Les Fouilles de Priène

Les Fouilles de Priène
Maxime Collignon


LES
FOUILLES DE PRIĚNE

Peu de régions offrent aux explorations archéologiques un champ plus riche que les côtes occidentales de l’Asie Mineure. Depuis le promontoire rocheux de la presqu’île de Cnide jusqu’à l’Hellespont, le littoral de la Grèce asiatique est comme jalonné par remplacement de villes antiques. Autour du golfe de Smyrne et du golfe Latmique étaient groupées les opulentes cités de l’Ionie où la civilisation grecque est née, s’est développée au VIe siècle dans une belle floraison, et a repris une étonnante vitalité sous les successeurs d’Alexandre. Aussi l’attention des archéologues est-elle plus que jamais tournée de ce côté. On ne se contente plus, comme autrefois, de voyages, de fouilles sommaires, de coups de main rapides pour découvrir et enlever des monumens d’art. On est entré dans la période des explorations patientes, suivies et poussées à fond. Les missions savantes se sont pour ainsi dire partagé le terrain. Les fouilles de Didymes, commencées par O. Rayet et l’architecte Thomas, reprises par MM. Haussoullier et Pontremoli, sont la part de la France. Les Autrichiens ont pris possession d’Ephèse. Les Allemands, après l’heureux succès remporté à Pergame, se sont établis à Priène, et ont commencé les fouilles de Milet.

Les résultats féconds d’une méthode de recherche qui tend à dégager de grands ensembles se sont fait sentir à Priène. On connaissait de longue date l’emplacement de la ville, une des douze cités fédérales fondées en Asie Mineure par les Ioniens, au lendemain des invasions doriennes, une de celles qui lancèrent leurs hardis marins à la conquête du littoral méditerranéen. Déjà, en 1765, deux voyageurs anglais, Chandler et Revett, envoyés par la société anglaise des Dilettanti, avaient reconnu les ruines du principal sanctuaire de Priène, le temple d’Athéna Polias, une des merveilles de l’architecture ionienne du IVe siècle, qui fit la gloire de l’architecte Pythios. En 1868, nouvelle exploration, due encore à l’initiative des Dilettanti, et dirigée par M. Pullan[1]. En 1873, deux savans français, O. Rayet et Albert Thomas, firent du temple une étude minutieuse d’où est sortie la belle restauration publiée dans un ouvrage que la mort d’un des auteurs devait laisser inachevé[2]. Pourtant la ville grecque restait ignorée. Elle n’a été dégagée que dans ces dernières années, grâce aux fouilles poursuivies depuis 1895, sous les auspices des musées royaux de Berlin, par les soins de MM. Wiegand, Heyne et Schrader. Le succès a été complet. La découverte d’une grande ville ionienne, entièrement reconstruite sur un plan d’ensemble vers le temps d’Alexandre ; la résurrection d’une sorte de Pompéi hellénistique, avec ses rues, ses places, ses maisons, ses édifices publics, tel est le bilan des fouilles de Priène. Ces résultats ne sont encore connus que par des rapports sommaires[3] ; ils attendent une publication définitive. Je me propose seulement de résumer ici les impressions que m’a laissées une excursion à Priène, faite au mois d’avril 1898. Cette visite m’a été facilitée par la parfaite courtoisie de M. Wiegand, et, sur le champ de fouilles, j’ai trouvé dans la personne de M. Schrader le guide le plus obligeant.


I

Le trajet de Smyrne à Priène se fait en partie par la ligne du chemin de fer d’Aïdin. A la station de Baladjik, près de l’ancienne Magnésie du Méandre, un embranchement se détache de la ligne principale, pénètre dans la haute plaine du Méandre, et aboutit à Sokhia. Chef-lieu du caza de Sevké, résidence d’un kaïmacam turc et d’un évêque grec, cette petite ville n’offre guère à la curiosité du voyageur que les rues ombragées et bruyantes d’un bazar anatolien.

Nous avons tout le loisir de les parcourir, durant les heures d’attente inévitable qu’il faut subir, tandis que dans la cour du khan on apprête avec lenteur un véhicule auquel il ne manque que des chevaux introuvables. Enfin le moment vient où, escortés d’un cawass tcherkesse, emportés au galop inégal et capricieux d’un attelage de rencontre, nous suivons la route mal frayée qui conduit à Priène. Pendant près de deux heures, nous longeons la base du Samsoun Dagh, l’ancien mont Mycale, qui étend dans la direction de la mer son échine aiguë, et, du côté sud, abaisse ses pentes dénudées vers la plaine marécageuse où se traînent les eaux du Méandre. Au-delà du hameau de Kélébech, dont les masures grises s’échelonnent sur le flanc de la montagne, une maison entourée de verdure annonce le voisinage du champ de fouilles : c’est la résidence de la mission allemande.

Pour prendre une idée d’ensemble de la situation de Priène, on est fort bien placé sur la terrasse du temple d’Athéna Polias. La ville s’étageait sur les pentes du mont Mycale, au pied d’un éperon rocheux, haut de 370 mètres, qui se détache de la montagne comme une proue de vaisseau et abaisse vers la plaine son flanc abrupt, taillé à pic, semblable à une formidable muraille de calcaire gris. Sur ce plateau, difficile d’accès, auquel conduisait seulement un âpre sentier, on a reconnu les vestiges de l’Acropole, qui n’était guère qu’une place de refuge en cas d’alerte. Le rocher de l’Acropole, les gorges sauvages qui l’enserrent, font à la ville, du côté nord, un cadre sévère et imposant. Du côté sud, l’aspect change, pour prendre un caractère de grandeur tout différent. Le regard découvre la vaste étendue de la plaine formée par le lent dépôt des alluvions du Méandre. Les atterrissemens du fleuve ont fait reculer la mer, qui venait jadis battre les môles du port de Priène ; ils ont créé le steppe uni et nu qu’on appelle l’Alan, et dont la description a été faite de main de maître par 0. Rayet. « Le sol y est dur, couvert d’une herbe rase et drue, et retentit sous le pied des chevaux comme le turf d’un champ de courses. Pendant l’été, alors que le soleil a brûlé ce mince tapis d’herbe et donné une teinte rousse uniforme à toute la surface de l’Alan, rien n’égale la monotonie et la désolation de cette immense étendue, où pas un arbre, pas un pli de terrain ne vient arrêter le regard et aider le voyageur à constater le progrès de sa marche. Même la campagne ; de Rome, dans ses parties les plus désertes, ne cause point une impression d’accablement aussi poignante[4]. » C’est là un paysage d’été. Pourtant, au printemps, la plaine du Méandre s’égaie d’un peu, de verdure, dans les maigres pâturages où les Yourouks nomades lâchent leurs chevaux. Et même on voit, non loin des pentes du Mycale, une ligne sinueuse de roseaux et de tamaris serpenter dans la plaine : c’est un des anciens lits du Méandre, un de ces Méandres morts dont le cours n’est plus guère marqué que par des eaux croupissantes ; dangereux voisinage, perpétuelle menace de fièvre et d’infection, en dépit de la verdure traîtresse qui pare ces marécages. Au-delà, la plaine allonge sa morne étendue ; tout au loin, elle est fermée par un clair horizon de montagnes, où l’on distingue la masse solide du mont Grion et la fine silhouette triangulaire du Latmos, découpée comme un fronton de temple.

