Les Excentricités du langage/Édition Dentu, 1865/M
Mac, Macque, Macchoux : Maquereau. — Maca : Maquerelle. — Macchoux est une corruption du mot maquereau. — Mac et maca sont deux abréviations. — Par un hasard singulier, la première de ces abréviations donne la clef même du mot Au moyen âge, le mot maque signifiait : vente, métier de marchand. V. Roquefort. — De là sont venus maquillon ou maquignon et maquerel ou maquereau. Le maquereau n’est qu’un maquignon de femmes. Pendant tout le moyen âge, on a écrit maquerel ou maqueriau. Ce dix-neuvième siècle a oublié la véritable source du mot qu’il a confondu avec celui du poisson, d’où les synonymes de poisson et de barbillon. — « Le métier de mac autrefois n’était guère exercé que par des voleurs et des mouchards… maintenant les prêtresses de Vénus Callipyge ont pour amants des jeunes gens de famille. » — 1837, Vidocq. — « Le macque est le souteneur des filles de la plus basse classe. Presque toujours c’est un repris de justice. » — Canler, 1863. — « Une vieille maca : Entremetteuse, femme vieillie dans le vice. » — 1808, Dhautel.
Macaire : Malfaiteur audacieux, spirituellement cynique, affectant en toute occasion les manières d’un homme bien élevé. — Cc type étrange date, comme l’on sait, du drame de l’Auberge des Adrets ; il doit toute sa fortune à Frédérick-Lemaître qui, en créant le rôle de Macaire, a caractérisé pour toujours une classe particulière de criminels. — « Ils se croyaient des Macaires et n’ont été que des filous. » — Luchet.
Macaron : Dénonciation. — Du vieux mot maque : vente. V. Roquefort. — Un dénonciateur vous vend à la police. — « Dans le nez toujours tu auras ma macarons et cabestans. » — Vidocq. — Macaroner : Trahir.
Mac-farlanes : Long pardessus sans manches, avec grand collet tombant sur le devant. — « Ils portent des mac-farlanes. » — Les Étudiants, 1860.
Machabée : « On appelle machabée tout être, homme ou animal, qui est privé de vie, et que l’on rencontre flottant sur un cours d’eau ou échoué sur le rivage. " — Val. Dufour. — Machabée : Juif. — Allusion biblique.
Mâcher (Ne pas le) : Parler franchement sans murmurer entre ses dents. — « Quand j’ai lieu de vous en vouloir, Ah ! n’ayez pas peur que j’vous l’mâche ! » — De Longchamps, Ch., 1809.
Machin : L’homme ou la chose dont on ne peut se rappeler le nom. V. Chose. — « M. Mâchin, pardon ! je ne me rappelle jamais votre nom. » — H. Monnier, 1840. — Dans la Gabrielle d’E. Aubrier, l’avoué Chabrière prie sa femme de faire « un machin au fromage. »
Mâchoire : Suranné. « L’on arrivait par la filière d’épithètes qui suivent : ci-devant, faux toupet, aile de pigeon, perruque, étrusque, mâchoire, ganache, au dernier degré de la décrépitude, à l’épithète la plus infamante, académicien et membre de l’Institut. » — Th. Gautier, 1833, — « Vieille Mâchoire : Personne sans capacité, ignorant, sot. » — 1808, Dhautel. — V. Ganache.
Main chaude (Jouer à la) : Être guillotiné. V. Raccourcir.
Major : « Le chirurgien, le tambour-major, le sergent-major, enfin le gros et inévitable major, sont dénommés indistinctement majors. » — L. Huart.
Mal (faire) : Faire pitié. — « Qu’on vienne baiser son vainqueur — Comme tu me fais mal ! » — Gavarni.
Malade : Prisonnier. — Maladie : Emprisonnement (Vidocq). V. Hôpital.
Mal blanchi : Nègre. — « Va donc ! mal blanchi, avec ta figure de réglisse. » — Bourget.
