le pain et le vin, car elle s’inspire d’un détachement sans amertume, d’une simple et solennelle acceptation. Que peuvent avoir de commun avec un vieux paysan de l’ancienne France, ces septuagénaires demeurés aussi ignorants des valeurs réelles de la vie qu’un polytechnicien de vingt ans, ces bêtes à formules et à systèmes qui, même pris dans les rets de la paralysie sénile, restent aussi turbulents sur leurs pots qu’au temps où ils présidaient des conférences économiques ? Cet ordre est le leur. On souhaiterait qu’ils crevassent ensemble, tous les deux, très tranquilles. Mais voilà où nous commençons à ne plus nous entendre, eux et nous. Ils ne veulent pas.

Flatter les jeunes aux dépens des vieux est, je le jure, loin de ma pensée. J’y perdrais d’ailleurs mon temps et ma peine. On voyait, à la fin du dernier siècle, des juives sans âge, macérées dans les aromates, jaunies par tous les poisons de la ménopause, peintes à l’œuf comme les antiques fresques, pomper les héritages et vider les reins d’innombrables cercleux, les plus « psuchtt », les plus « vlan » du noble Faubourg. Cette singularité psychologique irritait Drumont. Elle était pourtant moins dégoûtante que le goût des jeunes intellectuels d’alors pour ces mêmes aristocrates faisandés sur les mains desquels ils devaient se contenter de flairer l’odeur des alcôves pourries, dont ils ne connaîtraient jamais les délices. J’affirme que la génération qui vit le jour aux environs de 1870 a été consacrée dès sa naissance aux démons de la vieillesse, baptisée dans ce sang corrompu. C’est sans doute grâce à leur protection qu’elle a pu échapper, de justesse, à deux guerres. Et les générations sorties d’elle me semblent marquées du même signe maléfique. Les premières ont tenté en vain de se libérer, moins d’un ennemi dont elles méconnaissaient naïvement la force et les desseins, que du pressentiment funèbre qui remuait déjà dans leur cœur. À ce point de vue la révolte de Péguy contre la Sorbonne, ce réquisitoire haletant, balbutiant, d’une ironie parfois scolaire, entrecoupé de cris sublimes, l’appel anxieux jeté vers les ancêtres morts contre les Vieux toujours vivants est un des témoignages les plus tragiques de l’histoire. Avec tant de Français dont il était le chef-né — bien que la plupart, hélas, ignorassent jusqu’à son nom — Péguy dut payer chèrement son défi sacrilège aux divinités d’en bas. La guerre les a brûlés et dévorés ensemble, par monceaux. Après quoi l’esprit de vieillesse désespérant de justifier par la seule foi démocratique, le massacre universel des Innocents, s’est mis à parler grec et latin, pour la jubilation d’une partie de ses fidèles. Le buste de Brutus s’érige en face de celui de César, une moitié de Renan figure au Panthéon révolutionnaire tandis que le Panthéon réactionnaire a recueilli pieusement l’autre moitié, Jean-Jacques Rousseau pleure sur la poitrine de Nicolas Machiavel, et la haine contre l’Allemagne de Weimar passe toute chaude du giron des nationaux à celui des internationaux dégoûtés par M. Hitler. Bref, les deux France, la France de droite et la France de gauche adorent le même dieu sans le savoir, bien qu’elles ne révèrent pas les mêmes Saints.