Il ne reste plus aucune trace de la ville antérieure au ive siècle, et l’on chercherait vainement, sur le champ de fouilles, un vestige de l’ancienne histoire de Priène. Seuls, les textes des historiens nous apprennent que la colonie ionienne, fondée vers le XIe ou le Xe siècle, grandit au milieu des luttes soutenues contre ses voisins, les Cariens et les Lydiens ; que Priène eut à subir les invasions des Cimmériens ; qu’au moment de la conquête de l’Ionie par les Perses, vers l’année 544, elle fut saccagée par Mazarès, alors que l’activité de son commerce maritime l’avait rendue assez riche et assez prospère pour qu’un de ses habitans fît à Crésus une forte avance d’argent. Incorporée à l’empire perse, comme les autres cités ioniennes, elle participa à leurs tentatives de révolte, et finit par s’accommoder de la domination des satrapes perses, jusqu’au jour où la conquête de l’Asie Mineure par Alexandre lui rendit son indépendance. Entre temps, les alluvions du Méandre faisaient lentement et sournoisement leur œuvre, gagnant sur la mer, comblant les deux ports où mouillaient jadis les vaisseaux de commerce et les flottes de guerre, et interposant entre la ville et le littoral une large plage où le modeste port de Naulochon n’offrait guère aux navires qu’un médiocre abri. Tout ce passé a été pour ainsi dire effacé du sol ; la construction de, la ville que les fouilles nous ont rendue semble avoir fait table rase de la vieille cité qui fut la patrie du sage Bias.

Les travaux qui ont donné à Priène sa physionomie actuelle ont commencé sous le règne d’Alexandre. On sait que le temple d’Athéna Polias n’était pas encore terminé quand le roi de Macédoine traversa l’Ionie, vers l’année 334. Une inscription gravée sur un des blocs du mur d’enceinte, au-dessus d’une niche qui contenait l’image du héros Naulochos, appartient à peu près à la même époque. C’est donc vers ce temps que fut tracé le plan de la ville neuve. Nous ignorons quel Haussmann hellénique fut chargé de le dessiner et de l’exécuter ; mais il est sûr qu’il professait le culte de la ligne droite et des beaux alignemens bien corrects, et que, en vrai Grec d’Ionie, il suivait les traditions de l’architecte milésien Hippodamos, qui, au temps de Périclès, rebâtit le Pirée et construisit la ville de Thourioi, colonie athénienne d’Italie, sur le même plan rectiligne.

Il est impossible d’imaginer un tracé plus régulier que celui des rues de Priène. Les grandes voies, larges de 6 à 7 mètres, et absolument parallèles, se dirigent de l’ouest à l’est ; les petites rues, larges de 4 mètres, courent du nord au sud, coupant les premières à angle droit, et divisant la ville en 70 îlots de maisons qui couvrent tous la même superficie. Ces insulæ semblent avoir servi de mesure pour déterminer les dimensions des places et celles du terrain occupé par les édifices publics. Ainsi le grand portique de l’agora mesure une longueur de trois insulæ ; le temple d’Asclépios couvre l’emplacement d’un îlot. Ce plan rectiligne a été appliqué avec une rigueur inflexible, quelle que fût la déclivité du sol. Telle rue descend en pente raide, suivant son tracé en dépit de tout, se transformant en escalier pour franchir une passe difficile, et vient tomber à l’alignement comme un soldat dans le rang. On voit que le système rectiligne n’est pas une invention moderne, et que les villes américaines ont des prototypes fort anciens. Priène, en effet, n’est pas la seule ville de l’Orient grec où triomphait ainsi la ligne droite ; Smyrne, Rhodes offraient d’autres exemples de cette rymotomie géométrique fort admirée du géographe Strabon.

Un citoyen de Priène aurait donc pu donner son adresse à peu près comme le fait un habitant de New-York, et désigner, par exemple, la quatrième rue de la troisième avenue. Mais peut-être avait-on adopté un usage analogue à celui qui prévalait à Thourioi. Dans cette dernière ville, les noms des rues qui suivaient la même direction avaient la même désinence. Etait-il question des rues Aphrodisias, Olympias, Dionysias ? On savait que toutes s’ouvraient dans le sens de la plus grande longueur de la ville. Parlait-on des rues Héroa, Thouria, Thourina ? Nul n’ignorait qu’il s’agissait de petites voies, coupant les premières perpendiculairement.

Si le même système était en vigueur à Priène, on y retrouvait son chemin plus facilement qu’à Athènes, où beaucoup de rues paraissent n’avoir pas eu de nom. Bien que les principales voies de communication fussent désignées soit par la mention des industries qu’on y exerçait, — rue des Potiers ou des Hermoglyphes, — soit par une allusion aux monumens qui s’y trouvaient, — rue des Trépieds ou des Hermès, — il fallait souvent user de circonlocutions pour indiquer son domicile. L’un demeurait « près du puits de la maison de Chabrias ; » l’autre « dans la rue qui conduit à la porte du Pirée, près de l’hérôon de Chalkodon. » Il y avait donc à Priène, comme dans les grandes villes ioniennes, des nouveautés qui pouvaient surprendre un Grec venu d’Athènes. Toutefois, à ces cités modernes aux rues si bien tracées, l’Athénien préférait sans doute le pittoresque désordre qui lui était familier, et où revivait un long passé de souvenirs. Les rues étaient tortueuses, mais elles avoisinaient des monumens exquis. Telle ruelle était si étroite que Socrate, y rencontrant Xénophon, pouvait lui barrer le chemin avec son bâton ; mais elle conduisait à l’Acropole de Périclès et de Phidias.


II

La porte principale, celle par laquelle on entre pour procéder à une visite méthodique des fouilles, est la porte de l’Ouest. Elle donne accès à une grande et belle rue, pavée de larges dalles. C’est là un luxe qu’ignoraient les anciennes villes grecques, où les chaussées paraissent avoir été assez mal entretenues, témoin un décret rendu sur la proposition de l’orateur Démade, qui enjoint aux agoranomes du Pirée de nettoyer les rues pour le passage de la procession de Zeus Soter. Un canal servait à l’écoulement des eaux, et Priène était à ce point de vue mieux partagée que Smyrne, rebâtie cependant sous Antigone et Lysimaque, car Strabon remarque que, les jours de pluie, des immondices y flottaient dans les rues, changées en torrens. On ne voit aucune trace de trottoirs ; c’est une innovation qui s’introduit seulement à l’époque romaine, et Pompéi est, à cet égard, une ville d’aspect plus moderne que Priène. Mais cette voie largement ouverte, qui traverse toute la ville de l’ouest à l’est, ne laisse pas d’avoir fort bonne apparence, et éveille l’idée d’un mouvement de circulation très actif. Parmi les constructions malheureusement trop ruinées dont elle est bordée, plusieurs méritent attention. Voici, tout près de la porte de la ville, un petit sanctuaire de Cybèle, où l’on a retrouvé deux statues en marbre de la déesse. Plus loin, une sorte de « maison sacrée, » aménagée en vue d’un culte encore inconnu ; la pièce principale est une grande salle, avec une estrade à laquelle conduisent deux petits escaliers. Sur un des montans de la porte sont gravées une liste de prêtresses et des prescriptions rituelles : « On n’entre dans le sanctuaire qu’en vêtement blanc. » Plus loin encore, à l’angle de la grande rue et d’un escalier qui monte à la terrasse d’Athéna Polias, on s’arrête devant une jolie fontaine adossée à un mur en bossage et encadrée entre deux pilastres. Qu’on se rappelle les fontaines en pierre de lave ou en travertin qui, aux principaux carrefours de Pompéi, débitaient l’eau amenée par les conduites publiques : la fontaine de la Concordia Augusta, celle du Coq, celle de Silène, au point de croisement des rues de Stabies et de Nola ; qu’on songe à ce qu’elles mettent de vie dans la monotonie des rues désertes, en suggérant comme la vision de tableaux de genre familiers et populaires. On éprouve la même impression quand on s’attarde à considérer cette élégante construction de marbre. Un peintre de la vie grecque antique y trouverait un cadre fait à souhait pour y placer des scènes de la rue, haltes de passans, défilé de femmes venant, vers le soir, remplir leurs amphores. La fontaine de Priène a entendu bien des commérages qui auraient égayé la verve humoristique d’un Hérondas.