Malingrer : Souffrir (Vidocq). — Malingre se dit encore pour souffreteux.
Malle (Ch-r dans la) : Faire affront. — Mot à mot : chier dans la poche d’autrui. — « On se torche à présent de la foi conjugale. Quoi qu’il en soit, Léandre a chié dans ma malle. » — Le Rapatriage, parade du dix-huitième siècle.
Maltais : Cabaretier. — Beaucoup de Maltais exercent cette profession en Algérie, d’où vient le terme.
Maltouze : Contrebande. — Maltouzier : Contrebandier.
Manche de veste : Jambe arquée comme une manche d’habit. — « Mosieu Belassis, moi j’ai pas des jambes en manches de veste. » — Gavarni.
Manette (Mlle) : Malle (Vidocq). — Diminutif de manne : malle d’osier.
Manger, Manger le morceau : Dénoncer, avouer. — « Le morceau tu ne mangeras de crainte de tomber au plan… — Paumé tu ne mangeras dans le taffe du gerbement. » — Vidocq.
Mangeur : Dissipateur. — Mangeur de galette : Fonctionnaire vénal (Vidocq). — Mangeur de blanc : Homme se faisant entretenir par une femme. V. Dhautel. — Mangeur de blanche serait plus juste. — Mangeur de bon Dieu, de messes : Dévôt. — « Quittez vos tanières, antiques comtesses, mangeuses de messes. » — Départ de la Cour, Ch., 1830.
Manière (1re, 2e, 3e) : Ligne de conduite ou manière de faire son rapport avec l’âge, les progrès, ou les calculs d’un artiste, d’un écrivain, d’un intrigant, etc. — « Faustine en était encore au désintéressement, sa première manière, ainsi qu’elle disait elle-même, en empruntant le langage des artistes, » — dit M. Amédée Achard, dans ses Petits-Fils de Lovelace, d’une fille qui joue le désintéressement afin de mieux enlacer ses victimes.
Mannesingue, Minzinguin : Marchand de vin. — Mot à mot : homme (mann) vendant à boire (zu trinken). On a dit d’abord Mannestringue, puis mannesingue. Minzinguin est un diminutif corrompu. — « Quel est celui-là ? — Un ami, un vrai, un marchand de vin… — Un mannezing ? » — G. Bourdin. — « Le roi est un bon zigue qui protège les minzinguins. » — Cabassol. — V. Licher.
Maquillage : Le maquillage est une des nécessités de l’art du comédien ; il consiste à peindre son visage pour le faire jeune ou vieux, le plus souvent jeune. — « Dans certains théâtres on voit de jeunes aspirantes qui se font des yeux jusqu’aux oreilles et des veines d’azur du corset jusqu’aux tempes ; ce ne sont pas des femmes, ce sont des pastels. Cette première catégorie de grues s’appelle les maquillées. » — Joachim Duflot, Dict. des Coulisses.
maquiller : Agir, machiner. — « C’est par trop longtemps boire ; Il est, vous le savez, heure de maquiller. » — Grandval, 1723. — Maquiller un suage : Se charger d’un assassinat. — Maquiller son truc : Faire sa manœuvre. — Maquiller une cambriolle : Dévaliser une chambre. — Maquiller les brèmes : Jouer aux cartes. V. Momir. Ce verbe paraît venir du vieux mot maquillon : maquignon, qui vient lui-même de maque. V. Roquefort et Fr. Michel. — Maquignonner, c’est, en effet, machiner n’importe quoi, pourvu qu’on y gagne.