Les jeunes gens qui lisent ces pages hausseront probablement les épaules. « Adorer la vieillesse, quelle plaisanterie ! Nous ne cédons jamais aux dames mûres notre place dans le métro, nous pratiquons les sports d’hiver et, pour conserver la ligne, nous formons le dessein d’aller tout nus. » Évidemment, vous êtes des types de plein air, mais c’est votre pensée, mes amis, qui sent la tisane et l’urine, comme un dortoir d’hospice. Plus précisément vous n’avez pas de pensée, vous vivez dans celle de vos aînés, sans jamais ouvrir les fenêtres. Pour des champions d’altitude, avouez que le fait est étrange. Haussez tant que vous voudrez les épaules ! il suffit de lire vos journaux : les journaux où vous entrez chaque matin, en pantoufles, à l’heure du petit déjeuner, n’ont pas été repeints ni retapissés depuis trente ans, on y trouve partout des poils de barbe. Je parie d’imprimer demain sous un faux titre emprunté à la presse contemporaine, n’importe quel numéro de la Libre Parole, et vous ne vous apercevrez de rien, mes enfants. Que les vieux polémistes rouges, noirs ou blancs, veuillent bien se donner le mot, je jure que vingt-quatre heures plus tard, ils vous feront battre le long du boulevard Saint-Michel, aux cris de « Vive Dreyfus ! » et « À bas Dreyfus ! » mes pauvres gentils cocos. Je me suis promis de parler le moins possible de l’Action française car je ne voudrais pas être injuste. L’Action française, si incroyable que cela paraisse aujourd’hui, a eu une jeunesse, et je crains qu’on n’en puisse dire autant plus tard, de beaucoup d’entre vous… Mais enfin, mais tout de même, nous comprendrions parfaitement que vous assuriez à M. Maurras une retraite glorieuse. L’étrange c’est que votre sollicitude s’étende à tout le personnel. Quoi ! vous passez chaque jour, depuis des années, à travers ces bureaux, et aucun de vous n’a jamais senti le besoin de changer au moins les garnitures ? On admire toujours sur les cheminées, coulés en bronze barbedienne, M. Pujo, M. Delbecque, M. Pierre Tuc et d’autres seigneurs — ceux-là en plâtre — auxquels le plus discret coup de plumeau serait fatal. L’idée ne vous est jamais venue de souffler un peu dessus, pour voir ? Et lorsqu’un Prince de votre âge vous invite à choisir, il vous paraît tout naturel de lui tourner le dos, d’aller gravement vous asseoir sur les mêmes bancs où vos papas usèrent leurs culottes courtes, et de reprendre la leçon de doctrine sous la surveillance de M. Maxime Réal del Sarte, un autre prince, sacré jadis par les jeunes filles royalistes maintenant grand’mères : Prince de la Jeunesse française ?

Il y a une crise de la jeunesse, et elle ne se résoudra pas toute seule. Vos méthodes risquent de l’aggraver. Les maîtres du Monde croient sentir que la jeunesse leur échappe. Elle échappe à tous, elle échappe à elle-même, son énergie se détend peu à peu, ainsi que la vapeur dans le cylindre. L’accablante, la tyrannique, l’écrasante sollicitude des dictatures va la réduire à rien. On ne recrute pas plus les vrais enfants que les poètes, et les nouveaux systèmes d’éducation ne sauraient aboutir qu’au dressage de hideux homuncules, jouant au propagandiste, au soldat ou à l’ingénieur. Car l’esprit de jeunesse est une réalité aussi mystérieuse que la virginité, par exemple. La niaiserie, l’ignorance ou la peur, fût-elle même celle de l’enfer, ne forment pas les vierges. Ou du moins cette sorte de virginité me paraît aussi bête que l’espèce de chasteté obtenue par la castration.

Vous me direz, bien entendu, qu’un castrat n’est qu’un déchet, au lieu que la politique réaliste peut légitimement tenir pour vierge et utiliser comme telle, n’importe quelle jeune femme certifiée intacte par les médecins. Mêmement, si les dictateurs de droite ou de gauche, par un gigantesque effort budgétaire augmentent d’un certain nombre de têtes, le troupeau des jeunes mâles impubères, je veux bien leur laisser croire qu’ils disposent de vastes réserves d’enfance. L’esprit d’enfance, n’est-ce pas ? cela ne se voit pas, les statistiques n’en tiennent aucun compte. Elles ne tiennent non plus aucun compte de l’esprit militaire, ce qui permet à M. Mussolini de penser qu’en concentrant au pied du plateau de Pratzen et conformément aux plans de Napoléon, un nombre de divisions napolitaines ou siciliennes égal à celui des divisions impériales, il gagnerait sûrement la bataille