Les maisons déblayées dans le quartier que traversait la rue de l’Ouest sont loin d’offrir le même état de conservation que les habitations pompéiennes ; il n’y a là rien de comparable à la maison des Vettii, exhumée presque intacte avec ses peintures, et la décoration de son atrium. Mais, si les fouilles grecques n’ont pas encore ménagé de pareilles surprises, il faut nous féliciter de pouvoir aujourd’hui nous faire une idée assez nette de la maison hellénistique, comprendre comment elle dérive de la maison grecque du Ve siècle, et pressentir déjà, dans ses dispositions essentielles, l’aménagement de l’habitation pompéienne. Sur ces questions, les fouilles de Priène nous donnent satisfaction, et viennent heureusement compléter ce que nous avaient appris, pour une période un peu plus récente, les découvertes faites à Délos par l’Ecole française d’Athènes[5]. Tandis que les maisons déliennes datent du second ou du premier siècle avant notre ère, celles de Priène sont antérieures de plus d’un siècle. On voit que les l’enseignemens issus de ces deux sources peuvent se combiner pour l’étude de l’habitation grecque au temps des successeurs d’Alexandre.

Groupées le plus souvent quatre par quatre, égales en superficie, les maisons formaient des îlots rectangulaires, des insulse, mesurant environ 35 mètres de façade sur 47 mètres de côté. Chaque maison occupait donc l’angle de deux rues. Il ne semble pas que les Priéniens se soient souciés d’ouvrir leur logis sur la façade principale ; c’est dans les petites rues latérales que se trouvait ordinairement l’entrée. Il en résulte que les grandes rues devaient ressembler fort peu à celles de nos villes modernes. Des murs parfois construits avec un appareil en bossage, analogue à celui qui donne aux palais de Florence leur aspect sévère, de rares ouvertures, voilà tout ce qu’apercevait le passant. Peut-être évoquerait-on une image assez exacte de ce que devait être une rue peu fréquentée de Priène, en se rappelant les quartiers riches des villes arabes, les ruelles étroites, bordées de maisons closes et silencieuses, et qui donnent comme la sensation de la vie antique entrevue, lorsque, à la nuit tombante, on distingue à peine dans l’ombre qui grandit des silhouettes de figures drapées d’amples vêtemens. Il est certain tout au moins que la maison grecque, comme l’habitation orientale, était disposée pour une vie assez fermée.

Bien que, dans les habitations de Priène, le plan soit loin d’être uniforme, il peut cependant se ramener à certains élémens essentiels qui ne varient guère. Les pièces du rez-de-chaussée, parfois placées à un niveau inégal, en raison de la déclivité du sol, sont groupées autour d’une cour centrale, entourée de colonnes formant péristyle. C’est là le contre de la vie de famille. C’est dans les chambres communiquant avec le péristyle que l’on se tient l’hiver ; c’est sous la colonnade que, pendant l’été, on jouit à la fois de l’ombre et de l’air, sans que le repos soit troublé par le bruit de la rue. À vrai dire, la cour à péristyle a été de tout temps ce qui caractérise le plus nettement l’habitation grecque. Le principe trouve déjà son application dans la cour αὐλή (aulê) du palais mycénien[6], et l’on ne conçoit pas autrement, d’après les textes, la maison athénienne du Ve et du IVe siècle. Il suffit de se rappeler le début du Protagoras, où Platon décrit la demeure du riche Callias, et montre la cour et les portiques envahis par les disciples de Protagoras, tandis que, dans la pièce du rez-de-chaussée qui sert de bureau à Callias, on aperçoit un autre sophiste, Prodicos de Céos, encore couché, et enveloppé de fourrures et de couvertures. Comme les mêmes dispositions ont été constatées dans les maisons de Délos, on peut affirmer que les habitudes grecques avaient peu changé à l’époque hellénistique, et l’on comprend comment celle persistance des traditions explique l’aménagement de la demeure pompéienne.

Quel aspect présentait l’intérieur d’une des riches maisons de Priène qui paraissent avoir occupé tout un quartier, à l’ouest du temple d’Athéna ? En voici une qui doit avoir appartenu à un bourgeois aisé. La cour est vaste ; on y voit encore un bassin de marbre en forme de chapiteau. Les murs sont à la vérité fort délabrés. Pourtant, une des pièces a conservé les siens et les parois en sont à peu près intactes jusqu’aux deux tiers de la hauteur. Un touriste indifférent passerait sans s’arrêter ; mais des particularités intéressantes s’imposent à l’attention de l’archéologue. On distingue fort bien les traces d’un revêtement en stuc de marbre très fin, posé avec grand soin, et les restes d’une ornementation exécutée tantôt au pinceau, tantôt plastiquement : une frise de triglyphes, des cimaises à denticules, des demi-colonnes ioniques, un masque de satyre modelé en stuc et point en rouge vif. Il ne faut pas dédaigner ces vestiges en apparence insignifians, car ce sont les plus anciens témoignages qui nous renseignent sur l’histoire du style décoratif de Pompéi. À n’en pas douter, on constate ici l’emploi d’un système d’ornementation qu’on a appelé le premier style pompéien, parce qu’il est appliqué dans les maisons les plus anciennes, celles qui datent du second siècle avant notre ère, et sont antérieures au temps où la ville campanienne reçut la colonie de vétérans établie en 80 par P. Sulla[7]. Ce style a pour caractère propre d’imiter, à l’aide du stuc peint, des revêtemens en marbre de couleur, ou de figurer, toujours en stuc, des élémens architecturaux, frises de métopes, pilastres, demi-colonnettes encadrant des niches où l’on disposait des vases et des statuettes. En réalité, il n’est point pompéien d’origine ; il est grec, et je ne connais pas d’hypothèse plus satisfaisante que d’en placer le lieu de naissance à Alexandrie, où l’on se servait sans doute de vrais marbres diversement colorés pour incruster les murs des riches habitations. La Grèce hellénistique s’empressa de l’adopter, non sans remplacer parfois le marbre par une matière plus économique, le stuc. C’est le style qui règne à Priène et à Pergame ; il est en faveur à Délos, où l’on voit cependant s’annoncer les motifs décoratifs qui jouiront d’une si grande vogue à Pompéi, c’est-à-dire l’élément végétal et la figure humaine. Avec ses murs décorés de guirlandes de feuillage, d’amours aux ailes bleu de ciel voltigeant parmi les fleurs, la maison délienne nous montre déjà la transition entre le style de Priène et le second style de Pompéi.