Mar : Désinence arbitraire. — « Quant au reste de la langue, on se bornait (en 1830) à retrancher la dernière consonnance pour y substituer la syllabe mar. On disait Épicemar pour épicier, Boulangemar pour boulanger, Cafemar pour café, et ainsi de suite. C’était de l’esprit dans ce temps-là. Il est vrai que nos pères ont tous ri à se tordre en mettant le mot turlurette la fin de chaque couplet de chanson. Que signifiait mar ? Que voulait dire turlurette ? Absolument la même chose. Personne n’a jamais pu le savoir. » — P. d’Anglemont. « Méfie-toi… Le jeune épicemar est très-fort au billard et au piquet. » — Champfleury. V. Rama.
Marcandier : Marchand. — On trouve dans Roquefort mercadier. V. Solir, Farre.
Marchand d’hommes : Agent de remplacement militaire, négrier. — « D’un marchand d’hommes, je vois l’enseigne. » — Léonard, Parodie, 1863. — « Détestable anglais ! ajouta le marchand d’homme. » — L. Desnoyer.
Marche à terre : Fantassin. — « Quand tu étais dans la cavalerie, tu n’étais pas dans les marche à terre. » — Vidal, 1833.
Marcher, Marcher au pas : Être contraint à obéir. — « Empereur Nicolas, Les Français et les Anglais te feront marcher au pas. » — Layale, Ch., 1855.
marcheuse : « La marcheuse est un rat d’une grande beauté que sa mère, fausse ou vraie, a vendu le jour où elle n’a pu devenir ni premier, ni deuxième, ni troisième sujet de la danse, et où elle a préféré l’état de coryphée à tout autre, par la grande raison qu’après l’emploi de sa jeunesse, elle n’en pouvait pas prendre d’autre. Pour qu’un rat devienne marcheuse, c’est-à-dire figurante de la danse, il faut qu’elle ait eu quelque attachement solide qui l’ait retenu à Paris, un homme riche qu’elle n’aimait pas, un pauvre garçon qu’elle aimait trop. C’est un débris de la fille d’Opéra du dix-huitième siècle. » — Balzac.
Marécageux (Œil) : Œil voluptueux, à demi-noyé de langueur. — « Mais que tu danses bien la galope, Avec ton œil marécageux. » — Chans. populaire.
Margauder : Décrier la marchandise. — Corruption du mot marchander. — « Madame trouve moyen de margauder. » — La Correctionnelle.
Margot, goton : « Nom fort injurieux donné à une courtisane, à une femme de mauvaise vie. » — 1808, Dhautel. — « Nous le tenons. Nous savons où demeure sa margot. » — E. Sue. — On dit aussi sa jacqueline. (V. ce mot). — Dans son Vieux Cordelier, Camille Desmoulins apostrophe ainsi Hébert : « Le banquier Kocke, chez qui toi et ta Jacqueline vous passez les beaux jours de l’été. »
Margoulette : Bouche. — Diminutif de marge. Les lèvres forment la marge du palais. Peut être aussi diminutif corrompu du vieux mot gargoule : bouche.
Margoulin : Débitant, dans la langue des commis voyageurs. — « Parfois le margoulin est fin matois. » — Bourget.
Marlou : Souteneur. — Corruption du vieux mot marlier : sacristain. — Les souteneurs étaient de même appelés sacristains au dix-huitième siècle. On en trouve plus d’une preuve dans Rétif de la Bretonne. — « Un marlou, c’est un beau jeune homme, fort, solide, sachant tirer la savate, se mettant fort bien, dansant la chahu et le cancan avec élégance, aimable auprès des filles dévouées au culte de Vénus, les soutenant dans les dangers éminents… » — Cinquante mille voleurs de plus à Paris, Paris, 1830, in-8. — « Par extension, on appelle marlou tout homme peu délicat avec les femmes, et même tout homme qui a mauvais genre. » — Cadol.
Marmite : Fille publique nourrissant un souteneur. — Allusion facile à saisir. — « Un souteneur sans sa marmite est un ouvrier sans ouvrage. » — Canler. — Marmite de terre : Prostituée ne gagnant pas d’argent à son souteneur. — La Marmite de fer gagne un peu plus. — La Marmite de Cuivre rapporte beaucoup. — (Dict. d’argot, 1844.)