d’Austerlitz. J’ai entendu maintes fois, déplorer par les fascistes espagnols le préjugé antisocial des petits garçons français qui prennent plaisir à voir Guignol rosser le gendarme. Il y a là, disaient ces messieurs, une minuscule glande de sécrétion anarchique dont nos chirurgiens opéreront facilement l’ablation. Soit ! Les mêmes docteurs observent, dans l’Évangile, une glande révolutionnaire et une glande juive, qu’il conviendrait également d’inciser. Nul doute qu’une pareille intervention eût suffi jadis, en modifiant légèrement le métabolisme de saint François d’Assise, à faire de cet exalté sympathique un solide chanoine, humaniste et réaliste. Soit. Je me méfie beaucoup pourtant de cette chirurgie glandulaire. Je me méfie également de vos méthodes de dressage. Comme la plupart des villes d’Espagne, la capitale de Majorque appartenait aux enfants. Six semaines après l’avènement des croisés militaires, elle semblait leur appartenir davantage car armés de fusils de bois, précédés d’une clique, les joueurs de billes mobilisés défilaient gravement sur les chaussées désertes. Ils jouent au soldat, me disais-je. Mais lorsque les grands frères reviennent chaque soir d’expéditions mystérieuses, qu’il arrive à tout le monde de rencontrer au coin des chemins, sous les mouches, un cadavre à la tête éclatée, le dos contre le talus et qui porte gravement sur le ventre la moitié de sa cervelle rose, le héros n’est pas le soldat, mais le policier. On vit donc les anciens joueurs de billes devenir gendarmes auxiliaires, échanger leurs fusils de parade contre des matraques de caoutchouc, alourdies d’un peu de plomb. Hé bien ! oui, riez tant que vous voudrez, la terreur est la terreur et si vous aviez vécu au temps de Maximilien Robespierre, en qualité de suspect, c’est-à-dire de bête à police, pour laquelle la plus vague dénonciation est un péril de mort, vous auriez peut-être frémi au passage des carmagnoles de treize ans. Je ne tiens d’ailleurs nullement à ébranler vos nerfs, je voudrais simplement vous faire réfléchir car j’ai dû réfléchir moi-même. Je n’ai pas compris du premier coup. Si débarquant à Barcelone, au mois d’août 1936, j’avais vu défiler dans les rues de cette ville une troupe de marmots armés de casse-tête, chantant l’Internationale, les mots qui me seraient venus aux lèvres auraient été ceux que vous pensez. Au lieu que j’eusse traité d’espiègles les mêmes gosses brandissant les mêmes outils, pourvu qu’ils criassent : « À bas les Rouges ! » plutôt que « À bas les Curés ! » Que voulez-vous ? Nous ne sommes pas maîtres de certains réflexes. Il m’est facile de penser désormais aux uns et aux autres avec une égale pitié.

J’ai toujours pensé que le monde moderne péchait contre l’esprit de jeunesse, et que ce crime le ferait mourir. Il est clair que la parole de l’Évangile : vous ne pouvez servir Dieu et l’argent, a son équivalent naturaliste : Vous ne pouvez servir à la fois l’esprit de jeunesse et l’esprit de cupidité. Ce sont là, évidemment, des idées générales. Elles ne permettent pas de calculer la durée d’une évolution qui semble d’abord ne devoir se réaliser qu’avec une extrême lenteur. J’ai compris, à Palma, que l’immense effort de propagande éducatrice des dictatures allait la précipiter.

Oh ! mon Dieu, il ne s’agit pas d’une révélation d’en haut ! J’éprouve même beaucoup d’embarras et un peu de honte à choisir parmi tant de faits en apparence médiocres. Mais quoi ! Est-il rien de moins remarquable qu’un réflexe pupillaire ? Ne permet-il au médecin de diagnostiquer d’un coup d’œil une paralysie générale ? J’habitais à Majorque un petit village au bord de la mer, et qui n’est d’ailleurs qu’un faubourg de Palma, éloigné de cinq kilomètres. En pleine guerre civile, Porto-Pi manquait plutôt d’animation, je dois le dire. Les garçons servaient dans l’une ou l’autre bande, ou ne servaient pas du tout selon le lieu du monde où l’événement les avait surpris, car les Majorquins sont un peuple voyageur. Ceux qui restaient ne se montraient plus guère que le dimanche à la messe, suivie naturellement par tous. Je me rappelle… Je me rappelle… Il y avait ce vieux mendiant chargé de la voirie, avec sa drôle de charrette traînée par un fantôme d’âne recouvert d’un peau probablement empruntée à un autre animal de la même espèce, car elle était beaucoup trop grande pour ses os. Bien que le fils unique de cet agent