Comment un riche habitant de Priène meublait-il les pièces de réception qui étaient ouvertes aux visiteurs ? À vrai dire, les objets mobiliers découverts dans ces habitations ruinées sont en petit nombre. Des tables de marbre, avec des supports se terminant en pattes de lion, des brûle-parfums et des candélabres, des vases de bronze, voilà ceux qui retiennent surtout l’attention. Il est probable qu’en tenant compte de la différence des temps, le mobilier, où se faisait sentir l’influence du goût hellénistique, devait offrir bien des analogies avec celui de la maison pompéienne, si grecque à bien des égards. Mais les fouilles de Priène nous apportent des renseignemens nouveaux sur le rôle que jouaient, dans la décoration des appartemens, les figurines de terre cuite et les statuettes de marbre. On a longtemps discuté sur l’usage ; auquel étaient destinées les délicates figurines que les nécropoles grecques ont si abondamment livrées. Toutefois, le temps est loin où, pour en expliquer la présence dans les tombeaux, on épuisait toutes les ressources du symbolisme, où l’on découvrait à tout prix un lien entre ces sujets de genre, ces fantaisies humoristiques, et les idées antiques relatives à la vie d’outre-tombe. L’auteur du meilleur travail d’ensemble sur les terres cuites grecques, M. E. Pottier, a démontré jusqu’à l’évidence qu’elles servaient à des usages multiples : « jouets d’enfans, ornementation de chapelles privées, de l’intérieur des maisons, dons faits aux morts, » elles étaient employées à tous ces offices[8]. Nous savons aujourd’hui qu’à Priène, de même qu’à Délos[9], la mode s’était introduite de les utiliser comme de véritables bibelots d’étagère pour égayer la nudité des murs. On a retrouvé dans les ruines des maisons privées des figurines de types très variés, les unes reproduisant des sujets mythologiques, comme Eros, Aphrodite, Némésis, les autres appartenant à la catégorie des sujets de genre, comme la jeune fille jouant de la lyre, accompagnée de sa suivante, ou le pédagogue conduisant son élève. Peut-on aller plus loin, et leur assigner leur place dans la décoration des pièces ? Voici justement, dans une des maisons les mieux conservées, une chambre dont le mur est orné, aux deux tiers de la hauteur, d’une corniche saillante, assez large pour que de menus objets puissent y être posés. N’est-ce pas là que s’alignaient, au gré du possesseur, les terres cuites dont les silhouettes gracieuses amusaient le regard, et est-ce une hypothèse trop hardie que d’imaginer, suspendus au plafond par un fil, des Eros battant des ailes, figurés en plein vol, semblables à ceux que nous ont fait connaître les fouilles de Myrina ?

Outre les terres cuites, les statuettes de marbre concouraient encore à la décoration des pièces, et surtout, semble-t-il, à celle de la cour à portiques. Le déblaiement des maisons en a fait découvrir une assez riche série, et quelques-unes sont de véritables œuvres d’art ; dans le nombre, beaucoup d’Aphrodites, et une statuette d’Alexandre ; le souvenir du roi de Macédoine devait, en effet, être populaire dans la cité ionienne, car nous savons, par une inscription, qu’il avait fait la dédicace du grand temple d’Athéna Polias, achetant sans doute cet honneur par des libéralités faites aux Priéniens[10]. Ces trouvailles concordent avec celles de Délos pour nous apprendre à quel point le dilettantisme artistique avait pénétré dans les mœurs et transformé la physionomie, jusque-là si simple, de l’habitation grecque. Les maisons déliennes contenaient aussi beaucoup de sculptures en marbre, portraits, statuettes de divinités, copies de statues célèbres, comme le Diadumène qui est aujourd’hui la meilleure réplique comme du chef-d’œuvre de Polyclète[11]. Ainsi, dans toute la Grèce, la demeure privée s’ouvrait au luxe de l’art, longtemps réservé aux sanctuaires des dieux et aux édifices publics. Tandis que, dans les grandes capitales, à Pergame, par exemple, les souverains constituaient à grands frais de véritables musées, les particuliers se contentaient de ces copies, où des artistes ingénieux traitaient en sujets de genre les types mythologiques renouvelés par l’esprit hellénistique. On voit déjà se manifester à Priène des habitudes que les Romains adopteront avec empressement, et lorsque, au premier siècle de notre ère, un bourgeois de Pompéi ornait de statues de bronze et de marbre l’atrium et le péristyle de sa maison[12], il ne faisait que suivre une mode inaugurée autrefois par les riches habitans des villes grecques d’Asie.


III

Quelle que soit, pour l’histoire de l’art ionien, l’importance du temple d’Athéna Polias, nous ne nous y arrêterons pas. Aussi bien il est depuis longtemps connu par les restaurations qu’en ont données M. Pullan et M. Thomas, et les principaux fragmens retrouvés par les explorateurs anglais, frises, sculptures, membres d’architecture, ont pris place dans les galeries du British Muséum. Nous ne jetterons donc qu’un coup d’œil à la terrasse qui supporte les puissans soubassemens du temple, pour suivre, dans la direction de l’est, la grande rue dont il a été question plus haut. Elle nous conduit tout droit à l’agora, centre du commerce et de la vie publique.

Ce n’est pas le moindre intérêt des fouilles de nous avoir révélé, avec une précision inespérée, le type le plus achevé de l’agora grecque au temps des successeurs d’Alexandre. Elles nous offrent, en effet, le vivant commentaire des textes qui opposent aux anciennes agoras, construites suivant le système archaïque, celles où étaient appliqués des principes plus modernes de régularité et de symétrie, c’est-à-dire les agoras du type ionien. Les premières nous sont connues par un exemple suffisamment caractéristique, depuis qu’un ancien membre de notre Ecole française d’Athènes, M. Fougères, a fouillé la vieille agora de Mantinée, et a pu la restituer exactement comme un « rectangle irrégulier, bordé de portiques non continus, entre lesquels débouchaient les rues[13]. » Celle d’Elis, dont nous avons une description assez complète pour qu’on ait tenté d’en retracer le plan sur le papier[14], devait offrir un véritable encombrement de temples, de statues, et d’autels ; seul, le milieu de la place restait libre, pour qu’on pût y dresser les chevaux qui devaient courir dans l’hippodrome d’Olympie. Tout autre est le type ionien, d’où procèdent l’agora de Pergame[15] et celle de la ville éolienne d’Ægae, et qui est réalisé à Priène avec une ampleur bien faite pour surprendre, si l’on tient compte de l’espace relativement restreint occupé par la ville. Le premier aspect des fouilles suffit à faire saisir les caractères essentiels de ce type ionien. Lorsque l’œil aperçoit, dessinées en clair par la blancheur des marbres, les lignes droites de ce vaste rectangle tracé avec une régularité impeccable, les alignemens des portiques tirés au cordeau, il déchiffre immédiatement le plan d’ensemble, écrit avec une parfaite netteté. Rien ne fait mieux comprendre comment, après avoir longtemps cherché dans l’édifice isolé la perfection des formes, le goût hellénique s’est élargi et s’est épris des belles ordonnances monumentales, appliquant ainsi les mêmes principes qui guident aujourd’hui l’architecture dans la décoration des villes modernes.

