Les Forces éternelles/Le reproche

Comtesse de Noailles ()
Arthème Fayard & Cie, éditeurs (p. 318-319).

LE REPROCHE


<poem class="verse"> Il n’aurait pas fallu que vous fussiez méchant, Ou du moins seulement à ces moments extrêmes Où les femmes, gisant dans un rêve oppressant, Ne cherchent plus le cœur des hommes qu’elles aiment.

Mais j’étais ce soir-là sage et triste. Pourquoi Ai-je vu votre injuste et brumeuse colère ? Je ne connaissais plus vos yeux ni votre voix, Et votre cruauté ne savait pas me plaire.

Mon esprit, recherchant la céleste amitié, S’épouvantait ainsi qu’un vaincu qu’on désarme ; Vous n’aviez pas le droit de m’infliger des larmes Hors du plaisir, qui n’a pas besoin de pitié !

J’accepte que votre âme âprement se soulève
Aux instants où ma vie en la vôtre s’achève
Parmi tant de fureur et d’intrépidité ;
Mais parfois le désir impétueux fait trêve,
Ces jours-là ont besoin de charme et de bonté ;
Il faut plus de bonheur à l’amour lorsqu’il rêve
Qu’il n’en faut à la volupté !