municipal eût été tué par les militaires, un cabaretier charitable permettait qu’il couchât dans l’écurie, auprès de sa bête singulière. Ma petite fille Dominique les aimait beaucoup tous les deux. Elle a trouvé le matin de Pâques son vieux camarade pendu — entre sa poubelle et son âne — un matin de Pâques, un triomphal matin de Pâques, plein de mouettes blanches… Il y avait cette grosse fille si gaie, si complaisante, accueillie par tous, et qui communiait près de moi chaque dimanche. On a vu, un jour, sous son corsage maladroitement entr’ouvert, la plaque de police — une belle plaque toute neuve… Et cette cuisinière elle aussi chérie de mes gosses, qu’un argousin à face de mauvais prêtre, qui me saluait jusqu’à terre, est venu trouver au réveil. — « Habillez-vous, a-t-il dit. Je reviendrai vous chercher ce soir à 4 heures. » Elle a mis sa robe de soie noire devenue trop étroite et qui craquait aux coutures. Elle a noué son baluchon, et elle a pleuré tout le jour à gros sanglots, tout cet interminable jour. Je l’ai rencontrée dans le chemin, trottinant derrière son maître, et elle m’a fait le salut fasciste, misère !… misère !… Je me rappelle… Je me rappelle… Mais qu’importe. Je voudrais seulement vous faire comprendre que si tous ces gens-là n’étaient pas gais, ils ne manquaient pas de loisirs. Alors ils venaient s’asseoir au bord de l’eau, les papas fumaient leurs pipes. Ce point de la côte n’est guère fréquenté par les amateurs qui lui préfèrent le luxueux Terreno. Ce ne fut donc pas sans surprise que les gens du village virent s’y abattre une douzaine de ballillas, mais ils n’en laissèrent naturellement rien paraître, vous pensez bien ! L’un de ces marmots se baigna tout nu. Républicains ou non, les Palmesans sont prudes et une grand’mère crut l’occasion bonne de se délier un peu la langue. Elle traita le marmot d’effronté. Au coup de sifflet du chef, les gardes accoururent, et sans beaucoup de zèle, arrêtèrent la sacrilège. Ses compagnes protestèrent tandis que les hommes, toujours à l’écart, continuaient de fixer vaguement l’horizon mais laissaient éteindre leurs pipes. C’est à ce moment que les petits policiers décidèrent de déblayer le terrain à coups de matraque. Vous voyez le spectacle d’ici : les vieux, rouges de colère, clopinant devant ces gamins dont aucun d’entre eux n’eût d’ailleurs osé tirer les oreilles, puis s’efforçant, à cause des femmes, de reprendre un maintien digne, de ralentir le pas, et sautillant de nouveau, chaque fois que le cylindre de caoutchouc s’abattait sur leurs fesses. Quelques-uns pleuraient de rage. Force enfin dut rester à la loi.

Braves petits, direz-vous. Mon Dieu, oui, braves petits ! Ils étaient de braves petits avant qu’on en eût fait des nains, des hommes nains, avec les haines de l’homme mûr dans un corps de nain. Mais je suis tranquille : l’entreprise va se poursuivre, non tant par la malice des êtres, que par la logique des choses. Il serait étrange que les nationalismes autarchiques n’exploitassent pas à fond l’enfance ainsi que n’importe quelle matière première. Les pions exécrables, les boucs buveurs d’encre aux entrailles de buvard, leur soufflent qu’un petit d’homme, livré à lui-même, montre des dispositions à l’indépendance qu’une société prévoyante devrait supprimer sur-le-champ, au lieu de perdre, à le redresser, un temps précieux. Bref, il s’agit de donner bien vite le sens réaliste des hiérarchies, même sous la forme élémentaire, ce goût de l’ordre et de la discipline qui distingue, par exemple, l’adjudant corse. La mentalité enfantine, diraient ces docteurs dans leur sinistre langage, présente des tendances contradictoires. Il est naturel à un enfant de donner plus d’amour à un chien galeux qu’à une bête de prix. Il lui est naturel aussi d’assommer le chien galeux à l’aide de cailloux. La première tendance relève de la mystique celte qui s’exprime par l’absurde axiome : « Gloire aux vaincus. » La seconde est déjà comme une ébauche de génie politique latin, car un chien galeux ne saurait rendre aucun service, et il est licite de le détruire sauf à retenir un moment l’attention de l’exécuteur sur le caractère inutile et par conséquent peu social de certains raffinements de cruauté, lui faisant observer qu’il pourrait tuer proprement dix chiens galeux dans le même temps qu’il en martyrise un seul — d’où plaisir égal, et profit pour la communauté.