Marner : Voler. « Il y a des cabrioleuses très habiles qui, feignant une erreur, s’élancent dans les bras du voyageur qu’elles veulent marner : « C’est toi, mon loulou, s’écrient-elles, viens donc que je t’embrasse ! » On prétend que ces donneuses de bonjour sont rarement mises à la porte par le provincial, affriolé par des caresses de haut goût. » — Alb. Monnier. — Du vieux mot marronner : pirater.
Marottier : Marchand ambulant.
Marqueur : « On appelle marqueur, dans le langage des estaminets de Paris, l’individu chargé de faire la partie des habitués, quand ces derniers manquent de partenaires. La plupart donnent des leçons au cachet. » — Montépin. — Appelés ainsi parce qu’ils se chargent de marquer les points.
Marron : En flagrant délit de vol ou de crime. — Du vieux mot marronner : faire le métier de pirate, de corsaire. V. Roquefort. — Marron serait en ce cas une abréviation du participe marronnant. — Paumer marron, Servir marron : Prendre sur le fait. — « J’ai été paumé marron. » — La Correctionnelle. — V. Servir, Estourbir.
MARRONNER : Bouder, murmurer. — C’est, selon Dhautel, une corruption du mot marmonner : marmotter. — « J’peux pas voir ça, moi ! je marronne tout haut. » — Cognard, 1831.
MARSEILLAISE : Pipe courte et poreuse fabriquée à Marseille. — « Et tout en parlant ainsi, il chargeait et allumait sa marseillaise. » — Luchet.
MASTROQUET : Marchand de vins. Mot à mot : l’homme du demi-setier. — Vient de demi-stroc : demi-setier.
MATELOT : « Tous deux amis et se nommant mutuellement mon matelot : ce qui est le plus grand terme d’affection connu sur le "gaillard d’avant. » — Phys. du Matelot, 1843.
MAYEUX : Bossu. — Un peu avant 1830, d’innombrables charges, parmi lesquelles on distinguera celles de Traviès, eurent pour objet un bossu du nom de Mayeux : c’est le type d’un homme ridiculement contrefait, vaniteux et libertin, mais brave et spirituel à ses heures. De là son nom donné à tous ceux qu’affligent la même infirmité. — « Ici d’affreux petits mayeux.» — De Banville.
MÂTIN, MÂTINE : Personne déterminée, brusque, peu commode. — Terme emprunté à la race canine. «Kléber, un grand mâtin qu’a descendu la garde, assassiné par un Égyptien. » — Balzac. — « Ah ! mâtine de Turquie. Remy, ch., 1854.
Mauvaise (Elle est) : Cette histoire n’est pas bonne, cet acte est déplaisant. On dit dans le même sens : Je la trouve mauvaise. — « Quant à exiger qu’elles comprennent ce qu’elles disent, n’y pensez pas. — Elles la trouveraient mauvaise. » — Les Cocottes, 1864.
Mazaro : Prison militaire qu’il ne faut pas confondre avec la salle de police (ours). Dans celle-ci l’homme puni passe seulement la nuit sur une paillasse ; dans l’autre, il reste jour et nuit couché sur la planche.
Mécaniser : Ennuyer. — Mot à mot : réduire à un rôle passif, mécanique. — « Malgré qu’ça vous mécanise, Ça vous demande encore crédit. » — Chansons, Clermont, 1837. — « Et… Canalis regarda fixement Dumay qui se trouva, selon l’expression soldatesque, entièrement mécanisé. » — Balzac.
Méchant (Pas) : Encore une expression éminemment parisienne, dont la portée est plus grande qu’on ne pense. On dit d’une toilette mesquine, d’un homme inepte, d’un livre sans valeur : Ça n’est pas méchant ; ca ne mord pas ! — comme on dit d’un homme zélé : C’est un féroce. — « Achetez un caloquet plus méchant, votre tuyau de poêle n’est pas trop rup. » — Lem. de Neuville.
