Les Forces éternelles/Le souffle
Arthème Fayard & Cie, éditeurs, 1920 (éd. revue et corrigée) (p. 18-19).
LE SOUFFLE
Tu ne respires plus, le vent
Ne pénètre jamais la pierre
Qui ferme sa dure paupière
Sur ton être fixe et rêvant ;
Et je vois la nue infinie
Qui t’a refusé l’humble part
Que ton souffle anxieux, hagard,
Implorait, dans ton agonie.
Comment est ce refus soudain
De l’espace à la créature ?
Quel est ce moment, ô Nature,
Où l’homme meurt de ton dédain ?
J’ai, par-dessus tous les mystères,
Béni la respiration,
Cette sublime passion
Qui soulève toute la terre !
Et je contemple l’air mouvant :
— Ô force ineffable du vent,
C’est surtout par toi que diffèrent
Les tombeaux d’avec l’atmosphère,
Et les morts d’avec les vivants !
Janvier 1915.