Ces docteurs ne raisonnent pas mal. Car je répète qu’il est parfaitement vrai que le petit d’homme naît réfractaire, qu’il vit le plus longtemps possible dans un univers affectif fait à sa mesure, et où prennent aisément place, aux côtés d’un papa et d’une maman sublimés, des créatures à peine plus imaginaires, les ogres, les fées, les chevaliers, les reines pour lesquelles on pourfend des géants, et les jeunes princes qui meurent d’amour. Une fois possédé par des fantômes, un garçon quelconque, même soumis à un régime convenable ou développé par la pratique des sports, risque de devenir poète, anarchiste, au sens exact du mot, ou plutôt c’est-à-dire incapable d’exécuter en vers une commande des services de propagande de l’État. Je connais, je connais très intimement un jeune Français qui au début de la croisade épiscopale espagnole, ayant dû prendre part à une expédition punitive, revint hors de lui, déchira sa chemise bleue de phalangiste, répétant d’une voix entrecoupée de sanglots contenus, de son ancienne voix, de sa voix retrouvée de petit garçon : « Les salauds ! Ils ont tué deux pauvres types, deux vieux paysans, très vieux, des types d’au moins cinquante ans ! » — ce qui n’était pas, entre nous, très flatteur pour son papa, tout près d’atteindre à cette dernière étape de la sénilité… Un professeur de réalisme lui eût répondu : « Mon ami, l’acte qui vient de s’accomplir sous vos yeux est politique au premier chef. D’abord ces deux types professaient une autre opinion que celle autorisée par l’État. Qu’ils fussent vieux et pauvres, cela devrait plutôt calmer vos scrupules, si vous saviez réprimer les aveugles réflexes de votre sensibilité. Car un vieux a moins de prix qu’un jeune. Et puisque les pauvres ne goûtent guère aux joies de la vie, il n’y a pas grand désavantage à les priver d’un bien dont ils tirent peu de profit. »

Ce raisonnement vaut ce qu’il vaut. Je répète que vous ne ferez pas sa part au réalisme politique, et que le jour où le pauvre, l’infirme, l’idiot n’auront d’autre providence en ce bas monde que la naturelle répulsion des délicats pour la souffrance, il sera temps de conseiller le suicide à ces malheureux. Les gens du peuple ont un mot très profond lorsqu’ils s’encouragent à la sympathie : « Mettons-nous à sa place, disent-ils. On ne se met aisément qu’à la place de ses égaux. À un certain degré d’infériorité, réelle ou imaginaire, cette substitution n’est plus possible. Les délicats du dix-septième siècle ne se mettaient nullement à la place des nègres dont la traite enrichissait leurs familles. M. Vittorio Mussolini a publié un livre sur sa campagne d’Éthiopie :

Je n’avais jamais vu un grand incendie, déclare-t-il, bien que j’aie souvent suivi les autos de pompiers… C’est peut-être parce que quelqu’un avait entendu parler de cette lacune de mon éducation qu’un machine de la 14e escadrille a reçu l’ordre d’aller bombarder la zone d’Adi-Abo exclusivement avec des bombes incendiaires. Nous… devions mettre en jeu les collines boisées, les champs et les petits villages. Tout cela était très divertissant… À peine les bombes touchaient-elles le sol qu’elles éclataient en fumée blanche et une flamme gigantesque s’élevait pendant que l’herbe sèche se mettait à brûler. Je pensais aux animaux. Mon Dieu, ce qu’ils couraient !… Lorsque les châssis porte-bombes furent vides, j’ai commencé à lancer des bombes à la main… C’était très amusant. Une grande « zariba » entourée de grands arbres n’a pas été facile à atteindre. J’ai dû viser très exactement et je n’ai réussi qu’à la troisième fois. Les malheureux qui s’y trouvaient ont sauté au dehors lorsqu’ils ont vu leur toit brûler et se sont enfuis comme des fous… Entourés d’un cercle de flammes, quatre à cinq mille Abyssins sont arrivés à leur fin par asphyxie. On aurait dit l’enfer : la fumée s’élevait à une hauteur incroyable, et les flammes coloraient en rouge tout le ciel noir[1].