Mèche (Il y a mèche, il n’y a pas) : Il y a moyen il n’y a pas le plus petit moyen d’aboutir. Le mot fait image. Quand on a la mèche, on a bientôt fait de tirer la corde à soi. — « En termes typographiques, lorsque les ouvriers proposent leurs services au prote de l’imprimerie, ils demandent s’il y a mèche, c’est-à-dire : si on peut les occuper. » — 1808, Dhautel. — « Mais il te fera pincer. — Pas si bête ! il n’y a pas mèche. » — E. Sue.
Méchi : Malheur (id). — Abrév. du vieux mot méchief. V. Roquefort.
Médaille : « La jolie voix ! dit Schaunard en faisant chanter les pièces d’or. — Comme c’est joli, ces médailles ! ajouta Rodolphe. » — Murger.
Médecin : Avocat (id). — Ne soigne-t-il pas les malades à l’hôpital ? V. ces deux mots. — De là le mot médecine : bon conseil.
Médium : Homme qui prétend servir d’intermédiaire entre ses semblables et certains esprits plus ou moins infernaux. — Ses évocations sont désignées aussi par un adjectif nouveau : médianymique.
Meg, Mec : Maître. V. Chique. — Du vieux mot Mège : chef, souverain. V. Roquefort, au mot megedux. — Mec des mec : Dieu. V. Rebâtir.
Mêlé : Mélange d’eau-de-vie et de cassis, ou moins souvent de toute autre liqueur. « Aimez-vous l’eau-de-vie ? Dame ! on vend ytout du mêlé. » — Vadé, 1755. — « Coquelin, des verres de mêlé pour ces dames. » — 1845, P. d’Anglemont, le Prado.
melon : Niais, élève de première année à l’École Saint-Cyr. — « Vous êtes si melons à Châtellerault. » — Labiche. — « Qui viennent me brimer, moi, malheureux melon. » — Souvenirs de Saint-Cyr.
Même (Mettre a) : Tromper. V. Emblème. — On dit aussi Faire au même, Refaire au même.
Ménesse : Femme, maîtresse (Dict. d’Argot, 1844).
Méquard : Commandant. — Méquer : Commander. — De mec : maître.
Mercadet : Faiseur. V. ce mot.
Merde : « Mot ignoble et grossier dont le bas peuple se sert dans un sens négatif. » — Dhautel, 1808. — V. Cambronne. — Merde : Homme mou, sans consistance. — Merde alors ! Exclamation destinée à peindre une situation critique, un accident funeste. Elle peut se traduire ainsi : Alors, voici le moment de crier merde.
Merdeux : « Terme injurieux qui se dit d’un poltron, d’un fat sans esprit. » — 1808, Dhautel. — « Bâton merdeux : Homme qui brusque tous ceux qui s’adressent à lui. » — Id.
merlan : « Sobriquet donné à un perruquier à cause de la poudre qui couvre ordinairement ses habits. » — Dhautel, 1808. — La Peyronie est chef de perruquiers qu’on appelle merlans parce qu’ils sont blancs. » — Journal de Barbier, 1744.
Métal : Argent. — « Et t’as pas de métal. » — Ricard.
métier : Habileté d’exécution. « Vois toutes ces esquisses : il y a de la main, du métier ; mais où est la conception, où est l’idée ? » — L. Reybaud.
Mettre avec (Se) : Vivre maritalement. — « En se mettant avec Lise, le général aurait dû nous dire : J’ai ça et ça à payer ; il ne l’a pas dit, et ce n’est pas délicat. » — Ricard.
Meuble (Vieux) : Personne usée, incapable de service. — « Prends garde à toi, vieux meuble, affreuse bohémienne ! » — Les Folles Nuits du Prado, 1854.