La grande rue qui traverse l’agora la divise en deux parties inégales, dont la moins étendue se trouve au nord. De ce côté, elle longe une terrasse spacieuse, à laquelle donne accès un bel escalier à sept degrés. De là, on pénétrait sous un vaste portique, mesurant une largeur de trois insulæ. C’était, comme nous l’apprend une inscription, la « stoa sacrée, » fermée au commerce, réservée à la vie politique, administrative et religieuse. Aux deux extrémités, les murs étaient couverts d’inscriptions, décrets, actes officiels de toute nature, qui racontent l’histoire de la cité, particulièrement au temps où la politique romaine commence à intervenir dans les affaires de la Grèce. Les chambres qui s’ouvrent au fond du portique paraissent avoir été les bureaux des magistrats, des fonctionnaires préposés à la garde des archives publiques, des agens chargés de veiller au bon ordre de l’agora. Là, sans doute, siégeaient le stéphanophore, premier magistrat de la ville, le greffier du Sénat et du peuple, les agoranomes, en un mot tous ceux qui avaient leur place dans la hiérarchie administrative.

A l’extrémité orientale de la « stoa sacrée, » s’ouvrent deux édifices, qui sont évidemment affectés, eux aussi, à la vie politique. Le plus éloigné du portique, celui qui, par conséquent, se trouve le plus à l’est, peut être identifié sans difficulté : c’est le Prytanée, où se dressait l’autel de la cité, où l’on recevait solennellement les hôtes de marque. Il a été, par malheur, fort remanié à l’époque romaine, et ne nous donne qu’une idée incomplète d’un Prytanée grec. Au contraire, l’édifice voisin, dont l’état de conservation est remarquable, ménage une véritable surprise. La porte franchie, on se trouve dans une salle disposée pour les séances d’une assemblée délibérante. Mais laquelle ? Est-ce l’assemblée du peuple, et sommes-nous à l’Ecclesia ? Est-ce le Sénat, et sommes-nous au Bouleutérion ? Aucun indice certain n’est encore venu apporter une solution décisive ; mais, à coup sûr, on n’a le choix qu’entre ces deux hypothèses, si l’on n’admet pas, ce qui est pourtant fort possible, que la salle eût une double destination. Nous pouvons donc, pour la première fois, contempler, à peu près intacte, une de ces salles où, devant un auditoire de citoyens, les orateurs déroulaient les harmonieuses périodes de l’éloquence hellénique, et nous n’avons à faire aucun effort d’imagination pour en restituer l’aspect et l’aménagement ; il suffit de regarder.

Tout, ici, porte bien la marque grecque : emploi de matériaux admirables, perfection technique du travail, simplicité de la décoration. L’édifice, construit en beau marbre, comprend une salle carrée, garnie sur trois côtés de gradins également en marbre, dont le profil sobre, à la fois élégant et solide, rappelle celui des sièges des théâtres grecs. Dans le fond, les rangs de gradins montent plus haut que ceux des côtés, et ces derniers sont limités par un mur de marbre assez bas, analogue au mur de la parodos des théâtres. Six cents personnes pouvaient y tenir à l’aise ; des escaliers d’angle permettaient aux assistans de gagner commodément leur place, et des dégagemens s’ouvraient sur le passage qui séparait l’édifice du portique nord de l’agora. Au centre de l’espace laissé libre par les gradins, on remarque un autel carré, orné de têtes de taureau, de guirlandes, de patinettes et de coupes portant en guise d’emblèmes des têtes de divinités. C’est la seule note décorative un peu accentuée qui égaie la simplicité sévère de la salle ; aussi bien c’est vers l’autel que convergeaient tous les regards, et c’est près de là que se tenait l’orateur. La disposition de la salle, du côté opposé aux gradins, est tout à fait nouvelle pour nous. Qu’on imagine un mur percé d’une niche éclairée par une fenêtre cintrée, et garnie d’un large banc de marbre ; à droite et à gauche, deux autres bancs : tel est l’aspect tout à fait inattendu qu’offre la partie sud. A n’en pas douter, il faut reconnaître ici remplacement réservé au bureau de l’assemblée ou du Sénat, les bancs où siégeaient le président, ses assesseurs, les greffiers et les scribes. Voilà donc tous les élémens nécessaires pour évoquer le tableau d’une séance du Sénat. Voilà les gradins où l’on replace sans peine les auditeurs drapés dans les plis élégans de l’himation grec. Voilà l’autel près duquel des orateurs ont si souvent discuté l’interminable question qui, au IIIe siècle, domine toute l’histoire politique de Priène, celle du territoire contesté de Karion et de Dryoussa, que les Samiens et les Priéniens se disputèrent avec acharnement, faisant appel à l’arbitrage des Rhodiens et de Rome. Voilà le banc de marbre où s’est assis un personnage dont une inscription nous a conservé le nom et raconté la carrière, Aulos Æmilios Zosinios. Il occupa toutes les charges publiques. Il fut gymnasiarque, paidonome, greffier du peuple et du Sénat, et enfin stéphanophore. Il reconstitua le collège des éphèbes. Il offrit à dîner à tous les citoyens, lorsqu’il fut élu magistrat suprême. Il fit des libéralités au gymnase public. Mais surtout il fut un greffier appliqué et diligent, un archiviste modèle, car il est loué pour avoir calligraphié en double expédition, sur papyrus et sur parchemin, les actes publics de la ville. Tels étaient, vers la fin du second siècle avant notre ère, les mérites qui valaient à un citoyen de Priène la gloire d’une belle inscription honorifique gravée sur marbre. Chose curieuse, la salle des séances, quand on la déblaya, n’était pas tout à fait vide. On eut la surprise d’y trouver un squelette couché sur un des gradins supérieurs. Un esprit aventureux aurait pu conjecturer que les mœurs politiques étaient violentes, et que la dernière séance du Sénat fut particulièrement agitée. L’explication est beaucoup plus simple. Ce mort est un intrus. C’est un chrétien qui fut jadis enterré dans une chapelle byzantine construite au-dessus du Bouleutérion. Quand le plafond s’effondra, le squelette fut entraîné par la chute des débris, et le défunt inconnu vint dormir son dernier sommeil dans la salle depuis longtemps désertée.

La partie méridionale de l’agora, séparée de la première par la rue, était consacrée au commerce ; c’était le marché proprement dit. A l’ouest, elle confinait à un temple de Dionysos, dont l’étude promet de révéler des particularités intéressantes pour l’histoire de l’architecture ionienne. Mais le temple ne faisait pas partie de l’agora, dont le tracé est nettement délimité par un portique régnant sur trois des côtés. Il y avait là un vaste et commode promenoir, sur lequel s’ouvraient des boutiques, et, dans la pénombre fraîche de la colonnade, les acheteurs pouvaient marchander à l’aise les étoffes, les armes, les bijoux, qui devaient donner à ces galeries l’aspect chatoyant d’une rue de bazar oriental. Sur la face sud, la déclivité du terrain avait permis d’établir en sous-sol des magasins et des docks, suivant le système adopté dans d’autres villes d’Asie, par exemple à Pergame et à Ægae.