Il est clair que M. Vittorio Mussolini n’a jamais songé à se mettre à la place des Éthiopiens. Si son papa l’envoie un jour sur le front français, il comblera une autre lacune de son éducation. Il verra ce que c’est que des hommes et je suppose qu’il reviendra les pieds devant, faire part de cette expérience à sa famille. N’importe ! — Renvoyé à M. Brasillach pour l’oraison funèbre ! — Les soyeux de Lyon qui, sous la monarchie de Louis-Philippe, laissaient crever de faim leurs ouvriers, ne se mettaient pas à la place de ces frères inférieurs, non plus que M. Cavaignac dont on connaît la parole fameuse devant la Chambre, après l’insurrection de Lyon : « Il faut que les ouvriers sachent bien qu’il n’y a pas de remèdes pour eux que la patience et la résignation. » Parole contre laquelle l’épiscopat français de cette époque n’a élevé aucune protestation. Bref, la pitié ne joue jamais à coup sûr. Le législateur ne peut absolument pas compter sur elle comme, par exemple, sur l’esprit de lucre et l’intérêt. La pitié ne saurait se justifier en politique, ou du moins elle n’apporte au réaliste qu’une aide précaire, dans des cas exceptionnels. Il l’utilise parce qu’elle est là, il aimerait mieux s’en passer. Vous ne pouvez d’ailleurs juger la pitié, depuis vingt siècles vous ne savez plus exactement ce que c’est. Depuis vingt siècles, l’Ange de la Charité du Christ la tient pressée sur sa poitrine, au chaud contre son cœur sublime. Lorsque l’Ange en aura assez de vous, mes enfants, vos docteurs en politique positive auront beau lui faire proposer par des casuistes hors d’usage, poudrés de naphtaline, une avantageuse transaction. — «  Reprenez-la donc votre pitié », répondra l’Ange. Et vous trouvez par terre une pauvre petite bête aveugle, toute rose, sans poils ni plumes et qui crèvera de froid en cinq minutes.

Je ne prétends pas confondre l’esprit de jeunesse et celui de charité, je ne suis pas théologien. L’expérience m’a seulement appris qu’on ne rencontre jamais l’un sans l’autre, que diable voulez-vous que je vous dise. Oui, les vertus de l’Évangile sont un peu folles — il n’y a pas de mal, peut-être, à danser devant l’arche comme le Roi David ? Malheur aux prêtres qui, dans l’espoir sans doute de désarmer l’ironie des philosophes, coiffent ces Vertus du bonnet carré, avec une paire de lunettes sur le nez. À force de vouloir justifier la chasteté aux yeux des Bêtes à Morale, ou des Hygiénistes, des économistes, des médecins et des professeurs de culture physique, ils ont fini par la rendre ridicule. Je crois que nous leur devons le nom de « continent » — pardonnez-moi si je me trompe. On leur doit sûrement celui de Personnes du Sexe — qui n’est pas mal non plus. Il n’y a pas un paroissien français qui souhaite d’être appelé continent, à l’image de l’Afrique ou de l’Océanie. Les pions politiques rendent odieux, par les mêmes méthodes, le mot de liberté. Dès qu’on articule ces trois syllabes en présence d’un jeune réaliste, quelque chose se déclenche dans son larynx et il riposte d’une voix de Polichinelle : « La Liberté n’existe pas. Nous ne connaissons que les libertés. » Telle est la maxime qu’il a recueillie pieusement aux gencives de ses maîtres centenaires, et il ne se demandera jamais à quoi pourront bien servir les libertés lorsque aura disparu l’esprit de liberté qui seul les rendait fécondes. Enfin, pour le mot de justice, s’il m’arrive encore de l’employer par étourderie, j’ai beau le prononcer Ustice de peur qu’on ne m’accuse de l’écrire avec une majuscule, faute inexpiable aux yeux des Machiavels gâteux, il fait rigoler tout le monde. La justice est un truc dans le genre de la Société des Nations, une blague. Mes pauvres petits enfants, vous croyez ainsi vous montrer de véritables affranchis. Mais les vieux magistrats effrontés ne croient pas non plus à la justice, et les vieux financiers pas davantage. Le scepticisme des tôliers et des tôlières égale ou dépasse le vôtre sur ce point important. Vous