Meulard : Veau (Vidocq). V. Pavillonner. — Allusion au mugissement du veau.
Mezières : Bourgeois. — Corruption du vieux mot Messires. V. Regout.
Mezigue : Moi (Vidocq). V. Pavillonner.
Miché : Homme payant l’amour d’une femme. — Peut venir des vieux mots michon : sot (V. Roquefort) ou michon : argent de poche (V. Dhautel). — « On appelle miché Quiconque va de nuit et se glisse en cachette Chez des filles d’amour, Barbe, Rose ou Fanchonnette. » — Mérard de Saint-Just, 1764. — Dans une Protestation des Filles de Paris, 1790, nous lisons : « Ce pourfendeur de Mars avait bien affaire aussi de se présenter pour nous enlever nos michés. » — « La biche étudiante qui avait levé un michet quelconque. » — 1860, les Étudiants du Quartier latin.
Midi (Il est) : Il n’est plus temps. — Date du temps où midi était l’heure du repas, celle où cessait toute affaire.
Mie de pain : Vermine (Vidocq). — Allusion à la démangeaison causée par une mie de pain égarée.
Miette (Une) : Un peu. — « Minute ! je me chauffe les pattes une miette. » — Gavarni.
Mikel : Dupe (Vidocq). — C’est le nom de Michel, dont le diminutif michon signifiait autrefois sot. V. Roquefort.
Milord : On donne moins ce nom aux Anglais qu’à ceux dont les largesses rappellent l’opulence britannique. Au moyen âge, milourt avait déjà le même sens, avec une acception plus ironique encore. C’est, comme Anglais, un fruit de nos anciennes guerres. — « Ce sont milourdz qui ne voulsissent point d’hostes avoir. » — Cretin, Épitre à Charles VIII. — « Et je vous attise un beau feu au dessoubs et vous flambois mon milourt comme on faict les harencs sorets à la cheminée. » — Rabelais, Ch., 14. — « Le gros tailleur se dit négociant. À sa tournure il n’est pas milord russe. » — Sénéchal, Ch., 1852. — « Être sur le boulevard de Gand, se donner un air milord. » — Ed. Lemoine.
mince : Papier à lettres (Vidocq). — Allusion d’épaisseur.
Minette : Mot d’amitié. V. Chat. — « Oui, minette, je me calme. » — De Courcy.
Minotaure, risé : « Quand une femme est inconséquente, le mari serait, selon moi, minotaurisé. » — Balzac,
Minuit : Nègre (Vidocq). — Allusion à la couleur sombre de la nuit.
Minzinguin : « Le roi est un bon zigue qui protège les minzinguins. » — Cabassol. — V. Mannezingue.
mioche, mion : Bambin. — Mion est un mot de langue romane (V. Roquefort) dont mioche serait le diminutif. — « C’est à moi que reviendra le droit d’être le parrain de tous les mioches. » — Bourget. — V. Dardant.
Miradou : Miroir (Vidocq). — Mirauder voulait dire autrefois regarder.
Mirette : Œil (id). — L’œil est un petit miroir.
Mirobolamment : Merveilleusement. — « À meubler mirobolamment sa maison.» — Balzac.
Mirzale : Boucle d’oreille (Vidocq). — Même construction que dans cabe, combre, calvin. Une mirzale est mot à mot : ce qui mir-oite z’à l’oreille.
Misérable : Petit verre. V. Monsieur.
Misloque : Comédie (Vidocq). — « Je joue la mislocq pour un fanandel en fine pégrenne. » — Balzac.
Molanche : Laine (Vidocq). — Diminutif de molle.
Mitraille : Monnaie de cuivre. — On disait autrefois mitaille. V. Roquefort.
Mitre : Cachot (Vidocq). — Au moyen âge le mitre était le bourreau.