Cette agora bordée de portiques était le rendez-vous des flâneurs, des désœuvrés, du menu peuple qui trouvait non loin de là le marché aux poissons et les cuisines en plein vent dont on distingue encore des vestiges. C’était à la fois le centre de la vie populaire et la plus belle place de Priène. Il est naturel d’y retrouver de nombreuses traces de monumens décoratifs, de statues élevées aux personnages qui avaient bien mérité de la cité. Mais, si les Priéniens paraissaient avoir usé libéralement du marbre et du bronze doré pour honorer leurs concitoyens, ils avaient trouvé le moyen de faire aussi la part de l’utilité publique. Ces statues ne se dressaient point, comme celles de nos villes modernes, sur des bases élevées qui les isolent et les protègent contre le contact de la foule ; elles frayaient, pour ainsi dire, familièrement avec le public. Les bases qui les supportaient étaient très souvent garnies de bancs rectangulaires ou circulaires dont l’ampleur et la commodité invitaient les promeneurs au repos. Sur ces larges bancs de marbre, les oisifs pouvaient deviser à l’aise ; les pauvres gens pouvaient y faire leur sieste aux pieds de l’effigie coulée en bronze d’un Apollonios ou d’un Apollodore, opulent banquier dont les générosités avaient été récompensées par la dédicace d’une statue. Quelquefois même les faibles dimensions de la base mettaient la statue presque au niveau des piétons. M. Schrader a retrouvé le soubassement d’une statue équestre qui mesure à peine 50 centimètres de hauteur. Les passans coudoyaient donc, sur la place bordée de somptueux portiques, les figures de bronze ou de marbre qui conservaient les traits de leurs concitoyens illustres. Si quelque jour un réformateur se préoccupait de concilier l’égalité démocratique avec le luxe croissant des statues commémoratives ou honorifiques, la solution du problème serait toute trouvée : elle a été inventée à Priène au IIIe siècle avant notre ère.


IV

Le théâtre, situé non loin de l’agora, n’est séparé du Bouleutérion que par la largeur d’un îlot de maisons. Adossé aux pentes rocheuses qui descendent de l’Acropole, il s’ouvre sur une rue assez large, parallèle à la grande voie qui nous a conduits à l’agora, et aboutissant à la porte orientale de la ville. Parmi les théâtres grecs découverts dans ces dernières années, il n’en est point qui puissent rivaliser avec celui de Priène pour le bon état de conservation. Nous ne nous attarderons pas à décrire en détail tous les élémens qui le constituent, et qui se retrouvent dans les édifices du même genre : les gradins en hémicycle, avec leurs escaliers de dégagement ; l’orchestre, esplanade circulaire où évoluait le chœur ; la skéné, c’est-à-dire la construction qui faisait face au public, et renfermait les chambres où s’habillaient les acteurs, les magasins d’accessoires, et ce qu’on pourrait appeler les coulisses ; enfin le proscénion, à savoir le devant de la skéné, sorte de façade haute en général de trois mètres, formant à l’arrière-plan de l’orchestre comme une décoration fixe, et s’avançant en saillie de telle sorte qu’à la partie supérieure régnait une étroite plate-forme, désignée dans les textes comme étant le logeion, « l’endroit où l’on parle. » Toutes ces dispositions sont très connues et familières à quiconque s’est fait une idée générale, même sommaire, du théâtre grec[16].

Toutefois, si le théâtre de Priène est construit, pour ainsi dire, suivant le plan canonique, on y relève des détails nouveaux[17]. La rangée des sièges inférieurs, qui constituaient les places d’honneur réservées aux personnages de marque, la proédrie, comme l’appelaient les Grecs, est séparée des autres gradins par un large couloir qui l’isole ; elle est exactement au niveau du sol de l’orchestre. Mais voici qui déroute tout à fait les idées reçues sur l’emplacement de l’autel de Dionysos, de cette thymélé si souvent citée dans les textes, et qui faisait partie intégrante d’un théâtre grec, car toute représentation dramatique était précédée d’un sacrifice au dieu sous le patronage duquel le drame avait pris naissance. Jusqu’ici, on n’avait encore retrouvé nulle part des traces certaines de la thymélé. On s’attendait cependant, si les fouilles mettaient quelque jour à découvert un de ces autels, à le voir placé au milieu de l’orchestre ; n’était-ce pas là qu’il devait être primitivement, au temps où les danses rituelles et les chants exécutés autour de la thymélé constituaient tout le spectacle scénique ? Il n’en est rien. La thymélé de Priène se trouve en dehors de l’orchestre, juste au milieu du demi-cercle que forme la proédrie. À cet endroit, la rangée de sièges s’interrompt pour laisser de chaque côté de l’autel un passage qu’on pouvait fermer par une barrière. Le prêtre chargé de célébrer le sacrifice pouvait ainsi se retirer par le couloir, et défiler avec son cortège sous les yeux des spectateurs, sans traverser l’orchestre, qui restait libre pour le déploiement de l’appareil scénique. Ajoutez que nous pouvons, pour la première fois, voir intacte une thymélé : c’est un autel de marbre, surélevé sur un degré, couronné d’une corniche à denticules, et orné de deux frontons latéraux. Celle de Priène avait été dédiée par l’agonothète Pythotimos.

Pour la première fois aussi, la scène nous offre autre chose que des vestiges difficiles à interpréter. Le proscénion de Priène est assurément le plus complet de tous ceux que les fouilles poursuivies en Grèce ou en Asie Mineure ont fait découvrir depuis une dizaine d’années. La colonnade de la façade est intacte, avec ses douze colonnes de front engagées dans des pilastres ; sur un tiers de la largeur, on voit encore en place la corniche et les poutres de marbre qui supportaient le plancher du logeion, large de 2m, 74, et élevé au-dessus du sol de l’orchestre de toute la hauteur de la colonnade, c’est-à-dire de 2m, 70 environ. En arrière de cette construction, on aperçoit le mur qui fermait par devant la skéné ; on distingue les trois portes qui faisaient communiquer la colonnade ouvrant sur l’orchestre avec les chambres du fond où les acteurs revêtaient leur costume. Nulle part on n’est donc mieux placé pour étudier la question qui a longtemps divisé, qui divise encore les archéologues et les historiens du théâtre, à savoir la question du logeion.

Où jouaient les acteurs ? Est-ce dans l’orchestre, en avant du proscénion, dont les décors auraient constitué ce qu’on pourrait appeler la toile de fond ? Est-ce au contraire sur le logeion, sur cette plate-forme qui les aurait élevés à 3 mètres environ au-dessus du sol de l’orchestre ? Tel est le problème, ramené à ses termes essentiels.