vous fichez de la justice, mes enfants, soit. Sacrés gaillards ! Alors, soyez réguliers. Les gens du Milieu font profession d’ignorer la justice, mais ils n’estiment guère plus les hommes de justice, au lieu qu’on vous voit toujours du côté des gendarmes, mes mignons. C’est très joli d’étonner sa maman par des paradoxes incendiaires sur la force qui prime le droit et autres calembredaines. La brave femme se réjouit en son cœur de votre bonne mine, parce qu’elle sait d’avance que le gentil autocrate, après une carrière honorable, ira paisiblement toucher sa retraite aux guichets de l’État. Dieu veuille néanmoins garantir ce précieux produit contre les rigueurs de la crise menaçante ! Lorsque le navire s’enfonce, il faut jeter du lest, et qu’est-ce qui pèse le plus dans les soutes de la Société moderne, bien que sans valeur réelle ? Les scrupules. Car l’État sera toujours assez puissant et assez riche pour assurer la protection de l’Ordre et de la Propriété, si les jeunes classes dirigeantes l’aident à se décharger d’accablantes responsabilités morales, héritées du régime chrétien, et que les démocraties faisaient encore semblant d’assumer, par pudeur. Vous jouez votre rôle à merveille, chers farceurs. Il est d’ailleurs très facile à tenir, on ne vous demande que de rigoler. Rien de plus simple. Vous ne valez ni plus ni moins que vos grands-pères, et lorsqu’il s’agit d’affaires sérieuses, de défendre vos sous, par exemple, vous vous inspirez comme eux des principes d’un pharisaïsme modéré. Je ne parlerai donc que de votre attitude publique, du personnage qui dîne en ville, joue au bridge, pérore à son cercle, préside les conseils d’administration, bref, du personnage qu’un certain nombre de messieurs cravatés de noir reconduiront poliment un jour jusqu’au cimetière, et qui est rarement celui avec lequel une pauvre femme couche tous les soirs, ou celui que Dieu jugera. Au prix de quelques années d’entraînement, ce personnage éminemment social réussit à acquérir une espèce d’ automatisme qui lui permet de participer sans fatigue aux conversations lorsqu’elles s’égarent, c’est-à-dire prennent leur essor vers les idées générales, les cimes. Cet automatisme est le même chez vous que chez vos grands-pères, et il a le même mécanisme. Certains vocables commandent aussitôt le réflexe correspondant. C’est ce réflexe qui diffère, voilà tout. Vos grands-pères abusaient, je dois l’avouer, de la main sur le cœur et de la larme à l’œil. Il suffisait, par exemple, de prononcer le mot « chiffon de papier » pour faire éclater en sanglots une tablée entière de requins des lettres, du commerce ou des finances, voire d’huissiers. Aujourd’hui, ce même mot provoque chez les sportifs citoyens issus de leurs génitoires, un spasme irrésistible de l’arrière-gorge, qui s’achève en rire hystérique. Et la dépêche d’Ems, et les coups de poing sur la table ! À cette évocation l’huissier patriote, jadis, accablé de désespoir, finissait par se moucher dans la nappe. Le produit de cet homme de loi s’écrie maintenant, chaque fois qu’un diplomate reçoit un coup de pied au cul : « Quelle bonne blague ! La diplomatie, n’en faut plus. C’est des bêtises ! » Il y avait aussi la guerre sous-marine, péchère ! Le canonnier boche qui, à 120 kilomètres, faisait exprès de tuer les petits chanteurs de Saint-Gervais, et le bombardement de Strasbourg, et l’incendie de Louvain, et les exécutions de civils, saletés de boches qui ne respectent pas les femmes ! Depuis que ces horreurs-là s’observent en Espagne, en Éthiopie ou à Shangaï, oh ! mes enfants… Le malheureux qui oserait élever la plus timide protestation au nom de l’humanité — hi ! hi ! hi ! — se ferait traiter aussitôt de jobard et d’impuissant par de grosses dames, terriblement juteuses, décidées à en finir, une fois pour toutes, avec les ouvriers qui depuis l’avènement du Capitalisme en font voir de toutes les couleurs aux malheureux patrons, se sont engraissés de leurs sueurs, les cochons ! D’abord