Mobile : Garde mobile. De 1848 à 1850, on a dit souvent la mobile, un mobile. — « Qui sait comment cela eût fini si la mobile ne s’en fût mêlée. Brave mobile ! » — L. Reybaud. — À la révolution de juillet, on donnait déjà ce nom aux volontaires de la Charte. — « Pour m’engager dans la mobile j’avons quitté veste, tablier. » — Patriote Buteux, 1830.
Moka (Fort de) : V. Café.
Mollard : Graillon, expectoration laborieuse. Du vieux mot moller : s’efforcer. V. Roquefort.
mome, Momignard, Momaque : Petit enfant. — Du vieux mot momme : grimace. Les petits enfants en font beaucoup. — On dit encore momerie. En ce sens momaque et momignard sont les diminutifs dont Le second seul est pris en bonne part. — « Les rats dont nous voulons parler sont des mômes. » — Paillet. — « Elle entre avec un enfant dans un magasin et en faisant semblant de poser son momignard à terre. » — Id.
Monacos : « Honoré V, mort de dépit en 1841, de n’avoir pu faire passer pour deux sous en Europe ses monacos, qui ne valaient qu’un sou. » — Villemot. — V. Coller.
Monant : Ami (Vidocq).
Monnaie ! : (Plus que ça de) : Exclamation admirative équivalant à Quelle bonne fortune ! — « Mon homme a la croix d’honneur. Pus que ça d’monnaie ! » — Ricard.
Monarque : Roi de cartes. — « Ou si c’est un roi qu’elle relève, elle s’écrie : Je pince le monarque. » — M. Alhoy.
Monocle : Lorgnon simple. — « Adapte donc un monocle à l’arcade de ton œil gauche ! » — Montépin.
Monseigneur : Pince à forcer les portes. — Jeu de mots. — Quelle est la porte ne s’ouvrant pas lorsqu’on annonce monseigneur ? — Si, comme l’affirme M. Fr. Michel, on a dit autrefois Monseigneur le Dauphin et par abréviation Dauffe, nous voyons encore là un calembour sur le dos fin de la pince qui permet son introduction. V. Caroubleur.
Monsieur : Entreteneur. V. Amant de cœur. — On ne peut pas parler à mademoiselle. Et le mosieur… n’y est pas ? » — Gavarni. — « En argot de galanterie, le mot d’époux désigne l’entreteneur ; mais il n’est pas le seul. Suivant le degré de distinction d’une femme elle dit : Mon époux, — mon homme, — Mon monsieur, — mon vieux :, — monsieur chose, — mon amant, — monsieur, — ou enfin monsieur un tel. — Sauf dans la haute aristocratie où l’on dit : Monsieur un tel, ce mot mon époux est général, il se dit dans toutes les classes. » — Cadol.
Monstre : Détestable, monstrueux, au figuré. V. Crapaud. — « J’en ai assez de vos monstres de concerts. » — P. de Kock, 1845.
Mont : Mont-de-Piété. — Abréviation. — « Elle tient comme qui dirait un petit mont bourgeois… elle prête sur gages et moins cher qu’au grand mont. » — E. Sue. — V. Tante.
montant : Pantalon. — Le mot a été fait pour les anciennes culottes qui montaient assez haut. — V. Tirant.
Montmorency : À Paris, on appelle ainsi les cerises du nom de l’endroit où elles sont réputées. On dit de même Montreuil pour pêche, Fontainebleau pour raisin de treille, Valence pour orange. — Qui n’a entendu crier : « V’là des mémorenci, trois sous la livre ! »
Moquer comme de l’an 40 (Se)» : Sous-entendu, de l’an 40 de la République, c’est-à-dire d’un an qui n’arrivera point. Expression due sans doute aux royalistes. — « Je m’en moque comme de l’an 40 » — Jaime.
Monter le coup : Tromper. V. coup.
Morasse (Battre) : Crier à l’assassin. V. Battre.