Personne n’ignore quelles controverses cette question a soulevées, depuis qu’un archéologue allemand, M. Doerpfeld, s’est inscrit en faux contre l’opinion traditionnelle, qui assignait aux acteurs leur place sur l’étroite tribune du logeion. Familiarisé de longue date avec l’étude technique des monumens, y apportant des connaissances architecturales acquises par la pratique, M. Doerpfeld s’est avisé que les ruines des théâtres grecs pouvaient peut-être nous renseigner aussi bien que les textes. L’examen de ces documens positifs l’a conduit à mettre en doute l’autorité de témoignages écrits longtemps respectés, comme la description du théâtre grec laissée par Vitruve, et à formuler une théorie toute nouvelle[18]. Jusqu’à l’époque romaine, affirme-t-il, la tragédie et la comédie grecques n’ont pas été jouées ailleurs que dans l’orchestre, en avant du proscénion. C’est dans l’orchestre que le drame tragique a pris naissance ; il s’y est développé ; il y est toujours resté. C’est là, devant la pauvre façade d’un proscénion construit en bois, qu’au Ve siècle, les acteurs représentaient les tragédies d’Eschyle et de Sophocle, les comédies d’Aristophane et de Phrynichos. C’est là qu’évoluait le chœur, si souvent mêlé à l’action. Imaginer les choristes groupés dans l’orchestre, tandis que des acteurs auraient joué sur une scène surélevée, c’est méconnaître ce que la tragédie grecque elle-même nous apprend ; c’est s’exposer à ne pas comprendre telle scène des Suppliantes et des Perses, où il est de toute nécessité que les choristes se trouvent de plain-pied avec les acteurs. Il nous est difficile de rouvrir ici le débat, de reprendre en détail les argumens de M. Doerpfeld, de discuter ceux qui ont été opposés à sa thèse. Aussi bien, si elle a été vivement combattue, il semble qu’elle soit acceptée, au moins en partie, par les adversaires de la veille. L’idée qu’au Ve siècle, au temps où la scène était simplement une baraque de bois, l’orchestre ait réuni à la fois acteurs et choristes, cette idée, considérée d’abord comme révolutionnaire, a trouvé beaucoup d’adhérens. « Le combat, écrivait naguère M. Georges Perrot, est à peu près terminé. Le groupe de ceux qui défendent dans son intégrité l’ancienne théorie diminue à vue d’œil. Que, du temps d’Eschyle et de Sophocle, la tragédie ait été jouée sur une scène qui aurait dominé l’orchestre, c’est ce que presque personne ne croit plus[19]. »

Pourtant, si M. Doerpfeld a cause gagnée en ce qui concerne le théâtre du Ve siècle, la controverse se poursuit au sujet des théâtres de pierre construits au IVe siècle et à l’époque hellénistique. À cette date, objectent les contradicteurs, les habitudes scéniques sonl changées. Le drame s’est dégagé du chant lyrique. Le rôle du chœur, singulièrement réduit, se borne à des intermèdes sans rapport direct avec l’action dramatique. En outre, la comédie, qui le supprime complètement, prend de plus en plus possession de la scène grecque. Le moment n’est-il pas venu où les acteurs, qui sont toujours en petit nombre, désertent l’orchestre, et montent sur le logeion, sur cette plate-forme sans doute fort étroite, mais assez large cependant pour l’action scénique ? N’est-ce pas là qu’il faut les voir, « se détachant sur le mur de fond en silhouettes expressives, mais calmes, comme des personnages de bas-relief, comme une frise vivante[20] ? » N’est-ce pas ainsi qu’il faut interpréter une phrase d’un lexicographe grec, Pollux, dont les renseignemens ont été puisés aux meilleures sources : « La scène appartient en propre aux acteurs, comme l’orchestre au chœur ? » Enfin, la description du théâtre grec faite par Vitruve n’est-elle pas décisive ? Non, répond M. Doerpfeld. Rien n’est changé dans les théâtres de pierre édifiés aux IVe et IIIe siècles, comme ceux d’Athènes, d’Epidaure et de Priène. Les dispositions usitées au siècle précédent sont toujours respectées. L’orchestre reste circulaire, parce que c’est là que se groupent encore acteurs et choristes. Le proscénion de pierre ou de marbre reproduit, en matériaux plus solides, la forme de l’ancienne skéné de bois, et il garde la moine destination ; c’est toujours le décor de fond devant lequel jouent les acteurs. Le théâtre grec dont parle Vitruve est plus récent encore que ceux-là. C’est l’édifice dont certains théâtres d’Asie Mineure, par exemple celui de Telmessos en Pamphylie, nous ont conservé le type : l’orchestre diminué, le proscénion haut de 10 à 12 pieds, et réduit au rôle de simple soubassement pour la plate-forme élargie qui désormais sert de scène ; le premier rang de sièges exhaussé au-dessus du sol de l’orchestre pour mettre les spectateurs à hauteur convenable par rapport au niveau de la scène. Tel est le théâtre décrit par l’architecte romain[21].

Pour qui visite le théâtre de Priène avec le souvenir présent de ces controverses, le monument prend un intérêt tout particulier. Il date du IIIe siècle, c’est-à-dire de la période à laquelle se limite aujourd’hui le débat ; il nous offre le plus ancien proscénion de pierre qui nous soit connu, et le mieux conservé. Nul endroit n’est plus favorable pour mettre les théories à l’épreuve des faits.

Or, voici les réflexions qui s’imposent, après un examen fait sans parti pris. Ce proscénion à colonnade, qui mesure en hauteur l’élévation moyenne d’un étage de maison, n’a pas été construit uniquement pour supporter le plancher du logeion. Il a, de toute évidence, servi de décor de fond. Considérons les pilastres auxquels sont adossées les colonnes : voici, très apparentes encore, les rainures où s’inséraient les panneaux de bois peints, les pinakes, qui constituaient un décor mobile, et représentaient tantôt un palais ou un temple, s’il s’agissait d’une tragédie, tantôt un groupe de maisons bourgeoises, si l’on jouait la comédie. Trois de ces entre-colonnemens restaient libres, et correspondaient exactement aux trois ouvertures pratiquées dans le mur de fond.

A n’en pas douter, ils figuraient aux yeux du spectateur les trois portes qui étaient de règle dans un décor grec, et dont l’une, celle du milieu, s’appelait la « porte royale. » C’est par là que les acteurs pénétraient dans l’orchestre, et, pour employer l’expression moderne, entraient en scène, après avoir revêtu leur costume dans les chambres situées à l’arrière-plan. S’ils avaient dû monter sur la plate-forme du logeion, il leur aurait fallu gravir un petit escalier extérieur. Les imagine-t-on montant ces marches en vue du public, alourdis par leur pesant costume, et trébuchant à chaque pas sur leurs épais cothurnes à semelles de bois ?

La trace des décors du proscénion, si visible pour la première fois, suffirait à nous convaincre qu’à Priène, au IIIe siècle, les acteurs jouaient encore dans l’orchestre. Une autre preuve, c’est qu’on supprima ces décors, lorsque, à l’époque gréco-romaine, la scène fut transportée sur le logeion. On boucha, par des murs, les entre-colonnemens devenus inutiles, puisque les panneaux peints avaient émigré, avec les acteurs, sur la plateforme supérieure. La colonnade fut respectée, simplement parce qu’elle existait. Mais elle ne répondait plus à aucune nécessité, et l’on ne saurait conclure de cet exemple que le soubassement de la scène gréco-romaine fût orné de colonnes. D’habitude, il offre une façade tout unie.

La transformation de la scène entraîna d’autres conséquences. Il fallut remanier la plate-forme du logeion. On voit fort bien que le mur de fond fut reporté à 3 mètres en arrière pour donner plus de largeur à cette sorte de tribune, désormais affectée aux acteurs. Enfin, il fallut encore changer quelque chose dans l’hémicycle réservé aux spectateurs. Les anciens sièges d’honneur, placés au niveau de l’orchestre, étaient devenus de fort mauvaises places : voit-on les personnages les plus rapproches de la scène obligés de tendre désespérément le cou pour suivre le jeu des acteurs à 3 mètres au-dessus de leur tête ? On para à cet inconvénient en plaçant le banc d’honneur beaucoup plus haut, à la hauteur du quatrième gradin ; mais on conserva l’ancienne proédrie pour certaines cérémonies et pour certaines représentations, comme les jeux thyméliques, qui continuaient à être données dans l’orchestre.