ces Éthiopiens ne sont que des nègres, des sauvages. Et les Chinois ? Les Chinois sont civilisés depuis trop longtemps, place aux jeunes ! Et la France ? Quelle France ? On n’ose plus la montrer, elle inspire du dégoût aux vertueux dictateurs. Si du temps que M. Jaurès se faisait traiter d’avocat de l’Allemagne au Parlement français, l’empereur Guillaume avait prétendu décider quelle était la vraie France, la France authentique, vous auriez entendu d’ici les orateurs patriotes. Aujourd’hui le général Franco, entre deux bombardements de Madrid, donne aux royalistes dégénérés qui l’étrillent respectueusement de la langue, sa consultation motivée sur le passé, le présent et l’avenir de mon pays. Les royalistes français donnent congé à leurs Princes, suspects d’avoir perdu le sens de l’intérêt national, mais ils croient dur comme fer à la sollicitude désintéressée de M. Mussolini pour notre grandeur et notre honneur. Il tombe en effet sous le sens que celui-ci fait chaque soir à nos intentions, une prière à saint Nicolas Machiavel, car vous ne doutez pas qu’il obtienne plus aisément notre empire colonial d’une France unie et puissante que d’une France déchirée par les factions. Sur ce point capital, nos jeunesses dirigeantes n’admettent pas la moindre controverse. Les dictatures veulent le salut de la France, la Société des Nations veut sa ruine. Au temps où la presse bien-pensante menait contre cette dernière une campagne de slogans, comparable à celle des chansonniers montmartrois contre Cécile Sorel, j’avais beau ne nourrir aucune tendresse pour cette Académie, je me disais : « Qu’est-ce qui les prend comme ça chaque matin, quelle mouche les pique ? À les en croire l’Europe n’a pas d’autre ennemi que cet Institut. Si le traité de Versailles avait été conclu à nos dépens, et que Genève fût chargé d’en garantir l’exécution intégrale, la chose pourrait se comprendre, mais le statu quo nous est favorable, nous n’avons absolument aucun avantage à tourner en dérision le respect des signatures. » Que voulez-vous ? J’ignorais que le futur Empire préparât l’opinion à la conquête de l’Abyssinie, on ne peut pas tout savoir… Lorsque M. Mussolini accumulait sur les bords de la mer Rouge un matériel énorme, indénombrable — deux canons par tête de nègre — les jeunes réalistes français se relayaient pour tenir en scène jour et nuit : « Le droit international, hou ! hou ! M. Jèze au poteau ! » De temps en temps, nous entendions un bruit argentin. C’était M.  Laval qui faisait sa caisse. Sacrés nationaux ! Ils ont toujours le mot pour rire. M. René Benjamin passe les Alpes. Que découvre là-bas cet observateur ? Des autostrades fleuries, des écoles, des inscriptions, des fontaines et des jolies femmes — le tout de pur style fasciste. Il a découvert aussi l’Enchanteur, auquel il a demandé pardon pour la France et qui a bien voulu promettre de patienter encore un peu, de retenir sa droite puissante. Par un raffinement de délicatesse, M. Mussolini n’a rien voulu dire des vues impérialistes de mon pays sur Nice, la Corse, le Maroc et la Tunisie, que son Invincible Armée suffirait d’ailleurs à défendre contre les sbires de M. Thorez. C’est drôle, tout de même, de pouvoir aller et venir dans un pays mobilisé du premier au dernier homme sans penser une fois à la guerre, vous ne trouvez pas ? Moi, je trouve. Oh ! oui, sacrés nationaux ! Avec eux, pas moyen de s’ennuyer une seconde. Quand le Kronprinz parlait en 1914 de la guerre fraîche et joyeuse, ils l’appelaient Kon de Prince. Toutefois si le chef du Nouvel Empire Pacifique et Civilisateur répète la même chose dans un langage d’instituteur sorélien, ils trépignent d’aise. Je ne sais pas si la guerre mussolinienne sera joyeuse, mais étant donné l’enrôlement des gamins balillas, elle sera sûrement fraîche, elle sera faite avec du bétail frais. Sacrés, sacrés nationaux, toujours le mot pour rire, toujours le mot pour mourir !

  1. D’après De Grœne Amsterdammer, cité par la Paix civique.