Les GaietésAux dépens de la Compagnie (p. 45-46).


LES MŒURS.



Mes chers amis, respectons la décence…
Ce mot lui seul vaut presque une chanson ;
Sans équivoque, et surtout sans licence,
Je vais parler de l’amant de Lison :
Le drôle, un jour, d’un ton fait pour séduire,
Lui détaillait de lubriques horreurs.
Ce qu’il disait, je pourrais vous le dire,
Mais je me tais, par respect pour les mœurs.

Sachez que Lise est une fille honnête,
Qui se choqua d’un pareil impromptu ;
Mais au vaurien ne vient-il pas en tête
De pénétrer le fond de sa vertu !
Sein ferme et blanc ne saurait lui suffire,
Déjà deux doigts sont en besogne ailleurs.
Ce qu’ils y font, je pourrais vous le dire,
Mais je me tais, par respect pour les mœurs.


Au bord du lit sur le nez il la pousse,
Et bravement l’attaque par le dos ;
Lise, indignée en sentant qu’il la trousse,
Sans doute alors se livrait aux sanglots ;
Dans son cœur tendre aussitôt ce satyre
Enfonce, enfonce… un long sujet de pleurs…
Ce que c’était, je pourrais vous le dire,
Mais je me tais, par respect pour les mœurs.

Longtemps encor, Lison, dans sa posture,
À tours de reins se débat vivement.
On me dira que c’était par luxure ;
C’est par vertu, moi j’en fais le serment.
Or, pour six mois, sa vertu sut réduire
Le scélérat à pleurer ses erreurs.
Ce qu’il gagna, je pourrais vous le dire,
Mais je me tais, par respect pour les mœurs.