Il suit de là que, loin de contredire la théorie de M. Doerpfeld, l’étude du théâtre de Priène vient la confirmer, au moins pour l’époque hellénistique. Il nous offre toutes les dispositions que l’on est en droit de restituer dans un théâtre du Ve siècle, et si, comme il est permis de le croire, on y représentait encore quelquefois des tragédies de l’ancien répertoire, elles étaient, comme jadis, jouées dans l’orchestre, devant le proscénion. Peut-être, quand on examine sur place la scène et l’orchestre, nos idées modernes sur la solennité des représentations dramatiques sont-elles un peu déroutées. Le théâtre n’était pas très grand ; les spectateurs du premier rang se trouvaient de plain-pied avec l’orchestre, dont rien ne les séparait ; ils voyaient de fort près acteurs et choristes. Cela donne l’idée d’une certaine promiscuité un peu familière. Mais savons-nous si cette idée ne répond pas à la réalité ?

Nous avons signalé les principales découvertes auxquelles les fouilles de Priène doivent leur intérêt. Elles complètent sur plus d’un point ce que nous connaissions de la vie hellénique au temps des successeurs d’Alexandre ; mais surtout elles laissent dans l’esprit du visiteur une impression d’ensemble qui est fort nette. Avec son plan rectiligne, ses larges rues, ses belles ordonnances de monumens, sa physionomie de ville moderne créée pour ainsi dire de toutes pièces, Priène fait très bien comprendre les changemens profonds qui, vers la fin du IVe siècle, ont modifié l’ancienne civilisation grecque. A s’en tenir seulement aux formes extérieures, aux conditions matérielles de la vie, on sent que des exigences nouvelles se sont manifestées ; le goût public s’est transformé ; il réclame dans la décoration architecturale plus d’ampleur et d’harmonie ; il aime les vastes perspectives, les rues bien coupées, les larges places bordées de beaux portiques ; une ville de médiocre étendue, comme Priène, se pare aussi richement qu’une capitale royale. Ce qui est encore digne de remarque, c’est qu’ici ce luxe apparaît dans une cité dont les institutions sont restées démocratiques, et qu’il s’y adapte. On s’en rend bien compte, si l’on compare la ville ionienne à celle de ces capitales qui nous est aujourd’hui le mieux connue, à Pergame. Quand nous avons visité Priène, nous venions d’étudier les ruines de l’Acropole pergaménienne, découverte par MM. Humann et Conze dans la verdoyante vallée du Caïque. Nous avions vu les vestiges d’édifices construits, comme ceux de Priène, dans le goût hellénistique, avec la même recherche de la symétrie et de l’effet monumental. Tout y trahissait l’action du souverain. C’était vraiment la résidence royale, où les monumens, palais, musée, bibliothèque, ex-voto de victoires, racontaient l’histoire de la dynastie. Dans la vallée du Méandre, nous retrouvions encore l’ancienne cité grecque. Les plus beaux édifices étaient destinés à la vie politique et religieuse, ou à l’utilité générale ; c’était le temple, le théâtre, l’agora, où se concentrait toute l’activité publique. En quittant le champ de fouilles, nous pouvions évoquer l’image d’une ville où l’art a servi des préoccupations semblables aux nôtres, où le présent revit d’étrange manière dans le passé. Mais le charme du spectacle que nous avions sous les yeux était assez puissant pour retenir toute notre attention. Le soleil était déjà bas. Les chantiers se vidaient. Les ouvriers, Grecs alertes et Turcs à la démarche lourde, descendaient en groupes pittoresques le sentier qui conduit au village de Kélébech. La ville morte, un instant ranimée, retombait dans le silence, au pied des pentes du Mycale vigoureusement teintées de violet, et la plaine du Méandre, naguère revêtue de chaudes colorations, se noyait dans l’ombre grise, tandis que, bien au delà, du côté de Milet, les cimes claires des montagnes de la Mésogide lui faisaient encore comme une ceinture de lumière.


MAXIME COLLIGNON.


  1. Les résultats des recherches de M. Pullan sont exposés dans le tome IV des Antiquities of lonia, 1881.
  2. Milet et le golfe Latmique, Paris, 1877.
  3. Gonze, Jahrbuch des arch. Instituts, 1898, Anzeiger, p. 68 et suivantes. Schrader, Wochenschrift für klassische Philologie, 1898, et Jahrbuch, 1898, p. 178 et suivantes. Le travail de M. Schrader est jusqu’ici le résumé d’ensemble le plus complet qui ait été publié sur les fouilles de Priène. J’ai eu souvent l’occasion d’y secourir pour contrôler et préciser mes notes de voyage.
  4. O. Rayet, Milet et le golfe Latmique, p. 20.
  5. Ces découvertes, qui complètent sur quelques points la belle exploration de Délos faite par M. Homolle, sont dues surtout à M. Pierre Paris et à un jeune savant dont la mort récente est une perle sensible pour l’érudition française, M. Louis Couve. Elles ont été relatées dans le Bulletin de correspondance hellénique, 1884, p. 473, 496 ; 1895, p. 460 et suivantes.
  6. Voir G. Perrot et Ch. Chipiez, Histoire de l’art, dans l’antiquité, t. VI, p. 702.
  7. Voir A. Mau, Pompeji in Leben und Kunst, p. 418 et suivantes.
  8. Pottier, Les figurines de terre cuite dans l’antiquité, p. 218.
  9. Pour l’ornementation de la maison délienne, voir L. Couve, Bulletin de correspondance hellénique, 1895, p. 472.
  10. Rayet et Thomas, Milet, t. II. p. 5 et 6.
  11. Couve, Fondation Eugène Piot, Monumens et Mémoires, t. III.
  12. Voir G. Boissier, Promenades archéologiques, Pompéi, p. 318.
  13. G. Fougères, Mantinée et l’Arcadie orientale, p. 165.
  14. Werninke, Jahrbuch des archaeologischen Instituts, 1894, p. 128.
  15. Nous avons étudié l’agora de Pergame dans l’ouvrage que nous avons publié en collaboration avec ; M. Pontremoli : Pergame, restauration et description des monumens de l’Acropole. Paris, Société française d’éditions d’art, 1900.
  16. On trouvera toutes ces dispositions étudiées et décrites dans un ouvrage qui, sans viser à l’érudition, est l’œuvre d’un écrivain bien informé ; Dionysos, Étude sur l’organisation matérielle du théâtre athénien, par Octave Navarre, Paris, Klincksieck, 1895.
  17. En attendant la publication d’ensemble des fouilles, M. Wiegand a consacré à ce monument une étude préliminaire. Das Theater zu Priene, Athenische Mittheilungen des arch. Instituts, 1898, p. 307.
  18. M. Doerpfeld a exposé sa théorie dans l’ouvrage qu’il a publié en collaboration avec M. Reisch ; Das griechische Theater, 1890. On en trouvera l’analyse et la critique dans une série d’articles que M. Georges Perrot a donnés au Journal des savans, année 1898.
  19. Journal des savans, avril 1898, p. 204.
  20. Defrasse et Lechat, Epidaure, p. 216.
  21. M. Doerpfeld a développé ces conclusions dans des articles des Athenische Mittheilungen, 1897, p. 439-462 ; 1898, p. 326-356.