Mordre (Ne pas) : Être sans force, sans esprit ou sans talent. V. Méchant.
Mort (Faire le) : Jouer le whist à trois personnes, en découvrant le jeu d’un quatrième partenaire imaginaire. — « Mais nous ne sommes que trois ! — je ferai le mort. » — Achard.
Morgane : Sel (Vidocq). — De Morganer. V. Momir.
morfiller : Faire, manger. — Du mot de langue romane morfier : manger. V. Du Cange. — Morfillante : assiette. — « Calvi morfile sa dernière bouchée. » — Balzac. — V. Chêne, Jaspiner.
moricaud : Broc (Vidocq). — Allusion à la couleur noire que lui donne le vin.
Morillo : Chapeau à petits bords, l’opposé du bolivar. V. ce mot. — « C’était le temps de la lutte des républiques de l’Amérique méridionale contre le roi d’Espagne, de Bolivar contre Morillo. Les chapeaux à petits bords étaient royalistes et se nommaient des morillos ; les libéraux portaient des chapeaux à larges bords qui s’appelaient des bolivars. » — V. Hugo.
Morne : Mouton (Vidocq). — Du vieux mot moraine : laine. V. Du Cange.
morue : Femme abjecte. — « Vous voyez, Françoise, ce panier de fraises qu’on vous fait trois francs ; j’en offre un franc, moi, et la marchande m’appelle… — Oui, madame, elle vous appelle… morue ! » — Gavarni.
Mots (Avoir des) : Échanger des reproches. — « En rentrant du bal avec ton amant, vous avez eu des mots, et il t’a flanquée à la porte. » — Montépin.
mouchailler, moucharder : Espionner, dénoncer. — En 1455, les gueux ou coquillards de Dijon disaient déjà mouschier à la marine, pour dénoncer a la justice.
mouche : « Mouche, pour ceux qui ne comprendraient pas le langage parisien, signifie mauvais. » — Troubat. — Un volume intitulé les Mystères des théâtres, par un vieux comparse, publié en 1844, donne mouche dans le même sens. V. Toc.
moucheron : Enfant. — « La portière et son moucheron. » — Léonard, parodie, 1863.
Mouchettes (Des) : Non. — « Tu m’as volé ! tu vas rendre ! — Des mouchettes. » — Léonard, id.
Mouillante : Soupe (Vidocq). — Mouillante : Morue. — On sait que la morue trempe ordinairement dans des baquets d’eau.
Moule de gant : Soufflet. — La main est un moule de gant. — « Ne faut pas avoir un air, sans ça j’te repasse un moule de gants qui ne t’en restera pas une dent. » — 1844, Cat. poissard. — « Je lui donnai sur sa face un moule de gant. » — Rétif, 1783.
Mousse : Excrément. — On s’injurie fréquemment dans le peuple par ces mots : Vent et mousse pour toi !
mouton : « En prison, le mouton est un mouchard qui parait être sous le poids d’une méchante affaire et dont l’habileté consiste à se faire prendre pour un ami. » — Balzac. — Allusion ironique à la fausse candeur de ces compères. — Moutonner : Dénoncer. V. Coqueur.
Moyambine : V. Panama.
Muette : Conscience (Vidocq). — Mot inventé pour les hommes qui n’ont pas de conscience.
mufle, muffe, feton : Homme mal élevé, grossier. — Allusion au mufle d’un animal. — « Eh ! dis donc, la belle blonde, tu vas quitter ces deux muffles et t’en venir avec moi. » — E. Sue. — « Vois-tu, muffeton ? lui disait la dame. » — G. de Nerval. — V. Balancer.
Musardine : Habitué femelle des Concerts-Musards, de 1858 à 1860. — « On dit une musardine, comme jadis on disait une lorette. — A. Second.
musette : V. Piper, Couper.
musicien : Dénonciateur. — Allusion au bruit de la musique. V. Coqueur.